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07/03/2023 | FRANCE | N°20/01626

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 5ème chambre sociale ta, 07 mars 2023, 20/01626


ARRÊT N°



R.G : N° RG 20/01626 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HXYA

CRL/DO



TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE D'ARDECHE

02 juillet 2018





RG:20160202







URSSAF RHÔNE-ALPES



C/



Société [2]



















Grosse délivrée

le 07/03/2023

à

Me NISOL

Me BUREL



















COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMB

RE SOCIALE



ARRÊT DU 07 MARS 2023









APPELANTE :



URSSAF RHÔNE-ALPES

TSA 90001

[Localité 1]



représentée par Me Pierre-luc NISOL de la SELARL ACO, avocat au barreau de VIENNE





INTIMÉE :



Société [2]

[Adresse 4]

[Localité 5]



représentée par Me Franck BUREL de la SELARL ONELAW, avocat au barr...

ARRÊT N°

R.G : N° RG 20/01626 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HXYA

CRL/DO

TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE D'ARDECHE

02 juillet 2018

RG:20160202

URSSAF RHÔNE-ALPES

C/

Société [2]

Grosse délivrée

le 07/03/2023

à

Me NISOL

Me BUREL

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 07 MARS 2023

APPELANTE :

URSSAF RHÔNE-ALPES

TSA 90001

[Localité 1]

représentée par Me Pierre-luc NISOL de la SELARL ACO, avocat au barreau de VIENNE

INTIMÉE :

Société [2]

[Adresse 4]

[Localité 5]

représentée par Me Franck BUREL de la SELARL ONELAW, avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 945-1 du code de Procédure Civile, sans opposition des parties.

Elle en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère

GREFFIER :

Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 13 Décembre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 07 Mars 2023.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 07 Mars 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS DES PARTIES

La SNC [2] a fait l'objet par les services de l'URSSAF Rhône Alpes d'un contrôle de l'application des législations de sécurité sociale, d'assurance chômage et de garantie des salaires pour la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014.

A l'issue de ce contrôle, une lettre d'observations datée du 19 octobre 2015 a été établie par les inspecteurs du recouvrement, pour l'ensemble des établissements de la société, entraînant en rappel de cotisations et contributions d'un montant total de 5.677.608 euros répartis entre les 6 établissements.

Concernant l'établissement de [Localité 5], la lettre d'observations liste quatre chefs de redressement pour un montant total de 539.998 euros ainsi répartis :

- chef de redressement n° 10 : avantage en nature véhicule : principe et évaluation hors cas des constructeurs et concessionnaires : 362 euros,

- chef de redressement n° 11 : avantage en nature véhicule : évaluation forfaitaire : observations pour l'avenir,

- chef de redressement n°14 : annualisation de la réduction Fillon : détermination du coefficient : 539.636 euros,

- chef de redressement n° 15 : réduction Fillon : rémunérations brutes - heures de pause: néant.

Suite aux observations de la SNC [2], l'URSSAF a maintenu l'ensemble des chefs de redressement et a mis en demeure son établissement de Vernoux en [6] de lui régler la somme de 614.181 euros.

La SNC [2] a contesté cette mise en demeure en saisissant la Commission de Recours Amiable de l'URSSAF Rhône Alpes d'un recours contre cette décision, puis le tribunal des affaires de sécurité sociale du Gard en raison du rejet implicite de son recours. ( recours 20160202 ).

La Commission de Recours Amiable de l'URSSAF Rhône Alpes a, dans sa séance du 24 février 2017, annulé le chef de redressement n° 15 et maintenu le chef de redressement n°14. La SNC [2] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale du Gard d'un recours contre cette décision. ( recours 20170186)

Par jugement du 2 juillet 2018, le tribunal des affaires de sécurité sociale du Gard a :

- ordonné la jonction des procédures n° 20160202 et n° 20170186 sous le numéro 20160202,

- reçu la SNC [2] en son recours et l'a déclaré bien fondé,

- rejeté la demande de la SNC [2] tendant à annuler le contrôle opéré par l'URSSAF Rhône Alpes en 2015 et la mise en demeure du 16 décembre 2015,

- annulé la décision de redressement de l'URSSAF Rhône Alpes en ce qui concerne le point n°14 de la lettre d'observations du 19 octobre 2015,

