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08/03/2023 | FRANCE | N°21/00930

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 4ème chambre commerciale, 08 mars 2023, 21/00930


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS















ARRÊT N°



N° RG 21/00930 - N° Portalis DBVH-V-B7F-H7AW



CC



TRIBUNAL DE COMMERCE D'AVIGNON

11 décembre 2020

RG:2018 6149



S.A.S. PLANIFOLIA EUROPE



C/



[B] [O]





























Grosse délivrée

le 08 MARS 2023

à Me Emmanuelle VAJOU

Me Philipp

e PERICCHI















COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

4ème chambre commerciale





ARRÊT DU 08 MARS 2023





Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce d'AVIGNON en date du 11 Décembre 2020, N°2018 6149



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Mme Christ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 21/00930 - N° Portalis DBVH-V-B7F-H7AW

CC

TRIBUNAL DE COMMERCE D'AVIGNON

11 décembre 2020

RG:2018 6149

S.A.S. PLANIFOLIA EUROPE

C/

[B] [O]

Grosse délivrée

le 08 MARS 2023

à Me Emmanuelle VAJOU

Me Philippe PERICCHI

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

4ème chambre commerciale

ARRÊT DU 08 MARS 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce d'AVIGNON en date du 11 Décembre 2020, N°2018 6149

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre,

Madame Claire OUGIER, Conseillère,

Madame Agnès VAREILLES, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Isabelle DELOR, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 16 Février 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 08 Mars 2023.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTE :

S.A.S. PLANIFOLIA EUROPE, (ayant pour nom commercial Vanipro), Société par

actions simplifiée, au capital de 500 000,00 euros, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Grasse, sous le numéro 421 065 376, représentée par son président en exercice, domicilié en cette qualité audit siège,

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOUE NIMES, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Alain JAKUBOWICZ de l'AARPI JAKUBOWICZ ET ASSOCIÉS, Plaidant, avocat au barreau de LYON

INTIMÉ :

Monsieur [G] [B] [O]

né le 24 Mai 1954 à Madagascar

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représenté par Me Philippe PERICCHI de la SELARL AVOUEPERICCHI, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Assisté de Me Marie-laure VIGOUROUX, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 02 Février 2023

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre, le 08 Mars 2023,par mise à disposition au greffe de la Cour

EXPOSÉ

Vu l'appel interjeté le 5 mars 2021 par la SAS Planifolia Europe à l'encontre du jugement prononcé le 11 décembre 2020 par le tribunal de commerce d'Avignon dans l'instance n°20186149.

Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 1er décembre 2021 par l'appelante et le bordereau de pièces qui y est annexé.

Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 3 septembre 2021 par Monsieur [G] [B] [O], intimé et appelant incident, et le bordereau de pièces qui y est annexé.

Vu l'ordonnance du 31 octobre 2022 de clôture de la procédure à effet différé au 2 février 2023.

* * *

La société Planifolia Europe, ayant pour nom commercial Vanipro, a pour activité l'import-export, le négoce et la commercialisation de vanille et d'épices.

Monsieur [G] [B] [O] exerçait, jusqu'au 18 août 2017, l'activité de courtier professionnel en négoce d'épices, aromates, herboristerie, légumes secs, fruits secs et dérivés. Par acte sous signature privée du 21 septembre 2017, il a cédé son fonds de commerce à la SARL [B] Bokerage, exerçant la même activité, qu'il a créée avec son fils et dont il détient une partie du capital social.

Pour les besoins de son activité d'achat de vanille indonésienne, la société Planifolia faisait appel à ce courtier. En 2017, elle a de nouveau demandé à Monsieur [B] [O] de la mettre en relation avec un fournisseur.

Monsieur [B] [O] lui a alors présenté la société indonésienne PT [D] Food Ingredients et, par contrat du 15 février 2017, la société SAS Planifolia a acheté à ce fournisseur 2 tonnes de vanille pour un montant total de 750 000 USD. Le contrat n° 17 023 précisait que la vanille devait observer la qualité suivante : 'Gousses de vanille réservées à l'extraction avec une teneur minimale en vanilline de 1%. 20% d'humidité maximum - Planifolia - Origine : Indonésie'. Une réduction du prix était stipulée en cas de teneur en vanilline à 0,6%.

