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10/01/2023 | FRANCE | N°20/00873

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 5ème chambre sociale ph, 10 janvier 2023, 20/00873


ARRÊT N°



N° RG 20/00873 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HVTH



CRL/DO



CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'AUBENAS

19 février 2020



RG :F18/00137





S.C.A. LA CEVENOLE



C/



[Y]





































COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH



ARRÊT DU 10 JANVIER 2023





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APPELANTE :



S.C.A. LA CEVENOLE

[Adresse 4]

[Localité 2]



Représentée par Me Patrick LANOY de la SELARL CAPSTAN - PYTHEAS, avocat au barreau de NIMES





INTIMÉ :



Monsieur [G] [J]

né le 30 Juillet 1965

[Adresse 3]

[Localité 1]



Représenté par Me Barbara MICHEL, avocat au barreau de NIMES

Représe...

ARRÊT N°

N° RG 20/00873 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HVTH

CRL/DO

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'AUBENAS

19 février 2020

RG :F18/00137

S.C.A. LA CEVENOLE

C/

[Y]

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH

ARRÊT DU 10 JANVIER 2023

APPELANTE :

S.C.A. LA CEVENOLE

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Patrick LANOY de la SELARL CAPSTAN - PYTHEAS, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉ :

Monsieur [G] [J]

né le 30 Juillet 1965

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représenté par Me Barbara MICHEL, avocat au barreau de NIMES

Représenté par Me Isabelle PLANA, avocat au barreau de MONTPELLIER

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 27 Septembre 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère

GREFFIER :

Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 11 Octobre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 13 Décembre 2022 et prorogé ce jour ;

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 10 Janvier 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

M. [G] [J] a été engagé à compter du 1er janvier 1988 en qualité de cadre technique, échelon expert, coefficient V par la Société Coopérative Agricole ( SCA) la Cévenole, par contrat oral.

A la fin de sa relation contractuelle, M. [G] [J] occupait le poste de responsable technique de la coopérative, catégorie cadre, échelon expert, coefficient V et percevait un salaire moyen, sur 13 mois, de 3.655, 84 euros.

Le 23 mai 2018, M. [G] [J] a été convoqué à un entretien fixé au 1er juin 2018 à l'occasion duquel il lui a été remis un courrier exposant les motifs du projet de licenciement économique, les propositions de reclassement et la présentation du contrat de sécurisation professionnelle auquel il a adhéré le 18 juin 2018, cette adhésion entraînant la rupture de son contrat de travail.

Par courriers en date des 21 juin 2018 et 9 juillet 2018, M. [G] [J] a sollicité le paiement de 1.256 heures supplémentaires.

Les tentatives de résolution amiable du conflit ayant échoué, par requête, en date du 24 octobre 2018, M. [G] [J] a saisi le conseil de prud'hommes d'Aubenas en contestation de son licenciement et aux fins de voir condamner la SCA la Cévenole au paiement de diverses sommes indemnitaires.

Par jugement, en date du 19 février 2020, le conseil de prud'hommes d'Aubenas, a :

- déclaré le licenciement de M. [G] [J] sans cause réelle et sérieuse.

1 - Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse:

- condamné la SCA la Cévenole à payer M. [G] [J] la somme de 73. 116,80 euros (3 655,84 euros x 20 ans).

2 - Sur les heures supplémentaires telles qu'attestées par le constat d'huissier transcrivant la conversation entre le président M. [W] et M. [G] [J] sur son téléphone portable

- condamné la SCA la Cévenole à payer à M. [G] [J] la somme de 35. 684,94 euros au titre des heures supplémentaires,

- condamné la SCA la Cévenole à payer à M. [G] [J] la somme de 3 568,49 euros au titre des congés payés sur les heures supplémentaires,

3 - Sur les indemnités pour travail dissimulé (art. L2821 et suivants du code du travail)

- débouté M. [G] [J] de sa demande,

4 - Sur les dommages et intérêts pour comportement déloyal

- débouté M. [G] [J] de sa demande, conformément aux articles 6 et 9 du code de procédure civile

5 - Sur les dommages et intérêts pour dépassement du contingent annuel d'heures supplémentaires :

- débouté M. [G] [J] de sa demande conformément aux articles 6 et 9 du code de procédure civile

6 - Sur les dommages et intérêts pour non-respect des repos hebdomadaires et journaliers

- débouté M. [G] [J] de sa demande conformément aux articles 6 et 9 du code de procédure civile

- ordonné la remise par la SCA la Cévenole d'un bulletin de salaire, d'une attestation Pôle Emploi et d'un certificat de travail conformes au jugement, et ce sous quinzaine après la notification de la présente décision,

- débouté M. [G] [J] du surplus de ses demandes,

- condamné la SCA la Cévenole à payer à M. [G] [J] la somme de 1 500,00

euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SCA la Cévenole aux entiers dépens.

Par acte du 9 mars 2020, la SCA la Cévenole a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Par ordonnance en date du 11 juillet 2022, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 27 septembre 2022 à 16 heures et fixé l'examen de l'affaire à l'audience du 11 octobre 2022 à 14 heures.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 7 mars 2022, la SCA la Cévenole demande à la cour de :

A titre principal,

- réformer le jugement mais seulement en ce qu'il a :

* déclaré que le licenciement de M. [G] [J] était sans cause réelle et sérieuse,

* condamné la société à lui payer la somme de 73.116,80 euros (3 655,84 euros x 20 ans) à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif,

* condamné la société à lui payer la somme de 35.684,94 € à titre de rappels d'heures supplémentaires, outre la somme de 3.568,49 euros au titre de congés payés y afférents,

Statuant à nouveau,

- déclarer que le licenciement de M. [G] [J] repose sur une cause réelle et sérieuse,

- débouter M. [G] [J] de sa demande de rappel de salaire à titre de rappels d'heures supplémentaires et de congés payés y afférents,

-confirmer le jugement en ce qu'il a :

* débouté le salarié de sa demande indemnitaire pour travail dissimulé,

* débouté le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour dépassement du contingent annuel d'heures supplémentaires,

* débouté le salarié de sa demande de dommages et intérêts pour non-respect des repos hebdomadaires et journaliers,

- débouter M. [G] [J] de l'intégralité de ses demandes anciennes ou nouvelles, notamment : 10.000 euros de dommages-intérêts pour comportement déloyal de l'employeur,

- condamner M. [G] [J] à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

A titre subsidiaire,

- dire que M. [G] [J] ne démontre pas de préjudice financier consécutif à son licenciement,

- limiter le montant des dommages-intérêts pour licenciement abusif au strict minimum.

