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21/03/2023 | FRANCE | N°20/01763

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 5ème chambre sociale ta, 21 mars 2023, 20/01763


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











ARRÊT N°



N° RG 20/01763 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HYDS



CRL/DO



POLE SOCIAL DU TJ DE PRIVAS

29 juin 2020

RG :19/465







S.A.R.L. [8]



C/



[G]

CPAM ARDECHE



















Grosse délivrée

le 21.03.2023

à

Me FERRE

la FNATH

CPAM ARDECHE






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COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale TA



ARRÊT DU 21 MARS 2023





Décision déférée à la Cour : Jugement du Pole social du TJ de PRIVAS en date du 29 Juin 2020, N°19/465



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :



Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère, a entendu les plaidoiries en a...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 20/01763 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HYDS

CRL/DO

POLE SOCIAL DU TJ DE PRIVAS

29 juin 2020

RG :19/465

S.A.R.L. [8]

C/

[G]

CPAM ARDECHE

Grosse délivrée

le 21.03.2023

à

Me FERRE

la FNATH

CPAM ARDECHE

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale TA

ARRÊT DU 21 MARS 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du Pole social du TJ de PRIVAS en date du 29 Juin 2020, N°19/465

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère

GREFFIER :

Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 10 Janvier 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 21 Mars 2023.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTE :

S.A.R.L. [8]

[Adresse 9]

[Adresse 9]

[Localité 4]

Représentée par Me Denis FERRE de la SELARL ABEILLE & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMÉS :

Monsieur [V] [G]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représenté par la FNATH GROUPEMENT SUD EST en vertu d'un pouvoir spécial

CPAM ARDECHE

Services des affaires juridiques

[Adresse 5]

[Localité 1]

Représentée par Mme [P] [Y] en vertu d'un pouvoir spécial

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 21 Mars 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 23 juin 2015, la S.A.R.L. [8] a établi une déclaration d'accident du travail concernant son préposé, M. [V] [G] , salarié en qualité de poseur d'enseignes depuis le 15 juin 2015, accident survenu le 19 juin 2015 à 11 heures et décrit dans les termes suivants : 'prise de dimensions à l'échelle - l'échelle a ripé sur le carrelage'. Le certificat médical initial, établi le20 juin 2015 par un médecin du centre hospitalier de [Localité 4] mentionne ' poignet droit : fracture fermée de l'extrémité du radius'.

L'accident a été pris en charge au titre de la législation relative aux risques professionnels par la Caisse Primaire d'assurance maladie du Gard et la date de consolidation a été fixée au 10 juin 2018.

Le 30 août 2018, la Caisse Primaire d'assurance maladie du Gard a notifié à M. [V] [G] que le taux d'incapacité permanente partielle résultant de cet accident du travail était de 15 % en raison de ' séquelles indemnisables d'un traumatisme du poignet droit chez un droitier, ayant entraîné fracture et arrachement ligamentaire à type de raideur en extension et en flexion sans trouble de la prono-supination, sans état antérieur .'

Sollicitant la reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur et après échec de la procédure de conciliation mise en 'uvre par la Caisse Primaire d'assurance maladie du Gard, consacrée par un procès-verbal de carence en date du 10 janvier 2019, M. [V] [G] a saisi le tribunal de grande instance de Privas par requête adressée le 8 juillet 2019 aux mêmes fins.

Par jugement du 29 juin 2020, le tribunal judiciaire de Privas - Contentieux de la protection sociale, désormais compétent pour connaître de ce litige, a :

- dit que l'accident du travail survenu le 19 juin 2015 dont a été victime M. [V] [G] est la conséquence de la faute inexcusable de son employeur, la S.A.R.L. [8] et que la responsabilité de celle-ci est engagée sur le fondement de l'article L 452-1 du code de la sécurité sociale,

- déboute la S.A.R.L. [8] de ses demandes,

- fixe au maximum la majoration de la rente prévue par la loi dans la limite des plafonds prévus par l'article L 452-2 du code de la sécurité sociale,

- rappelle que la majoration est payée par la caisse qui en récupère le capital représentatif auprès de l'employeur, en application des dispositions de l'article L 452-2 du code de la sécurité sociale,

- avant dire droit sur la liquidation des préjudice, ordonné une expertise médicale confiée au Dr [L], (...)

