RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 20/00781 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HVKQ
CRL/DO
CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DEPARTAGE DE NIMES
20 janvier 2020
RG :17/00671
E.U.R.L. [O] ELAGAGE
C/
[D]
Grosse délivrée
le
à
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
5ème chambre sociale PH
ARRÊT DU 10 JANVIER 2023
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de NIMES en date du 20 Janvier 2020, N°17/00671
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère
GREFFIER :
Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l'audience publique du 11 Octobre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 13 Décembre 2022 et prorogé ce jour ;
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANTE :
E.U.R.L. [O] ELAGAGE
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Pierry FUMANAL, avocat au barreau de NIMES
INTIMÉ :
Monsieur [I] [D]
né le 30 Novembre 1984 à [Localité 8]
[Adresse 4]
[Localité 1]
Représenté par Me Julie REBOLLO, avocat au barreau de NIMES
Représenté par Me Elodie AMBLOT, avocat au barreau de MONTPELLIER
ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 27 Septembre 2022
FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS
M. [I] [D] a été engagé à compter du 24 septembre 2007 suivant contrat à durée déterminée de 3 mois en qualité d'élagueur par l'EURL [O] Elagage, prolongé de trois mois par un avenant du 14 décembre 2007 puis poursuivi en contrat à durée indéterminée, le 25 mars 2008.
Le contrat de travail est soumis à la convention collective des entreprises du paysage.
M. [I] [D] a été victime d'un accident sur son lieu de travail, le 13 janvier 2017, entraînant un arrêt de travail jusqu'à sa reprise le 10 avril 2017.
Le 14 avril 2017, l'EURL [O] Elagage a convoqué M. [I] [D] à un entretien préalable à un éventuel licenciement et lui a notifié une mise à pied conservatoire.
Par courrier en date du 5 mai 2017, l'EURL [O] Elagage a notifié à M. [I] [D] son licenciement pour motif personnel.
Par requête en date du 19 septembre 2017, M. [I] [D] a saisi le conseil de prud'hommes de Nîmes en contestation de son licenciement, lequel par jugement de départage en date du 20 janvier 2020, a :
- constaté que M. [I] [D] formulait ses demandes à l'encontre de l'EURL [O] Elagage et non plus à l'encontre de la S.A.R.L. [O] Elagage,
- constaté que comparait représentée par son conseil l'EURL [O] Elagage,
- déclaré nul le licenciement opéré par la défenderesse à l'encontre de M. [I] [D],
- constaté que les dispositions de l'article L1235-5-2ème du code du travail sont discriminatoires envers M. [I] [D] en ce qu'elles privent, en raison de la seule appartenance à une entreprise occupant habituellement mois de onze salarié, M. [I] [D] qui justifie d'une ancienneté d'au moins deux années au sein de l'entreprise défenderesse, des dispositions plus favorables de l'article L1235-3 du code du travail réservées aux salariés disposant d'une ancienneté d'au moins deux années licenciés abusivement par des entreprises occupant habituellement au moins onze salariés,
- constaté les dispositions discriminatoires édictées par l'article L1235-5-2ème du code du travail sont contraires aux dispositions de l'article 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966 ratifié par la République française et applicable sur le territoire national à compter du 4 février 1981 selon décret n°81-76 du 29 janvier 1981, publié au journal officiel du 1er février 1981,
- dit par conséquent qu'il convient dans les espèces, d'écarter les dispositions de l'article L1235-5-2ème du code du travail et d'appliquer à la situation de M. [I] [D] les seules dispositions de l'article L1235-3 ancien du code du travail,
- condamné l'EURL [O] Elagage à payer à M. [I] [D] la somme de 30.191, 20 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,
- dit que l'EURL [O] Elagage est redevable envers M. [I] [D] des indemnités repas antérieures au 19 septembre 2014,
- déclaré irrecevables les demandes en paiement formulées par M. [I] [D] au titre des indemnités repas pour la période antérieure au 19 septembre 2014
Et avant dire droit,
- ordonné la réouverture des débats à l'audience qui se déroulera le lundi 23 mars 2020 à 9h00 dans les locaux du conseil de prud'hommes de Nîmes,
- ordonné à M. [I] [D] à produire lors de l'audience susvisée un décompte des indemnités repas pour la période du 19 septembre 2014 au 5 mai 2017 sur laquelle a été calculée les indemnités repas en calculant celles-ci annuellement et en prenant comme référence pour chaque année le minimum garanti au 1er janvier de chacune des années 2017, 2016, 2015 et 2014 ainsi que le prévoit l'article 6b de la convention collective applicable après déduction de ses périodes d'arrêts de travail ou de congés.
Par acte du 28 février 2020, l'EURL [O] Elagage a régulièrement interjeté appel de cette décision. La procédure a été enregistrée sous le RG 20 00781.