Le contrat prévoyait un paiement de 50% à l'avance et 50% avant embarquement.

La société Planifolia a réglé l'intégralité du prix, soit 750 000 USD en deux versements effectués en février et en avril 2017.

A la réception de la marchandise, la société Planifolia a reproché à la société PT Mahari Foods d'avoir failli à ses obligations à trois titres :

Elle a livré la marchandise le 14 juin 2017 alors que la date de livraison était fixée en février ou début mars 2017;

Elle a livré 665kg de marchandises au lieu des 2 000kg commandés et payés;

Elle a livré une vanille de qualité non conforme aux spécifications contractuelles.

Les mises en demeures adressées à la société indonésienne sont restées vaines.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 28 février 2018, la société Planifolia a demandé au courtier de l'indemniser de son préjudice à hauteur de 750 000 USD, faisant valoir que sa responsabilité était engagée pour manquements aux obligations de prudence, diligence, renseignement et conseil.

Par courrier du 26 mars 2018, Monsieur [B] [O] a décliné toute responsabilité et a rappelé à la société Planifolia qu'elle était une professionnelle avertie du marché de la vanille.

Par exploit du 11 mai 2018, la société Planifolia a fait assigner Monsieur [B] [O] devant le tribunal de commerce d'Avignon aux fins de la voir condamner à réparer son préjudice du fait de l'inexécution contractuelle.

Par jugement du 11 décembre 2020, le tribunal de commerce d'Avignon a :

-Dit que Monsieur [G] [B] [O] a bien agi en qualité de courtier de marchandises et qu'à ce titre il ne peut être ducroire;

-Dit qu'il n'a pas failli à ses obligations de devoir d'information et de conseil;

-Dit que la société Planifolia Europe exerçant sous le nom commercial Vanipro ne démontre pas son préjudice;

-Débouté la société Planifolia Europe exerçant sous le nom commercial Vanipro de ses demandes d'indemnisation;

-Débouté Monsieur [G] [B] [O] de sa demande de dommages et intérêts;

-Condamné la société Planifolia Europe exerçant sous le nom commercial Vanipro à payer à Monsieur [G] [B] [O] la somme de 5 000 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

-Laissé à la société Planifolia Europe exerçant sous le nom commercial Vanipro la charge des dépens, dont ceux de greffe liquidés à la somme de 73,22 euros TTC.

Le 5 mars 2021, la SAS Planifolia Europe a interjeté appel de cette décision aux fins de la voir réformer en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'elle a débouté Monsieur [B] [O] de sa demande de dommages et intérêts.

***

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique, l'appelante demande à la cour, au visa des articles 1103, 1104, 1231-1, 1984 et suivants du code civil, de la jurisprudence citée, des pièces versées aux débats, de :

Statuant sur l'appel formé par la SAS Planifolia Europe exerçant sous le nom commercial Vanipro, à l'encontre de la décision rendue le 11 décembre 2020 par le tribunal de commerce d'Avignon;

Le déclarant recevable et bien fondé,

Y faisant droit,

-Infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a :

Dit que Monsieur [G] [B] [O] a bien agi en qualité de courtier de marchandises et qu'à ce titre il ne peut être ducroire;

Dit qu'il n'a pas failli à ses obligations de devoir d'information et de conseil;

Dit que la société Planifolia Europa exerçant sous le nom commercial Vanipro ne démontre pas son préjudice;

Débouté la société Planifolia Europa exerçant sous le nom commercial Vanipro de ses demandes d'indemnisation;

Condamné la société Planifolia Europe exerçant sous le nom commercial Vanipro à payer Monsieur [G] [B] [O] la somme de 5 000 euros titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

Laissé la société Planifolia Europe exerçant sous le nom commercial Vanipro la charge des dépens, dont ceux de greffe liquidés à la somme de 73,22 euros TTC.