La SCA la Cévenole soutient que :

- l'absence de lettre de licenciement s'explique par le fait que le contrat de travail n'a pas été rompu à l'initiative de l'employeur mais conformément à l'article L 1233-67 du code du travail en raison de l'adhésion au contrat de sécurisation professionnelle, la procédure de licenciement est donc régulière,

- les pseudos analyses économiques ou comptables de M. [G] [J] sont sans commune mesure avec la réalité économique de la structure, les comptes qu'elle-même produit étant certifiés par le commissaire aux comptes, lesquels attestent d'une baisse de chiffre d'affaires de 38%,

- le poste de M. [G] [J], contrairement à ce qu'il soutient, a été supprimé, et l'est encore à ce jour, ses tâches ayant été réparties entre les autres salariés,

- subsidiairement, eu égard à l'indemnité conventionnelle de licenciement qu'il a perçue et de l'emploi occupé pendant deux années après son licenciement, M. [G] [J] ne peut se prévaloir d'aucun préjudice financier,

- s'agissant de la demande au titre des heures supplémentaires, les bulletins de salaire mentionnent le paiement d'heures supplémentaires, et les demandes antérieures au 24 octobre 2015 sont prescrites,

- M. [G] [J] a présenté le paiement ultérieur de ces heures comme acquis au nouveau président M. [W], sans aucun décompte, lequel n'a par ailleurs jamais validé ce principe depuis le début de l'instance,

- s'agissant du travail dissimulé, M. [G] [J] n'établit pas l'intention de dissimulation,

- la demande au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail est un moyen de contourner les règles de prescription sur les heures supplémentaires et doit en conséquence être rejetée,

- M. [G] [J] ne démontre pas le dépassement de son contingent annuel d'heures, ni l'existence d'un préjudice au titre du repos journalier et hebdomadaire.

En l'état de ses dernières écritures en date du 28 juillet, M. [G] [J] demande à la cour de :

-rejeter l'appel de la SCA la Cévenole comme étant injuste et en tous les cas non fondé,

- faire droit à son appel incident,

Ce faisant,

- constater l'absence de notification d'une lettre postérieurement à l'entretien préalable,

- constater l'absence de difficultés économiques significatives,

- constater l'absence de recherches loyales de reclassement,

- constater l'existence d'heures supplémentaires non réglées,

- constater le caractère nécessairement volontaire du non-paiement des heures supplémentaires,

- constater le comportement déloyal de l'employeur,

- constater le non-respect des repos hebdomadaires,

- constater la privation du droit au repos compensateur,

En conséquence,

- dire et juger que le défaut d'envoi d'une lettre valant lettre de licenciement ou lettre de rupture d'un commun accord postérieurement à l'entretien préalable entache la procédure d'une nullité de fond,

- confirmer le jugement entrepris sur ce point,

Subsidiairement,

- dire et juger que son licenciement économique est dénué de cause réelle et sérieuse,

- dire et juger que la SCA la Cévenole a manqué à son obligation de tentative loyale et sérieuse de reclassement,

- réformant sur le quantum des dommages et intérêts,

Statuant sur l'indemnité compensatrice de préavis,

- condamner la SCA la Cévenole à lui payer les sommes suivantes :

- 10. 967,52 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis

- 1.096,75 euros au titre des congés payés sur préavis

- 100.000 euros net de CSG CRDS à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 35.684,94 euros au titre des heures supplémentaires non réglées

- 3.568,49 euros au titre des congés payés y afférents

- 21. 935,04 euros au titre de l'indemnité pour travail dissimulé

- 10 000 euros à titre de dommages intérêts pour dépassement du contingent annuel des heures supplémentaires

- 5.000 euros à titre de dommages intérêts pour non-respect des repos hebdomadaires et journaliers,

- 10.000 euros à titre de dommages intérêts pour comportement déloyal,

- ordonner la remise d'un bulletin de salaire récapitulatif ainsi qu'une attestation Pole Emploi et d'un certificat de travail conformes au jugement à intervenir sous astreinte de 80 € par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir,

- ordonner le remboursement par l'employeur des indemnités de chômage qui lui ont été versées,

- rappeler que la moyenne des trois derniers mois de salaire s'élève à la somme de 3 655 euros.

- condamner la SCA la Cévenole à lui payer la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile

- la condamner aux entiers dépens.

M. [G] [J] fait valoir que :

- l'envoi d'une lettre de licenciement, y compris en cas de remise d'une notice d'information lors de l'entretien préalable, constitue une formalité substantielle qui n'a pas été respectée en l'espèce, le défaut de cet envoi rend le licenciement sans cause,

- les motifs économiques invoqués par la SCA la Cévenole ne sont pas caractérisés, ainsi le résultat net a été multiplié par 13 entre 2016 et 2017, et les coopérateurs n'ont subi aucune baisse de leur revenu,

- la fiche de solde et règlement de la récolte pour les années 2016/2017/2018 finalement produite par la SCA la Cévenole démontre qu'elle était en parfaite santé financière au moment de son licenciement,

- lors de son entretien préalable, il lui avait été clairement indiqué que son licenciement avait pour objectif de faire baisser la masse salariale, afin de permettre une augmentation des profits, ce qui n'est pas un motif économique valable,