- condamné la SNC [2] à payer à l'URSSAF Rhône Alpes la somme de 11.620,92 euros au titre du chef de redressement ' annualisation de la réduction Fillon' pour son établissement de [Localité 5] et pour les années 2012, 2013 et 2014, outre les pénalités de retard afférentes à chiffrer,

- débouté la SNC [2] de sa demande tendant à ce que l'URSSAF Rhône Alpes lui rembourse la somme de 209.800 euros,

- constaté que le recours de la SNC [2] au titre du point n°15 de la lettre d'observations est devenu sans objet suite à la décision explicite de la Commission de Recours Amiable du 24 février 2017,

- constaté que la demande de la SNC [2] sur la capitalisation des intérêts est devenue sans objet,

- condamné l'URSSAF Rhône Alpes à payer à la SNC [2] la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- constaté l'absence de tous dépens,

- ordonné l'exécution provisoire.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée le 17 août 2018, l'URSSAF Rhône Alpes a régulièrement interjeté appel de cette décision. Initialement enregistrée sous le numéro RG 18/3110, cette affaire a fait l'objet d'une ordonnance de radiation le 21 décembre 2018pour défaut de diligence des parties, puis a été réinscrite sous le RG 20/1626 le 9 juillet 2020 et appelée à l'audience du 8 juin 2021.

A cette audience, l'examen de l'affaire a été renvoyé à l'audience du 14 décembre 2021 pour permettre à l'URSSAF Rhône Alpes, suite à la communication à sa demande par la SNC [2] d'un panel de bulletins de salaires, de vérifier les conditions d'application de la réduction Fillon ' tant pour les erreurs de paramétrages que pour la neutralisation des temps de pause'.

L'examen de l'affaire a finalement été renvoyé à l'audience du 12 avril 2022 puis, en raison d'une transaction en cours entre les parties à celles du 21 juin 2022 puis du 13 décembre 2022 à laquelle elle a été retenue.

Au terme de ses conclusions écrites, déposées et soutenues oralement lors de l'audience, l'URSSAF Rhône Alpes demande à la cour de :

- confirmer le jugement du 2 juillet 2018 en ce qu'il a rejeté la demande de la société [2] tendant à annuler le contrôle et la mise en demeure du 16 décembre 2015,

- valider le calcul effectué par la société [2] relatif au défaut de paramétrage pour les années 2012 à 2014 issu des tableaux Excel,

- rejeter le calcul effectué par la société [2] avec le retraitement du temps de pause, ce dernier n'étant pas justifié par des paramètres probants,

En conséquence,

- confirmer le bien fondé du redressement relatif à l'annualisation de la réduction Fillon pour son montant actualisé, soit 11.620 euros en cotisations, outre majorations de retard,

- valider la mise en demeure pour un montant ramené à 11.982 euros outre 3.563 euros de majorations de retard,

- débouter la SNC [2] du surplus de ses demandes.

Au soutien de ses demandes, l'URSSAF Rhône Alpes fait valoir que :

- la mise en demeure du 16 décembre 2015 respecte les dispositions de l'article R 244-1 du code de la sécurité sociale puisqu'elle renvoie à la lettre d'observations, laquelle conformément à l'article R 243-9 du code de la sécurité sociale précise la nature et le mode de calcul du redressement, la différence de deux euros entre la lettre d'observations et le mise en demeure étant sans incidence,

- par application des articles L 241-13 et D 241-7 du code de la sécurité sociale et en l'absence de documents exploitables, elle a procédé dans un premier temps au redressement de cotisations concernant la réduction Fillon tel qu'il est mentionné dans la lettre d'observations,

- suite aux échanges et aux pièces produites par la SNC [2], notamment le panel de bulletins de paie, elle a pu identifier les erreurs de paramétrage au niveau informatique et accepte à titre exceptionnel et non générateur de droit le recalcul effectué par la société tel qu'issu des tableaux défaut de paramétrage,

- en revanche, à défaut d'éléments portant sur les temps de pause sur les bulletins de salaire, elle ne peut pas s'assurer du respect des conditions et modalités de mise en oeuvre de leur neutralisation au regard des personnes concernées, des montants reportés par la société dans ses tableaux , elle aboutit au redressements suivants :

* 2.083 euros pour l'année 2012,

* - 6.853 euros pour l'année 2013,

* 16.390 euros pour l'année 2014,

soit un total de 11.620 euros en cotisations en lieu et place de 539.636 euros initialement retenus, outre le chef de redressement non contesté relatif à l'avantage en nature véhicule de 273 euros en 2012 et 89 euros en 2013, auquel il convient d'ajouter après recalcul 3.563 euros de majorations de retard,

- la SNC [2] devra être déboutée de sa demande de crédit de 45.779,71 euros au titre de la neutralisation des temps de pause au dénominateur du coefficient servant de calcul à la réduction Fillon faute de produire des éléments permettant de considérer que cette neutralisation a été régulièrement effectuée par la société, dès lors qu'il existe conformément à l'accord relatif à la durée et à l'aménagement du temps de travail dans la société des temps de pause différents en fonction des catégories de salariés.