Statuant à nouveau,

-Juger que Monsieur [G] [B] [O] a violé ses obligations d'information et de conseil lui incombant en tant que courtier et de rédacteur d'acte,

En conséquence,

-Juger qu'il engage sa responsabilité civile contractuelle;

-Condamner Monsieur [G] [B] [O] à payer à titre de dommages et intérêts à la SAS Planifolia Europe la somme de 750 000 USD, soit la contre-valeur en euros de 664 578 euros au taux de change arrêté à la date à laquelle la marchandise conforme aurait dû être livrée, en réparation de son préjudice matériel;

-Débouter Monsieur [G] [B] [O], de toutes ses demandes, fins et prétentions plus amples ou contraires et de son appel incident;

-Condamner Monsieur [G] [B] [O] à payer à la SAS Planifolia Europe exerçant sous le nom commercial Vanipro, la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Au soutien de ses prétentions, l'appelante expose que le courtier professionnel est débiteur d'une obligation de conseil et d'information à l'égard de la société Planifolia et qu'il devait de lui présenter un partenaire fiable et sérieux. Son consentement a été déterminé par la confiance que le courtier avait dans la société [D], Monsieur [B] ayant assuré qu'elle était un partenaire de longue date, fiable et avec laquelle il avait de très bonnes relations. La société Planifolia fait grief au jugement d'avoir retenu qu'elle était un professionnel averti alors que l'essentiel de son activité porte sur le commerce de la vanille de Madagascar. C'est parce qu'elle n'était pas compétente sur le marché indonésien qu'elle faisait précisément appel à un courtier. Celui-ci aurait dû se renseigner sur la fiabilité de la société [D] et de mettre en garde la société Planifolia.

En outre, alors que la société Planifolia n'était pas favorable à la clause de pré-paiement imposée par la société [D] et en avait référé à Monsieur [B] [O] qui l'avait convaincu de l'accepter, lui garantissant la fiabilité du fournisseur, le courtier l'a convaincu d'accepter cette clause, au mépris de son obligation de prudence et de mise en garde. En effet, l'absence de fiabilité de la société [D] semble connue des acteurs du marchés de la vanille indonésienne.

La société Planifolia conteste l'analyse du tribunal qui a qualifié le contrat du 15 février 2017 de contrat de courtage alors qu'il s'agit d'un contrat de vente mentionnant qu'elle est le vendeur et la société [D] l'acheteur. Le courtier était le rédacteur de ce contrat, lequel ne prévoit ni de clause de remboursement en cas de livraison incomplète ou de mauvaise qualité des produits livrés, ni de clause imposant une analyse contradictoire de la vanille en cas de défaut de qualité. Ce contrat n'est même pas signé. La responsabilité de Monsieur [B] [O] est également engagée à ce titre.

Le préjudice de la société Planifolia s'élève au total de la vente (750 000 USD) puisque la seule partie livrée était non conforme. A cet égard, l'appelante soutient apporté la preuve de son double paiement et critique l'analyse contraire des magistrats de première instance. Elle fait valoir que le paiement total de la commande n'est pas contesté par la partie adverse.

***

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique, l'intimé demande à la cour de :

-Débouter la société Panifolia Europe de toutes ses demandes;

-Confirmer le jugement en ce qu'il a :

Dit que Monsieur [G] [B] [O] a bien agi en qualité de courtier de marchandises et qu' ce titre il ne peut tre ducroire;

Dit qu'il n'a pas failli ses obligations de devoir d'information et de conseil;

Dit que la société Planifolia Europa exerçant sous le nom commercial Vanipro ne démontre pas son préjudice;

Débouté la société Planifolia Europa exerçant sous le nom commercial Vanipro de ses demandes d'indemnisation;

Débouté Monsieur [G] [B] [O] de sa demande de dommages et intérêts;

Condamné la société Planifolia Europe exerçant sous le nom commercial Vanipro payer Monsieur [G] [B] [O] la somme de 5 000 euros titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

Laissé la société Planifolia Europe exerçant sous le nom commercial Vanipro la charge des dépens, dont ceux de greffe liquidés la somme de 73,22 euros TTC.

Faisant droit au seul appel incident du concluant,

-Infirmer le jugement en ce qu'il a débouté Monsieur [B] de Guéry de sa demande de dommage et intérêt;

-Condamner la société Planifolia Europe à 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive;

-Condamner Planifolia Europe à 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

L'intimé expose que le courtier est soumis à une obligation de moyens et qu'il n'est responsable ni de la conclusion du contrat de vente, ni de son exécution. Or, Monsieur [B] [O] a rempli ses obligations puisqu'il a trouvé la marchandise que recherchait la société Planifolia et lui a conseillé de n'en prendre que 2 tonnes au lieu de 4. Le vendeur est reconnu sur le marché et utilisé par les concurrents de l'appelante.