- il n'est pas contesté que ses tâches ont été dispatchées entre les autres salariés, mais l'un d'eux a vu son salaire augmenter de 500 euros par mois ce qui est contradictoire avec les difficultés économiques avancées par l'employeur qui aurait alors pu lui proposer une modification de son contrat pour motif économique, ou une réduction de son temps de travail,

- il ne lui a pas été proposé le poste de gérant de la cave coopérative de [Localité 5], également adhérente comme la SCA la Cévenole à l'UVICA, ce qui lui aurait évité des recherches en externe,

- en conséquence de l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement, il peut prétendre à une indemnité compensatrice de préavis, outre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, les emplois qu'il a pu retrouver ultérieurement lui assurant une rémunération bien moindre que celle dont il disposait en tant que salarié de la SCA la Cévenole,

- le principe des heures supplémentaires non rémunérées a été reconnu lors de l'entretien préalable, et par message retranscrit par huissier le lendemain, le président de la SCA la Cévenole reconnaît qu'il lui doit 800 heures supplémentaires qu'il propose d'indemniser pour partie hors charges sociales, et considère comme prescrites les 400 heures restantes,

- aucune solidarité dans la faute ne peut lui être opposée sur le non paiement de ses heures supplémentaires et le travail dissimulé est caractérisé, de même que le comportement déloyal de son employeur pendant plus de trente années à son égard.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues à l'audience.

MOTIFS :

Demandes relatives à l'exécution du contrat de travail

* rappel de salaire - heures supplémentaires

Aux termes de l'article L. 3171-2 alinéa 1er du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l'article 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016, l'employeur tient à la disposition de l'inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

Selon l'article L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, la charge de la preuve n'incombe spécialement à aucune des parties; il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

Il appartient à la juridiction de vérifier si les heures supplémentaires revendiquées ont été rendues nécessaires par le travail confié au salarié, l'opposition à l'exécution de celle-ci de l'employeur se trouvant alors indifférente.

Le salarié peut revendiquer le paiement d'heures supplémentaires à raison de l'accord tacite de l'employeur. Cet accord tacite peut résulter de la connaissance par l'employeur de la réalisation d'heures supplémentaires par le biais de fiche de pointage et l'absence d'opposition de l'employeur à la réalisation de ces heures.

En l'espèce, M. [G] [J] sollicite le paiement de 35.684,94 euros correspondant à

- 56 h00 supplémentaires à 25% et 255h30 supplémentaires à 50% pour la période du 22 juin 2015 au 31 décembre 2015,

- 84h30 supplémentaires à 25% et 402h30 supplémentaires à 50% pour l'année 2016,

- 45h00 supplémentaires à 25% et 188h30 supplémentaires à 50% pour l'année 2017,

- 27h30 supplémentaires à 25% pour la période du 1er janvier au 21 juin 2018,

après déduction des heures supplémentaires rémunérées sur ces périodes, outre la somme de 3.568,49 euros de congés payés y afférents.

Au soutien de sa demande, M. [G] [J] produit :

- un tableau représentant année par année, en numérotation par semaine, un décompte global comprenant pour chaque semaine ' heures normales' 'heures 25%' et 'heures 50%', lequel ne précise ni les jours concernés par les heures supplémentaires invoquées, ni les horaires de travail journalier effectif, ni le décompte des heures supplémentaires par jour,

- une attestation de M. [N] [U] qui se présente comme gérant du site des Vans et indique 'chaque fois que j'étais présent, par intermittence en 2017 et début 2018, à temps plein depuis le 20 mars 2018, [G] [J] quittait la cave toujours après les autres employés', laquelle est rédigée en termes très généraux et ne permet pas de connaître précisément les horaires de travail de M. [G] [J] et les éventuelles heures supplémentaires non rémunérées,

- une attestation de M. [C] [O], qui indique avoir travaillé sous la direction de M. [G] [J] en tant que travailleur saisonnier lors des vendanges de 2006 et 2007 puis de 2012 à 2016, et précise en parlant de ce dernier ' il était dans l'établissement tôt le matin, en journée et tard le soir', laquelle est rédigée en termes très généraux et ne permet pas de connaître précisément les horaires de travail de M. [G] [J] et les éventuelles heures supplémentaires non rémunérées,

- des copies de calendriers pour les années 2012 à 2018 comportant des chiffres en bleu et en rouge, présentés comme correspondant au nombre d'heures travaillées par jour,

- la retranscription par huissier d'une conversation téléphonique présentée par M. [G] [J] comme étant une conversation tenue avec M. [W] son ancien employeur qui lui attribue notamment ' je viens d'avoir l'avocat (...) Au-delà des trois ans, par rapport à tes heures supplémentaires, il dit ça c'est pas légal ( ...) Les 400 heures avant 2015 pour lui c'est perdu ( ...) Que sur les 800 heures qu'il te reste, qu'on le fasse intelligemment' suivi d'une proposition d'un règlement 'net sans impôt' de 18.000 euros,

- une attestation établie par M. [F] [D], qui a assisté M. [G] [J] en qualité de conseiller du salarié lors de l'entretien préalable, qui indique que ce dernier a interrogé le président de la SCA la Cévenole sur les heures supplémentaires effectuées depuis 2011 et 'M. [W] reconnaît l'existence de ces heures de travail mais ne peut pas donner de réponse précise quand à leur paiement'.

Pour remettre en cause ces éléments, la SCA la Cévenole considère que les demandes antérieures de plus de trois à la date de saisine du conseil de prud'hommes sont prescrites, soit les demandes antérieures au 24 octobre 2015 .

La SCA la Cévenole conteste l'argument de M. [G] [J] selon lequel ses heures supplémentaires trouveraient leur explication dans une augmentation significative des volumes de vin produits, et observe que le salarié ne donne aucun décompte précis des heures qu'il invoque, ni d'horaires de travail, ce qui est d'autant plus nécessaire pour apprécier le bien-fondé de sa demande que des heures supplémentaires ont été payées à M. [G] [J] ainsi qu'en attestent ses bulletins de salaire lors des périodes de forte activité que représentent les vendanges.