- déclaré le jugement opposable à la Caisse Primaire d'assurance maladie de l'Ardèche,

- sursis à statuer sur les demandes relatives à l'article 700 du code de procédure civile,

- réservé les dépens.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée le 16 juillet 2020, la S.A.R.L. [8] a régulièrement interjeté appel de cette décision. Enregistrée sous le numéro RG 20 01763, l'examen de cette affaire a été appelé à l'audience du 10 janvier 2023.

Au terme de ses conclusions écrites, déposées et soutenues oralement lors de l'audience, La S.A.R.L. [8] demande à la cour de :

A titre principal,

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 29 juin 2020 par le pôle social du tribunal judiciaire de Privas en ce qu'il a reconnu sa faute inexcusable et ordonné une expertise médicale,

En conséquence,

- dire et juger qu'aucune faute inexcusable n'est rapportée par M. [V] [G],

- le débouter en conséquence de l'ensemble de ses demandes,

A titre subsidiaire,

- dire et juger que l'expertise éventuellement ordonnée sera limitée aux préjudices prévus par l'article L 452-3 du code de la sécurité sociale,

- rejeter toute autre demande,

- dire et juger qu'en tout état de cause la Caisse Primaire d'assurance maladie sera condamnée à faire l'avance des condamnations ordonnées,

En tout état de cause,

- condamner M. [V] [G] au paiement de la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Au soutien de ses demandes, la S.A.R.L. [8] fait valoir que :

- elle n'a pas manqué à ses obligations en terme de règles de sécurité, le signalement fait par l'inspecteur du travail au procureur de la République n'ayant donné lieu après enquête à aucun engament de sa responsabilité,

- l'inspecteur du travail dans son rapport indique clairement qu'aucun élément matériel en lien avec des infractions en lien direct avec l'accident du travail n'a été relevé,

- le recours à l'échelle pour prendre des mesures était parfaitement autorisé, l'évaluation du risque établissant qu'il s'agit de travaux de courte durée, non répétitifs, et présentant un risque faible,

- l'absence de formation s'explique par le fait que l'accident a eu lieu lors de la première semaine de travail de M. [V] [G], lequel présentait en revanche une expérience professionnelle dans ce domaine,

- M. [V] [G] a été débouté de sa demande devant le conseil de prud'hommes de Valence tendant à la voir condamner pour manquement à l'obligation de sécurité.

Au terme de ses conclusions écrites, déposées et soutenues oralement lors de l'audience, M. [V] [G] demande à la cour de :

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement du Pôle social du tribunal judiciaire de Privas du 29/06/2020,

- condamner la S.A.R.L. [8] au paiement de la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile uniquement pour la cause d'appel,

- condamner l'employeur, la S.A.R.L. [8] aux entiers dépens.

Au soutien de ses demandes, M. [V] [G] fait valoir que :

- le jour de l'accident il devait déposer des enseignes et non pas prendre des mesures,

- les devis et factures consultés par les inspectrices du travail confirment ses déclaration et contredisent la position de l'employeur selon laquelle il devait uniquement prendre des cotes,

- les témoins entendus lors de l'enquête de la DIRECCTE viennent confirmer ses explications,

- la S.A.R.L. [8] savait pertinemment qu'il devait exécuter un travail de longue durée, soit la dépose de deux enseignes, mais n'a pas mis à sa disposition le matériel adapté à savoir une nacelle ou un échafaudage,

- le rapport de la DIRECCTE conclut au fait que l'employeur n'a pas mis à sa disposition un équipement préservant sa sécurité,

- il s'en déduit que la faute inexcusable de l'employeur est démontrée.

