La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/11/2022 | FRANCE | N°20/016241

France | France, Cour d'appel de nîmes, 4r, 22 novembre 2022, 20/016241


ARRÊT No

R.G : No RG 20/01624 - No Portalis DBVH-V-B7E-HXX3
EM/DO

POLE SOCIAL DU TJ D'AVIGNON
27 février 2020

RG:18/1087

S.A. PAREXGROUP

C/

CPAM DU VAUCLUSE
[M]

Grosse délivrée
le
à

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 22 NOVEMBRE 2022

APPELANTE :

S.A. PAREXGROUP
[Adresse 2]
[Localité 6]

représentée par Me Jacques BELLICHACH, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉS :

CPAM DU VAUCLUSE
[Adresse 3]
[Localité 4]

représenté par M. [U] en ve

rtu d'un pouvoir général

Monsieur [W] [M]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 5]

représenté par Me Emilie MILLION-ROUSSEAU de la SELARL RACINE, avocat au barreau de MARSEILLE substitué...

ARRÊT No

R.G : No RG 20/01624 - No Portalis DBVH-V-B7E-HXX3
EM/DO

POLE SOCIAL DU TJ D'AVIGNON
27 février 2020

RG:18/1087

S.A. PAREXGROUP

C/

CPAM DU VAUCLUSE
[M]

Grosse délivrée
le
à

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 22 NOVEMBRE 2022

APPELANTE :

S.A. PAREXGROUP
[Adresse 2]
[Localité 6]

représentée par Me Jacques BELLICHACH, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉS :

CPAM DU VAUCLUSE
[Adresse 3]
[Localité 4]

représenté par M. [U] en vertu d'un pouvoir général

Monsieur [W] [M]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 5]

représenté par Me Emilie MILLION-ROUSSEAU de la SELARL RACINE, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Alexis RINGUE, avocat au barreau de MARSEILLE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 945-1 du code de Procédure Civile, sans opposition des parties.
Elle en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère

GREFFIER :

Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 13 Septembre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 22 Novembre 2022.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 22 Novembre 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 11 avril 2013, M. [W] [M], salarié de la SA Parexgroup à compter du 1er septembre 2001 en qualité de conducteur de ligne, a adressé à la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse une demande de reconnaissance de maladie professionnelle pour "hernie discale". Le certificat médical initial en date du 11 janvier 2013, établi par le Dr [E] mentionnait " hernie discale L4-L5 foraminale gauche suite à des efforts de soulèvements et rotations".

Le questionnaire salarié a été renseigné le 22 mai 2013 et le questionnaire employeur n'est pas daté. Le colloque médico-administratif en date du 29 août 2013 a conclu à la prise en charge de la pathologie au titre de la législation relative aux risques professionnels.

Par décision en date du 19 septembre 2013, la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse a notifié à la SA Parexgroup la prise en charge au titre de la législation relative aux risques professionnels de la pathologie déclarée par M. [W] [M] le 12 avril 2013, "sciatique par hernie discale L4-L5" inscrite au tableau 98 des maladies professionnelles "affections chroniques du rachis lombaire provoquées par la manutention manuelle de charges lourdes".

Sur contestation de la SA Parexgroup, la Commission de Recours Amiable de la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse, dans sa séance du 14 janvier 2014, a confirmé la prise en charge de la pathologie du 11 janvier 2013, déclarée par M. [W] [M] le 12 avril 2013 au titre de la législation relative aux risques professionnels.

Par décision du 5 mars 2014, la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse a alloué à M. [W] [M] une rente à compter du 13 janvier 2014, pour un taux d'incapacité permanente partielle de 13% dont 1% de taux professionnel en raison de " séquelles douloureuses et fonctionnelles d'une lombosciatique gauche par hernie discale L4L5 gauche : persistance de douleurs nécessitant un traitement occasionnel et une gêne fonctionnelle avec signe de Lasègue gauche."

La SA Parexgroup a saisi, le 10 mars 2014, le tribunal des affaires de sécurité sociale des Hauts de Seine d'un recours contre cette décision, lequel par jugement du 20 mars 2018 s'est dessaisi au profit du tribunal des affaires de sécurité sociale de Vaucluse.

