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01/02/2023 | FRANCE | N°22/03586

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 4ème chambre commerciale, 01 février 2023, 22/03586


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS















ARRÊT N°



N° RG 22/03586 - N° Portalis DBVH-V-B7G-ITVC



CC



TRIBUNAL DE COMMERCE D'AVIGNON

21 octobre 2022

RG:2020002657



Société REALTYSSIMMO



C/



S.A.R.L. ZERUS

S.E.L.A.R.L. BALINCOURT



S.A.S. LPA GESTION



























Grosse délivrée

le



à















COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

4ème chambre commerciale





ARRÊT DU 01 FEVRIER 2023





Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce d'AVIGNON en date du 21 Octobre 2022, N°2020002657



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Mme Christine ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 22/03586 - N° Portalis DBVH-V-B7G-ITVC

CC

TRIBUNAL DE COMMERCE D'AVIGNON

21 octobre 2022

RG:2020002657

Société REALTYSSIMMO

C/

S.A.R.L. ZERUS

S.E.L.A.R.L. BALINCOURT

S.A.S. LPA GESTION

Grosse délivrée

le

à

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

4ème chambre commerciale

ARRÊT DU 01 FEVRIER 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce d'AVIGNON en date du 21 Octobre 2022, N°2020002657

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre,

Madame Claire OUGIER, Conseillère,

Madame Agnès VAREILLES, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Isabelle DELOR, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

MINISTERE PUBLIC :

Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée.

DÉBATS :

A l'audience publique du 19 Janvier 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 01 Février 2023.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTE :

Société REALTYSSIMMO SASU au capital social de 1.000€, immatriculée au RCS de Fréjus sous le numéro 828 478 677, prise en la personne de son Président en exercice domicilié es-qualités au siège social sis,

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représentée par Me Vanessa CREMADES de la SELARL CREMADES, Plaidant, avocat au barreau D'AVIGNON

Représentée par Me Georges POMIES RICHAUD, Postulant, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉES :

S.A.R.L. ZERUS, prise en la personne de ses gérants en exercice,

[Adresse 5]

1717 LUXEMBOURG

Représentée par Me Michel DISDET de la SCP DISDET ET ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau D'AVIGNON

Représentée par Me Ardoine CLAUZEL, Plaidant, avocat au barreau D'AVIGNON

S.E.L.A.R.L. BALINCOURT, représentée par Maitre Frédéric TORELLI, ayant son siège social sis [Adresse 2], immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Nîmes, sous le numéro 824 797 286, prise en son étude d'AVIGNON - [Adresse 4], pris en sa qualité de mandataire liquidateur de la société HOTEL ARENE, désigné en cette qualité par jugement du Tribunal de commerce d'AVIGNON du 11 décembre 2019.

[Adresse 4]

[Adresse 8]

[Localité 7]

Représentée par Me Quentin FOUREL-GASSER de la SCP GASSER-PUECH-BARTHOUIL-BAUMHAUER, Plaidant/Postulant, avocat au barreau D'AVIGNON

S.A.S. LPA GESTION, immatriculée au RCS de NIMES sous le N° 453005183, prise en la personne de son Président en exerce, et venant aux droits de la SARL ZERUS, ayant son siège social sise [Adresse 5], prise en la personne de ses gérants en exercice, suite à la fusion absorption de cette dernière par LPA GESTION.

INTERVENANTE VOLONTAIRE

[Adresse 9]

[Localité 3]

Représentée par Me Michel DISDET de la SCP DISDET ET ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau D'AVIGNON

Représentée par Me Ardoine CLAUZEL, Plaidant, avocat au barreau D'AVIGNON

Statuant en matière d'assignation à jour fixe

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre, le 01 Février 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour

EXPOSÉ

Vu l'appel interjeté le 9 novembre 2022 par la société Realtyssimmo SASU à l'encontre du jugement prononcé le 21 octobre 2022 par le tribunal de commerce d'Avignon dans l'instance n°2020002657.