Par jugement en date du 5 octobre 2020, le conseil de prud'hommes de Nîmes a :
- dit que la défenderesse a manqué à son obligation de sécurité envers le requérant,
- dit que la défenderesse n'a pas exécuté loyalement le contrat de travail à l'égard du requérant,
- condamné la défenderesse à payer à M. [D] les sommes suivantes:
* 1.738,71 euros au titre des indemnités de repas pour la période du 19/09/2014 au 05/05/2017, ainsi que la somme de 173,87 euros au titre de l'indemnité de congés payés y afférente,
* 2.168,60 euros au titre des indemnités journalières complémentaires ainsi que la somme de 216,86 euros au titre de l'indemnité de congés payés y afférente,
* 2.000 euros à titre de dommages et intérêts en raison du manquement de l'employeur à son obligation de sécurité,
* 40.000 euros à titre de dommages et intérêts en raison du manquement de l'employeur à son obligation de loyauté dans l'exécution du contrat de travail,
- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement,
- condamné la défenderesse au paiement des entiers dépens,
- condamné la défenderesse à payer au requérant la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Par acte du 27 octobre 2020, l'EURL [O] Elagage a régulièrement interjeté appel de cette décision. La procédure a été enregistrée sous le RG 20 02723.
Par ordonnance en date du 12 février 2021, le conseiller de la mise en état a ordonné la jonction des deux procédures et leur poursuite sous le numéro de RG 20 00781.
Par ordonnance en date du 11 juillet 2022, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 27 septembre 2022 à 16 heures et fixé à examen à l'audience du 11 octobre 2022.
Aux termes de ses dernières conclusions en date du 27 mai 2020, prises dans le cadre de la procédure 20 00781 avant jonction et en date du 27 janvier 2021 prise dans le cadre de la procédure 20 2723 avant jonction , l'EURL [O] Elagage demande à la cour de :
- déclarer recevable et bien fondé ses appels interjetés à l'encontre des jugements de départage rendu le 20 janvier 2020 et le 5 octobre 2020 par le conseil de prud'hommes de Nîmes,
- réformer les décisions querellées,
Considérant que l'avis du conseil constitutionnel, dans sa décision du 13 octobre, 2016, admettant le principe de constitutionnalité de l'article 1235-5 2ème du code du travail,
Considérant le licenciement de M. [I] [D] comme causé,
- débouter M. [I] [D] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires,
- condamner M. [I] [D] à une somme de 3.000 euros au visa des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonner la jonction du second appel enregistré devant la cour d'appel de Nîmes, devant la 5ème chambre sociale PH - RG n° 20 00781,
- le condamner aux entiers dépens.
L'EURL [O] Elagage soutient que :
- le jour de la reprise de M. [I] [D] après son arrêt de travail, la discussion a porté sur les conditions de sa reprise, le salarié estimant que n'étant pas ouvrier qualifié il n'avait pas à manipuler une tronçonneuse, et sur l'envoi dans les délais légaux de son arrêt de travail à la Mutualité sociale agricole,
- elle lui a répondu que s'il ne pouvait pas manipuler une tronçonneuse, il n'avait qu'à rentrer chez lui, ainsi que cela est exposé dans la lettre de licenciement,
- le retard dans la prise en compte de l'accident du travail ne lui est pas imputable ainsi qu'en atteste le courrier de la Mutualité sociale agricole qu'il dit verser aux débats, par lequel elle lui notifie un délai supplémentaire d'instruction de la demande,
- la motivation de la rupture repose sur les journées des 12 et 13 avril, le salarié ne souhaitant pas effectuer des tâches lourdes afin de ménager son épaule qu'il déclarait lui-même fragilisée, elle lui a confié une tâche adaptée, sur un chantier à [Localité 7] pour le compte du GFA [Localité 6] qui n'est pas isolé comme le soutient M. [I] [D], qu'il n'a pas plus accompli avec son seul sécateur les travaux qu'il prend en photo, ainsi qu'en atteste le client,
- le droit de retrait invoqué le 13 avril 2017 est dès lors dénué de fondement,
- la demande d'indemnités de repas n'est pas fondée, le conseil de prud'hommes a demandé au seul salarié de produire un tableau récapitulatif de ses demandes, sans permettre à l'employeur de produire un quelconque justificatif, étant observé que les chantiers se trouvaient à proximité du domicile des salariés qui pouvaient rentrer chez eux et que les rares fois où cela n'a pas été possible, elle leur a réglé leur repas,
- M. [I] [D] s'est livré à des actes de violences le 13 avril 2017, qui ont donné lieu à un dépôt de plainte.