Par jugement en date du 27 février 2020, le tribunal judiciaire d'Avignon, désormais compétent pour connaître de ce litige a :
- débouté la SA Parexgroup de l'intégralité de ses demandes,
- confirmé la décision de la Commission de Recours Amiable de la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse du 14 janvier 2014,
- déclaré opposable à la SA Parexgroup la maladie professionnelle déclarée par M. [W] [M] le 11 janvier 2013,
- condamné la SA Parexgroup à payer les entiers dépens de l'instance.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée le 2 juillet 2020, la SA Parexgroup a interjeté appel de cette décision qui lui a été notifiée par courrier du greffe daté du 27 février 2020 mais pour lequel aucun accusé réception ne figure au dossier. Enregistrée sous le numéro RG 20 01624, l'examen de cette affaire a été appelé à l'audience du 13 septembre 2022.

Au terme de ses conclusions écrites, déposées et soutenues oralement lors de l'audience, la SA Parexgroup demande à la cour de :

- infirmer dans toutes ses dispositions le jugement du tribunal judiciaire d'Avignon du 27 février 2020,

Et statuant à nouveau,
A titre principal,
- dire que faute d'avoir caractérisé l'atteinte radiculaire de topographie concordante, l'affection de l'assuré constitue une maladie hors tableau,
- dire en conséquence que la déclaration de maladie professionnelle devait être instruite selon le 4ème alinéa de l'article L 461-1 du code de la sécurité sociale,
- dire que la condition relative au taux de 25% posée par les dispositions du 4ème alinéa de l'article L 461-1 du code de la sécurité sociale n'est pas remplie en l'espèce,
- dire que la maladie déclarée par l'assuré ne pouvait donc être prise en charge au titre des maladies professionnelles,

Subsidiairement,
- constater que M. [W] [M] ne remplit pas les conditions du tableau no98 des maladies professionnelles au regard des travaux énumérés par ledit tableau,
- constater que M. [W] [M] ne remplit pas les conditions du tableau no98 des maladies professionnelles au regard du délai de prise en charge,

En conséquence de tout ce qui précède,
- déclarer inopposable au fond la décision de reconnaissance prise par la caisse ainsi que la décision confirmative de la CRA.

Au soutien de ses demandes, la SA Parexgroup, après avoir rappelé la législation applicable et la jurisprudence subséquente, considère que la Caisse Primaire d'assurance maladie n'établit pas que la pathologie déclarée par M. [W] [M] correspond à celle visée au tableau 98 des maladies professionnelles, faute de caractériser l'atteinte radiculaire de topographie concordante. Elle en déduit que la pathologie déclarée est une simple hernie discale L4L5 et qu'elle ne pouvait être prise en charge qu'au titre du 4ème alinéa de l'article L 461-1 du code de la sécurité sociale, lequel impose un taux d'incapacité permanente partielle d'au moins 25% et une transmission pour avis au Comité Régional de Reconnaissance des Maladies Professionnelles.

M. [W] [M] présentant un taux d'incapacité permanente partielle de 13% pour une maladie hors tableau, elle en déduit que la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse ne pouvait pas la prendre en charge au titre de la législation relative aux risques professionnels.

Subsidiairement, la SA Parexgroup observe que le tableau 98 des maladies professionnelles suppose une "manutention habituelle de charges lourdes", et que M. [W] [M] a été affecté sur des postes de conducteur de ligne, qui consistent principalement dans la supervision à partir d'un écran de contrôle de la chaîne de production, et qui n'implique pas de port de charges sauf à titre accessoire ; et de préparateur ce qui représente un port de charge de manière occasionnelle, en raison du temps journalier occupé à cette fonction, et avec la réserve qu'il était assisté d'aides à la manutention. Elle dit produire en ce sens une étude chiffrée détaillée qui démontre que les charges effectivement portées sont en deça des seuils fixés par la norme W35-109.

La SA Parexgroup considère par ailleurs qu'il n'est pas démontré que le délai de prise en charge de 6 mois a été respecté, ni que M. [W] [M] remplit la condition de durée d'exposition au risque de 5 ans, son cursus en son sein démontrant au contraire une exposition, sous réserve de considérer qu'il était amené à porter des charges lourdes, seulement partielle et discontinue.

Au terme de ses conclusions écrites, déposées et soutenues oralement lors de l'audience, la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse demande à la cour de :
- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Avignon le 27 février 2020,
- constater que la maladie déclarée par M. [W] [M] le 11 janvier 2013 respecte les conditions requises par le tableau 98,
- déclarer opposable à la SA Parexgroup la maladie professionnelle ainsi déclarée par M. [W] [M] le 11 janvier 2013,
- débouter la SA Parexgroup de l'intégralité de ses demandes.