Vu l'ordonnance du 10 décembre 2022 de la déléguée du premier président de la cour d'appel de Nîmes, autorisant la société Realtyssimmo à assigner à jour fixe la société Zerus et la SELARL Étude Balincourt à comparaître à l'audience du jeudi 19 janvier 2023 devant la 4ème chambre commerciale.

Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 12 janvier 2023 par l'appelante et le bordereau de pièces qui y est annexé.

Vu les dernières conclusions en intervention volontaire remises par la voie électronique le 6 janvier 2023 par la SAS LPA Gestion, venant aux droits de la SARL Zerus et le bordereau de pièces qui y est annexée,

Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 16 janvier 2023 par la SELARL Etude Balincourt, intimée, et le bordereau de pièces qui y est annexé.

Vu la communication de la procédure au Ministère Public qui, par conclusions notifiées aux parties le 9 décembre 2022, a indiqué qu'il « s'en rapporte à l'appréciation de la Cour ».

* * *

Par acte sous signature privée du 13 décembre 2018, la Compagnie du Trèfle, SAS en cours d'immatriculation représentée par Monsieur [S] [T], agissant en qualité de président, a conclu avec la société Hôtel Arene, et pour le compte de cette dernière, un mandat de gestion et de direction de son établissement situé à [Adresse 10]. En contrepartie de ses engagements, la société gestionnaire perçoit, au titre de l'exploitation des honoraires fixés par la convention.

La société gestionnaire n'ayant jamais été immatriculée, la société Realtyssimmo, spécialisée en conseil et gestion d'hôtel et présidée par Monsieur [S] [I], s'est substituée à la société La Compagnie du Trèfle et a facturé les prestations effectuées par cette dernière à la société Hôtel Arene, puis à la société Holding Zerus.

Par jugement du 16 octobre 2019, une procédure de redressement judiciaire a été prononcée à l'encontre de la société Hôtel Arene puis a été convertie en liquidation judiciaire par un jugement du 11 décembre 2019. La SELARL Balincourt, représentée par Maitre Frédéric Torelli, a été désignée en qualité de mandataire et de liquidateur judiciaires.

Par exploit du 10 février 2020, la société Realtyssimmo a fait assigner la SELARL Etude Balincourt, prise en la personne de Maitre Frédéric Torelli, es qualités, et, par attestation de remise d'acte du 18 février 2020, la société luxembourgeoise Zerus, devant le tribunal de commerce d'Avignon en paiement de diverses factures.

Par jugement du 21 octobre 2022, le tribunal de commerce d'Avignon s'est déclaré incompétent pour juger du présent litige, a invité les parties à mieux se pourvoir et a :

-Condamné la société Realtyssimmo à payer à la SELARL Etude Balincourt, prise en la personne de Me Frédéric Torelli, es qualités, la somme de 800 euros, à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

-Laissé à la société Realtyssimmo la charge des dépens, dont ceux de greffe, liquidés, s'agissant du seul coût du présent jugement, à la somme de 125,26 euros TTC.

La société Realtyssimmo SASU a relevé appel de ce jugement aux fins de le voir réformer en toutes ses dispositions.

***

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique, l'appelante demande à la cour, au visa de l'article L. 721-3 du code de commerce, des articles 1142 à 1149 du code de procédure civile, des articles 42 à 48 du code de procédure civile, de l'article 1199 du code civil, de l'article 568 du code de procédure civile, des pièces versées au débat, de l'intervention de la SAS LPA Gestion venant aux droits de la SARL Zerus, de :

-Débouter la SAS LPA Gestion venant aux droits de la SARL Zérus de ses demandes, fins et conclusions ;

-Dire et juger que la société Realtyssimmo est recevable et bien fondée en son appel ;

-Réformer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de commerce d'Avignon le 21 octobre 2022 (RG n°2020002657) ;