Elle observe que les plannings versés par M. [G] [J] démontrent qu'il a pu récupérer certaines de ses heures sur les mois de février, mars, avril ou décembre et qu'en outre deux plannings différents sont communiqués pour l'année 2016.

La SCA la Cévenole considère que le fait que son nouveau président considère qu'une partie de la demande était prescrite ne vaut pas reconnaissance du bien fondé de celle-ci, et ce d'autant moins que M. [G] [J] lui avait présenté comme 'certaines et acquises' les heures supplémentaires qu'il soutient avoir effectuées et dont il ne l'a jamais informé, alors qu'en sa qualité d'administrateur, le président n'avait pas vocation à suivre le travail des salariés.

Elle s'étonne que M. [G] [J], qui faisait partie de ses cadres et participait à la clôture des comptes, n'ait jamais fait provisionner ces heures supplémentaires qui lui auraient été dues.

- s'agissant de l'éventuelle prescription des demandes :

En application de l'article L 3245-1 du code du travail, l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.

Le contrat de travail de M. [G] [J] ayant été rompu par l'adhésion de celui-ci au contrat de sécurisation professionnelle le 22 juin 2018, il est recevable à présenter des demandes de rappel de salaire pour les trois années précédant cette date, soit pour la période du 22 juin 2015 au 22 juin 2018, ce qui est le cas en l'espèce.

Les demandes de rappel de salaire présentées par M. [G] [J] sont donc recevables.

- s'agisssant du bien-fondé des demandes

La convention collective nationale concernant les caves coopératives vinicoles prévoit en ses articles 30 et 31 des dispositions dérogatoires concernant les heures supplémentaires, et notamment la possibilité de porter le temps de travail hebdomadaire à 66 heures sur 3 semaines ou 60 heures sur 5 semaines pendant les vendanges ; ainsi que le fait pour l'employeur de disposer chaque année, en début d'exercice social, d'un contingent de 160 heures supplémentaires qui donne droit à des repos compensateurs.

Les bulletins de salaires de M. [G] [J] établissent qu'il est rémunéré sur la base d'un temps plein, soit 151,67 heures mensuelles.

Force est de constater que M. [G] [J] qui revendique le paiement d'heures supplémentaires pour la période de juin 2015 à juin 2018 ne verse pas aux débats ses bulletins de salaire pour la période de juin 2015 à décembre 2016.

Faute de disposer de ces bulletins de salaire qui permettraient de connaître la réalités des heures de travail rémunérées sur cette période, et alors que la SCA la Cévenole verse quelques bulletins de salaires sur cette même période qui démontrent le paiement de

- 36 heures supplémentaires en août 2015,

- 50 heures supplémentaires en septembre 2015,

- 24 heures supplémentaires en octobre 2015,

- 48 heures supplémentaires en septembre 2015,

- 50 heures supplémentaires en octobre 2016,

- 15 heures supplémentaires en novembre 2015,

M. [G] [J] sera débouté de sa demande de rappel de salaire et de congés payés y afférents sur la période de juin 2015 à décembre 2016.

De même, M. [G] [J] ne verse pas aux débats les éventuels avenants à son contrat de travail qui auraient permis de connaître d'éventuelles dispositions contractuelles quant aux modalités de décompte ou de récupération des heures de travail en raison du caractère spécifique de l'activité qui implique des périodes de forte activité, notamment pendant la période des vendanges et des périodes de moindre activité. Par suite, l'examen du décompte des heures effectuées par M. [G] [J] se fera de manière mensuelle, aucune indication n'étant donnée quant à un décompte hebdomadaire ou journalier du temps de travail dans le cadre contractuel.

Concernant l'année 2017, l'examen des bulletins de salaire établit les paiements des heures supplémentaires suivantes :

- janvier 2017 : 32 heures supplémentaires à 25%

20 heures supplémentaires à 50%

- février 2017 pas d'heures supplémentaires

- mars 2017 : pas d'heures supplémentaires

- avril 2017 pas d'heures supplémentaires

- mai 2017 pas d'heures supplémentaires

- juin 2017 pas d'heures supplémentaires

- juillet 2017 pas d'heures supplémentaires

- août 2017 : 24 heures supplémentaires à 25%

- septembre 2017 : 32 heures supplémentaires à 25%

20 heures supplémentaires à 50%

- octobre 2017 29 heures supplémentaires à 25%

4 heures supplémentaires à 50%

- novembre 2017 pas d'heures supplémentaires

- décembre 2017 pas d'heures supplémentaires

L'examen du planning produit par M. [G] [J] pour la même période établit qu'il a travaillé :

- en janvier 2017 168,30 heures et a été rémunéré pour 203,67 heures soit un excédent de 35,37 heures en sa faveur,

- en février 2017 127 heures et a été rémunéré pour 151,67 heures soit un excédent de 24,64 heures en sa faveur,

- en mars 2017 145,30 heures et a été rémunéré pour 151,67 heures soit un excédent de 6,37 heures en sa faveur,

- en avril 2017 95,30 heures et a été rémunéré pour 151,67 heures soit un excédent de 56,37 heures en sa faveur,

- en mai 2017 115,30 heures et a été rémunéré pour 151,67 heures soit un excédent de 36,37 heures en sa faveur,

- en juin 2017 166,30 heures et a été rémunéré pour 151,67 heures soit un excédent de 14,63 heures en faveur de la SCA la Cévenole,

- en juillet 2017 68 heures, outre 10 jours de congés payés ( équivalent à 70 heures de travail ) et a été rémunéré pour 151,67 heures soit un excédent de 13,67 heures en sa faveur,

- en août 2017 247,30 heures et a été rémunéré pour 175,67 heures soit un excédent de 71,63 heures en faveur de la SCA la Cévenole,

- en septembre 2017 295,30 heures et a été rémunéré pour 203,67 heures soit un excédent de 91,63 heures en faveur de la SCA la Cévenole,

- en octobre 2017 169 heures et a été rémunéré pour 184,67 heures soit un excédent de 15,67 heures en sa faveur,

- en novembre 2017 130,30 et a été rémunéré pour 151,67 heures soit un excédent de 21,37 heures en sa faveur,

- en décembre 2017 94,30 heures, outre 4 jours de congés payés ( équivalent à 28 heures de travail ) et a été rémunéré pour 151,67 heures soit un excédent de 29,37 heures en sa faveur.

