RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 18/00583 - N° Portalis DBVH-V-B7C-G4MT
EM/DO
TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE DE NIMES
01 février 2017
RG :21500637
Société [7]
C/
CPAM DU GARD DEPARTEMENT DES AFFAIRES JURIDIQUES
Grosse délivrée le 09 MAI 2023 à :
- Me GUILLEMIN
- LA CPAM
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
5ème chambre sociale TA
ARRÊT DU 09 MAI 2023
Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de NIMES en date du 01 Février 2017, N°21500637
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère, a entendu les plaidoiries, en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère
GREFFIER :
Monsieur Julian LAUNAY-BESTOSO, Greffier lors des débats et Madame Delphine OLLMANN, Greffière lors du prononcé de la décision.
DÉBATS :
A l'audience publique du 14 Février 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 09 Mai 2023.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANTE :
Société [7]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Stéphane GUILLEMIN de la SELARL GUILLEMIN, avocat au barreau de NIMES
INTIMÉE :
CPAM DU GARD DEPARTEMENT DES AFFAIRES JURIDIQUES
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représenté par Mme [M] [L] (Autre) en vertu d'un pouvoir spécial
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 09 Mai 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour.
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :
Le 05 juin 2013, Mme [Y] [W], embauchée par la Sas [7] de [Localité 3] et mise à la disposition de la société [6] en qualité de manutentionnaire, a été victime d'un accident du travail.
La déclaration d'accident du travail établie par l'employeur le 07 juin 2013 mentionnait que «Mle [W] manipulait son chariot lorsque celui-ci a basculé. En le rattrapant, elle aurait ressenti une douleur au dos».
Le certificat médical initial établi le 05 juin 2013 par le Docteur [V] [D] [B] mentionnait une «déchirure musculaire lombaire».
Le 13 juillet 2013, la Caisse primaire d'assurance maladie du Gard a notifié la prise en charge de cet accident au titre de la législation sur les risques professionnels le 10 juillet 2013.
le 30 mars 2016, la caisse primaire d'assurance maladie du Gard a notifié à Mme [Y] [W] la décision de guérison de ses lésions à la date du 15 janvier 2016.
Par courrier du 16 avril 2015, la Sas [7] a contesté la durée des arrêts de travail pris en charge au titre de la législation professionnelle et saisissait la commission de recours amiable laquelle a rejeté le recours par une décision du 26 août 2015.
La Sas [7] a saisi le Tribunal des affaires de sécurité sociale du Gard, lequel, suivant jugement du 1er février 2017, a:
déclaré irrecevable pour cause de forclusion la demande en inopposabilité de la décision en date du 10 juillet 2013,
débouté la société [7] de sa demande de communication du dossier médical d'[Y] [W],
débouté la société [7] de sa demande d'expertise médicale,
confirmé la décision de la commission de recours amiable du 26 août 2015,
laissé les dépens à la charge de la demanderesse.
Suivant courrier recommandé du 20 février 2017, la Sas [7] a régulièrement interjeté appel de cette décision.
Après avoir été radiée pour défaut de diligence des parties suivant ordonnance du 22 décembre 2017, l'affaire a été réinscrite à la demande de la Sas [7], enregistrée sous le numéro 18/000583, fixée à l'audience du 28 janvier 2020 puis renvoyée à des audiences ultérieures, et retenue à celle du 08 septembre 2020.
Suivant arrêt du 24 novembre 2020, la cour d'appel de céans a :
- confirmé le jugement rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale du Gard du 1er février 2017 en ce que :
- il a déclaré irrecevable pour cause de forclusion la demande en inopposabilité de la décision prise par la Caisse primaire d'assurance maladie du Gard en date du 10 juillet 2013, relative à la prise en charge de l'accident du travail dont madame [Y] [W] a été victime le 05 juin 2013,
- débouté la société [7] de sa demande de communication du dossier médical d'[Y] [W],
- l'a réformé pour le surplus,
Statuant à nouveau,
Avant dire droit sur les demandes relatives à l'imputabilité des arrêts de travail et des soins dont a bénéficié madame [Y] [W] consécutivement à l'accident du travail dont elle a été victime le 05 juin 2013,
Ordonné une expertise médicale sur pièces de madame [Y] [W] confiée au docteur [K] [R] avec pour mission de :
- se faire communiquer l'entier dossier médical de madame [Y] [W] en possession du service médical de la Caisse primaire d'assurance maladie du Gard et de la Caisse primaire d'assurance maladie d'[Localité 5] (81) au profit de laquelle le dossier a été transféré le 25 août 2014,
- retracer l'évolution des lésions de madame [Y] [W] et dire si l'ensemble des lésions qu'elle a présentées sont en relation directe et unique avec son accident du travail,
- dire jusqu'à quelle date l'arrêt de travail et les soins causés par l'accident du travail du 05 juin 2013 étaient médicalement justifiés,
- déterminer la date à partir de laquelle les arrêts de travail ont eu, le cas échéant, une cause étrangère à l'accident du travail du 05 juin 2013,
- fournir les seuls éléments médicaux de nature à apporter une réponse à la question posée,
- dit que la Caisse primaire d'assurance maladie du Gard doit faire l'avance des frais d'expertise,
- renvoyé la cause et les parties à l'audience du 28 avril 2021 à 14 Heures,
- dit que la notification du présent arrêt vaut convocation des parties,
- réservé les dépens de la procédure d'appel.
L'expert a déposé son rapport le 18 octobre 2022.
L'affaire a été renvoyée à été fixée à l'audience du 14 février 2023 à laquelle elle a été retenue.