Au terme de ses conclusions écrites, déposées et soutenues oralement lors de l'audience, la SNC [2] demande à la cour de :

- dire et juger irrecevable et à tout le moins mal fondée l'URSSAF en son appel,

- confirmer le jugement rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Privas le 2 juillet 2018 sauf en ce qu'il a dit n'y avoir pas lieu de prononcer l'annulation du contrôle non plus que la mise en demeure et déclaré irrecevable sa demande relative à son crédit résultant de la prise en compte de la pause au dénominateur du coefficient servant au calcul de la réduction générale des cotisations,

A. Sur le paramétrage de l'annualisation et les situations d'absence

A titre principal,

- infirmer le jugement en ce qu'il a dit n'y avoir lieu de prononcer l'annulation du contrôle non plus que la mise en demeure et,

- constater que l'URSSAF a manqué à ses obligations lors du contrôle, de sorte que la lettre d'observations et la mise en demeure comportent un montant sciemment erroné,

- dire et juger que ces erreurs entraînent la nullité du contrôle et de la mise en demeure,

Subsidiairement, si la juridiction de céans ne prononçait pas purement et simplement l'annulation du redressement et de la mise en demeure en raison de cette erreur de chiffrage sciemment commise par l'URSSAF,

- confirmer le jugement rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Privas le 2 juillet 2018,

- constater, dire et juger que le montant qu'elle doit au titre des erreurs de paramétrage résultant de l'annualisation et du traitement de certaines absences est de 11.620,92 euros,

- dire et juger infondé le redressement pratiqué par l'URSSAF,

- annuler la mise en demeure et infirmer la décision de la Commission de Recours Amiable,

B. Sur la neutralisation de la rémunération des temps de pause,

- infirmer le jugement rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale en ce qu'il a considéré que son recours était sans objet compte tenu de la décision de la Commission de Recours Amiable,

Statuant à nouveau,

- constater que l'acceptation du principe du crédit mais non de son montant maintient l'entièreté de l'objet de son recours à ce titre devant la Commission de Recours Amiable,

- constater que l'article L 241-13 du code de la sécurité sociale permet aux employeurs de neutraliser les temps de pause au dénominateur du coefficient servant au calcul de la réduction Fillon sans condition relative à leur qualification en temps de travail effectif ou non effectif,

En conséquence de quoi,

- constater, dire et juger que l'article L 241-13 du code de la sécurité sociale permet aux employeurs de neutraliser les temps de pause au dénominateur du coefficient servant au calcul de la réduction Fillon sans condition relative à leur qualification en temps de travail effectif ou non effectif, et qu'il en résulte un crédit à son profit de 45.779,71 euros,

En conséquence de quoi,

- dire et juger le redressement infondé,

- condamner l'URSSAF à lui verser la somme de 34.158,79 euros correspondant à la réduction Fillon recalculée en tenant compte des erreurs de paramétrage et de la neutralisation des temps de pause au dénominateur du coefficient,

- condamner l'URSSAF à lui rembourser le montant acquitté au titre de la mise en demeure, à savoir 209.800 euros,

En tout état de cause,

- ordonner la capitalisation des intérêts,

- condamner l'URSSAF au paiement de la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de l'instance.