Il en résulte que le cumul des heures en faveur de M. [G] [J], c'est à dire rémunérées, mais non travaillées ou prises sous forme de congés, est de 239,20 heures et celui en faveur de la SCA la Cévenole, c'est-à-dire non rémunérées, mais travaillées par M. [G] [J], est de 177,89 heures.

Il s'en déduit, à partir des seuls plannings produits par M. [G] [J] au soutien de sa demande de rappel de salaire pour l'année 2017 que celle-ci est infondée dès lors qu'il a été rémunéré pour un nombre d'heures supérieur à celui qu'il dit avoir effectuées, la différence en sa faveur permettant de compenser la majoration de rémunération des heures supplémentaires.

Il sera en conséquence débouté de sa demande de rappel de salaire et de congés payés y afférents pour l'année 2017.

Concernant l'année 2018, l'examen des bulletins de salaire établit que M. [G] [J] n'a bénéficié du paiement d'aucune heure supplémentaire.

L'examen du planning produit par M. [G] [J] pour la même période établit qu'il a travaillé :

- en janvier 2018 157 heures et a été rémunéré pour 151,67 heures soit un excédent de 5,33 heures en faveur de la SCA la Cévenole,

- en février 2018 118,30 heures et a été rémunéré pour 151,67 heures soit un excédent de 33,37 heures en sa faveur,

- en mars 2017 124,30 heures, outre 4 jours de congés payés ( équivalent à 28 heures de travail ) et a été rémunéré pour 151,67 heures soit un excédent de 0.63 heures en faveur de la SCA la Cévenole,

- en avril 2017 110 heures et a été rémunéré pour 151,67 heures soit un excédent de 41,67 heures en sa faveur,

- en mai 2017 115,30 heures et a été rémunéré pour 151,67 heures soit un excédent de 36,37 heures en sa faveur,

- du 1er au 22 juin 2017 113 heures et a été rémunéré pour 113 heures.

Il en résulte que le cumul des heures en faveur de M. [G] [J], c'est à dire rémunérées, mais non travaillées ou prises sous forme de congés, est de 111,41 heures et celui en faveur de la SCA la Cévenole, c'est-à-dire non rémunérées, mais travaillées par M. [G] [J], est de 5,96 heures.

Il s'en déduit, à partir des seuls plannings produits par M. [G] [J] au soutien de sa demande de rappel de salaire pour l'année 2018 que celle-ci est infondée dès lors qu'il a été rémunéré pour un nombre d'heures supérieur à celui qu'il dit avoir effectuées, la différence en sa faveur permettant de largement compenser la majoration de rémunération des heures supplémentaires.

Il sera en conséquence débouté de sa demande de rappel de salaire et de congés payés y afférents pour l'année 2018.

La décision déférée ayant fait droit aux demandes de rappel de salaire et de congés payés y afférents sera infirmée.

* indemnité pour travail dissimulé

Dès lors que M. [G] [J] a été débouté de sa demande de rappel de salaire , il sera débouté de la demande présentée au titre de dommages et intérêts résultant de l'existence d'une situation de travail dissimulé.

* dommages et intérêts pour comportement déloyal,

Au soutien de cette demande, M. [G] [J] vise le fait de ne pas avoir pu obtenir le paiement des heures supplémentaires couvertes par la prescription.

Outre le fait que la réalité des heures de travail supplémentaires dont il n'aurait pas obtenu le paiement n'est pas démontrée dans le cadre de la présente instance, M. [G] [J] ne saurait obtenir par une demande de dommages et intérêts des sommes auxquelles il ne peut plus prétendre en raison des dispositions d'ordre public relatives à la prescription.

La décision déférée qui l'a débouté de cette demande sera confirmée.

* dommages et intérêts pour défaut de prise de repos compensateurs

Dès lors que M. [G] [J] a été débouté de sa demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires, il sera également débouté de cette demande fondée sur la non prise en compte des dites heures dans le comptabilisation de son contingent annuel.

La décision déférée qui l'a débouté de cette demande sera confirmée

* dommages et intérêts pour non-respect des repos journaliers et hebdomadaires

Outre le fait que M. [G] [J] ne démontre pas la réalité du préjudice dont il se prévaut pour solliciter 5.000 euros de dommages et intérêts, l'examen des périodes sur lesquelles M. [G] [J] soutient ne pas avoir bénéficié de son repos hebdomadaire ou journalier démontre qu'il s'agit de la période des vendanges qui est soumise, conformément à la convention collective, à des règles dérogatoires quant au temps de travail.

La décision déférée qui l'a débouté de cette demande sera confirmée

Demandes relatives à la rupture du contrat de travail

Selon l'article L1233-3 du code du travail dans sa version applicable, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques.

La réorganisation de l'entreprise constitue un motif économique de licenciement si elle est effectuée pour en sauvegarder la compétitivité ou celle du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient, et répond à ce critère la réorganisation mise en oeuvre pour prévenir des difficultés économiques à venir liées à des évolutions technologiques et leurs conséquences sur l'emploi, sans être subordonnée à l'existence de difficultés économiques à la date du licenciement ; les modifications des contrats de travail résultant de cette réorganisation ont eux-mêmes une cause économique ce qui implique que la compétitivité soit déjà atteinte ou menacée de manière certaine.