En l'état de ses dernières écritures en date du 25 août 2020, M. [I] [D] demande à la cour de :
A titre principal :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
- constaté que M. [I] [D] formule ses demandes à l'encontre de l'EURL [O] Elagage et non plus à l'encontre de la S.A.R.L. [O] Elagage,
- constaté que comparait représentée par son conseil l'EURL [O] Elagage,
- déclaré nul le licenciement opéré par la défenderesse à l'encontre de M. [I] [D],
- constaté que les dispositions de l'article L 1235-5-2e du code du travail sont discriminatoires envers M. [I] [D] en ce qu'elles privent, en raison de la seule appartenance à une entreprise occupant habituellement moins de onze salariés, M. [I] [D] qui justifie d'une ancienneté d'au moins deux années au sein de l'entreprise défenderesse, des dispositions plus favorables de l'article L 1235-3 du code du travail réservées aux salariés disposant d'une ancienneté d'au moins deux années licenciés abusivement par des entreprises occupant habituellement au moins onze salariés,
- constaté les dispositions discriminatoires édictées par l'article L 1235-5 2e du code du travail sont contraires aux dispositions de l'article 26 du Pacte International relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966 ratifié par la République française et applicable sur le territoire national à compter du 4 février 1981 selon décret n°81-76 du 29 janvier 1981 publié au journal officiel du 1 er février 1981,
- dit par conséquent qu'il convient dans les espèces, d'écarter les dispositions de l'article L 1235-5 2e du code du travail et d'appliquer à la situation de M. [I] [D] les seules dispositions de l'article L 1235-3 ancien du code du travail,
- dit que l'EURL [O] élagage est redevable envers M. [I] [D] des indemnités repas en application de l'article 6b de la convention collective applicable,
- infirmer pour le surplus,
En conséquence,
- condamner l'EURL [O] Elagage au paiement de la somme de 39.034,80 euros,
- condamner l'EURL [O] Elagage au paiement de la somme 5 000 euros pour manquement à l'obligation de loyauté,
- condamner l'EURL [O] Elagage au paiement de la somme 5 000 euros pour manquement à l'obligation de sécurité,
- condamner l'EURL [O] Elagage au paiement de la somme 1738,71 euros au titre des frais de repas et 173,87 euros au titre des congés payés y afférents,
- condamner l'EURL [O] Elagage au paiement de la somme 2 168,60 euros au titre des indemnités journalières complémentaires et 216,86 euros au titre des congés payés afférents,
- enjoindre l'EURL [O] Elagage la régularisation des bulletins de salaires avec astreinte de 500 euros par jour à compter de la notification de la présente décision à intervenir,
A titre subsidiaire :
- dire et juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse ,
- condamner l'EURL [O] Elagage au paiement de la somme de 39 034.80 euros;
- condamner l'EURL [O] Elagage au paiement de la somme 5 000 euros pour manquement à l'obligation de loyauté,
- condamner l'EURL [O] Elagage au paiement de la somme 5 000 euros pour manquement à l'obligation de sécurité,
- condamner l'EURL [O] Elagage au paiement de la somme 1738,71 euros au titre des frais de repas et 173,87 euros au titre des congés payés y afférents,
- condamner l'EURL [O] Elagage au paiement de la somme 2 168,60 euros au titre des indemnités journalières complémentaires et 216,86 euros au titre des congés payés afférents,
- enjoindre l'EURL [O] Elagage la régularisation des bulletins de salaires avec astreinte de 500 euros par jour à compter de la notification de la présente décision à intervenir,
En tout état de cause :
- débouter l'EURL [O] Elagage de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires,
- condamner l'EURL [O] Elagage à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens y compris ceux de première instance.
M. [I] [D] fait valoir que :
- son employeur a décidé de le licencier en raison de son état de santé, ainsi que cela résulte du compte-rendu de l'entretien préalable établi par le personnel de la DIRECCTE l'ayant assisté à cette occasion, ce qui constitue une cause de discrimination ayant pour conséquence la nullité du licenciement,
- en raison de son ancienneté et des conséquences de son licenciement, mais également en raison des circonstances de son licenciement, il est en droit de solliciter une indemnisation à hauteur de 39 034.80 euros, et subsidiairement de confirmer le montant alloué par le conseil de prud'hommes,
- subsidiairement, si la cour ne retenait pas la nullité de son licenciement, elle devra constater que celui-ci est sans cause réelle et sérieuse, que la décision de le licencier avait été prise avant l'entretien préalable, et que les motifs invoqués sont faux, qu'il s'agisse de son refus de travailler le 12 avril 2017, alors que c'est son employeur qui l'a placé dans des conditions anormales de travail, ou des prétendues violences qu'il aurait commises à l'encontre de son employeur, la plainte déposée par celui-ci ayant été classée sans suite,
- il a dû mettre en demeure son employeur d'adresser les documents d'arrêt de travail à l'organisme social, lequel a attendu deux mois avant de le faire, le plaçant en difficulté financière en l'obligeant à faire l'avance des frais médicaux résultant de son accident de travail,
- le manquement à l'obligation de sécurité est caractérisé par le fait que son employeur l'a laissé seul au milieu d'un chantier, avec un outil inadapté,
- son employeur l'a mis à l'écart dès son retour de congés maladie, cherchant un motif pour le licencier, et n'a pas fait les démarches pour permettre la prise en charge immédiate de son arrêt maladie, ce qui caractérise un manquement à l'obligation de loyauté,
- malgré les dispositions conventionnelles, aucune indemnité journalière complémentaire ne lui a été versée lors de ses arrêts du 27 octobre au 10 novembre 2014, puis du 13 janvier 2017 au 10 avril 2017, ce qui correspond à un rappel de salaire de 2.168,60 euros,
- malgré les dispositions conventionnelles son employeur ne lui a jamais versé d'indemnité repas, alors qu'il n'est pas contesté qu'il devait rester sur les chantiers toute la journée, soit la somme de 1.738,71 euros conformément au décompte établi à la demande du conseil de prud'hommes.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues à l'audience.
MOTIFS
Demandes relatives à l'exécution du contrat de travail
* Indemnisation au titre des frais de repas
L'article 6 de la convention collective, dans sa version applicable jusqu'au 17 juillet 2020 indique que :
a) Est réputé constituer un temps normal de trajet celui qui éloigne les salariés de moins de 50 km du siège, de l'agence ou du dépôt.
b) Le salarié qui se rend par ses propres moyens sur le chantier assigné par son employeur perçoit pour ses frais de repas, s'il ne déjeune ni à l'entreprise ni à son domicile, une indemnité de panier, d'un montant égal à la valeur de 2,5 MG en vigueur au 1er janvier de l'année en cours.
c) Le salarié qui se rend sur les chantiers par les moyens de transport mis à sa disposition par l'entreprise au siège ou dans l'un de ses dépôts est indemnisé dans les conditions suivantes :
*Dans la limite du temps normal de trajet visé au a) ci-dessus, le salarié est globalement indemnisé de ses frais de panier et de déplacement par le biais d'une indemnité pour petit déplacement fixée comme suit :
- dans un rayon de 0 à 5 km du siège ou du dépôt jusqu'au chantier 3 MG
- dans un rayon de plus de 5 km jusqu'à 20 km 4 MG
- dans un rayon de plus de 20 km jusqu'à 30 km 5 MG
- dans un rayon de 30 km jusqu'à 50 km 6 MG
Le MG applicable est celui en vigueur au 1er janvier de l'année en cours.
*Au-delà du temps normal de trajet visé au a) ci-dessus, le salarié est, en outre, rémunéré pour le trajet restant comme s'il s'agissait d'un temps de travail.
L'appréciation, en durée, du temps normal de trajet de petit déplacement est déterminée par accord collectif d'entreprise ou à défaut par l'employeur après consultation du comité d'entreprise ou des délégués du personnel s'ils existent.
d) Dans les zones à faible densité de population, le temps normal de trajet peut excéder 50 km sans dépasser 70 km.
Ce temps normal de trajet est déterminé par accord collectif d'entreprise ou à défaut par l'employeur, après consultation du comité d'entreprise ou des délégués du personnel s'ils existent et ratification à la majorité du personnel.
Cet accord devra préciser les données économiques justifiant ce dépassement et fixer les conditions d'indemnisation du temps normal de trajet tel que retenu par l'accord.
Pour solliciter le paiement par son employeur d'une somme de 1.738,71 euros au titre des indemnités repas pour la période du 19/09/2014 au 05/05/2017, outre 173,87 euros au titre des congés payés y afférents, M. [I] [D] verse aux débats ses bulletins de salaire sur la période concernée, et un tableau reprenant à compter de septembre 2014,le nombre de jours travaillés et le montant de l'indemnité mensuelle de repas correspondant.
Force est de constater que ce décompte qui reprend le nombre de jours travaillés pour chaque mois, n'apporte aucun élément sur le moyen de transport utilisé ( personnel ou de l'entreprise ) et sur la distance entre le domicile, l'entreprise et le chantier concerné alors que ces différents paramètres conditionnent l'octroi ou non de l'indemnité de repas, étant observé que M. [I] [D] fonde sa demande sur le fait qu'il se rendait par ses propres moyens sur son lieu de travail alors qu'il reproche à l'EURL [O] Elagage au titre de l'obligation de sécurité et de l'exécution déloyale du contrat de travail, de l'avoir laissé seul sur un chantier sans moyen de déplacement.
M. [I] [D] sera en conséquence débouté de sa demande et la décision déférée sera infirmée en ce sens.
* Indemnités journalières complémentaires
L'article 13.1 de la convention collective indique qu'en cas d'arrêt de travail pour maladie, maternité, maladie professionnelle, accident de la vie privée, de trajet ou de travail, il est attribué le versement d'indemnités journalières en complément de celles servies par les assurances sociales agricoles.
Les indemnités journalières complémentaires sont versées dans tous les cas par l'organisme assureur y compris lorsqu'elles sont servies en application de l'article L. 1226-1 du code du travail :
' dès le 21e jour d'arrêt de travail en cas de maladie ou d'accident de la vie privée (en cas d'arrêts successifs lorsque le premier arrêt est supérieur à 20 jours, il n'y a pas de décompte d'une nouvelle période de franchise si le nouvel arrêt se produit dans les 180 jours) ;
' dès le 1er jour d'arrêt de travail en cas d'accident du travail, de trajet, de maladie professionnelle ou de maternité.
Le montant des indemnités journalières complémentaires correspond à :
' 25 % du salaire brut dans la limite du plafond des assurances sociales agricoles (TA) ;
' 70 % du salaire brut dépassant le plafond des assurances sociales agricoles (TB et TC).
Le montant de l'indemnisation est porté à 90 % du salaire brut au profit des salariés pour lesquels l'employeur a l'obligation de compléter la rémunération en vertu de l'article L. 1226-1 du code du travail et ce, pour une durée d'indemnisation variant dans les conditions des articles D. 1226-1 1° et D. 1226-2 du même code et dans le respect des délais de franchise mentionnés ci-dessus.
Le total des indemnités journalières complémentaires versées par l'organisme assureur et des prestations des assurances sociales agricoles ne doit pas excéder 100 % du salaire net du salarié.
Le salaire de référence utilisé pour le calcul des indemnités journalières complémentaires est celui visé à l'article 8.1.2 du présent accord.
Le service des indemnités journalières complémentaires est maintenu tant que les indemnités journalières du régime de base sont servies au salarié.