Et statuant à nouveau,

-Dire et juger que le tribunal de commerce d'Avignon est compétent pour statuer sur le litige qui lui était soumis ;

-Renvoyer les parties devant le tribunal de commerce d'Avignon ;

Subsidiairement, si la cour de céans estime devoir évoquer le fond du litige ;

-Constater que la créance de la société Realtyssimmo à l'encontre de la SAS LPA Gestion venant aux droits de la SARL Zerus est certaine, liquide et exigible :

-Condamner solidairement la SAS LPA Gestion venant aux droits de la SARL Zerus à verser à la société Realtyssimmo les sommes suivantes, telles que fixées au passif de la procédure collective de la société Hotel Arene :

Facture n°2019-0901 en date du 1er septembre 2019 d'un montant de 8 849 euros ;

Facture n°2019-1001 en date du 1er octobre 2019 d'un montant de 1 665,15 euros ;

Facture n°2019-1101 en date du 1er novembre 2019 d'un montant de 6 000 euros.

-Dire et juger que ces sommes porteront intérêt au taux légal à compter de la date de l'assignation introductive d'instance ;

-Débouter la SAS LPA Gestion venant aux droits de la SARL Zerus de sa demande indemnitaire ;

En tout état de cause,

-Décharger la SAS LPA Gestion venant aux droits de la SARL Zerus de toute condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

-Condamner la SAS LPA Gestion venant aux droits de la SARL Zerus à verser à la société Realtyssimmo la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, l'appelante fait valoir que :

Sur la compétence du tribunal de commerce d'Avignon,

-les parties commerçantes qui décident de soumettre leur éventuel litige à une convention d'arbitrage doivent le stipuler par écrit au regard de l'article 1443 du code de procédure civile ; pour se déclarer incompétent, le tribunal de commerce d'Avignon s'est fondée sur la clause compromissoire tirée de l'article 17 du mandat de gestion ; or, aucun document écrit contenant une telle clause n'a été régularisée entre les parties puisque seule la société Hôtel Arene est signataire du mandat de gestion, la SAS Compagnie du Trèfle n'ayant jamais été immatriculée ;

-la société Zerus ne démontre pas qu'une clause compromissoire constatée par écrit a été stipulée avec la société Realtyssimmo ;

-la société Zerus a reconnu expressément par lettre recommandée avec accusé de réception du 13 novembre 2019 ne pas être partie au contrat litigieux ; dès lors la clause compromissoire ne peut lui bénéficier en raison de l'effet relatif des contrats ;

-la clause compromissoire n'étant pas applicable, le tribunal de commerce d'Avignon est compétent ;

-il n'est pas contestée que la créance de la société Realtyssimmo à l'encontre de la société Hôtel Arene est née antérieurement à l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire ; la première ne pouvait donc valablement assigner la seconde devant le tribunal arbitral et la société Zerus ne pouvait soutenir que l'inopposabilité de la clause litigieuse à cette dernière reviendrait à scinder le même litige entre deux juridictions ;

-la clause compromissoire ne détermine pas précisément l'objet du litige puisqu'elle vise « tous les litiges » sans préciser expressément les problématiques relatives à l'exécution ou l'inexécution du contrat ; la clause doit donc être réputée non écrite ;

Subsidiairement,

-si la cour d'appel évoque le fond du litige, la société Realtyssimmo sera privée du double degré de juridiction ;

-la société la Compagnie du Trèfle n'ayant jamais été immatriculée et n'ayant pas la personnalité juridique, elle ne pouvait facturer une quelconque prestation ; la société Realtyssimmo était donc bien fondée à facturer les sommes revenant à la première en vertu du mandat de gestion puisqu'elle a été substituée à la société mandatée ;

-par courriel du 24 juillet 2019, la société Zerus a accepté de se voir facturer les prestations dues par la société Hôtel Arene ;

-en matière commerciale, il existe une présomption générale de solidarité ;

