ARRÊT N°
N° RG 20/01500 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HXM3
EM/DO
CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE CPH DE NIMES
02 mars 2020
RG :19/00322
[R]
C/
Société LA MIE TEMPS GOURMANDE
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
5ème chambre sociale PH
ARRÊT DU 17 JANVIER 2023
APPELANTE :
Madame [F] [R]
née le 09 Février 1978 à [Localité 3]
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 4]
Représentée par Me Alexandra MERLE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de MONTPELLIER
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro du 18/05/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Nîmes)
INTIMÉE :
Société LA MIE TEMPS GOURMANDE
[Adresse 1]
[Localité 2]
assignée par procès verbal de recherches infructueuses
ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 25 Octobre 2022
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère
GREFFIER :
Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l'audience publique du 08 Novembre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 17 Janvier 2023.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
ARRÊT :
Arrêt rendu par défaut, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 17 Janvier 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour
FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS
Mme [F] [R] a été engagée à compter du 25 avril 2018 suivant contrat à durée déterminée saisonnier, dont le terme était fixé au 24 octobre 2018, en qualité de serveuse par la Sasu la Mie du temps gourmande.
Par courrier du 09 juin 2018, Mme [F] [R] a réclamé à la Sasu la Mie du temps gourmande de lui régler les heures supplémentaires qu'elle avait effectuées.
Du 11 juin 2018 au 24 octobre 2018, Mme [F] [R] a été en arrêt maladie.
Par requête du 06 juin 2019, Mme [F] [R] a saisi le conseil de prud'hommes de Nîmes aux fins qu'il soit dit que la Sasu la Mie du temps gourmande a manqué à son obligation de loyauté et de sécurité, que la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et que la société soit condamnée à lui payer diverses sommes indemnitaires et à titre de rappels de salaire.
Par jugement, en date du 02 mars 2020, le conseil de prud'hommes de Nîmes a :
- n'a pas reconnu qu'il ait eu un début du contrat de travail au 1er mars 2018, ni durant la période du 1er mars 2018 au 24 avril 2018,
- dit que la SASU la Mie du temps gourmande n'a pas manqué à son obligation de loyauté et de sécurité,
- constaté que la rupture du contrat de travail n'est pas un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- débouté Mme [F] [R] de sa demande de requalification de contrat à durée déterminée saisonnier en contrat à durée indéterminée,
- débouté Mme [F] [R] de toutes ses demandes liées et celle relative à la requalification du contrat de travail,
- dit que les 910,85 euros bruts à titre de rappel d'heures supplémentaires pour le mois de mai 2018 et les 91,08 euros bruts de congés payés y afférents, doivent être versés et qu'il y a lieu de produire un bulletin pour ces sommes,
- débouté Mme [F] [R] de sa demande de remise de documents de fin de contrat,
- débouté Mme [F] [R] de sa demande d'exécution provisoire,
- débouté Mme [F] [R] de sa demande de 1 800 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 puisqu'elle a obtenu l'aide juridictiormelle totale,
- condamné Mme [F] [R] aux dépens.
Par acte du 26 juin 2020, Mme [F] [R] a régulièrement interjeté appel de cette décision.
Par ordonnance en date du 11 août 2022, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 25 octobre 2022 à 16 heures et fixé l'examen de l'affaire à l'audience du 8 novembre 2022 à laquelle elle a été retenue.
Aux termes de ses dernières conclusions, Mme [F] [R] demande à la cour de:
- condamner la SASU la Mie du temps gourmande à payer à Mme [F] [R] les sommes suivantes :
- 2 721, 95 euros bruts à titre de rappels de salaire correspondant à la période du 1er mars 2018 au 24 avril 2018 ainsi que 272, 19 euros bruts au titre des congés payés y afférents,
- 910, 85 euros bruts à titre de rappel d'heures supplémentaires pour le mois de mai 2018 ainsi que 91,08 euros bruts au titre des congés payés y afférents,
- 10 000 euros net de CSG CRDS à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale de la relation de travail et pour violation de l'obligation de sécurité,
- 1 722,93 euros net de CSG CRDS à titre de dommages et intérêts pour son licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 1 722,93 euros bruts à titre d'indemnité de préavis outre la somme de 172, 29 euros bruts à de congés payés sur préavis,
- 10 337,57 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,
- ordonner la remise de documents de fin de contrat et des bulletins de paie rectifiés, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir, la cour se réservant le droit de liquider l'astreinte,
- condamner aux entiers dépens, outre paiement de la somme de 1 800 euros au titre de l'article 37 de la loi du de la loi du 10 juillet 1991.
