Ordonnance n° 23/07
N° RG 23/00008 - N° Portalis DBVH-V-B7H-IVMM
J.L.D. NIMES
04 janvier 2023
[X]
C/
LE PREFET DU GARD
COUR D'APPEL DE NÎMES
Cabinet du Premier Président
Ordonnance du 05 JANVIER 2023
Nous, Madame Alexandra BERGER, Conseillère à la Cour d'Appel de NÎMES, conseiller désigné par le Premier Président de la Cour d'Appel de NÎMES pour statuer sur les appels des ordonnances des Juges des Libertés et de la Détention du ressort, rendues en application des dispositions des articles L 742-1 et suivants du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit de l'Asile (CESEDA), assisté de Mme Emmanuelle PRATX, Greffière,
Vu l'arrêté préfectoral portant obligation de quitter le territoire national en date du 26 mai 2022 notifié le même jour, ayant donné lieu à une décision de placement en rétention en date du 6 décembre 2022, notifiée le même jour à 10h30 concernant :
M. [D] [X]
né le 27 Mai 1998 à ORAN (ALGERIE)
de nationalité Algérienne
Vu l'ordonnance en date du 8 décembre 2022 rendue par le Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal Judiciaire de Nîmes portant prolongation du maintien en rétention administrative de la personne désignée ci-dessus ;
Vu la requête reçue au Greffe du Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal Judiciaire de Nîmes le 3 janvier 2023 à 14h43, enregistrée sous le N°RG 23/41 présentée par Mme le Préfet du Gard ;
Vu l'ordonnance rendue le 04 Janvier 2023 à 11h03 par le Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal de NÎMES sur seconde prolongation, qui a :
* Ordonné pour une durée maximale de 30 jours commençant à l'expiration du précédent délai de 28 jours déjà accordé, le maintien dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, de M. [D] [X];
* Dit que la mesure de rétention prendra fin à l'expiration d'un délai de 30 jours à compter du 5 janvier 2023 à 10h30,
Vu l'appel de cette ordonnance interjeté par Monsieur [D] [X] le 04 Janvier 2023 à 15h59 ;
Vu l'absence du Ministère Public près la Cour d'appel de NIMES régulièrement avisé ;
Vu la présence de Monsieur [N] [H], représentant le Préfet du Gard, agissant au nom de l'Etat, désigné pour le représenter devant la Cour d'Appel en matière de Rétention administrative des étrangers, entendu en ses observations ;
Vu l'assistance de Madame [K] [I] [F] interprète en langue arabe inscrit sur la liste des experts de la cour d'appel de Nîmes,
Vu la comparution de Monsieur [D] [X], régulièrement convoqué ;
Vu la présence de Me Laurie LE SAGERE, avocat de Monsieur [D] [X] qui a été entendu en sa plaidoirie ;
MOTIFS
Monsieur [D] [X] a reçu notification le 26 mai 2022 d'un arrêté du Préfet du Gard du même jour lui faisant obligation de quitter le territoire national sans délai avec interdiction de retour pendant un an.
Monsieur [D] [X] a fait l'objet d'une interpellation à [Localité 1] le 5 décembre 2022 à13h35.
Par arrêté de la même préfecture en date du 6 décembre 2022 et qui lui a été notifié le jour même à 10h30, il a été placé en rétention administrative aux fins d'exécution de la mesure d'éloignement.
Par requêtes du 7 décembre 2022, Monsieur [D] [X] et le Préfet du Gard ont respectivement saisi le Juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Nîmes d'une contestation de ce placement en rétention et d'une demande en prolongation de la mesure.
Par ordonnance prononcée le 8 décembre 2022 à 16h03, le Juge des libertés et de la détention de Nîmes a rejeté les exceptions de nullité soulevées ainsi que les moyens présentés par Monsieur [D] [X] et ordonné la prolongation de sa rétention administrative pour vingt-huit jours ; ordonnance confirmée en appel le 9 décembre 2022.
Sur requête préfectorale du 3 janvier 2023, le juge des libertés et de la détention de Nîmes a ordonné, le 4 janvier 2023 à 11h03, la prolongation de la rétention administrative de Monsieur [D] [X] pour trente jours.
Monsieur [D] [X] a interjeté appel de cette ordonnance le 4 janvier 2023 à 15h59.
Sur l'audience, Monsieur [D] [X] indique qu'il a des problème au niveau du genou, une déchirure et que ces problèmes lui ont été révélées au mois de janvier après une IRM au mois de décembre. Il doit subir une intervention chirurgie. Sur son refus de s'exprimer devant le consulat, il explique qu'il était malade et stressé ce jour là. Il rajoute qu'il souhaite bénéficier d'une nouvelle chance.
Son avocat se désiste du moyen tiré de l'irrégularité de la requête en prolongation de la mesure. Sur le fond, elle soutient l'absence de diligences suffisantes et les éléments médicaux transmis récemment à Monsieur [D] [X].
Monsieur le Préfet pris en la personne de son représentant demande la confirmation de l'ordonnance dont appel. Il rappelle l'OQTF dont il fait l'objet. Il rappelle les diligences effectuées par la Préfecture et les enquêtes en cours avec relance de la part de la Préfecture. Une audition par la Tunisie doit avoir lieu ce jour.
SUR LA RECEVABILITE DE L'APPEL :
L'appel interjeté par Monsieur [D] [X] à l'encontre d'une ordonnance du Juge des libertés et de la détention du Tribunal judiciaire de Nîmes prononcée en sa présence le 4 janvier 2023 à 11h03, a été relevé dans les délais légaux et conformément aux dispositions des articles L.743-21, R.743-10 et R.743-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Il est donc recevable.