-elle verse au débat l'avis d'admission de sa créance au passif de la procédure collective de la société Hotel Arene, pour un montant de 16 514,15 euros, créance n'ayant fait l'objet d'aucune contestation par la société placée en redressement ;

-la responsabilité délictuelle impose de rapporter la preuve d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité ; or, la société Zerus ne démontre pas la réalité des prétendus manquements contractuels commis par la société Realtyssimmo ou de son préjudice ;

-elle était tenue à une obligation de moyens et non à une obligation de résultat dans l'exécution de ses obligations contractuelles ;

-elle avait intérêt à faire prospérer l'établissement puisqu'elle était rémunérée pour l'essentiel sur la base des chiffres d'affaires ;

-il n'est pas établi qu'elle a manqué à son obligation de moyens, Monsieur [T] ayant tout mis en 'uvre pour exécuter au mieux son mandat ;

-la société Zerus ne démontre pas son préjudice ; elle a simplement choisi d'investir au sein d'une opération financière non rentable ;

-la société Zerus ne démontre aucun lien causal entre les prétendues fautes commises par la société Realtyssimmo et son prétendu préjudice ;

-la société Hôtel Arene n'est jamais venue lui reprocher des manquements contractuels.

***

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique, la société LPA Gestion, venant aux droits de la SARL Zerus, intimée, demande à la cour de :

-Déclarer recevable et bien fondée l'intervention volontaire de la SAS LA Gestion ;

Vu l'article 1148 du code de procédure civile,

Vu la clause compromissoire figurant à l'article 17 du mandat de gestion,

-Confirmer en tous points le jugement entrepris ;

En conséquence,

-Débouter l'appelante de toutes ses prétentions comme irrecevables et mal fondés ;

Subsidiairement,

Vu les dispositions de l'article 568 du code de procédure civile,

Évoquant le fond du litige,

Vu l'article 1199 du code civil, l'article L. 621-22 du code de commerce, les articles 1310 et 1353 du code civil,

-Débouter l'appelante de l'intégralité de ses prétentions à l'encontre de la SARL Zerus, et de LPA Gestion venant au droit de cette dernière, comme irrecevables et mal fondées ;

Vu les articles 1240 et suivants du code civil,

-Constater que les fautes et inexécutions causées par la SASU Realtyssimmo dans le cadre du contrat conclu entre la Cie du Trèfle à laquelle elle s'est substituée et la société Hotel Arene ont causé à l'intimée un important préjudice qu'elle se doit de réparer ;

En conséquence,

-Condamner la SASU Realtyssimmo au paiement de la somme de 600 000 euros à la SAS LPA Gestion venant aux droits de la SARL Zerus, à titre de dommages et intérêts, en réparation du préjudice par elle subi ;

En tout état de cause, la condamner au paiement de la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens.

Au soutien de ses prétentions, l'intimée fait valoir que :

Sur la clause compromissoire,

-dans la mesure où la société Realtyssimo demandait au tribunal de commerce la condamnation solidaire des sociétés Hôtel d'Arene et de Zerus à payer les factures, et ce sur le fondement du mandat de gestion contenant une clause compromissoire, elle ne saurait échapper à cette clause et devait saisir un tribunal arbitral ;

-l'existence d'une clause compromissoire conduit à une définition très générale de l'objet du litige aux termes de l'article 1142 alinéa 2 du code de procédure civile et oblige à soumettre à l'arbitrage tous litiges en lien avec le mandat de gestion ;

-la clause compromissoire est écrite puisqu'elle est rédigée dans le mandat de gestion et une clause contenue en dehors du contrat signé par les parties peut les engager ;

Subsidiairement,

-elle n'est pas redevable des factures de septembre à novembre 2019, celles-ci ayant été émises par la société Realtyssimmo au titre du mandat de gestion conclu avec la société Hôtel Arene ;

-la société Realtyssimmo ne prouve pas que la société Zerus est son obligée ;