Mme [F] [R] soutient que :
- elle démontre par la production notamment d'une attestation de la société et des échanges de textos avec son responsable, M. [N] [M], qu'elle a débuté son activité professionnelle avant la signature du contrat de travail, dès le 1er mars 2018,
- elle justifie avoir effectué de nombreuses heures supplémentaires non rémunérées par la production d'un décompte précis et de textos dans lesquels elle réclame à son employeur le paiement de ces heures, qu'en mai 2018 elle a effectué 240,5 heures soit 88,33 heurs supplémentaires, que l'employeur ne lui a réglé que 1a somme de 1700 euros alors qu'il lui devait 2610,85 euros,
- l'employeur a manifestement exécuté le contrat de travail de mauvaise foi, qu'elle a dû faire face à la mise en place abusive de son pouvoir de direction, qu'elle n'est pas vue remettre de contrat de travail avant le 25 avril 2018, elle devait gérer seule l'établissement, M. [N] [M] n'étant pas présent sur son lieu de travail, les missions qui lui étaient confiées dépassaient le cadre de ses fonctions, elle ne bénéficiait que d'un seul jour complet de repos et ses heures supplémentaires n'étaient pas rémunérées, que suite à ses réclamations, il lui a brutalement indiqué qu'il souhaitait mettre un terme à la relation de travail, que le comportement de M. [M] a eu raison de son état de santé, qu'elle a été arrêtée pour trouble anxio-dépressif,
- dès lors que la relation de travail a débuté le 1er mars 2018 avant la signature du contrat à durée déterminée, le contrat doit automatiquement s'analyser en un contrat à durée indéterminée, que l'employeur n'a pas respecté la procédure de licenciement ni fourni de motifs écrits dans la lettre de licenciement, que le licenciement est donc irrégulier en la forme et dépourvu de cause réelle et sérieuse,
- pour fixer les dommages et intérêts auxquels elle a droit, la cour prendra en compte son salaire moyen de référence, 1722,93 euros, ses difficultés à retrouver un emploi stable, sa situation de famille, elle a en charge un enfant de 16 ans, le contexte de la rupture et ses difficultés financières,
- la durée de son préavis est d'un mois,
- l'employeur n'a procédé à aucune déclaration préalable à l'embauche avant le 25 avril 2018, qu'elle est donc en droit de solliciter le paiement par la Sarl la Restauration de l'indemnisation forfaitaire de six mois prévue en cas de travail dissimulé.
La Sasu la Mie du temps gourmande n'a pas constitué avocat et n'a pas conclu. Mme [F] [R] justifie avoir fait signifier à la société la déclaration d'appel et ses conclusions le 06 août 2020 à l'adresse suivante : [Adresse 1], qui correspond à la dernière adresse connue ; l'huissier de justice a dressé un procès-verbal de recherches infructueuses après avoir mentionné les diligences accomplies.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.
MOTIFS
Sur les demandes relatives à l'exécution du contrat de travail :
Sur la demande de rappel de salaires pour la période du 1er mars 2018 au 25 avril 2018 :
Aux termes de l'article 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver, et réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
Le contrat de travail est une convention par laquelle une personne s'engage à travailler pour le compte d'une autre et sous sa subordination moyennant une rémunération.