Il revient à l'employeur, sur qui repose la charge de la preuve, de produire des documents ou autres éléments qui établissent des signes concrets et objectifs d'une menace sur l'avenir de l'entreprise, autrement dit de démontrer le caractère inéluctable des difficultés économiques si la situation reste en l'état.

La seule intention de l'employeur de faire des économies ou d'améliorer la rentabilité de l'entreprise ne peut constituer une cause de rupture du contrat de travail.

Bien que le juge n'ait pas à se substituer à l'employeur dans les choix économiques, lesquels relèvent de son pouvoir de gestion, il doit toutefois vérifier que l'opération était nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise.

En vertu de l'article L1233-16 du code du travail, la lettre de licenciement comporte l'énoncé des motifs économiques invoqués par l'employeur ; cette obligation légale a pour objet de permettre au salarié de connaître les limites du litige quant aux motifs énoncés.

Si la lettre de licenciement doit énoncer la cause économique du licenciement telle que prévue par l'article L1233-1 du code du travail et l'incidence matérielle de cette cause économique sur l'emploi ou le contrat de travail du salarié, l'appréciation de l'existence du motif invoqué relève de la discussion devant le juge en cas de litige.

Il en résulte que la lettre de licenciement qui mentionne que le licenciement a pour motifs économiques la suppression de l'emploi du salarié consécutive à la réorganisation de l'entreprise justifiée par des difficultés économiques et/ou la nécessité de la sauvegarde de sa compétitivité répond aux exigences légales, sans qu'il soit nécessaire qu'elle précise le niveau d'appréciation de la cause économique quand l'entreprise appartient à un groupe ; c'est seulement en cas de litige qu'il appartient à l'employeur de démontrer dans le périmètre pertinent, la réalité et le sérieux du motif invoqué.

Selon l'article 1232-6 alinéa 2 du même code, dans sa rédaction applicable, la lettre de licenciement comporte l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur.

Sur le respect de la procédure de licenciement

Par application des dispositions de l'article 4 de la convention du 26 janvier 2015 relative au contrat de sécurisation professionnelle,

§ 1.- Chacun des salariés concernés doit être informé, par l'employeur, individuellement et par écrit du contenu du contrat de sécurisation professionnelle et de la possibilité qu'il a d'en bénéficier.

Il dispose d'un délai de vingt et un jours pour accepter ou refuser un tel contrat à partir de la date de la remise du document proposant le contrat de sécurisation professionnelle selon les modalités prévues au paragraphe 2 du présent article.

Pour les salariés dont le licenciement est soumis à autorisation, ce délai de réflexion est prolongé jusqu'au lendemain de la date de notification à l'employeur de la décision de l'autorité administrative compétente.

Le document remis par l'employeur au salarié porte mention :

-de la date de remise du document faisant courir le délai de réflexion ;

-du délai de vingt et un jours imparti au salarié pour donner sa réponse ;

-de la date à partir de laquelle, en cas d'acceptation du contrat de sécurisation professionnelle, son contrat de travail est rompu.

Le document remis au salarié comporte également un volet bulletin « d'acceptation détachable », à compléter par le salarié s'il demande à bénéficier du contrat de sécurisation professionnelle et à remettre à son employeur.

Au cours du délai de réflexion, le salarié bénéficie d'un entretien d'information réalisé par Pôle emploi, destiné à l'éclairer dans son choix.

§ 2.- Lorsque le licenciement pour motif économique doit être précédé d'un entretien préalable au licenciement, le document écrit d'information prévu au paragraphe 1 du présent article est remis au salarié au cours de cet entretien préalable, contre récépissé (1).

Lorsque le licenciement pour motif économique doit être soumis à la procédure d'information et de consultation des représentants élus du personnel dans le cadre des articles L. 1233-28 à L. 1233-30 du code du travail, le document écrit d'information prévu au paragraphe 1 est remis à chaque salarié concerné, contre récépissé, à l'issue de la dernière réunion de consultation des représentants élus du personnel.

Lorsque le licenciement pour motif économique donne lieu à un plan de sauvegarde de l'emploi dans les conditions prévues aux articles L. 1233-24-2 à L. 1233-24-4 du code du travail, le document écrit d'information prévu au paragraphe 1 est remis à chaque salarié, contre récépissé, au lendemain de la notification ou de l'acquisition de la décision administrative de validation ou d'homologation du plan prévue à l'article L. 1233-57-4 du même code.

Lorsque, à la date prévue par les articles L. 1233-15 et L. 1233-39 du code du travail pour l'envoi de la lettre de licenciement, le délai de réflexion dont dispose le salarié pour faire connaître sa réponse à la proposition du contrat de sécurisation professionnelle n'est pas expiré, l'employeur lui adresse une lettre recommandée avec demande d'avis de réception :

-lui rappelant la date d'expiration du délai de réflexion ;

-et lui précisant qu'en cas de refus du contrat de sécurisation professionnelle, cette lettre recommandée constituera la notification de son licenciement.

Ainsi, lorsque la rupture du contrat de travail résulte de l'acceptation par le salarié d'un contrat de sécurisation professionnelle, l'employeur doit en énoncer le motif économique ainsi que la mention du bénéfice de la priorité de réembauche soit dans le document écrit d'information sur ce dispositif remis obligatoirement au salarié concerné par le projet de licenciement, soit dans la lettre qu'il est tenu d'adresser au salarié lorsque le délai de réponse expire après le délai d'envoi de la lettre de licenciement imposé par les articles L. 1233-15 et L. 1233-39 du code du travail, soit encore, lorsqu'il n'est pas possible à l'employeur d'envoyer cette lettre avant l'acceptation par le salarié du contrat de sécurisation professionnelle, dans tout autre document écrit, porté à sa connaissance au plus tard au moment de son acceptation.