Au terme de ses conclusions écrites, déposées et soutenues oralement lors de l'audience, la Caisse Primaire d'assurance maladie de l'Ardèche demande à la cour de :

- lui donner acte de ce qu'elle s'en remet à la sagesse de la cour sur le point de savoir si l'accident dont a été victime M. [V] [G] le 19 juin 2015 est imputable ou non à la faute inexcusable de l'employeur,

Dans l'affirmative,

- fixer le montant de la majoration de la rente, et le montant des préjudices extra-patrimoniaux selon l'usage en vigueur,

- reconnaître son action récursoire à l'encontre de la S.A.R.L. [8],

- ordonner la communication de coordonnées de la compagnie d'assurance garantissant le risque.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues à l'audience.

MOTIFS

Selon l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale, est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail de toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise

Selon l'article L. 452-1 du Code de la Sécurité Sociale, lorsque l'accident est dû à la faute inexcusable de l'employeur ou de ceux qu'il s'est substitués dans la direction, la victime ou ses ayants droit ont droit à une indemnisation complémentaire dans les conditions définies aux articles suivants.

Le manquement à cette obligation légale de sécurité et de protection de la santé à laquelle l'employeur est tenu envers le travailleur a le caractère d'une faute inexcusable lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.

Il est indifférent que la faute inexcusable commise par l'employeur ait été la cause déterminante de l'accident survenu aux salariés, mais il suffit qu'elle en soit une cause nécessaire pour que la responsabilité de l'employeur soit engagée, alors même que d'autres fautes auraient concouru au dommage.

La conscience du danger s'apprécie au moment ou pendant la période d'exposition au risque.

Il incombe en conséquence au salarié de prouver, en dehors des hypothèses de faute inexcusable présumée, que son employeur, qui devait avoir conscience du danger auquel il était exposé, n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.

L'article L 4121-1 du code du travail, sans sa version applicable, dispose que l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent :

1° des actions de préventions des risques professionnels et de la pénibilité au travail,

2° des actions d'information et de formation,

3° la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.

L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes.

L'article R 4323-63 du code du travail dispose qu'il est interdit d'utiliser les échelles, escabeaux et marchepieds comme poste de travail.

Toutefois, ces équipements peuvent être utilisés en cas d'impossibilité technique de recourir à un équipement assurant la protection collective des travailleurs ou lorsque l'évaluation du risque a établi que ce risque est faible et qu'il s'agit de travaux de courte durée ne présentant pas un caractère répétitif.

En l'espèce, les circonstances matérielles de l'accident survenu le 19 juin 2015, sont décrites :

- dans la déclaration d'accident du travail établie par l'employeur le 26 juin 2015 dans les termes suivants : ' prise de dimension à l'échelle. L'échelle a ripé sur le carrelage',

- dans les écritures de M. [V] [G] qui affirme qu'il devait au moment de l'accident procéder à la dépose de deux enseignes.

Il s'en déduit que la matérialité de l'accident n'est pas discutée, soit la chute d'une échelle, laquelle est compatible avec les constatations du médecin dans le certificat médical initial : ' poignet droit : fracture fermée de l'extrémité du radius'.

En revanche, M. [V] [G] soutient que contrairement à ce qu'a indiqué son employeur sur la déclaration d'accident du travail, il n'était pas en train de prendre des dimensions au moment où il est tombé, mais en train de démonter une enseigne, sans dispositif de sécurité adapté et alors qu'il avait conscience du danger que représentait cette intervention en hauteur.

Au soutien de ses affirmations, il renvoie au rapport de la DIRECCTE établi ensuite de son accident du travail et adressé au procureur de la République, en visant les infractions de mise à disposition pour des travaux en hauteur d'un équipement ne préservant pas la sécurité des travailleurs et de mise à disposition du travailleur d'un équipement de travail ne permettant pas de garantir sa sécurité, dans lequel les deux inspectrices ont indiqué que :

- la réalisation de travaux à partir d'une échelle qui ne constitue pas un poste de travail est par principe interdite et que par exception, lorsque l'évaluation du risque a établi que le risque était faible et qu'il s'agissait de travaux de courte durée ne présentant pas un caractère répétitif, cet équipement peut être utilisé ( article R 4323-63 du code du travail ),