Suivant les dernières conclusions écrites, déposées et soutenues oralement à l'audience, la Sas [7] demande à la cour de :
- entériner le rapport d'expertise du docteur [R],
- dire et juger que l'ensemble des conséquences financières et médicales relatives à l'accident du 05 juin 2013 lui sont inopposables, à compter du 19 juillet 2013, puisque n'étant pas en relation avec l'accident du travail de Mme [W].
Elle fait valoir qu'il résulte du rapport d'expertise du docteur [R] que la totalité des arrêts de travail dont a bénéficié Mme [W] des suites de son accident du 05 juin 2013 n'ont pas de lien avec le travail et n'auraient pas dû être pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels, que c'est donc à tort que le coût de ces arrêts a été imputé sur ses comptes.
Suivant les dernières conclusions écrites, déposées et soutenues oralement à l'audience, la caisse primaire d'assurance maladie du Gard demande à la cour de :
- lui décerner acte de ce qu'elle s'en remet à justice quant à l'appréciation des conséquences du rapport d'expertise.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure , ainsi que des prétentions et moyens de parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues à l'audience.
MOTIFS
La présomption d'imputabilité au travail des lésions apparues à la suite d'un accident du travail instituée par l'article L411-1 de la sécurité sociale s'étend pendant toute la durée d'incapacité de travail précédant soit la guérison complète soit la consolidation de l'état de la victime .
Il en résulte que la présomption d'imputabilité au travail s'applique non seulement au fait accidentel, mais également à l'ensemble des évolutions constatées et des prestations délivrées jusqu'à la complète guérison ou la consolidation de l'état du salarié.
Il appartient à l'employeur, dans ses rapports avec la caisse, dès lors que le caractère professionnel de l'accident est établi, de prouver que les lésions invoquées ne sont pas imputables à l'accident.
L'employeur qui peut combattre cette présomption simple, devra ainsi, sauf rupture dans la continuité des soins ou de l'arrêt de travail, renverser la présomption d'imputabilité en démontrant que les nouvelles prescriptions ne sont pas rattachables au sinistre initial.
Enfin, l'employeur qui sollicite une mesure d'expertise doit apporter un commencement de preuve contraire à la présomption d'imputabilité, et en particulier, un élément d'ordre médical relatif à un état pathologique antérieur du salarié de nature à exclure le rôle causal du travail dans l'accident.
En l'espèce, le docteur [R] a conclu dans son rapport d'expertise qu'il y avait lieu de retenir la date du 19 juillet 2013 comme date où une cause étrangère à l'accident au 05/06/2013 est survenue, après avoir retenu la discussion suivante :
'Mme [W] a présenté une lombalgie aigue à la suite de l'accident du travail du 05/06/2013, que les explorations ont mis en évidence sur une TDM du mois d'août 2013 et sur une IRM du 18/10/2013 respectivement un débord discal et une hernie discale, qu'elle a bénéficié de traitements antalgiques, la réalisation d'une infiltration articulaire le 16/11/2013, qu'une prolongation des arrêts de travail et rééducation en CRF du 23/02/2015 au 27/03/2015, que la guérison est intervenue le 15/01/2016, qu'après analyse de l'ensemble des documents médicaux, il apparaît que l'ensemble des lésions présentées par Mme [W] ne sont pas en relation directe et unique avec son accident de travail. Initialement Mme [W] a présenté un traumatisme musculaire sans signe d'irradiation radiculaire. Or, lors d'un traumatisme les lésions sont maximales dans les heures qui suivent le traumatisme avec une défervescence progressive.
Dans le cas présenté par Mme [W] on assiste à une douleur post traumatique correspondant aux lombalgies retenues initialement et ayant motivé au service des urgences un arrêt de travail de 2 jours.
Progressivement, s'est instauré sur un rachis présentant une discopathie confirmée par les examens radiographiques (TDM IRM) une pathologie à type de lombasciatalgie, pathologie constatée à distance du fait accidentel et dont nous ne pouvons pas retenir l'imputabilité au traumatisme du 05/06/2013.
Au titre des conséquences de l'accident du travail du 05/06/2013, nous retiendrons une période d'arrêt de travail imputable du 05/06/2013 au 18/07/2013 période à laquelle les certificats de prolongation d'arrêt de travail mentionnent un lumbago en amélioration progressive.
Ces certificats permettent de constater un événement nouveau avec une aggravation motivant le 19/07/2013 un avis rhumatologique et la réalisation d'examens complémentaires tels que TDM'.
La caisse primaire d'assurance maladie du Gard n'apporte aucun autre élément médical de nature à remettre en cause sérieusement les conclusions expertales dont la Sas [7] sollicite qu'elles soient entérinées.
Il convient dans ces conditions de dire et juger que l'ensemble des soins et arrêts de travail résultant de l'accident du travail dont Mme [Y] [W] a été victime le 05 juin 2013 sont inopposables à la Sas [7] à compter du 19 juillet 2013.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière de sécurité sociale et en dernier ressort ;
Vu le rapport d'expertise du docteur [R] déposé le 18 octobre 2022,
Infirme le jugement rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale du Gard le 1er février 2017 en ce qu'il a confirmé la décision de la commission de recours amiable de la caisse primaire du 26 août 2015,
Dit et juge que l'ensemble des soins et arrêts de travail résultant de l'accident du travail dont Mme [Y] [W] a été victime le 05 juin 2013 est inopposable à l'égard de la Sas [7] à compter du 19 juillet 2013,
Condamne la caisse primaire d'assurance maladie du Gard aux dépens de la procédure d'appel.
Arrêt signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, et par Madame Delphine OLLMANN, Greffière.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT