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04/04/2023 | FRANCE | N°20/01848

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 5ème chambre sociale ta, 04 avril 2023, 20/01848


ARRÊT N°



R.G : N° RG 20/01848 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HYK7

EM/DO



DE GARD

31 décembre 2018





RG:21701044









S.A.S. [5]





C/



CPAM DU GARD



















Grosse délivrée

le 04.04.2023

à

Me RAFEL

CAPM GARD



















COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE SOCIALE



ARRÊT DU

04 AVRIL 2023









APPELANTE :



S.A.S. [5]

[Adresse 7]

[Adresse 3]

[Localité 4]



représentée par Me Isabelle RAFEL de la SCP VIDAL-NAQUET AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE





INTIMÉE :



CPAM DU GARD

Département des Affaires Juridiques

[Adresse 1]

[Localité 2]



représenté par M. [S] en vertu d'un pouvoir ...

ARRÊT N°

R.G : N° RG 20/01848 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HYK7

EM/DO

DE GARD

31 décembre 2018

RG:21701044

S.A.S. [5]

C/

CPAM DU GARD

Grosse délivrée

le 04.04.2023

à

Me RAFEL

CAPM GARD

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 04 AVRIL 2023

APPELANTE :

S.A.S. [5]

[Adresse 7]

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Me Isabelle RAFEL de la SCP VIDAL-NAQUET AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMÉE :

CPAM DU GARD

Département des Affaires Juridiques

[Adresse 1]

[Localité 2]

représenté par M. [S] en vertu d'un pouvoir spécial

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 945-1 du code de Procédure Civile, sans opposition des parties.

Elle en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère

GREFFIER :

Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 17 Janvier 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 04 Avril 2023.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 04 Avril 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

Le 23 octobre 2016, M. [E] [R], salarié de la Sas [5], a déclaré avoir été victime d'un accident pour lequel une déclaration d'accident de travail a été établie par l'employeur le 25 octobre 2016 qui mentionnait ' l'intéressé déclare s'être fermé la portière de son véhicule sur le doigt'.

Un certificat médical initial a été établi par le docteur [M] [N] le 24 octobre 2016 qui mentionnait 'fracture pouce droit...'.

Cet accident a été pris en charge au titre de la législation professionnelle par la Caisse primaire d'assurance maladie du Gard par décision du 14 décembre 2016.

Le 08 février 2017, la Sas [5] a saisi la commission de recours amiable d'une contestation de la matérialité de l'accident déclaré par M. [E] [R].

Par décision du 12 octobre 2017, la commission de recours amiable a rejeté le recours de l'employeur.

Le 07 décembre 2017, la Sas [5] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale du Gard.

Par jugement du 31 décembre 2018, le tribunal des affaires de Sécurité Sociale du Gard a :

- confirmé la décision de la commission de recours amiable en date du 12 octobre 2017,

- débouté la société [5] de toutes ses demandes fins et conclusions,

- rejeté comme non fondées toutes autres conclusions contraires ou plus amples des parties,

- condamné la société [5] aux éventuels dépens de l'instance.

Par lettre recommandée du 01 avril 2019, la Sas [5] a régulièrement interjeté appel de cette décision dont il n'est pas justifié de la notification dans le dossier de première instance transmis à la cour.

L'affaire était radiée pour défaut de diligence des parties le 03 juillet 2020 pour être ré-inscrite à la demande de la Sas [5] le 28 juillet 2020.

Suivant acte du 12 octobre 2022, l'affaire a été fixée à l'audience du 17 janvier 2023 à laquelle elle a été retenue.

Par conclusions déposées et développées oralement à l'audience, la Sas [5] demande à la cour de :

- réformer le jugement querellé,

- dire que la Caisse primaire d'assurance maladie du Gard ne disposait pas d'éléments suffisamment graves, précis et concordants pour faire jouer à bon droit, la présomption d'origine professionnelle,

- dire que la décision de prise en charge en date du 14 décembre 2016 lui est inopposable,

- entrer en voie de condamnation à l'encontre de la Caisse primaire d'assurance maladie du Gard sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur de 1 000 euros ainsi que sur le fondement des entiers dépens.