- elles se sont rendus dans les locaux de la S.A.R.L. [8] le 7 janvier 2016, pour notamment obtenir des précisions sur les circonstances de l'accident du travail dont a été victime M. [V] [G],

- le document d'évaluation des risques qui leur était présenté par l'employeur n'était pas daté et succinct malgré un précédent contrôle au cours duquel il lui avait été rappelé ses obligations en matière de prévention des risques, les mentions qui y sont portées sont qualifiées 'd'indigentes' et il est observé que le risque de chute lors de travaux en hauteur ( comme la prise de cotes sur chantier) n'y figure pas,

- l'employeur a fait état de l'existence d'un PPSPS concernant l'opération au cours de laquelle l'accident a eu lieu, lequel ne leur a pas été présenté,

- en l'absence de réponse de l'employeur sur leur demande de fournir tous éléments qui permettrait d'étayer les circonstances de l'accident, elles se sont rendues dans le magasin [7] où a eu lieu l'accident et ont entendu différentes personnes dont le responsable des travaux pour le magasin, M. [J], qui mentionne que selon lui le salarié démontait l'enseigne indiquant l'ancienne cafétéria, une hôtesse de caisse, Mme [R], qui dit avoir été témoin de l'accident, le salarié était en train de démonter une enseigne,

- elles se sont rendues sur le lieu précis de l'accident et ont 'constaté des marques désignant la présence de travaux pouvant être le démontage d'une enseigne' et que 'la hauteur de l'intervention est relativement importante pour une intervention à partir d'une échelle ( entre 2,50 et 3 mètres )',

- le directeur des travaux pour le compte de [7] dispose d'un devis de la S.A.R.L. [8] daté du 11 juin 2015 pour la dépose de deux enseignes, la commande a été passée le 16 juin 2015 et l'intervention a eu lieu à sa connaissance le 19 juin 2015,

- la réponse de la S.A.R.L. [8] ne leur est parvenue que le 13 juillet 2016, qui leur a adressé 'une fiche d'intervention en date du 17 juin 2015 qui mentionne une prise de cotes pour démontage d'une enseigne suspendue dans la galerie marchande, sans autre référence de lieu, pour une intervention le 19 juin 2015 sur laquelle est prévue M. [G]', ainsi que l'achat d'équipement de travail ( de type échelle trois pans ) en décembre 2015 et janvier 2016, sans pour autant préciser le type d'équipement utilisé lors de l'accident, et leur a précisé qu'en fait aucun PPSPS n'avait été établi,

- elles en déduisent que l'aptitude médicale du salarié au poste de travail n'a pas été constatée avant de lui confier des travaux en hauteur, que l'évaluation des risques et la mise en oeuvre de mesures de prévention sont inconséquentes, aucune formation du travailleur en contrat de travail à durée déterminée affecté à des postes à risques n'a été mise en oeuvre, les déclarations de l'employeur sur le type de travaux à réaliser ne sont pas crédibles et sont contredites par les pièces produites par le magasin [7].

Pour remettre en cause ces éléments, la S.A.R.L. [8] expose que M. [V] [G] devait prendre des mesures pour la confection d'une enseigne, soit une tâche présentant un risque faible, de courte durée et ne présentant pas un caractère répétitif et qui autorisait conformément à l'article R 4323-63 du code du travail le recours à une échelle.

Elle observe que le rapport de la DIRECCTE qui mentionne que deux infractions sont susceptibles d'être retenues ne fait état d'aucune certitude et n'a pas donné lieu à des poursuites pénales, ce qui vient confirmer qu'aucune infraction n'est démontrée à son encontre.

Enfin, elle renvoie à la décision du conseil de prud'hommes de Valence qui a débouté M. [V] [G] de sa demande de dommages et intérêts pour manquement de l'employeur à son obligation de sécurité.

Ceci étant, les constatations effectuées par les inspectrices du travail, agents assermentés, font foi jusqu'à preuve du contraire et il ressort de leurs procès-verbal que dans le cadre de la relation commerciale concernant le remplacement de deux enseignes par la S.A.R.L. [8] pour le compte du magasin [7] de [Localité 6] :

- le devis a été établi par la S.A.R.L. [8] le 11 juin 2015,

- la commande a été passée par le client le 16 juin 2015,

- l'intervention a été programmée par la S.A.R.L. [8] pour le 19 juin 2015;

et les témoignages qu'elles ont recueillis attestent qu'au moment de l'accident, le 19 juin 2015, M. [V] [G] était occupé à démonter une enseigne.

Ainsi, contrairement aux affirmations de la S.A.R.L. [8], lors de l'accident, M. [V] [G] était non pas en train de prendre des cotes, mais occupé à démonter une enseigne, tâche qui ne répond pas à la définition de l'article R 4323-63 du code du travail et qui aurait dû se dérouler, non pas en montant sur une échelle, mais avec des équipements de sécurité adaptés aux travaux en hauteur.

De plus, la S.A.R.L. [8] n'apporte aucune explication sur l'absence de mesure de prévention, telle qu'une formation adaptée aux travaux en hauteur, que lui reproche son salarié.

L'absence de poursuites pénales suite au signalement de la DIRECCTE, qui relève de l'exercice par le procureur de la République de sa prérogative tenant à l'opportunité des poursuites, ne remet pas en cause la sincérité des constatations effectuées par les inspectrices du travail. L'emploi du conditionnel dans la conclusion de leur rapport est fondé sur le respect des principes généraux de la procédure pénale aux termes desquels seule la juridiction de jugement peut se prononcer sur la caractérisation d'une infraction et son imputabilité à son auteur.

Enfin, la juridiction prud'homale a débouté M. [V] [G] de sa demande de dommages et intérêts pour manquement de l'employeur à son obligation de sécurité, non pas parce que celle-ci n'était pas caractérisée, mais parce que M. [V] [G] ' n'apporte pas au conseil les éléments de réglementation que son employeur n'aurait pas respecté en le faisant travailler en utilisant une échelle'.

Par suite, en demandant à M. [V] [G] de procéder à la dépose d'une enseigne dont il n'est pas contesté qu'elle se situait à une hauteur comprise entre 2,5 et 3 mètres, la S.A.R.L. [8] ne pouvait ignorer que son salarié serait exposé à un danger, risque de chute, et n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver, faute de lui avoir fourni un équipement de sécurité adapté et une formation aux travaux en hauteur.

En conséquence, c'est à juste titre que les premiers juges ont considéré que la S.A.R.L. [8] avait commis une faute inexcusable à l'origine de l'accident du travail dont a été victime son salarié, M. [V] [G], le 19 juin 2015, ordonné la majoration de la rente et ordonné une expertise médicale avant de liquider les préjudices de la victime.

La mission d'expertise étant conforme à la détermination des préjudices pouvant être indemnisés dans le cadre d'une faute inexcusable de l'employeur, il n'y a pas lieu d'en modifier la mission.

Aucune demande de provision n'étant présentée par M. [V] [G] qui demande la confirmation du jugement déféré, lequel n'a pas fixé de provision à valoir sur l'indemnisation des préjudices, les observations de la S.A.R.L. [8] sur ce point sont sans objet.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, en matière de sécurité sociale, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 29 juin 2020 par le tribunal judiciaire de Privas,

Renvoie les parties devant la juridiction de première instance pour la liquidation des préjudices de M. [V] [G],

Condamne la S.A.R.L. [8] à verser à M. [V] [G] la somme de 1.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile dans le cadre de la procédure d'appel,

Rejette les demandes plus amples ou contraires,

Condamne la S.A.R.L. [8] aux dépens de la procédure d'appel.

Arrêt signé par le président et par la greffiere.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 5ème chambre sociale ta
Numéro d'arrêt : 20/01763
Date de la décision : 21/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-21;20.01763 ?
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