Il a obtenu l'accord du vendeur sur les exigences de l'acheteur concernant le prix et la qualité et les modalités de paiement (50% à la conclusion du contrat et de 50% à la livraison (avant chargement aérien) sont usuelles et connues par l'acheteur qui a déjà utilisé ce mode de règlement dans de précédents contrats. Ce contrat, qu'il a fait conclure, est en tout point légal, il a engagé les parties et a fait l'objet d'un début d'exécution.

Le courtier soutient que la société Planifolia ne rapporte pas la preuve de l'existence d'une clause de ducroire, laquelle doit être expresse car elle est contraire au principe selon lequel le courtier ne garantit pas la bonne exécution du contrat. Il n'a pas garanti la fiabilité de l'opération ni la qualité de la marchandise mais a simplement présenté un vendeur en qui il avait toute confiance. Il relève que les concurrents de la société Planifolia ont eu recours à ce vendeur qui était donc reconnu.

Le courtier rappelle avoir effectué plusieurs opérations de courtage avec la société Planifolia- laquelle avait déjà acheté de la vanille indonésienne - se concrétisant par des contrats qu'il signait lui-même, pour attester de la vente. Les négociations auxquelles il a participé ont été succinctes, d'autant que la société Planifolia n'a discuté ni du prix ni des conditions de paiement avant livraison. Il conteste la valeur contractuelle de l'acte du 15 février 2017, qui n'est qu'une attestation de l'existence du contrat, lequel est formalisé par le document remis par le vendeur, intitulé « proforma invoice » signé tant par ce vendeur que la société Planifolia le 15 février 2017.

Le courtier remarque que la société Planifolia a accepté la première livraison d'un montant de 249 375 USD et n'a pas fait faire d'expertise contradictoire. L'absence de préjudice est patente, ce qui justifie une indemnisation pour procédure abusive.

L'abus d'ester en justice est constitué non seulement par la réclamation contre le courtier pour une prétendue garantie qu'il n'a pas donné, mais aussi parce que le soi-disant préjudice n'est pas justifié.

***

Pour un plus ample exposé il convient de se référer à la décision déférée et aux conclusions visées supra.

DISCUSSION

La société Planifolia se fonde sur la responsabilité contractuelle du courtier mais n'invoque plus une clause de ducroire.

Elle avait fait appel à Monsieur [B] pour acquérir plusieurs tonnes de vanille indonésienne en 2016 auprès d'un autre vendeur, payable selon la modalité du « CAD Arrival ».

A la demande de la société Planifolia, le courtier communique par courriel du 3 novembre 2016, le prix et la qualité de la vanille en vente. Il fait état des dernières offres et des modalités de paiement pour 2000 kgs à savoir 50% à la commande et 50% avant embarquement.

La société Planifolia répond le même jour qu'elle va réfléchir.

Une offre d'achat est faite par la société Planifolia le 15 février 2017, selon contrat signé par l'acheteur et le courtier. L'offre est acceptée par le vendeur qui délivre le même jour une facture pro forma signée, reprenant les modalités de l'offre d'achat.

La vente est donc parfaite.

Le 20 février 2017, l'acheteur s'enquiert du sérieux et de la solvabilité du vendeur pour le cas où il y aurait un problème de qualité de la vanille entraînant de ce fait une réduction de son prix. Le paiement étant effectué avant réception de la marchandise à l'Ile Maurice, la société [D] devrait, en effet, dans ce cas, procéder à un remboursement.

Le courtier répond qu'il connaît le vendeur depuis 20 ans et qu'il ne ferait pas prendre le moindre risque à la société Planifolia.

Cette dernière ne respecte pas les termes du contrat et paie les deux tonnes de vanille en février et avril 2017, alors que l'embarquement des 665 premiers (et derniers kilos) n'a lieu que le 14 juin 2017.

L'étendue de l'obligation d'information et de conseil du courtier, dont la preuve du respect incombe à celui-ci, est ajustée selon les connaissances et les besoins du client qui en est le créancier.

Civ 2ème 17 janvier 2019 n°17-301.48

Il ressort des échanges de courriel que la société Planifolia était informée, dès novembre 2016 des modalités de paiement de sa future commande, qu'elle n'a émis aucune objection sur celles-ci, a pris le temps de la réflexion et les a entérinées dans sa proposition d'achat. Les conditions de paiement, par moitié à la commande et par moitié avant embarquement de la marchandise à destination de l'Ile Maurice étaient parfaitement claires pour un professionnel averti comme la société Planifolia, fournisseur international de vanille, dont l'activité n'est pas limitée à la vanille de Madagascar, comme le démontre l'importance de ses commandes de vanille indonésienne l'année précédant le litige.

En tant que professionnel averti, il n'a pu échapper à la société Planifolia que les conditions de paiement étaient différentes de celles de son précédent fournisseur indonésien et, non seulement cela ne l'a pas gêné, mais elle a devancé les délais qui lui étaient impartis en payant la totalité de la commande avant même qu'elle ne soit livrée au point de contrôle de l'exportation.

Contrairement à ce qu'elle soutient, le courtier ne l'a pas incité à procéder de la sorte puisque le courriel du 20 février 2017 est une réponse à une suggestion de « [Z] » (de Planifolia) portant sur une L/C payée sans document d'expédition. Le courtier répond que [D] « n'a pas l'habitude » et souhaite le draft de la L/C pour le soumettre à son service financier. Il n'est à aucun moment fait état d'un paiement anticipé par rapport aux clauses contractuelles.

Si Planifolia s'inquiète de la solvabilité du vendeur de vanille indonésien, ce n'est pas à propos de la clause de prépaiement mais sur les facultés de remboursement dudit vendeur en cas de litige sur la qualité de la vanille.

Le courtier a effectivement rassuré l'acheteur en lui disant qu'il connaissait le vendeur depuis 17 ans et qu'il avait confiance en lui.

La société Planifolia ne démontre pas que le vendeur était notoirement insolvable au jour de la conclusion du contrat. L'attestation d'un concurrent, qu'elle verse aux débats, date du 24 janvier 2019 et ne précise pas à quelle date ce concurrent, également lésé, a su que le fournisseur était frauduleux.

L'appelante n'établit pas davantage que le courtier savait que le vendeur était insolvable.

Or, c'est elle qui recherche la responsabilité contractuelle du courtier et doit donc rapporter cette preuve.

Com. 14 janv. 2003, no 99-16.569

Enfin, le contrat de vente comporte une clause particulière qui n'existait pas dans les ventes conclues en 2016, à savoir que le vendeur acceptait une réduction de prix si la marchandise avait une teneur en vanilline de 0,6%.

L'appelante critique la formulation de cette clause, qui serait mal rédigée et non conforme à ses intérêts. Cet argument est toutefois inopérant car le vendeur n'a pas contesté la mauvaise qualité des produits livrés. En effet, il indique dans un courriel du 8 août 2017 avoir honte de ce que la partie de la marchandise reçue ne soit pas conforme aux critères de Planifolia. Il a d'ailleurs proposé dans un autre courriel le remboursement intégral de l'acheteur.

Ce paiement n'est pas intervenu en raison de l'insolvabilité du vendeur qui est certaine en juillet 2017.

Il s'ensuit que le courtier n'a pas commis de faute dans son activité d'intermédiaire et le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions, y compris en ce qu'il a débouté le courtier de sa demande de dommages intérêts. En effet, la société Planifolia a apprécié inexactement ses droits, ce qui n'est pas constitutif d'un abus et le courtier ne justifie d'aucun préjudice particulier.

La société Planifolia, qui succombe, devra supporter les dépens de l'instance et payer à Monsieur [B] [O] une somme équitablement arbitrée à 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Dit que la société Planifolia Europe exerçant sous le nom commercial Vanipro supportera les dépens d'appel et payera à Monsieur [B] [O] une somme de 3 000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Arrêt signé par la présidente et par la greffiere.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 4ème chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 21/00930
Date de la décision : 08/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-08;21.00930 ?
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