Ordonnance N°23/15
N° RG 23/00017 - N° Portalis DBVH-V-B7H-IVP7
J.L.D. NIMES
09 janvier 2023
[R]
C/
LE PREFET DE L'HERAULT
COUR D'APPEL DE NÎMES
Cabinet du Premier Président
Ordonnance du 10 JANVIER 2023
(Au titre des articles L. 742-4 et L 742-5 du CESEDA)
Nous, Madame Alexandra BERGER, Conseillère à la Cour d'Appel de NÎMES, conseiller désigné par le Premier Président de la Cour d'Appel de NÎMES pour statuer sur les appels des ordonnances des Juges des Libertés et de la Détention du ressort, rendues en application des dispositions des articles L 742-1 et suivants du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit de l'Asile (CESEDA), assisté de Mme Emmanuelle PRATX, Greffière,
Vu l'interdiction du territoire français prononcée le 14 mars 2022 par le tribunal correctionnel de Montpellier, notifiée le même jour, ayant donné lieu à une décision de placement en rétention en date du 10 novembre 2022, notifiée le même jour à 09h05 concernant :
M. [P] [R]
né le 09 Juin 1992 à SIDI LAKHDAR (ALGERIE)
de nationalité Algérienne
Vu l'ordonnance en date du 12 novembre 2022 rendue par le Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal Judiciaire de Nîmes portant prolongation du maintien en rétention administrative de la personne désignée ci-dessus ;
Vu la requête reçue au Greffe du Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal Judiciaire de Nîmes le 08 janvier 2023 à 14h33, enregistrée sous le N°RG 23/108 présentée par M. le Préfet de l'Hérault ;
Vu l'ordonnance rendue le 09 Janvier 2023 à 13h00 par le Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal de NÎMES sur troisième prolongation, à titre exceptionnel qui a :
* Ordonné pour une durée maximale de 15 jours commençant à l'expiration du précédent délai de 30 jours déjà accordé, le maintien dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, de M. [P] [R];
* Dit que la mesure de rétention prendra fin à l'expiration d'un délai de 15 jours à compter du 09 janvier 2023 à 09h05 ;
Vu l'appel de cette ordonnance interjeté par Monsieur [P] [R] le 09 Janvier 2023 à 16h16 ;
Vu l'absence du Ministère Public près la Cour d'appel de NIMES régulièrement avisé ;
Vu la présence de Monsieur [E] [Z], représentant le Préfet de l'Hérault, agissant au nom de l'Etat, désigné pour le représenter devant la Cour d'Appel en matière de Rétention administrative des étrangers, entendu en ses observations ;
Vu la comparution de Monsieur [P] [R], régulièrement convoqué ;
Vu la présence de Me Patricia PERRIEN, avocat de Monsieur [P] [R] qui a été entendu en sa plaidoirie ;
MOTIFS
Monsieur [P] [R] a fait l'objet d'un d'une interdiction judiciaire du territoire national définitive pendant deux ans, en date du 14 mars 2022 par le tribunal correctionnel de Montpellier et qui lui a été notifié le même jour.
Le 10 novembre 2022, à sa levée d'écrou, il a reçu notification d'un arrêté de placement en rétention administrative adopté le même jour, notifié le 10 novembre 2022 à 9h05.
Sur requête de la Préfecture et par ordonnance du Juge des libertés et de la détention de Nîmes en date du 12 novembre confirmée par la Cour d'appel le 15 novembre 2022, sa rétention administrative a été prolongée de vingt huit jours.
Sur nouvelle requête de la Préfecture et par ordonnance du Juge des libertés et de la détention, en date du 9 décembre 2022, sa rétention administrative a été encore prolongée de trente jours supplémentaires.
Sur requête du Préfet de l'Hérault en date du 8 janvier 2023, le Juge des libertés et de la détention de [Localité 2] a ordonné une troisième prolongation de cette rétention pour 15 jours, et ce par ordonnance du 9 janvier 2023, à 13h00.
Monsieur [P] [R] a relevé appel de cette ordonnance le 9 janvier 2023 à 16h16.
Sur l'audience, il dit qu'il vit en Espagne et souhaite y retourner pour retrouver sa famille, notamment sa fille. Il explique avoir des documents mais qui ne sont pas sur lui. Il explique avoir été de passage en France pour visiter une partie de sa famille.
Son avocat se désiste du moyen tiré de l'irrégularité de la requête en prolongation de la mesure. En revanche, elle indique qu'il n'existe pas de perspectives d'éloignement et qu'en outre il a une famille qui l'attend en Espagne. Il fait état de l'absence de reconnaissance jusqu'ici.
Le Préfet de l'Hérault pris en la personne de son représentant demande la confirmation de l'ordonnance dont appel. Il rappelle les diligences effectuées et finalement la possibilité d'identifier plus rapidement l'intéressé grâce à son permis de conduire. Il a refusé de coopérer avec les autorités algériennes. Les perspectives sont réelles avec ce document et une relance a été faite le 5 janvier 2023. Actuellement il est dépourvu de titre de séjours en Espagne.
SUR LA RECEVABILITE DE L'APPEL :
L'appel interjeté le 9 janvier 2023 à 16h16 par Monsieur [P] [R] sur une ordonnance rendue le 9 janvier 2023 à 13h00 a été relevé dans les délais légaux et conformément aux dispositions des articles L.743-21, R.743-10 et R.743-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Il est donc recevable.