-elle n'est pas partie au contrat conclu entre la société Compagnie du Trèfle et la société Hôtel Arene et ne saurait donc être tenue d'exécuter ce contrat ;

-aucun contrat n'a été conclu par elle avec la société Realtyssimmo ;

-c'est lorsque la société Realtyssimmo a compris que Monsieur [H] entendait procéder au dépôt de bilan de la société Hôtel Arene qu'elle a établi au nom de la société Zerus les factures des mois de septembre et octobre 2019 initialement libellées au nom de la société Hôtel Arene ; or, la SARL Zerus n'a jamais accepté que ces prestations lui soient facturées ;

-elle dispose de plusieurs gérants et en cas de pluralité de gérants, tous les engagements de la société doivent être validés par eux ; or, le paiement par elle des factures n'a jamais été validé par l'un des gérants ;

-le mandat de gestion n'a pas été correctement réalisé par Monsieur [T] ;

-aucune disposition conventionnelle ne prévoit de solidarité entre elle et la société Hôtel Arene, la solidarité ne se présumant pas ;

-elle ignore si la société Realtyssimmo s'est soumise ou non à la procédure de déclaration de créances.

Sur l'action en responsabilité délictuelle,

-la société Realtyssimmo a mal exécuté le mandat de gestion, conduisant la société Hôtel Arene au dépôt de bilan et ayant causé à la société Zerus, tiers à ce contrat mais propriétaire de 99% des parts de la société Hôtel Arene, un important préjudice ;

-le tiers à un contrat peut engager une action en réparation sur le fondement délictuel lorsqu'une inexécution contractuelle lui a causé un dommage ;

-la SAS Hôtel Arene a signé avec Monsieur [T] un contrat de management de transition pour la période du 1er juillet 2018 au 31 décembre 2018 ; lorsque les parties se sont rencontrées, le gestionnaire a présenté à Monsieur [H], président de la société Hôtel Arène, un prévisionnel donnant un chiffre d'affaires de 1 510 377 euros et un résultat net avant amortissement de 47 818 euros :

-la gestion défaillante par la société Realtyssimmo a amené des résultats en dessous ceux prévus sur la base desquels la société Hôtel Arene s'était engagée, au vu dudit prévisionnel ;

-la société Realtyssimmo a manqué à ses obligations contractuelles puisqu'elle n'est pas parvenue à s'en tenir au prévisionnel qu'elle avait établi soit par négligence ou incompétence, soit sciemment en trompant la société Hôtel Arene par l'émission d'un prévision irréaliste en toute connaissance de cause eu égard à l'audit et au premier mandat de gestion qu'elle avait réalisé ;

-il résulte des témoignages de deux employées que le non-respect du prévisionnel est dû à la mauvaise gestion de Monsieur [T] qui cherchait à satisfaire son propre intérêt ;

-Monsieur [T] a démissionné sans préavis, ce que le mandat de gestion ne permettait pas, lorsqu'il a constaté que la société Hôtel Arene n'avait d'autre choix que de déposer le bilan ;

-cette démission a entraîné la rupture du mandat de gestion, elle-même directement à l'origine du dépôt de bilan puis de la liquidation judiciaire de la société Hôtel Arene ; la société Realtyssimmo est donc lourdement fautive puisque cela constitue une violation des obligations du gestionnaire envers son mandant, la rupture s'étant opérée sans préavis et en dehors des périodes contractuellement prévues ;

-pour soutenir l'activité de la SARL Hôtel Arene, sa filiale, la société Zerus, a dû effectuer des avances de trésorerie à fonds perdus ; la LPA Gestion, filiale de la société Zerus a effectué des avances de trésorerie au profit d'Hôtel Arene, qui ne lui seront jamais remboursées, à hauteur de 260 000 euros environ ;

-elle a donc subi un préjudice direct, devant provisionner la dépréciation des titres de ses filiales ;

-elle a fait des avances sur les factures de la société Realtyssimmo, dont le remboursement a été demandé, sans succès et ce, à hauteur de 34 120,15 euros ;

-elle a perdu l'investissement qu'elle avait effectué en acquérant les parties de la société Hôtel Arene et ce, pour un montant de 564 671 euros ;

-elle a acquis la SCI Casa Mia, propriétaire des murs, pour 930 000 euros mais elle n'aura d'autre choix que de vendre à perte l'immeuble désormais inexploité.