Elle soutient que :

- elle conteste la matérialité de l'accident déclaré par M. [E] [R] comme s'étant produit le 23 octobre 2016 ainsi que le caractère professionnel de la lésion constatée ; elle considère que la caisse primaire d'assurance maladie du Gard ne rapporte pas la preuve de la matérialité d'un fait accidentel qui se serait produit le 23 octobre 2016 à 5h du matin ; il n'existe pas dans le dossier d'éléments suffisamment graves, précis et concordants qui pouvaient permettre à la caisse primaire de faire jouer à bon droit, la présomption d'origine puisqu'elle a considéré que la présomption devait jouer à la vue des seules affirmations de l'assuré ; or cet accident a pu se produire sur n'importe quel parking, y compris chez la victime, lorsqu'il est arrivé chez lui; le régime aurait alors été celui de l'accident de trajet, et ce d'autant plus qu'il a indiqué à son employeur que l'accident se serait produit lorsqu'il est sorti de son véhicule ; la caisse primaire ne dispose d'aucune certitude selon laquelle cet accident se serait réellement produit sur le parking du lieu du travail ; bien plus, la matérialité de ce prétendu fait accidentel ne ressort que des déclarations effectuées M. [E] [R] ; personne n'a constaté les circonstances de fait décrites par le salarié ;

- il apparaît assez curieux que M. [E] [R] ait informé M. [W] [O] alors qu'il n'a pas informé sa hiérarchie, sauf à ce que celui-ci ait été son passager ; cependant, si tel avait été le cas, il aurait assisté à l'accident; les circonstances de fait décrites par ce dernier, sur les seules indications de M. [E] [R] puisqu'il n'a pas assisté au fait accidentel, sont pour le moins curieuses et difficilement compatibles avec la lésion constatée ;

- enfin, M. [E] [R] a passé toute la journée chez lui avant d'informer sa hiérarchie du fait accidentel ; le certificat médical initial date du 24 octobre 2016, soit le lendemain du prétendu fait accidentel, alors que dans sa lettre manuscrite, M. [E] [R] indique avoir consulté son médecin le jour même, soit le 23 octobre, avant de prévenir son supérieur hiérarchique à 19h34 ce 23 octobre ; le fait qu'il se soit rendu aux urgences ne permet pas d'avoir la certitude d'un fait accidentel au temps et au lieu du travail ; ce décalage de date est également suspect ; la matérialité du fait accidentel ne saurait être retenue comme prouvée par la caisse primaire du Gard ; l'inopposabilité est donc encourue.

Suivant conclusions écrites, déposées et soutenues oralement à l'audience, la caisse primaire d'assurance maladie du Gard demande à la cour de :

- confirmer purement et simplement le jugement rendu le 31 décembre 2018 par le pôle social du tribunal de grande instance de Nîmes,

- rejeter l'ensemble des demandes de la société [5].

Elle fait valoir que :

- au visa de l'article L411-1 du code de la sécurité sociale, M. [E] [R] décrit un fait accidentel précis, soudain et violent ; contrairement à ce que soutient la société, l'heure et le lieu de l'accident permettent d'expliquer l'absence de témoin ; le fait accidentel s'est produit sur le parking de la société vers 5h du matin, alors que le salarié terminait son poste de nuit ; il a informé son employeur le jour même, soit dans le délai légal de 24 heures ; un collègue de travail a été avisé de cet accident immédiatement après qu'il se soit produit et confirme que M. [E] [R] présentait une lésion du pouce droit ; le certificat médical initial mentionne une lésion d'origine traumatique qui est cohérente avec le fait accidentel,

- elle disposait de présomptions graves, précises et concordantes permettant d'établir la matérialité de l'accident de M. [E] [R],