SUR LES MOYENS ET ÉLÉMENTS NOUVEAUX INVOQUÉS EN CAUSE D'APPEL:
L'article L.743-11 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose: « A peine d'irrecevabilité, prononcée d'office, aucune irrégularité antérieure à une audience à l'issue de laquelle le juge des libertés et de la détention a prolongé la mesure ne peut être soulevée lors d'une audience ultérieure »
L'article 563 du Code de Procédure Civile ajoute encore que « pour justifier en appel les prétentions qu'elles avaient soumises au premier juge, les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux, produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves. »
En l'espèce, ne restent recevables que le moyen d'irrecevabilité de la requête en prolongation sur laquelle l'ordonnance dont appel a statué et les moyens de fond, même nouveaux en appel. Les moyens soulevé tenant à l'absence de diligences et de perspectives d'éloignement sont des moyens de fond recevable.
SUR LE FOND :
Au motif de fond sur son appel, Monsieur [D] [X] soutient que l'administration française ne démontre pas avoir engagé les démarches utiles et nécessaires à son départ, et que par voie de conséquence sa rétention ne se justifie plus .
Selon l'article L.742-4 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, après la première période de prolongation de 28 jours depuis l'expiration du délai de quarante-huit heures mentionné à l'article L.742-1, le juge peut être à nouveau saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours dans les cas suivants:
« 1° en cas d'urgence absolue ou de menace d'une particulière gravité pour l'ordre public,
2° lorsque l'impossibilité d'exécuter la décision d'éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l'intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l'obstruction volontaire faite à son éloignement,
3° lorsque la décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison :
a) du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l'exécution de la décision d'éloignement,
b) de l'absence de moyens de transport. »
La prolongation de la rétention court alors « à compter de l'expiration de la précédente période de rétention et pour une nouvelle période d'une durée maximale de trente jours. La durée maximale de la rétention n'excède alors pas soixante jours ».
Ces dispositions doivent s'articuler avec celles de l'article L.741-3 du même code, selon lesquelles il appartient au juge judiciaire d'apprécier la nécessité du maintien en rétention et de mettre fin à la rétention administrative lorsque les circonstances de droit ou de fait le justifient, un étranger ne pouvant être placé ou maintenu en rétention « que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet ».
En l'espèce, le consulat d'Algérie a été sollicité le 14 décembre 2022 et Monsieur [D] [X] a refusé de s'exprimer lors de son audition, sans qu'il justifie des problèmes de santé ayant justifié ce refus. Une audition par le consulat de Tunisie a été organisée ce jour. Manifestement, l'administration a diligenté les démarches nécessaires à l'exécution de la mesure.
La délivrance d'un laissez-passer ou tout autre document de voyage ne peut être délivré que dès lors que la nationalité et donc l'identité de l'intéressé a été formellement établie. En l'état d'une personne dépourvue de pièces d'identité et de droit au séjour, les recherches propres à identifier l'origine et la nationalité de celle-ci sont incontournables et retardent d'autant la délivrance du titre de voyage.
Les circonstances et conditions exigées par l'article L742-4 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont donc satisfaites et la requête en prolongation de la rétention administrative de Monsieur [D] [X] fondée en droit.
SUR LA SITUATION PERSONNELLE DE MONSIEUR [D] [X] :
Monsieur [D] [X], présent irrégulièrement en France est dépourvu de passeport et de pièces administratives pouvant justifier de son identité et de son origine de telle sorte qu'une assignation à résidence judiciaire est en tout état de cause exclue par les dispositions de l'article L743-13 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Monsieur [D] [X] ne justifie de plus d'aucune adresse ni domicile stables en France, ne démontre aucune activité professionnelle et ne dispose d'aucun revenu ni possibilité de financement pour assurer son retour dans son pays. Il ne produit aucun document attestant de l'incompatibilité de la mesure avec son état de santé.
Il est l'objet d'une mesure d'éloignement en vigueur, telle que précitée, et qui fait obstacle à sa présence sur le sol français.
Il s'en déduit que la prolongation de sa rétention administrative demeure justifiée et nécessaire aux fins qu'il puisse être procédé effectivement à son éloignement.
Il convient par voie de conséquence de confirmer l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, en matière civile et en dernier ressort,
Vu l'article 66 de la constitution du 4 octobre 1958,
Vu les articles L.741-1, L.742-1 à L.743-9, R.741-3 et R.743-1 à R.743-19, L.743.21 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
DÉCLARONS recevable l'appel interjeté par Monsieur [D] [X] ;
CONFIRMONS l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions ;
RAPPELONS que, conformément à l'article R.743-20 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile, les intéressés peuvent former un pourvoi en cassation par lettre recommandée avec accusé de réception dans les deux mois de la notification de la présente décision à la Cour de cassation 5 quai de l'Horloge 4ème étage, 75055 PARIS CEDEX 05.
Fait à la Cour d'Appel de NÎMES,
le 05 Janvier 2023 à
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,
' Notification de la présente ordonnance a été donnée ce jour au Centre de rétention administrative de [Localité 2] à [D] [X], par l'intermédiaire d'un interprète en langue arabe.
Le à H
Signature du retenu
Copie de cette ordonnance remise, ce jour, par courriel, à :
Monsieur [D] [X], pour notification au CRA
Me Laurie LE SAGERE, avocat
M. Le Préfet du Gard
M.Le Directeur du CRA de NIMES
Le Ministère Public près la Cour d'Appel de NIMES
M. / Mme Le Juge des libertés et de la détention