Au soutien de ses demandes, la société [2] fait valoir que :

- en la redressant sur la totalité de la réduction Fillon dont elle a bénéficié en 2012, 2013 et 2014, sans spécifier le montant de redressement lié aux erreurs identifiées l'URSSAF n'a pas respecté les dispositions de l'article R 243-9 du code de la sécurité sociale, ce qui entraine la nullité des opérations de contrôle et par suite de la mise en demeure,

- subsidiairement, le montant du redressement devra être calculé en fonction des seules erreurs de paramétrage identifiées par l'URSSAF lors du contrôle et se limiter à la somme de 11.620,92 euros pour les années 2012, 2013 et 2014,

- s'agissant de la neutralisation de la rémunération des temps de pause, si la Commission de Recours Amiable a accepté le principe du crédit, elle a persisté à refuser la demande de chiffrage et le tribunal aurait dû statuer sur ce point,

- sur le fond, conformément à la convention collective, elle rémunère les temps de pause de ses ouvriers inclus dans le temps de travail effectif, et la Cour de cassation par arrêt du 31 mars 2016 concernant son établissement de [Localité 3] a jugé que les temps de pause inclus dans le temps de travail effectif pouvaient être neutralisés au dénominateur du coefficient servant au calcul de la réduction Fillon,

- il en résulte à son profit un crédit de 45.779,71 euros duquel il convient de déduire la somme de 11.620,92 euros correspondant au redressement au titre des erreurs de paramétrage, outre le remboursement de la somme de 209.800 euros qu'elle a acquitté au titre de ce redressement.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues à l'audience.

MOTIFS

* s'agissant de la régularité de la procédure de contrôle et de la mise en demeure

L'article R 243-59 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable à la date du contrôle, tout contrôle effectué en application de l'article L. 243-7 est précédé de l'envoi par l'organisme chargé du recouvrement des cotisations d'un avis adressé à l'employeur ou au travailleur indépendant par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception, sauf dans le cas où le contrôle est effectué pour rechercher des infractions aux interdictions mentionnées à l'article L. 8221-1 du code du travail. Cet avis fait état de l'existence d'un document intitulé " Charte du cotisant contrôlé " présentant au cotisant la procédure de contrôle et les droits dont il dispose pendant son déroulement et à son issue, tels qu'ils sont définis par le présent code. Il précise l'adresse électronique où ce document, dont le modèle est fixé par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale, est consultable, et indique qu'il est adressé au cotisant sur sa demande.

L'employeur ou le travailleur indépendant a le droit pendant le contrôle de se faire assister du conseil de son choix. Il est fait mention de ce droit dans l'avis prévu à l'alinéa précédent.

Les employeurs, personnes privées ou publiques, et les travailleurs indépendants sont tenus de présenter aux agents chargés du contrôle mentionnés à l'article L. 243-7, dénommés inspecteurs du recouvrement, tout document et de permettre l'accès à tout support d'information qui leur sont demandés par ces agents comme nécessaires à l'exercice du contrôle.

Ces agents peuvent interroger les personnes rémunérées notamment pour connaître leurs nom et adresse ainsi que la nature des activités exercées et le montant des rémunérations y afférentes, y compris les avantages en nature.

A l'issue du contrôle, les inspecteurs du recouvrement communiquent à l'employeur ou au travailleur indépendant un document daté et signé par eux mentionnant l'objet du contrôle, les documents consultés, la période vérifiée et la date de la fin du contrôle. Ce document mentionne, s'il y a lieu, les observations faites au cours du contrôle, assorties de l'indication de la nature, du mode de calcul et du montant des redressements et des éventuelles majorations et pénalités définies aux articles L. 243-7-2, L. 243-7-6 et L. 243-7-7 envisagés. En cas de réitération d'une pratique ayant déjà fait l'objet d'une observation ou d'un redressement lors d'un précédent contrôle, il précise les éléments caractérisant le constat d'absence de mise en conformité défini à l'article L. 243-7-6. Le cas échéant, il mentionne les motifs qui conduisent à ne pas retenir la bonne foi de l'employeur ou du travailleur indépendant. Le constat d'absence de mise en conformité et le constat d'absence de bonne foi sont contresignés par le directeur de l'organisme chargé du recouvrement. Il indique également au cotisant qu'il dispose d'un délai de trente jours pour répondre par lettre recommandée avec accusé de réception, à ces observations et qu'il a, pour ce faire, la faculté de se faire assister d'un conseil de son choix.

En l'absence de réponse de l'employeur ou du travailleur indépendant dans le délai de trente jours, l'organisme de recouvrement peut engager la mise en recouvrement des cotisations, des majorations et pénalités faisant l'objet du redressement.

Lorsque l'employeur ou le travailleur indépendant a répondu aux observations avant la fin du délai imparti, la mise en recouvrement des cotisations, des majorations et pénalités faisant l'objet du redressement ne peut intervenir avant l'expiration de ce délai et avant qu'il ait été répondu par l'inspecteur du recouvrement aux observations de l'employeur ou du travailleur indépendant.