- lorsqu'une lésion apparaît au temps et au lieu du travail, elle bénéficie de la présomption d'imputabilité au travail ; il appartient à l'employeur qui souhaite renverser cette présomption de démontrer l'existence d'une cause totalement étrangère au travail ; tel n'est pas le cas en l'espèce ; l'employeur se contente d'instiller un doute sur la véracité des déclarations du salarié en relevant des 'incohérences' entre la date de survenance de l'accident et celle de l'établissement du certificat médical initial ; au vu des décomptes IMAGE, elle démontre que le 23 octobre 2016, M. [E] [R] s'était bien rendu à une consultation aux urgences.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs écritures déposées et soutenues oralement lors de l'audience.

MOTIFS

Selon l'article L411-1 du code de la sécurité sociale, est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise.

L'accident de travail se définit comme un événement ou une série d'événements survenus à des dates certaines par le fait ou à l'occasion du travail dont il est résulté une lésion corporelle quelle que soit la date d'apparition de celle-ci.

L'accident survenu alors que la victime était au temps et au lieu de travail est présumé imputable au travail.

Cette présomption ne tombe que si l'employeur établit que la cause de l'accident est totalement étrangère au travail.

En l'espèce, la déclaration d'accident de travail établie par la Sas [5] le 25 octobre 2016 mentionne : un accident survenu le 23 octobre 2016 dont M. [E] [R] a été victime, à 5h, soit pendant ses horaires de travail fixés ce jour là de '21h00 à 05h00"' sur le 'parking fonte' situé à [Localité 6] correspondant au lieu de travail habituel du salarié, dans les circonstances suivantes :'l'intéressé déclare s'être fermé la portière de son véhicule sur le doigt' ; la déclaration indique le siège et la nature des lésions 'pouce', 'traumatisme', mentionne l'absence de témoin et l'absence d'établissement d'un rapport de police, que l'accident n'a pas été causé par un tiers, que l'employeur a été informé le 23 octobre 2016 à 19h34 par l'un de ses préposés et que le fait accidentel a été décrit par la victime.

M. [W] [X] a établi une attestation dans laquelle il précise que l'accident a eu lieu au 'portier Sud' dans les circonstances suivantes : 'la portière côté conducteur lui est revenu vers lui et en la stoppant avec sa main droite...la victime a déclaré avoir été blessée à la main droite'.

Le lieu de survenance de l'accident allégué par M. [E] [R] est ainsi confirmé par un témoin M. [W] [X] dont la Sas [5] ne justifie pas qu'il ne pouvait pas être présent aux côtés de M. [E] [R], au moment de l'accident.

L'heure à laquelle s'est produit le fait accidentel allégué est compris dans le créneau des horaires de travail du salarié.

Dans le questionnaire de la caisse renseigné par l'assuré le 02 novembre 2016, M. [E] [R] précise qu'il a été blessé au pouce droit, répond à la question 'pourquoi n'avez-vous pas informé votre responsable avant'' : 'Je ne pensai pas que ma blessure soit aussi grave (fracture pouce droit), indique que M. [W] [X] était présent et joint une lettre manuscrite de sa main datée du même jour : 'travaillant en poste mon accident s'est produit quand je terminais ma première de nuit en sachant que j'avais posé ma deuxième nuit en repas. Je précise que j'effectue du covoiturage et que cette nuit là c'est moi qui avait mon véhicule. Mon poste se termine à 5h le matin j'ai demandé à un collègue de prendre mon véhicule car j'avais du mal à conduire dû à la douleur de mon doigt. En arrivant à 6h à mon domicile, je me suis bandé et pris un antidouleur, je ne pensais pas à la gravité de mon accident de travail. L'après midi je me suis rendu chez le docteur [N] qui m'a conseillé d'aller passer une radio. Effectivement après la radio nous avons constaté une fracture ...'.