En l'espèce, Mme [F] [R] soutient que l'existence d'un contrat de travail à compter du 1er mars 2018 ne fait aucun doute et produit aux débats, à l'appui de ses prétentions:
- une attestation de la Sasu la Mie du temps gourmande : ' Sasu la Mie du temps gourmande RCS NIMES 803341999- Le 01 mars 2018 - transfert son siège social au [Adresse 1], l'article 4 des statuts a été modifié; extention de l'objet social à la restauration, l'article 2 des statuts a été modifié ; Mme [F] [R] exercera ses fonctions de serveur au Restaurant le Ranquet',
- des échanges de textos avec M. [N] [M] le responsable de la société :
* 13 mars 2018 '...je suis à [Localité 4] avec les coaching si j'arrive à 14h30 c'est bon pour toi''
* 19 mars 2018 '...j'ai eu ma conseillère pôle emploi ce matin et j'aurais besoin de qq renseignements ...j'ai fait les photocopies de mes documents pour la DDE et je te les done demain..'
* le 25 mars 2018 '...je voulais juste confirmer avec toi que j'avais laisser mon agenda herbalife au Ranquet sur ma tablea l'autre jour...',
* le 30 mars 2018 :'je prends une réservation de 15 personnes le 22 à midi...sinon on travaille un peu', réponse : 'cool bravo les filles je passe vers 18h',
* 31 mars 2018 '...après le service on partira faire un tour encore pour d'autres établissements...' , 'monsieur je fais le prosseco à la coupe à 7 euros c'est bien'...', réponse :'très bien maître d'hôtel- bonne initiative'; Mme [F] [R] : '...nous sommes à 10 couverts à 41 euros de panier moyen...',
* 1er avril 2018 'pouvez-vous acheter aussi du papier toilette et de produit pour nettoyer...', 'j'ai pris une table de 6 aussi', réponse : '..j'espère que vous aurez quelques tables ce soir sinon fermeture à 21h30",
* 08 avril : '11 couverts monsieur',
* 21 avril 'monsieur je ferme à 21h30...zéro ce soir',
* 27 avril 'pouvez-vous prendre une barquette de fraises...', 'le fournisseur de fruits est là',
* 6 mai 'nous avons 12 en réservation', 'on est en rupture de cabillaud pour dimanche',
* 13 mai 'la liste des courses est faite'',
* 11 juin 2018 M. [N] [M] '...je préfère que nous arrêtions ton contrat d'un commun accord car je suis saturé de tout ce qui se passe entre toi et moi. Si tu es d'accord faisons une rupture de contrat à l'amiable et finissons en car je n'aime pas ce qui se passe dans l'établissement. Après ces bouleversements qui ont provoqué chez toi un changement total de comportement depuis le départ de [D] les mensonges pour partir en week-end et autres libertés, je préfère que nous nous quittons en bon terme si tu es d'accord',
* 12 juin 'bonjour, vous allez recevoir mon arrêt de travail avec AR aujourd'hui',
- un courrier de Mme [F] [R] daté du 11 juin 2018 adressé à son employeur : elle réclame ses heures impayées effectuées au mois de mai, indique avoir réalisé 240 heures, qu'il lui a remis un chèque de 1 300 euros et 400 euros en espèces, elle lui réclame la remise d'une fiche de paie et le complément de son salaire manquant, elle indique qu'après le départ de Mme [D] [P] elle était amenée à 'tout faire pour faire fonctionner' son 'restaurant', elle s'est retrouvée seule à faire le service, le ménage et les courses, les préparations des plats, la caisse, l'accueil de la clientèle, et de la prospection marketing dans les chambres d'hôtes alors qu'elle n'était pas censée être dans l'entreprise car il n'y avait aucun contrat signé,
- le contrat de travail signé le 25 avril 2018 à compter de cette date jusqu'au 24 octobre 2018, lequel prévoit une rémunération mensuelle de 1 722,93 euros sur la base de 169 heures mensuelles de travail effectif,
- la déclaration préalable à l'embauche de Mme [F] [R] effectuée le 25 avril 2018.