***

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique, la SELARL Balincourt, intimée, demande à la cour de :

Sur la compétence,

-Donner acte à l'étude Balincourt, es qualités, qu'elle s'en rapporte sur la question de la compétence ;

En cas d'infirmation du jugement sur la question de la compétence,

A titre principal,

Vu l'article 568 du code de procédure civile,

-Débouter les parties de leur demande d'évocation et renvoyer le dossier devant le tribunal de commerce d'Avignon pour qu'il statue au fond ;

A titre subsidiaire,

Vu les articles L 622-19 et L 622-24 du code de commerce,

-Déclarer irrecevables les demandes de la société Realtyssimo dirigées contre la concluante ;

-L'en débouter ;

A titre infiniment subsidiaire,

Vu l'article L 210-6 du Code de Commerce,

Vu l'article 1199 du Code Civil,

-Débouter la société Realtyssimo de l'intégralité de ses demandes ;

En tout état de cause,

-Condamner tout succombant aux dépens de première instance et d'appel ainsi qu'au paiement de la somme de 2 000 euros au profit de Maître Torelli, es qualités.

Au soutien de ses prétentions, l'intimée fait valoir que :

Sur la compétence matérielle,

-la société Realtyssimo ne peut déterminer comme elle l'entend si le mandat lui bénéficie ou non en fonction des situations ;

A titre principal,

-elle s'oppose à la demande d'évocation du fait de la complexité des rapports juridiques allégués par les parties qui impliquent une société jamais immatriculée, une autre prétendant venir aux droits de la première et une société porteuse de parts prétendument absorbée récemment ; en outre, les sommes en jeu sont importantes, les sociétés Zerus et LPA formant des demandes à hauteur de plusieurs centaines de milliers d'euros ;

A titre subsidiaire,

-les factures dont il est réclamé le paiement ont été établies pour une période antérieure au jugement d'ouverture et elles auraient du être déclarées entre les mains du mandataire puis du liquidateur ; or, aucune déclaration de créance n'est produite aux débats par la société Realtyssimo ;

-la société Realtyssimo n'a pas signé le mandat pour le compte de la société Compagnie du Trèfle en cours de formation ;

-le signataire du mandat étant Monsieur [T], il est seul bien fondé à revendiquer le bénéfice des engagements de la société Compagnie du Trèfle ; or, il ressort des pièces produites par la société Realtyssimo qu'il n'est pas le représentant légal de cette dernière ;

-la société Realtyssimo ne démontre pas que la société Hôtel Arene lui aurait réglé la moindre facture puisqu'il apparaît que les factures réglées en cours d'année 2019 l'ont été par la société Zerus ;

***

Pour un plus ample exposé il convient de se référer à la décision déférée et aux conclusions visées supra.

DISCUSSION

Sur l'intervention volontaire :

La société LPA Gestion intervient volontairement car elle vient aux droits de la société Zerus, par suite de la fusion-absorption de cette dernière au sein de LPA Gestion.

Sur la compétence :

L'article 1442 alinéa 2 du code de procédure civile dispose : « la clause compromissoire est la convention par laquelle les parties à un ou plusieurs contrats s'engagent à soumettre à l'arbitrage les litiges qui pourraient naître relativement à ce ou ces contrats ».

L'article 1443 du code de procédure civile précise qu'à peine de nullité, la convention d'arbitrage est écrite et qu'elle peut résulter d'un échange d'écrits ou d'un document auquel il est fait référence dans la convention principale.