SUR LES MOYENS NOUVEAUX ET ÉLÉMENTS NOUVEAUX INVOQUÉS EN CAUSE D'APPEL:
L'article L.743-11 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que « à peine d'irrecevabilité, prononcée d'office, aucune irrégularité antérieure à une audience à l'issue de laquelle le juge des libertés et de la détention a prolongé la mesure ne peut être soulevée lors d'une audience ultérieure ».
L'article 563 du Code de Procédure Civile ajoute encore que « pour justifier en appel les prétentions qu'elles avaient soumises au premier juge, les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux, produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves. »
En l'espèce, ne restent recevables que le moyen d'irrecevabilité de la requête en prolongation sur laquelle l'ordonnance dont appel a statué et les moyens de fond, même nouveaux en appel. Monsieur [P] [R] soulève l'absence de perspective d'éloignement à bref délai. Ce moyen de fond est recevable.
SUR LE FOND :
Au motif de fond sur son appel, Monsieur [P] [R] soutient qu'il n'existe aucune perspective d'éloignement à bref délai le concernant et qu'ainsi sa rétention ne se justifie plus.
L'article L742-5 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en son alinéa 5 dispose que, «à titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l'article L.742-4 lorsqu'une des situations suivantes apparaît dans les quinze derniers jours :
1° L'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la décision d'éloignement,
2° L'étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d'éloignement :
a) une demande de protection contre l'éloignement au titre du 9° de l'article L.611-3 ou du 5° de l'article L.631-3,
b) ou une demande d'asile dans les conditions prévues aux articles L.754-1 et L.754-3 ,
3° La décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé et qu'il est établi par l'autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.
L'étranger est maintenu en rétention jusqu'à ce que le juge ait statué.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l'expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d'une durée maximale de quinze jours.
Si l'une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° survient au cours de la prolongation exceptionnelle ordonnée en application du huitième alinéa, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. La durée maximale de la rétention n'excède pas alors quatre-vingt-dix jours. »
Ces dispositions doivent s'articuler avec celles de l'article L.741-3 du même code, selon lesquelles il appartient au juge judiciaire d'apprécier la nécessité du maintien en rétention et de mettre fin à la rétention administrative, lorsque les circonstances de droit ou de fait le justifient : « « Un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet. »
En l'espèce, les autorités algériennes n'ont pas reconnu l'intéressé mais ont été saisies à nouveau après présentation de l'original de son permis de conduire. Une enquête approfondie a été diligentée par ces mêmes autorités. Des relances ont été adressées au consulat en décembre et le 5 janvier 2023.
Malgré les diligences ainsi accomplies par l'administration, la délivrance des documents de voyage par le Consulat dont relève Monsieur [P] [R] n'est pas encore intervenue.
Pour autant, au regard de l'avancement de la procédure et en l'absence de tout élément connu qui pourrait empêcher ce Consulat d'y procéder très rapidement, il apparaît que ces documents de voyage vont nécessairement être communiqués à bref délai.
Les conditions légales permettant la troisième prolongation demandée sont ainsi remplies.
SUR LA SITUATION PERSONNELLE DE MONSIEUR [P] [R] :
Monsieur [P] [R], présent irrégulièrement en France est dépourvu de passeport et de pièces administratives pouvant justifier de son identité et de son origine de telle sorte qu'une assignation à résidence judiciaire est en tout état de cause exclue par les dispositions de l'article L743-13 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Il ne justifie de plus d'aucune adresse ni domicile stables en France, ne démontre aucune activité professionnelle et ne dispose d'aucun revenu ni possibilité de financement pour assurer son retour dans son pays. Après vérification, aucun élément de rattachement en Espagne n'a été détecté et il n'est pas en mesure de justifier de sa situation familiale.
Il est l'objet d'une mesure d'éloignement en vigueur, telle que précitée, et qui fait obstacle à sa présence sur le sol français.
Il s'en déduit que la prolongation de sa rétention administrative demeure justifiée et nécessaire aux fins qu'il puisse être procédé effectivement à son éloignement.
Il convient par voie de conséquence de confirmer l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, en matière civile et en dernier ressort,
Vu l'article 66 de la constitution du 4 octobre 1958,
Vu les articles L.741-1, L742-1 à L743-9 ; R741-3 et R.743-1 à L.743-19 et L.743-21 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
DECLARONS recevable l'appel interjeté par Monsieur [P] [R] ;
CONFIRMONS l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions ;
RAPPELONS que, conformément à l'article R.743-20 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile, les intéressés peuvent former un pourvoi en cassation par lettre recommandée avec accusé de réception dans les deux mois de la notification de la présente décision à la Cour de cassation [Adresse 1].
Fait à la Cour d'Appel de NÎMES,
le 10 Janvier 2023 à
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,
' Notification de la présente ordonnance a été donnée ce jour au Centre de rétention administrative de [Localité 2] à M. [P] [R].
Le à H
Signature du retenu
Copie de cette ordonnance remise, ce jour, par courriel à :
Monsieur [P] [R], pour notification au CRA
Me Me Patricia PERRIEN, avocat
M. Le Préfet de l'Hérault
M. Le Directeur du CRA de NIMES
Le Ministère Public près la Cour d'Appel de NIMES
M / Mme Le Juge des libertés et de la détention