Leur montant est réduit dans les mêmes proportions que celui des indemnités journalières servies par les assurances sociales agricoles.
M. [I] [D] sollicite le paiement d'une somme de 2.168,60 euros à ce titre, pour ses arrêts de travail du 27 octobre au 10 novembre 2014, puis du 13 janvier au 10 avril 2017.
L'EURL [O] Elagage n'oppose aucun argument à cette demande à laquelle les premiers juges ont fait droit, autrement qu'en concluant au débouté global des demandes.
En conséquence, c'est à juste titre et par des moyens auxquels il convient de se référer que les premiers juges ont alloué cette somme à M. [I] [D], leur décision sera confirmée sur ce point.
* Erreur de qualification mentionnée sur les bulletins de salaire.
M. [I] [D] soutient qu'en raison de son diplôme : BEP agricole, option aménagement de l'espace - spécialité professionnelle : travaux forestiers obtenu le 21 novembre 2002, il avait une qualité d'élagueur ouvrier position 5 qui n'est apparue que sur ses deux derniers bulletins de salaire.
Ceci étant, la seule détention d'un diplôme ne suffit pas à déterminer le niveau de recrutement et la classification professionnelle, mais doit également être confrontée aux fonctions confiées au salarié.
En l'espèce, M. [I] [D] n'apporte aucun élément au soutien de sa demande, qu'il s'agisse des dispositions de la convention collective auxquelles il se réfère ou des tâches qui lui ont été confiées par son employeur.
En conséquence, il sera débouté de sa demande.
* Manquement à l'obligation de loyauté
L'article L1222-1 du code du travail dispose que le contrat de travail est exécuté de bonne foi.
Au soutien de sa demande de 5.000 euros de dommages et intérêts, M. [I] [D] reproche à l'EURL [O] Elagage de l'avoir volontairement mis à l'écart lors de son retour de congés et de ne pas avoir envoyé ses documents médicaux aux organismes sociaux le contraignant à avancer ses frais médicaux pendant trois mois.
Il résulte du courrier de la Mutualité sociale agricole du Languedoc en date du 24 avril 2017 que concernant l'accident survenu à M. [I] [D] le 13 janvier 2017 :
- le certificat médical initial a été adressé le 24 janvier 2017,
- la déclaration d'accident a été réceptionnée le 28 mars 2017,
- l'organisme social a notifié le recours à un délai supplémentaire d'instruction de deux mois avant de prendre sa décision sur le caractère professionnel ou non de l'accident.
Il se déduit de ces éléments que la Mutualité sociale agricole n'ayant pas les éléments lui permettant de statuer dans les 30 jours de la réception de la déclaration d'accident fixé par l'article R 751-115 du code rural et de la pêche maritime, elle a notifié conformément à l'article R 751-121 du code rural et de la pêche maritime, avant l'expiration de ce délai de 30 jours, un délai d'instruction complémentaire de deux mois.
Par suite, si la notification du délai d'instruction complémentaire n'intervient que le 24 avril 2017, c'est parce que l'organisme social n'a réceptionné la déclaration d'accident que dans les trente jours qui l'ont précédée, la mention du 28 mars 2017 dans le courrier sus visé ne pouvant s'analyser comme une erreur de plume.
Dès lors, la déclaration de l'accident du 13 janvier 2017 a été adressée avec plus de deux mois de retard par l'employeur, retardant d'autant une éventuelle décision de prise en charge au titre de la législation relative aux risques professionnels, retard dont il est résulté un préjudice pour M. [I] [D].
S'agissant en revanche de l'isolement invoqué par M. [I] [D] le jour de sa reprise de travail après son arrêt maladie, il ne porte le cas échéant que sur une journée et ne peut caractériser une exécution déloyale du contrat de travail.
En conséquence, M. [I] [D] qui n'apporte aucune donnée chiffrée au soutien de sa demande de dommages et intérêts qui permettrait de mesurer l'étendue de l'avance financière qu'il a du fournir pour la prise en charge de ses soins, sera justement indemnisé de son préjudice par une somme de 1.000 euros.
* Manquement à l'obligation de sécurité
Selon l'article L4121-1 du code du travail, l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.
Ces mesures comprennent :
1° Des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail ;
2° Des actions d'information et de formation ;
3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.
L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes.»
L'article L.4121-2 précise que l'employeur met en oeuvre les mesures prévues à l'article L. 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants :
1° Eviter les risques ;
2° Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités ;
3° Combattre les risques à la source ;
4° Adapter le travail à l'homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé ;
5° Tenir compte de l'état d'évolution de la technique ;
6° Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n'est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux ;
7° Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel, tels qu'ils sont définis aux articles L. 1152-1 et L. 1153-1 ;
8° Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle ;
9° Donner les instructions appropriées aux travailleurs.»