L'article 1447 du même code dit que la convention d'arbitrage est indépendante du contrat auquel elle se rapporte et qu'elle n'est pas affectée par l'inefficacité de celui-ci.

Enfin l'article 1448 du code de procédure civile édicte le principe compétence-compétence en disposant : « lorsqu'un litige relevant d'une convention d'arbitrage est porté devant une juridiction de l'Etat, celle-ci se déclare incompétente, sauf si le tribunal arbitral n'est pas encore saisi et si la convention d'arbitrage est manifestement nulle ou manifestement inapplicable ». Il est complété par l'article 1465 du même code qui donne compétence au seul tribunal arbitral pour statuer sur les contestations relatives à son pouvoir juridictionnel.

***

En l'espèce, le contrat de mandat de gestion est signé par la compagnie du Trèfle qui n'a jamais été immatriculée. L'article 1 dernier alinéa du mandat stipule que « le propriétaire accepte que le gestionnaire puisse substituer en ces lieux et place et à tout moment dans le mandat de gestion ici octroyé toute personne physique ou morale qui lui conviendrait ».

C'est ainsi que la société Realtyssimo ' qui affirme sans être contredite exploiter la marque La Compagnie du Trèfle déposée par Monsieur [T] ' s'est substitué au gestionnaire initial et a facturé ses prestations de gestionnaire tantôt à l'hôtel Arene, tantôt à la société Zerus.

Bien que la société Zerus soit distincte de la SARL Arene, elle a acquitté des factures du gestionnaire pour un montant de 34 120,15 euros. Elle en demande d'ailleurs le remboursement dans ses prétentions au fond.

L'article 17 du contrat stipule que « tous les litiges auxquels la présente convention pourrait donner lieu, notamment en ce qui concerne sa validité, son interprétation ou sa résolution, seront soumis à un arbitrage ». Ce libellé est conforme aux exigences de l'article 1442 alinéa 2 du code de procédure civile en ce qu'il vise les litiges concernant le contrat de mandat.

Par application de l'article 1448 du code de procédure civile, la juridiction de l'Etat doit se déclarer incompétente à moins que la convention d'arbitrage ne soit manifestement nulle ou manifestement inapplicable. En effet, aucun tribunal arbitral n'est encore saisi.

Or, n'est pas nulle une clause d'arbitrage insérée dans un contrat où l'une des parties a été substituée pour son exécution (Cass. 1ère civ. 12-11-2009 n°09-10.575) ou dont une partie, non signataire de ce contrat l'a exécuté en fait ([Localité 11], 26-02-2013 RG 12/12593, rev. de l'arbit. 2013-527).

Le fait même d'avoir facturé des prestations de gestionnaire en se référant expressément à la convention de mandat démontre que la société Realtyssimo disposait du contrat, dans lequel est stipulé par écrit la clause compromissoire.

Dès lors, l'interprétation du rôle des différents intervenants dans la gestion de l'hôtel Arene relève de la compétence de la juridiction arbitrale.

Il est également inopérant d'arguer l'application de l'article 1445 du code de procédure civile qui concerne le compromis alors que le contrat de mandat stipule une clause compromissoire pour définir le droit d'action d'un éventuel litige.

Il s'ensuit que l'appelante ne peut se prévaloir d'aucune nullité manifeste ou inapplicabilité manifeste de la convention d'arbitrage et le jugement déféré qui a retenu l'incompétence de la juridiction étatique sera confirmé en toutes ses dispositions.

Sur les frais d'instance :

La société Realtyssimo, qui succombe, devra supporter les dépens de l'instance et payer à la société LPA Gestion une somme équitablement arbitrée à 2 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne la société Realtyssimo à payer à la société LPA Gestion une somme de 2 500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne la société Realtyssimo aux dépens d'appel.

Arrêt signé par la présidente et par la greffiere.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 4ème chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 22/03586
Date de la décision : 01/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-01;22.03586 ?
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