M. [G] [J] soutient que la procédure de licenciement n'a pas été respectée en raison de l'absence d'envoi après son adhésion au contrat de sécurisation professionnelle d'une lettre de licenciement et que son licenciement doit en conséquence être qualifié comme étant dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Ceci étant, le courrier remis au salarié lors de l'entretien du 1er juin 2018 est conforme aux dispositions ainsi rappelées puisqu'il énonce le motif du licenciement économique et le bénéfice de la priorité de reembauche.

Au surplus, le non-respect de la procédure de licenciement n'entraîne ni la nullité du licenciement, ni la qualification du licenciement en licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse mais est sanctionné par l'octroi éventuel de dommages et intérêts, lesquels ne sont pas demandés en l'espèce.

En conséquence, M. [G] [J] sera débouté de la demande présentée de ce chef.

Sur le motif du licenciement :

La cause du licenciement doit s'apprécier à la date de la rupture du contrat.

Le licenciement consécutif à une restructuration afin de réduire les charges et notamment les coûts de fonctionnement,'nonobstant l'augmentation du chiffre d'affaires, est justifié.

La réorganisation de compétitivité permet à l'entreprise d'anticiper des difficultés économiques à venir en prenant des mesures de nature à éviter des licenciements ultérieurs plus importants.

Répond au critère de la sauvegarde de la compétitivité , la réorganisation mise en 'uvre pour prévenir des difficultés économiques à venir liées à des évolutions technologiques et leurs conséquences sur l'emploi ; ainsi, l'employeur peut anticiper des difficultés économiques prévisibles et mettre à profit une situation financière saine pour adapter ses structures à l'évolution de son marché dans les meilleures conditions.

En l'espèce, la SCA la Cévenole présente le contexte économique et sa situation financière dans la lettre remise à M. [G] [J] lors de l'entretien préalable du 1er juin 2018 et ainsi formulée : ' Dans le cadre du projet de licenciement pour motif économique dont vous faites l'objet, vous avez la possibilité de bénéficier d'un contrat de sécurisation professionnelle ( CSP) aux conditions définies dans le document d'information établi par Pôle emploi remis en même temps que la présente lettre.

Ce projet de licenciement repose sur les motifs suivants :

La cave a connu une forte dégradation de sa situation ces dernières années qui s'est traduite par un niveau élevé des frais de cave et une diminution des surfaces en apport, outre une récolte extrêmement faible en 2017.

Ainsi, nous avons enregistré une forte diminution : - 38 % du chiffre d'affaires sur les deux derniers trimestres par rapport à l'année précédente, puisque le CA est passé de 2.834 K euros sur la période d'octobre 2016 - mars 2017 à 1.744 K euros sur la période octobre 2017 - mars

2018, ce qui nous oblige à réduire fortement les frais de cave et notamment à supprimer votre poste de cadre technique.'

La SCA la Cévenole verse au soutien de ces éléments :

- les comptes annuels 2016 et 2017 établis par la société d'expertise comptable Fiduciaire Ardéchoise, qui confirment les données chiffrées visées dans le courrier du 1er juin 2018,

- les déclarations de productions annuelles aux services des douanes et droits indirects qui établissent une diminution du volume produit qui était de 51.043 hectolitres pour la récolte 2016, contre 22.023 hectolitres pour celle de 2017,

- un tableau de synthèse du chiffre d'affaires trimestriel qui établit une diminution de celui-ci en dessous du million d'euros pour le 4ème trimestre 2017 et le 1er trimestre 2018 pour des montants supérieurs à 1,3 million à N-1,

Pour remettre en cause ces éléments, M. [G] [J] soutient que la baisse de production de 2017 est conjoncturelle, que la SCA la Cévenole ayant souscrit une assurance perte de récolte elle a été indemnisée en conséquence, que le découpage trimestriel du chiffre d'affaires est artificiel et qu'il convient de raisonner par année, et d'observer que le résultat net a été multiplié par 13 entre 2016 et 2017.

Il en déduit que la SCA la Cévenole ne connaissait aucune difficulté économique au moment de son licenciement, et que les coopérateurs malgré la baisse de production n'ont connu aucune baisse de leur rémunération.

M. [G] [J] développe sa propre analyse sous forme d'une centaine d'items en procédant par affirmations pour dénigrer l'analyse comptable effectuée par des professionnels et remettre en cause les choix de gestion du conseil d'administration, considérant qu'il ne faut par exemple pas raisonner par coût de production par hectolitre, que les reprises d'amortissement sont le moyens de diminuer le revenu fiscal sans ponctionner dans la trésorerie, et qu'en l'absence d'une telle manipulation le résultat de 2018 aurait été supérieur à celui de 2017, pour en déduire l'absence de difficultés économiques, et la volonté de faire croire à une telle situation pour fonder son licenciement.

Ceci étant, il résulte des pièces produites par la SCA la Cévenole, qui ne sont pas susceptibles d'être remises en doute dans leur authenticité, que les difficultés économiques étaient réelles au moment du licenciement de M. [G] [J] : une baisse de volume de production de plus de 50% sur une récolte même si elle est conjoncturelle et a pu partiellement être compensée par des assurances a forcément des répercussions sur la santé économique d'une structure coopérative dont les frais fixes de fonctionnement ne vont pas diminuer pour autant et à laquelle on ne peut pas reprocher de souhaiter garantir le revenu de ses adhérents, c'est à dire de ses viticulteurs, et qui devra faire face au surplus dans les années suivantes à une augmentation du coût de ses assurances.

Ainsi, le motif économique fondant le licenciement est établi.

Sur le reclassement :

L'article L1233-4 du code du travail dispose dans sa version applicable que le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient.

Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure.

Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises.

L'article L1233-4-1 du même code dans sa version applicable, dispose que lorsque l'entreprise ou le groupe auquel elle appartient est implanté hors du territoire national, l'employeur demande au salarié, préalablement au licenciement, s'il accepte de recevoir des offres de reclassement hors de ce territoire, dans chacune des implantations en cause, et sous quelles restrictions éventuelles quant aux caractéristiques des emplois offerts, notamment en matière de rémunération et de localisation.