Les premières constatations médicales effectuées le 24 octobre 2016, soit le lendemain du fait accidentel allégué, sont compatibles avec le déroulement du fait accidentel tel qu'il a été décrit par M. [E] [R] dans la déclaration d'accident de travail ou dans son courrier manuscrit ; comme l'ont justement relevé les premiers juges dans le jugement entrepris : 'la nature des blessures qui ont été subies et qui ont fait l'objet d'une radiographie corroborant le certificat médical initial s'accordent avec un écrasement du pouce droit, suite à la fermeture inopinée d'une portière de voiture'.

Il ressort des pièces communiquées aux débats que la Sas [5] a émis des réserves suivant courrier du 25 octobre 2016 :'aucun témoin n'était présent lors de ce prétendu accident qui se serait produit à la fin de son poste. M. [E] [R] ne nous a pas signalé au moment des faits et n'est pas passé à l'infirmerie du site, de sorte que nous n'avons à aucun moment eu connaissance de cet accident...nous contestons le caractère professionnel de cet accident nos réserves portant à la fois sur les circonstances de temps et de lieu de l'accident, qu'aucun élément matériel ne vient étayer et sur l'existence potentielle d'une cause totalement étrangère au travail , compte tenu notamment du délai très important et anormal entre le moment où ce fait se serait produit et le moment où M. [E] [R] s'est manifesté auprès de nous'.

Contrairement à ce que soutient la Sas [5], M. [E] [R] a avisé son employeur le jour même, le 23 octobre 2016, moins de 24 heures après la survenue de l'accident.

Dans le questionnaire de la caisse renseigné par l'employeur le 10 novembre 2016, la Sas [5] répondu par la négative à la question 'la nature du travail qu'effectue votre salarié ainsi que l'heure de survenance de l'accident est-il compatible avec l'absence de témoins', positivement à la question 'y avait-il au moment des faits une ou plusieurs personnes membres de l'encadrement ou habilitées à rédiger une déclaration' , le chef de poste préparation et à la question 'votre salarié avait-il la possibilité de prévenir un de ses responsables hiérarchiques dans les 24 h compte tenu du jour et de l'heure de l'accident', M. [B] [T] responsable unité Pdc.

Or, force est de constater que M. [E] [R] a produit une attestation d'une personne présente au moment de l'accident et qu'il a déclaré l'accident à son employeur dans les délais.

Par ailleurs, la caisse primaire produit une capture d'écran du site IMAGE qui mentionne le code 'ATU' à la date du 23 octobre 2016 correspondant à un 'forfait accueil et traitement des urgences', ce qui conforte les déclarations de M. [E] [R] selon lesquelles il s'est rendu sur les conseils de son médecin traitant au service des urgences quelques heures après la survenue de la lésion.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, il apparaît que l'accident allégué par M. [E] [R] qui a revêtu un caractère soudain, s'est produit au temps et au lieu de travail et est à l'origine d'une lésion corporelle qui a été constatée dans un temps proche de l'accident, que la caisse primaire a produit des indices graves, précis et concordants susceptibles d'établir la matérialité de l'accident ainsi déclaré par M. [E] [R].

Le fait accidentel bénéficie donc de la présomption d'imputabilité au travail.

Or, la Sas [5] ne produit aucun élément de nature à établir que l'apparition soudaine de la lésion corporelle ce 23 octobre 2016 résulterait d'une cause totalement étrangère au travail.

C'est donc à bon droit que la caisse primaire d'assurance maladie du Gard a pris en charge cet accident au titre de la législation sur les risques professionnels.

Le jugement entrepris sera donc confirmé.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière de sécurité sociale et en dernier ressort;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale du Gard du 31 décembre 2018,

Déboute la Sas [5] de l'intégralité de ses prétentions,

Condamne la Sas [5] aux dépens de la procédure d'appel.

Arrêt signé par le président et par la greffiere.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 5ème chambre sociale ta
Numéro d'arrêt : 20/01848
Date de la décision : 04/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-04;20.01848 ?
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