Au soutien de ses demandes, la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse rappelle qu'une hernie discale foraminale est un type particulier de hernie qui affecte le foramen intervertébral, c'est-à-dire les racines nerveuses, ce qui correspond à la définition d'une atteinte radiculaire, et que le diagnostic d'une hernie foraminale a été posé dès le certificat médical initial, l'ensemble des examens médicaux postérieurs venant confirmer le diagnostic initial.

S'agissant de la liste des travaux susceptibles de provoquer cette maladie, elle rappelle que la manutention habituelle de charges lourdes n'est soumise au respect d'aucune norme ou réglementation, les normes édictées pour le code du travail pour le port de charges occasionnelles ne trouvant pas à s'appliquer puisqu'il est question pour le tableau 98 du port habituel de charges. Elle observe qu'au-delà du questionnaire salarié et des éléments fournis par M. [W] [M], les réponses contenues dans le questionnaire employeur suffisent à caractériser le port habituel de charges lourdes, malgré la mise en place à compter de 2006 d'aides à la manutention.

Concernant la durée d'exposition au risque, la condition de 5 ans est respectée puisque l'exposition a duré de 2001 à 2013. Par ailleurs, le délai de prise en charge doit se calculer sur la base du certificat médical initial qui retient comme date de première constatation le 15 janvier 2010, date à laquelle il a été placé en arrêt maladie et qui correspond également à la date à laquelle a cessé l'exposition au risque .

Au terme de ses conclusions écrites, déposées et soutenues oralement lors de l'audience, M. [W] [M] demande à la cour de :

A titre principal,
- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Avignon le 27 février 2020,
Et statuant à nouveau,
- confirmer le caractère professionnel de sa maladie au titre du tableau 98 des maladies professionnelles,
- débouter la SA Parexgroup de l'ensemble de ses demandes,

A titre subsidiaire,
- désigner tel médecin expert afin de déterminer si la sciatique par hernie discale L4-L5 déclarée le 11 janvier 2013 présente bien une atteinte radiculaire de topographie concordante,

En tout état de cause,
- condamner la SA Parexgroup à lui payer la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,
- dire et juger que les sommes porteront intérêts à compter du jour de la demande en jsutice et que les intérêts de ces sommes seront capitalisés.

Au soutien de ses demandes, M. [W] [M] rappelle qu'il soufre d'une sciatique par hernie discale L 4-L5 avec atteinte radiculaire de topographie concordante ainsi qu'en attestent les pièces médicales qu'il verse aux débats, en ce compris ses arrêts de travail qui mentionnent tous une hernie discale foraminale, hernie de type particulier affectant le foramen intervertébral, c'est-à-dire les racines nerveuses.

Il considère que dès lors que la SA Parexgroup reconnait qu'il était amené a minima à manipuler 3 sacs de 25kg de mortier par jour, le port habituel de charges lourdes exigé par le tableau 98 des maladies professionnelles est caractérisé.

Enfin, il rappelle qu'il a été pris en charge dès son arrêt de travail, soit dès la fin de l'exposition au risque, qui a duré de 2001 à 2013, ce qui démontre que les conditions de délai de prise en charge et de durée d'exposition au risque sont respectées.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues à l'audience.

MOTIFS

Au terme de l'article L 461-1 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable à la date de déclaration de la maladie professionnelle, issue de la loi du 98-1194 du 23 décembre 1998, est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau.

Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime.

Peut être également reconnue d'origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau de maladies professionnelles lorsqu'il est établi qu'elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu'elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente d'un taux évalué dans les conditions mentionnées à l'article L. 434-2 et au moins égal à un pourcentage déterminé.

Dans les cas mentionnés aux deux alinéas précédents, la caisse primaire reconnaît l'origine professionnelle de la maladie après avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles. La composition, le fonctionnement et le ressort territorial de ce comité ainsi que les éléments du dossier au vu duquel il rend son avis sont fixés par décret. L'avis du comité s'impose à la caisse dans les mêmes conditions que celles fixées à l'article L. 315-1.

En cas de recours de l'employeur, il incombe à l'organisme social qui a décidé d'une prise en charge de rapporter la preuve de la réunion des conditions exigées par le tableau. Il appartient au juge du fond de vérifier que la maladie désignée par le certificat médical initial coïncide avec celle mentionnée par le tableau, avec tous ses éléments constitutifs et doit être constatée conformément aux éléments de diagnostic éventuellement prévus, sans toutefois s'arrêter à une analyse littérale de ce certificat. A défaut d'avoir été objectivée dans les conditions prévues au tableau qui désigne la maladie professionnelle, la prise en charge de celle-ci n'est pas opposable à l'employeur.