Les éléments produits par Mme [F] [R] sont suffisants pour établir qu'elle a travaillé sous l'autorité et la responsabilité de M. [N] [M] depuis le 1er mars 2018, et qu'elle a suivi ses directives, soit avant son engagement formalisé par écrit le 25 avril 2018 et que les premiers juges ont manifestement fait une erreur d'interprétation de deux textos envoyés par la salarié les 13 et 19 mars 2018.
Mme [F] [R] est donc en droit de réclamer un rappel de salaire à hauteur de 1507,59 euros pour le mois de mars et de 1 214,36 euros pour la période du 1er au 24 avril 2018, calculé sur la base d'un salaire horaire brut de 9,94 euros, outre la somme de 271,19 euros à titre d'indemnité de congés payés y afférente.
Le jugement entrepris sera donc infirmé en ce sens.
Sur le rappel d'heures supplémentaires pour le mois de mai 2018 :
Selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.
Il résulte de ces dispositions qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures supplémentaires de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précisées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.
En cas de litige relatif à l'existence et au nombre d'heures effectuées, l'employeur doit être mesure de fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié dans la limite de la prescription quinquennale.
En l'espèce, Mme [F] [R] soutient avoir effectué pour le mois de mai 2018 240,5 heures dont 88,33 heures supplémentaires et produit à l'appui de ses prétentions :
- un décompte des heures supplémentaires pour ce mois, sur lequel figurent les heures de début et de fin de journée et un total d'heures de 240,5 heures,
- un texto envoyé par M. [N] [M] à Mme [F] [R] en mai 2018 'dans ton contrat les 169 heures sont assujetties aux taxes et ensuite les heures sup sont rémunérées à 12 euros de l'heure. Ton intérêt est d'effectuer des heures au delà des 169 h. Si je te donne un jour de repos en plus, cela va être compliqué d'arriver aux 240 h...'.
Les éléments produits par Mme [F] [R] sont suffisamment précis pour établir la réalité du nombre d'heures supplémentaires réalisées et non rémunérées.
Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point.
Sur la demande relative à l'exécution déloyale du contrat de travail :
L'article L1222-1 du code du travail dispose le contrat de travail est exécuté de bonne foi.
En l'espèce, il résulte des pièces communiquées par Mme [F] [R] et plus particulièrement des échanges de textos avec M. [N] [M], qu'elle a été amenée à effectuer des tâches dépassant les fonctions de serveuse pour lesquelles elle avait été engagée par la Sasu la Mie du temps gourmande, puisque, outre le service, elle faisait le ménage, des courses pour le restaurant et de la prospection pour faire connaître l'établissement.
Par ailleurs, Mme [F] [R] justifie avoir bénéficié d'un arrêt de travail pour maladie consécutivement à l'annonce de la rupture du contrat de travail le 11 juin 2018, avoir perçu des indemnités journalières jusqu'au 29 juin 2018 et avoir bénéficié d'un traitement médicamenteux pour trouble anxio-dépressif.
Les explications apportées par la Sasu la Mie du temps gourmande dans un texto que son responsable a envoyé à Mme [F] [R] pour justifier de cette rupture sont peu explicites et font suite aux réclamations faites par la salariée quelques jours auparavant portant sur le paiement de son salaire - 09 juin : 'n'oublie pas mon salaire ce soir si tu viens pas demain ...car mes prélèvements n'ont pas passé', 'tu m'a fait un chèque de 240,50 euros pour 32,5 travaillé donc pour 169 heures c'est 1250,60 net en chèque'.
Il se déduit de l'ensemble des éléments qui précèdent que la Sasu la Mie du temps gourmande a manifestement exécuté le contrat de travail signé avec Mme [F] [R] de façon déloyale et il convient de faire droit à la demande de dommages et intérêts de la salariée à ce titre, à hauteur de 2 000 euros.
Sur les demandes relatives à la rupture du contrat de travail :
Sur la demande de requalification de la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse :
L'existence d'une relation de travail salarié ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs.