L'inspecteur du recouvrement transmet à l'organisme chargé de la mise en recouvrement le procès-verbal de contrôle faisant état de ses observations, accompagné, s'il y a lieu, de la réponse de l'intéressé et de son propre courrier en réponse.

L'absence d'observations vaut accord tacite concernant les pratiques ayant donné lieu à vérification, dès lors que l'organisme de recouvrement a eu les moyens de se prononcer en toute connaissance de cause. Le redressement ne peut porter sur des éléments qui, ayant fait l'objet d'un précédent contrôle dans la même entreprise ou le même établissement, n'ont pas donné lieu à observations de la part de cet organisme.

En l'espèce, la SNC [2] reproche à l'URSSAF d'avoir procédé à un redressement au titre de la réduction Fillon sans préciser les modalités de calcul du redressement, et sans chiffrer les erreurs qu'elle a identifiées.

Ceci étant, la lettre d'observations du 19 octobre 2015 reprend précisément sur ce point de redressement la législation applicable, les constatations de l'inspecteur du recouvrement et les bases de redressement établissement par établissement et année par année.

La SNC [2] a pu faire valoir ses observations, de manière détaillée, par courrier du 19 novembre 2015, ce qui suppose qu'elle avait été au préalable en capacité de comprendre les motifs et fondements du redressement qu'elle contestait.

L'URSSAF a ensuite répondu à ces observations par courrier du 26 novembre 2015, en apportant des explications complémentaires à la lettre d'observations.

Enfin, la mise en demeure qui vise la lettre d'observations est régulière en ce qu'elle se réfère à la lettre d'observations, vise les périodes concernées par le redressement et le montant des cotisations redressées par année.

Elle permet à la SNC [2] de connaître, la cause la nature et l'étendue de son obligation, le fait que le montant des cotisations appelées, 539.998 euros sur la lettre d'observations et 540.000 euros sur la mise en demeure diffère de 2 euros entre les deux documents, soit 0,0037% du montant, est sans incidence sur la régularité de la mise en demeure et la parfaite information de la société sur ses obligations.

En conséquence, c'est à juste titre que les premiers juges ont débouté la SNC [2] de sa demande d'annulation de la procédure de contrôle et de la mise en demeure subséquente.

* sur le fond

- chef de redressement n°14 : annualisation de la réduction Fillon : détermination du coefficient : 539.636 euros,

Sur ce point, l'URSSAF indique qu'elle accepte 'à titre exceptionnel et non générateur de droit le recalcul effectué par la société' soit une limitation du montant du redressement des cotisations à la somme de 11.620 euros correspondant à 2.083 euros pour l'année 2012, - 6.853 euros pour l'année 2013 et 16.390 euros pour l'année 2014, outre les majorations de retard sur ce montant.

La décision déférée ayant statué en ce sens sera confirmée.

- chef de redressement n° 15 : réduction Fillon : rémunérations brutes - heures de pause: néant.

La réduction de cotisations sur les bas salaires , dite réduction 'Fillon' a été instituée par la loi no 2003-47 du 17 janvier 2003, elle a pour objet d'exonérer ou de réduire le montant des cotisations dues afférentes aux rémunérations allant du SMIC à 1.6 fois ce montant.

Les dispositions de l'article L. 241-13, qui reprennent au sein du code de la sécurité sociale, ce dispositif de réduction, ont été modifiées à plusieurs reprises. Il reste constant que cette réduction résulte d'un rapport entre le montant du SMIC et les rémunérations ( au sens générique) auquel est appliqué un coefficient, selon une formule définie par décret, qui se trouve codifiée à l'article D 241-7 du code de la sécurité sociale, modifié au moins annuellement.

Il résulte de l'application combinée des articles L 3121-1 et L 3121-2 du code du travail que les temps de pauses ne sont considérés comme du temps de travail effectif que si ils en réunissent les critères, ce qui suppose que le salarié se trouve à la disposition de l'employeur sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles. A défaut ces temps de pauses ne sont pas considérés comme du temps de travail effectif. Ils peuvent cependant en application des dispositions d'une convention ou d'un accord collectif ou encore des stipulations du contrat de travail faire l'objet d'une rémunération.