En l'espèce, M. [I] [D] reproche à l'EURL [O] Elagage, au soutien de sa demande de 5.000 euros de dommages et intérêts, de l'avoir laissé seul et isolé sur un chantier avec un matériel inadapté et verse au soutien de sa demande :
- des photographies d'une allée d'arbres avant et après taille, un des clichés contenant en gros plan un sécateur,
- un échange de messages SMS dont la date est illisible, présenté comme étant du 12 avril 2017, le premier message adressé par le salarié à son employeur ' 7h30-16h sur le chantier, sans pause j'ai pas mangé vu que tu m'as laissé ni repas, ni camion pour acheter à manger, ça fait 2h supp, ne les oublie pas à la fin du mois. Le travail demandé à été fait en fonction de l'outillage( simple sécateur ) mis à disposition', la réponse de l'employeur ' la même demain' et la réponse du salarié ' tant que tu payes toutes les heures ça me va',
- un courrier daté du 13 avril 2017 dans lequel M. [I] [D] informe son employeur qu'il fait valoir son droit de retrait au motif que sa sécurité n'est pas garantie ' je suis seul et sans véhicule, il pourrait arriver n'importe que et se passer plusieurs heures avant que quelqu'un n'intervienne. Je tient à signaler qu'il est impossible d'effectuer la tâche confiée avec le matériel mis à disposition'.
Pour remettre en cause ces éléments, l'EURL [O] Elagage fait valoir que conformément au souhait de M. [I] [D], il a été affecté à un chantier où il ne devait pas utiliser de tronçonneuse pour ménager son épaule et avait pour tâche de couper du lierre, le dit chantier se situait à [Localité 7], au GFA de [Localité 6], le client et ses ouvriers agricoles étant présents sur place.
Force est de constater que les photos présentées par M. [I] [D] comme un résumé de sa journée de travail ne résistent pas à l'analyse dès lors qu'elles semblent signifier qu'avec sa seule pince coupante il aurait procédé à l'élagage de plus d'une dizaine d'arbres et aurait réussi ainsi équipé à couper des branches d'une section de plusieurs dizaines de centimètres. Ces clichés n'ont dès lors aucun caractère probant, pas plus que les affirmations de M. [I] [D] selon lesquelles il aurait dû, et serait parvenu à procéder avec un sécateur à l'élagage d'une allée d'arbres.
Le plan versé par l'EURL [O] Elagage aux débats, non contesté par M. [I] [D], démontre que les terrains du GFA se situent à proximité de la commune de [Localité 7].
Par ailleurs, les échanges de messages en fin de journée entre M. [I] [D] et l'EURL [O] Elagage ne font état d'aucune récrimination de la part de M. [I] [D] dont le seul souci est d'être rémunéré pour toutes ses heures, sans pause repas, pour la journée écoulée et pour celle à venir ( ' tant que tu payes toutes les heures ça me va').
Enfin, M. [I] [D] n'objecte aucun argument quant au fait qu'il serait resté inactif, selon les déclarations du gérant du GFA, présent sur les lieux, qui en aurait informé l'EURL [O] Elagage.
En conséquence, et malgré le droit de retrait formalisé le lendemain, M. [I] [D] ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de ce que son employeur serait contrevenu à son obligation de sécurité à son égard.
Demandes relatives à la rupture du contrat de travail
M. [I] [D] a été licencié pour cause réelle et sérieuse par courrier en date du 5 mai 2017 rédigé dans les termes suivants :
'Monsieur,
A la suite de notre entretien du 27 Avril 2017, je suis contraint de vous notifier par la présente, votre licenciement pour motif personnel.
Les raisons qui motivent cette décision, et qui vous ont été exposées à cette occasion sont les suivantes :
Vous avez été embauché le 24 Septembre 2007 en qualité d'ouvrier élagueur.
Suite à un arrêt de travail et conformément aux préconisations de votre médecin, vous avez repris l'activité le 10 Avril 2017, alors que nous intervenions sur le chantier du GFA « [Localité 6] » à [Localité 7].
Ce même jour, vous m'avez indiqué que vous ne pouviez pas utiliser la tronçonneuse, ni tirer les branches, ce qui représente, au vu de vos fonctions, la majeure partie de votre activité.
Vous avez quitté le 11 avril soit le lendemain votre poste de travail afin de vous rendre selon vos dires à l'inspection du travail.
Dans ce contexte, de tension je vous ai attribué une fonction consistant à couper du lierre à hauteur d'homme sur le chantier en cours, soit celui du GFA « [Localité 6] ». Le gérant Monsieur [T] m'a contacté pour m'indiquer que vous ne souhaitiez pas effectuer d'activité, et que vous préfériez rester inactif. Cette situation ne peut valablement perdurer, et cause à l'entreprise un déficit de crédibilité certain, que le client n'a pas manqué de me faire remarquer.
Je vous ai fait légitiment remarqué l'ambiguïté de votre situation, vous avez alors, prétexté au travers d'une correspondance du 13 Avril vouloir « vous retirer du chantier car votre sécurité n'était pas garantie ». La mission confiée n'a jamais présenté une dangerosité particulière, et depuis les 9 années que vous travaillez à mes côtés vous ne pouvez ignorer que la sécurité a toujours été une préoccupation essentielle tenant le risque de notre activité. D'ailleurs, vous n'avez jamais été blessé à l'occasion de l'exercice de vos fonctions.
Ce même 13 avril, alors que nous étions au dépôt de [Localité 5], vous avez exercé des violences physiques sur ma personne, cherchant à me pousser à bout, vous vous êtes assis au sol dans le bureau, alors que je vous ai demandé de reprendre, en toute logique voter travail, vous avez à nouveau refusé d'exercer l'activité pour laquelle vous êtes rémunéré. Une plainte pénale a été déposée suite à ces faits, puisque vous m'avez bousculé.