L'article L1242-12 du code du travail dispose que le contrat de travail à durée déterminée est établi par écrit et comporte la définition précise de son motif. A défaut, il est réputé conclu pour une durée indéterminée.
Il comporte notamment :
1° Le nom et la qualification professionnelle de la personne remplacée lorsqu'il est conclu au titre des 1°, 4° et 5° de l'article L1242-2 ;
2° La date du terme et, le cas échéant, une clause de renouvellement lorsqu'il comporte un terme précis ;
3° La durée minimale pour laquelle il est conclu lorsqu'il ne comporte pas de terme précis ;
4° La désignation du poste de travail en précisant, le cas échéant, si celui-ci figure sur la liste des postes de travail présentant des risques particuliers pour la santé ou la sécurité des salariés prévue à l'article L4154-2, la désignation de l'emploi occupé ou, lorsque le contrat est conclu pour assurer un complément de formation professionnelle au salarié au titre du 2° de l'article L1242-3, la désignation de la nature des activités auxquelles participe le salarié dans l'entreprise ;
5° L'intitulé de la convention collective applicable ;
6° La durée de la période d'essai éventuellement prévue ;
7° Le montant de la rémunération et de ses différentes composantes, y compris les primes et accessoires de salaire s'il en existe ;
8° Le nom et l'adresse de la caisse de retraite complémentaire ainsi que, le cas échéant, ceux de l'organisme de prévoyance.
Est réputé à durée indéterminée tout contrat de travail conclu en méconnaissance des dispositions des articles L1242-1 à L. 1242-4, L1242-6, L1242-7, L1242-8-1, L1242-12 alinéa premier, L1243-11, alinéa premier, L1243-13-1,L1244-3-1, L1244-4-1 et des stipulations des conventions ou accords de branche conclus en application des articles L1242-8, L1243-13, L1244-3 et L1244-4.
La méconnaissance de l'obligation de transmission du contrat de mission au salarié dans le délai fixé par l'article L1242-13 ne saurait, à elle seule, entraîner la requalification en contrat à durée indéterminée. Elle ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité, à la charge de l'employeur, qui ne peut être supérieure à un mois de salaire.
En l'espèce, dès lors que Mme [F] [R] établit que la relation de travail avec la Sasu la Mie du temps gourmande a débuté dès le 1er mars 2018, en l'absence de tout contrat, soit antérieurement à la signature du contrat à durée déterminée, il y a lieu de faire droit à sa demande de requalification de son contrat en contrat à durée indéterminée, la signature d'un contrat à durée déterminée saisonnier étant sans incidence sur la relation contractuelle requalifiée en contrat à durée indéterminée.
Sur le licenciement :
L'article L.1232-6 du code du travail prévoit que lorsque l'employeur décide de licencier un salarié, il lui notifie sa décision par lettre recommandée avec avis de réception. Cette lettre comporte l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur.
A défaut de lettre énonçant les motifs du licenciement conforme aux dispositions de l'article L.1232-6 du code du travail, le licenciement de M. [W] est dépourvu de cause réelle et sérieuse et ouvre droit à son profit au paiement des indemnités de rupture et de dommages-intérêts.
L'article L1245-2 du même code dispose que lorsque le conseil de prud'hommes est saisi d'une demande de requalification d'un contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, l'affaire est directement portée devant le bureau de jugement qui statue au fond dans un délai d'un mois suivant sa saisine.
Lorsque le conseil de prud'hommes fait droit à la demande du salarié, il lui accorde une indemnité, à la charge de l'employeur, ne pouvant être inférieure à un mois de salaire. Cette disposition s'applique sans préjudice de l'application des dispositions du titre III du présent livre relatives aux règles de rupture du contrat de travail à durée indéterminée.
En l'espèce, force est de constater que la Sasu la Mie du temps gourmande n'a pas respecté la procédure de licenciement en ne notifiant pas à Mme [F] [R] une lettre énonçant les motifs du licenciement, de sorte que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et ouvre droit à son profit au paiement des indemnités de rupture et de dommages-intérêts.