Par suite, il résulte des articles L. 241-13 et D. 241-7 du code de la sécurité sociale, dans leurs rédactions successives applicables aux dates d'exigibilité des cotisations litigieuses, que la rémunération des temps de pause est exclue de la rémunération mensuelle du salarié prise en compte pour le calcul du coefficient de réduction des cotisations sur les bas salaires, peu important qu'elle corresponde à la rémunération d'un temps effectif de travail.

En l'espèce, il est constant que l'entreprise a procédé à la rémunération des temps de pause de ses salariés travaillant en horaire continue selon la convention collective applicable, soit la convention collective nationale d'industries charcutiers, les assimilant à du travail effectif.

En effet l'annexe II, 'ouvriers' de la convention collective nationale de l'industrie de la salaison, charcuterie en gros et conserves de viandes du 29 mars 1972 prévoit que lorsque, dans une entreprise, il existe du personnel ayant un horaire ininterrompu de huit heures au moins, ce personnel a droit à un arrêt payé de trente minutes pour le casse-croûte, arrêt qui se situera à l'intérieur de l'horaire ci-dessus, suivant les nécessités du service. L'arrêt payé étant de 20 minutes pour un horaire supérieur à sept heures mais inférieur à huit heures.

Si l'URSSAF ne remet pas en cause cette décision de la Cour de cassation, elle reproche à la SNC [2] de ne pas lui donner les moyens de vérifier qu'elle a bien appliqué les temps de pause spécifiques à chaque catégorie de salarié, en fonction de leur temps de pause tel que résultant de la convention collective

Ceci étant, il ressort des écritures et des pièces produites par la société [2] qu'elle a procédé pour le calcul de la réduction Fillon à un décompte des temps de pause quotidiens sur une base de 20 minutes par salarié indépendamment du fait qu'ils puissent prétendre, conformément à la convention collective et à l'accord d'entreprise sur le temps de travail, à des temps de pause plus importants.

Il s'en déduit que contrairement à ce que soutient l'URSSAF, la rémunération des temps de pause devait être exclue des sommes prises en compte pour le calcul de la réduction des

cotisations.

Par suite, il en résulte un crédit de cotisations au profit de la SNC [2] d'un montant de 45.779,71 euros, non contesté à titre subsidiaire par l'URSSAF.

La décision déférée sera infirmée en ce sens.

- s'agissant de la demande de remboursement de la somme de 209.800 euros

Force est de constater que la SNC [2] ne justifie pas du paiement de cette somme à l'URSSAF Rhône Alpes laquelle avait initialement fait inscrire pour garantir le paiement de cette somme un privilège qui a fait l'objet d'une radiation selon certificat du tribunal de commerce de Vienne en date du 21 septembre 2017.

En conséquence, c'est à juste titre que les premiers juges ont débouté la société [2] de cette demande de remboursement.

Il se déduit de l'ensemble de ces éléments que:

* la SNC [2] est redevable envers l'URSSAF des sommes de :

- 11.620 euros au titre de la détermination du coefficient pour l'annualisation de la réduction Fillon

- 362 euros au titre de l'avantage en nature voiture,

* l'URSSAF est redevable envers la SNC [2] de la somme de :

- 45.779,71 euros au titre de la réduction Fillon : rémunérations brutes - heures de pause,

soit un solde en faveur de la SNC [2] de 33.798 euros.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, en matière de sécurité sociale, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;

Confirme le jugement rendu le 2 juillet 2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale du Gard sauf en ce qu'il a :

- constaté que le recours de la SNC [2] au titre du point n°15 de la lettre d'observations est devenu sans objet suite à la décision explicite de la Commission de Recours Amiable du 24 février 2017,

- constaté que la demande de la SNC [2] sur la capitalisation des intérêts est devenue sans objet,

Et statuant à nouveau sur les éléments infirmés,

Juge que le chef de redressement n° 15 : réduction Fillon : rémunérations brutes - heures de pause génère un crédit au profit de la SNC [2] de 45.779,71 euros,

Condamne l'URSSAF Rhône Alpes à verser à la SNC [2] la somme de 33798 euros,

Condamne l'URSSAF Rhône Alpes à verser à la SNC [2] la somme de 1.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette les demandes plus amples ou contraires,

Condamne l'URSSAF Rhône Alpes aux dépens de la procédure d'appel.

Arrêt signé par le président et par la greffiere.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 5ème chambre sociale ta
Numéro d'arrêt : 20/01626
Date de la décision : 07/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-07;20.01626 ?
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