L'ensemble de ces raisons m'a conduit à vous notifier une mise à pied disciplinaire, et conservatoire.
Le refus manifeste d'exercer votre travail, pour des raisons de sécurité fantaisistes, équivaut à une insubordination caractérisée, et empêche que la relation de confiance, et de respect nous liant jusqu'alors, ne perdure.
C'est la raison pour laquelle j'ai décidé de vous licencier pour ces faits qui constituent une cause réelle et sérieuse de rupture de votre contrat à durée indéterminée, et cela à effet immédiat.
La mise à pied, ainsi que votre ancienneté vous seront réglées au titre du préavis et de l'indemnité de licenciement.
Il en est de même en ce qui concerne le solde de vos congés payés.
Enfin, je vous rappelle qu'à compter de la rupture de votre contrat de travail, vous avez la possibilité de conserver le bénéfice des régimes de santé et de prévoyance en vigueur au sein de l'entreprise, et ce durant, une partie de votre période d'indemnisation par l'assurance chômage.'
Selon l'article L. 1235-1 du code du travail, en cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.
La cause réelle du licenciement est celle qui présente un caractère d'objectivité. Elle doit être existante et exacte. La cause sérieuse concerne une gravité suffisante pour rendre impossible la poursuite des relations contractuelles. La lettre de licenciement doit énoncer des motifs précis et matériellement vérifiables. La datation dans cette lettre des faits invoqués n'est pas nécessaire.
Le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige doit être apprécié au vu des éléments fournis par les parties, étant précisé que, si un doute subsiste, il profite au salarié, conformément aux dispositions de l'article L. 1235-1 du code du travail dans sa version applicable à l'espèce.
Si la lettre de licenciement doit énoncer des motifs précis et matériellement vérifiables, l'employeur est en droit, en cas de contestation, d'invoquer toutes les circonstances de fait qui permettent de justifier ce motif.
* s'agissant de la nullité du licenciement
Aux termes de l'article L 1132-1 du code du travail dans sa version applicable au litige, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m'urs, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une prétendue race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, ou en raison de son état de santé, de sa perte d'autonomie ou de son handicap, de sa capacité à s'exprimer dans une langue autre que le français.
Aux termes de l'article L 1132-4 du code du travail, toute disposition ou tout acte pris à l'égard d'un salarié en méconnaissance des dispositions du présent chapitre ou du II de l'article 10-1 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique est nul.
Aux termes de l'article L 1134-1 du même code, lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance des dispositions du chapitre II, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations.
Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.
En considération de ces dispositions, s'il appartient au salarié qui se prétend lésé par une mesure discriminatoire de soumettre au juge des éléments de faits susceptibles de caractériser une atteinte au principe de non-discrimination, il incombe à l'employeur, s'il conteste le caractère discriminatoire de cette mesure, d'établir que la disparité de situation ou la différence de rémunération constatée est justifiée par des critères objectifs, étrangers à toute discrimination.
En l'espèce, M. [I] [D] soutient que son licenciement est fondé sur une discrimination en raison de son état de santé et avait été décidé pour ce motif avant l'entretien préalable. Il verse en ce sens le compte-rendu de l'entretien préalable établi par son conseiller, duquel il isole deux phrases : la première en réponse à la question de M. [I] [D] ' j'aimerais savoir pourquoi dès le premier jour tu cherches à me licencier au lieu de me donner les papiers, que je me soigne et que je revienne travailler; Pourquoi'', ' parce que j'en avais jusque là c'est la goutte d'eau' et, la seconde, suite à l'intervention de M. [I] [D] ' parce que je me fais mal, je perds mon travail et c'est la goutte d'eau' ' non, tu comprends, quinze jours avant tu te fais mal à ton pouce'.
En réponse à ces éléments, l'EURL [O] Elagage fait observer que le motif du licenciement n'est pas l'arrêt de travail de M. [I] [D] mais le comportement qu'il a adopté à compter de son retour d'arrêt de travail, refusant de travailler.
Il ressort de la lecture in extenso du compte-rendu d'entretien préalable qu'à cette occasion M. [I] [D] a formulé de nombreux griefs couvrant ses neuf années de travail envers son employeur ( niveau de rémunération, paniers repas, documents sur les arrêts de travail ) qui s'est retranché derrière les démarches effectuées ou non par son comptable, et qui a insisté sur le refus de travail depuis le retour d'arrêt maladie, lequel faisait suite à un refus de rupture conventionnelle et de nombreuses autres période d'absences ( 'regarde tes bulletins de paie, ils ne sont jamais complets').
Dès lors, aucune mesure discriminatoire n'est établie, les griefs invoqués n'étant pas en lien l'état de santé de M. [I] [D].
Par suite, le licenciement n'est entaché d'aucune nullité et la décision déférée sera infirmée en ce sens.
* s'agissant du respect de la procédure de licenciement
Au terme de l'article L 1232-2 du code du travail, l'employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant toute décision, à un entretien préalable.
La convocation est effectuée par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre indique l'objet de la convocation.
L'entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation.
M. [I] [D] soutient que la procédure de licenciement n'a pas été respectée en raison de la décision de licencier prise dès l'entretien préalable, et en déduit que son licenciement doit être considéré comme dépourvu de cause réelle et sérieuse.