Au moment de son licenciement, Mme [F] [R] avait une ancienneté de 6 mois d'ancienneté et était âgée de 40 ans.
Au vu de l'ensemble de ces éléments, il convient de faire droit à la demande de dommages et intérêts de Mme [F] [R] sur le fondement des dispositions légales susvisées à hauteur de 1 722,93 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et, au titre de l'indemnité compensatrice de préavis à la somme de 1772,29 euros, outre celle de 172,29 euros à titre d'indemnité de congés payés y afférente.
Le jugement entrepris sera infirmé en ce sens.
Sur la demande relative au travail dissimulé :
Selon l'article L. 8221-5 du code du travail : est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :
1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;
2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;
3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.
Au cas d'espèce, il est établi que la Sasu la Mie du temps gourmande n'a procédé à la déclaration préalable à l'embauche de Mme [F] [R] que le jour de la signature du contrat de travail à durée déterminée le 25 avril 2018 alors qu'elle justifie avoir travaillé de façon effective dès le 1er mars 2018, de sorte que la salariée démontre que l'employeur s'est soustrait volontairement à l'accomplissement de la formalité relative à la déclaration préalable d'embauche.
En application de l'article L.8223-1 du code du travail qui prévoit qu'en cas de rupture de la relation de travail le salarié auquel un employeur a eu recours en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire, il y a lieu de faire droit à la demande de Mme [F] [R] de paiement par la société de la somme de 10 337,58 euros correspondant à une indemnité égale à six mois de salaires.
Sur la demande de remise des documents de fin de contrat :
Enfin, il convient d'ordonner à la Sasu la Mie du temps gourmande de remettre à Mme [F] [R] les documents de fin de contrat et les bulletins de paie rectifiés, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la notification du présent arrêt
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt par défaut, en matière prud'homale et en dernier ressort;
Confirme le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Nîmes le 02 mars 2020 en ce qu'il a dit que les 910,85 euros bruts à titre de rappel d'heures supplémentaires pour le mois de mai 2018 et les 91,08 euros bruts de congés payés y afférents, doivent être versés et qu'il y a lieu de produire un bulletin pour ces sommes,
L'infirme pour le surplus,
Statuant sur les dispositions réformées et y ajoutant,
Juge que la relation de travail entre Mme [F] [R] et la Sasu la Mie du temps gourmande a débuté le 1er mars 2018,
Condamne la Sasu la Mie du temps gourmande à payer à Mme [F] [R] la somme de 910,85 euros bruts à titre de rappel d'heures supplémentaires pour le mois de mai 2018 et 91,08 euros bruts de congés payés y afférents,
Juge que la Sasu la Mie du temps gourmande a exécuté de façon déloyale le contrat de travail,
Requalifie le contrat de travail à durée déterminée signé entre Mme [F] [R] et la Sasu la Mie du temps gourmande le 25 avril 2018 en contrat à durée indéterminée,
Dit que le licenciement de Mme [F] [R] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
Condamne la Sasu la Mie du temps gourmande à payer à Mme [F] [R] les sommes suivantes :
- 1 507,59 euros à titre de rappel de salaire pour le mois de mars,
- 1 214,36 euros à titre de rappel de salaire du 1er au 24 avril 2018
- 271,19 euros à titre d'indemnité de congés payés y afférente,
- 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat par l'employeur,
- 1 722,93 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 1 722,93 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 172,29 euros à titre d'indemnité de congés payés y afférente,
- 10 337,58 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,
Ordonne à la Sasu la Mie du temps gourmande de remettre à Mme [F] [R] les documents de fin de contrat et les bulletins de paie rectifiés, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la notification du présent arrêt,
Condamne la Sasu la Mie du temps gourmande à payer à Mme [F] [R] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 37 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991,
Rejette les demandes plus amples,
Condamne la Sasu la Mie du temps gourmande aux dépens de première instance et d'appel.
Arrêt signé par le président et par la greffiere.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,