Le salarié manifeste son accord, assorti le cas échéant des restrictions susmentionnées, pour recevoir de telles offres dans un délai de six jours ouvrables à compter de la réception de la proposition de l'employeur. L'absence de réponse vaut refus.

Les offres de reclassement hors du territoire national, qui sont écrites et précises, ne sont adressées qu'au salarié ayant accepté d'en recevoir et compte tenu des restrictions qu'il a pu exprimer. Le salarié reste libre de refuser ces offres. Le salarié auquel aucune offre n'est adressée est informé de l'absence d'offres correspondant à celles qu'il a accepté de recevoir.

L'employeur doit se livrer à une recherche sérieuse des postes de reclassement et cette recherche doit être individuelle, s'étendre à l'entreprise prise dans ses divers établissements même s'ils sont situés dans des régions différentes ou au groupe dont elle fait partie.

L'employeur doit proposer tous les emplois disponibles en rapport avec les aptitudes professionnelles du salarié.

Il ne suffit pas que l'emploi offert appartienne à la même catégorie que le poste qu'occupait le salarié, il faut que le salarié dispose des compétences pour l'exercer ; ainsi, seuls les emplois qui ne requièrent qu'un complément de formation, même si les fonctions sont différentes doivent être proposés.

Soit l'employeur établit qu'il a recherché toutes les possibilités de reclassement au sein de l'entreprise et du groupe dont elle relève, soit l'employeur établit l'absence de tout poste disponible à l'époque du licenciement en rapport avec les compétences du salarié et en le faisant bénéficier le cas échéant d'une formation d'adaptation.

Le courrier du 1er juin 2018 énonce les propositions de reclassement qui ont été faites à M. [G] [J] dans les termes suivants :

Les recherches en interne ne nous ont pas permis d'identifier de poste permanent de reclassement à vous proposer, vu notre petite taille.

En revanche, du fait des emplois saisonniers auxquels nous pouvons avoir recours pendant les vendanges, si vous le souhaitez, nous serions en mesure de prolonger votre préavis jusqu'à la fin du mois d'octobre 2018.

Par ailleurs, nous avons également identifié une possibilité de reclassement externe auprès de l'UVICA, à un emploi de cariste en contrat à durée indéterminée à temps plein avec des horaires en journée, OEHQ (niveau 1, échelon expert), pour un salaire de base de 2.300 euros bruts pour 151,67 heures mensuelles (convention collective des caves coopératives), outre le treizième mois conventionné'.

M. [G] [J] reproche à la SCA la Cévenole de ne pas lui avoir proposé une modification de son contrat de travail pour compenser ses difficultés économiques plutôt que d'augmenter de 500 euros mensuels un autre salarié auquel une partie de ses tâches ont été confiées.

Un tel argument est inopérant dès lors que le coût d'une augmentation de 500 euros mensuels pour un salarié est sans commune mesure avec le coût d'une emploi à temps plein d'un salarié, quelque soit son niveau de rémunération.

M. [G] [J] considère que le poste de reclassement qui lui a été proposé ne correspondait pas à son niveau de compétence et était bien moins rémunéré, ce qui est contradictoire avec le fait qu'il reproche dans le même temps à son employeur de ne pas lui avoir proposé une modification à la baisse de son contrat de travail.

Enfin, M. [G] [J] reproche à la SCA la Cévenole de ne pas lui avoir proposé le poste de gérant de la cave coopérative de [Localité 5] qui dépend comme elle de l'union UVICA.

Ceci étant, ainsi que le rappelle la SCA la Cévenole, l'UVICA est un regroupement de professionnels du vin qui ne répond pas à la définition d'un groupe tel que précédemment rappelé dès lors que la SCA la Cévenole n'a aucun lien capitalistique ou économique avec les autres membres de cette union, mais uniquement des intérêts promotionnels ou commerciaux et qu'elle ne peut pas intervenir sur leur gestion.

En conséquence, M. [G] [J] ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de ce que la SCA la Cévenole aurait manqué à son obligation de recherche loyale et sérieuse de reclassement. Le licenciement économique de M. [G] [J] repose donc sur une cause réelle et sérieuse et celui-ci sera débouté de ses demandes indemnitaires.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;

Infirme le jugement rendu le 19 février 2020 par le conseil de prud'hommes d'Aubenas sauf en ce qu'il a :

3 - Sur les indemnités pour travail dissimulé (art. L2821 et suivants du code du travail)

- débouté M. [G] [J] de sa demande,

4 - Sur les dommages et intérêts pour comportement déloyal

- débouté M. [G] [J] de sa demande, conformément aux articles 6 et 9 du code de procédure civile

5 - Sur les dommages et intérêts pour dépassement du contingent annuel d'heures supplémentaires :

- débouté M. [G] [J] de sa demande conformément aux articles 6 et 9 du code de procédure civile

6 - Sur les dommages et intérêts pour non-respect des repos hebdomadaires et journaliers

- débouté M. [G] [J] de sa demande conformément aux articles 6 et 9 du code de procédure civile,

Et statuant à nouveau sur les éléments infirmés,

Déboute M. [G] [J] de sa demande de rappel de salaire et de congés payés y afférents,

Juge que le licenciement économique de M. [G] [J] est fondé sur une cause réelle et sérieuse,

Déboute M. [G] [J] de ses demandes indemnitaires subséquentes,

Condamne M. [G] [J] à verser à la SCA la Cévenole la somme de 800 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Rappelle en tant que de besoin que le présent arrêt infirmatif tient lieu de titre afin d'obtenir le remboursement des sommes versées en vertu de la décision de première instance assortie de l'exécution provisoire,

Rejette les demandes plus amples ou contraires,

Condamne M. [G] [J] aux dépens de la procédure d'appel.

Arrêt signé par le président et par la greffiere.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 5ème chambre sociale ph
Numéro d'arrêt : 20/00873
Date de la décision : 10/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-10;20.00873 ?
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