S'il est incontestable que lors de l'entretien préalable, l'employeur a annoncé en fin d'entretien à M. [I] [D] ' on a calculé ton solde de tout compte', cela ne signifie pas pour autant que la décision de rompre le contrat de travail était déjà prise, ce calcul pouvant signifier également que l'employeur s'est posé la question du coût financier maximal de la procédure disciplinaire qu'il engageait en adressant la convocation à l'entretien préalable.
Au surplus, le non-respect de la procédure de licenciement n'entraîne ni la nullité du licenciement, ni la qualification du licenciement en licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse mais est sanctionné par l'octroi éventuel de dommages et intérêts, lesquels ne sont pas demandés en l'espèce.
En conséquence, M. [I] [D] sera débouté de la demande présentée de ce chef.
* sur l'existence d'une cause réelle et sérieuse
Il ressort de la lettre de licenciement que l'EURL [O] Elagage a retenu deux séries de griefs au soutien de sa décision de mise à pied conservatoire : le refus de travailler et les violences commises à l'égard de M. [O] son gérant, mais ne formule qu'un seul grief dans le cadre de la décision de licenciement pour cause réelle et sérieuse, abandonnant la qualification de faute grave, soit ' Le refus manifeste d'exercer votre travail, pour des raisons de sécurité fantaisistes, équivaut à une insubordination caractérisée, et empêche que la relation de confiance, et de respect nous liant jusqu'alors, ne perdure.
C'est la raison pour laquelle j'ai décidé de vous licencier pour ces faits qui constituent une cause réelle et sérieuse de rupture de votre contrat à durée indéterminée,'
La matérialité du refus de travailler pour des raisons de sécurité est établie et non contestée par M. [I] [D] puisqu'elle résulte de son courrier du 13 avril 2017 par lequel il informe son employeur de son droit de retrait.
Ces faits ont été analysés dans le cadre de la demande de M. [I] [D] quant au manquement de l'employeur à l'obligation de sécurité.
Il en résulte que le grief est constitué et que par la perte de confiance et l'incertitude quant à l'accomplissement des taches confiées à son salarié qu'elle provoque chez l'employeur, il constitue une cause réelle et sérieuse qui empêche la poursuite de la relation de travail.
En conséquence, M. [I] [D] sera débouté de sa demande tendant à voir qualifier son licenciement comme étant dénué de cause réelle et sérieuse et des ses demandes indemnitaires subséquentes.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;
Infirme le jugement rendu le 20 janvier 2020 par le conseil de prud'hommes de Nîmes sauf en ce qu'il a :
- constaté que M. [I] [D] formulait ses demandes à l'encontre de l'EURL [O] Elagage et non plus à l'encontre de la S.A.R.L. [O] Elagage,
- constaté que comparait représentée par son conseil l'EURL [O] Elagage,
- déclaré irrecevables les demandes en paiement formulées par M. [I] [D] au titre des indemnités repas pour la période antérieure au 19 septembre 2014
Et avant dire droit,
- ordonné la réouverture des débats à l'audience qui se déroulera le lundi 23 mars 2020 à 9h00 dans les locaux du conseil de prud'hommes de Nîmes,
- ordonné à M. [I] [D] à produire lors de l'audience susvisée un décompte des indemnités repas pour la période du 19 septembre 2014 au 5 mai 2017 sur laquelle a été calculée les indemnités repas en calculant celles-ci annuellement et en prenant comme référence pour chaque année le minimum garanti au 1er janvier de chacune des années 2017, 2016, 2015 et 2014 ainsi que le prévoit l'article 6b de la convention collective applicable après déduction de ses périodes d'arrêts de travail ou de congés.
Infirme le jugement rendu le 5 octobre 2020 par le conseil de prud'hommes de Nîmes sauf en ce qu'il a :
- dit que la défenderesse n'a pas exécuté loyalement le contrat de travail à l'égard du requérant,
- condamné la défenderesse à payer à M. [D] les sommes suivantes:
* 2.168,60 euros au titre des indemnités journalières complémentaires ainsi que la somme de 216,86 euros au titre de l'indemnité de congés payés y afférente,
- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement,
- condamné la défenderesse au paiement des entiers dépens,
Et statuant à nouveau sur les éléments infirmés,
Condamne l'EURL [O] Elagage à verser à M. [I] [D] la somme de 1.000 euros de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de loyauté,
Déboute M. [I] [D] de ses autres demandes indemnitaires présentées au titre de l'exécution du contrat de travail,
Juge que le licenciement notifié par l'EURL [O] Elagage à M. [I] [D] n'est entaché d'aucune nullité et qu'il est fondé sur une cause réelle et sérieuse,
Déboute M. [I] [D] de ses demandes indemnitaires présentées au titre de la rupture du contrat de travail,
Condamne M. [I] [D] à verser à l'EURL [O] Elagage la somme de 700 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette les demandes plus amples ou contraires,
Rappelle en tant que de besoin que le présent arrêt infirmatif tient lieu de titre afin d'obtenir le remboursement des sommes versées en vertu de la décision de première instance assortie de l'exécution provisoire,
Condamne M. [I] [D] aux dépens de la procédure d'appel.
Arrêt signé par le président et par la greffiere.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,