Le tableau 98 des maladies professionnelles est ainsi défini :
- Désignation des maladies : Sciatique par hernie discale L4-L5 ou L5-S1 avec atteinte radiculaire de topographie concordante. Radiculalgie crurale par hernie discale L2-L3 ou L3-L4 ou L4-L5, avec atteinte radiculaire de topographie concordante.
- Délai de prise en charge : 6 mois (sous réserve d'une durée d'exposition de 5 ans)
- Liste limitative des travaux susceptibles de provoquer ces maladies : Travaux de manutention manuelle habituelle de charges lourdes effectués : - dans le fret routier, maritime, ferroviaire, aérien ; - dans le bâtiment, le gros oeuvre, les travaux publics ; - dans les mines et carrières ; - dans le ramassage d'ordures ménagères et de déchets industriels ; - dans le déménagement, les garde-meubles ; - dans les abattoirs et les entreprises d'équarrissage ; - dans le chargement et le déchargement en cours de fabrication, dans la livraison, y compris pour le compte d'autrui, le stockage et la répartition des produits industriels et alimentaires, agricoles et forestiers ; - dans le cadre des soins médicaux et paramédicaux incluant la manutention de personnes ; - dans le cadre du brancardage et du transport des malades ; - dans les travaux funéraires

* s'agissant de la maladie

Il résulte du tableau de maladie professionnelle précédemment rappelé que les pathologies visées sont la sciatique par hernie discale L4-L5 ou L5-S1 avec atteinte radiculaire de topographie concordante et la radiculalgie crurale par hernie discale L2-L3 ou L3-L4 ou L4-L5, avec atteinte radiculaire de topographie concordante étant précisé que l'atteinte radiculaire de topographie concordante renvoie à la cohérence entre le niveau de la hernie et le trajet de la douleur.

Le certificat médical initial en date du 11 janvier 2013, établi par le Dr [E] mentionne " hernie discale L4-L5 foraminale gauche suite à des efforts de soulèvements et rotations".

Selon le dictionnaire Larousse médical :
- une hernie foraminale est une hernie discale qui touche le foramen intervertébral qui correspond à la cavité située entre les pédicules de deux vertèbres successives ou autrement dit, ce sont les racines nerveuses qui se lient aux vertèbres,
- une atteinte radiculaire est une atteinte sous forme d'inflammation, d'infection ou de compression d'une racine nerveuse.

En conséquence de ces définitions et ainsi que l'a retenu le colloque médico-administratif et attesté le médecin traitant de M. [W] [M] par certificat médical en 11 juin 2018, la pathologie présentée par l'assuré est bien une sciatique par hernie discale L4-L5 ou L5-S1 avec atteinte radiculaire de topographie concordante telle que visée par le tableau 98 des maladies professionnelles.

* s'agissant de la liste limitative des travaux

Le tableau 98 des maladies professionnelles vise la "manutention manuelle habituelle de charges lourdes".

Le caractère habituel de la manutention n'implique pas une manutention permanente sur l'intégralité de la durée du poste de travail, mais une répétition de cette manutention. La notion de charges lourdes n'est encadrée par aucune norme ou réglementation, et s'apprécie concrètement en fonction des données de l'espèce.

Il ressort de l'enquête administrative diligentée par la Caisse Primaire d'assurance maladie de Vaucluse et des pièces produites aux débats que M. [W] [M] a exercé à compter de son embauche par la SA Parexgroup les fonctions de :
- septembre 2001 à septembre 2003 : conducteur de ligne, sur les chaînes de production 1 ( à 90% de son temps de travail ) et 2 ( à 10%) et ponctuellement les fonctions de cariste et préparateur,
- de septembre 2003 à avril 2006 : conducteur de ligne, sur la chaîne de production 1,
- d'avril 2006 au 15 novembre 2010, date de son arrêt de travail : conducteur de ligne et cariste sur la chaîne de production 3 à temps égal sur chaque fonction.

L'employeur précise dès l'enquête administrative que jusqu'en avril 2006, les ports de charge représentaient 400 kg par poste, et que sur la chaîne 3 cette charge a "sensiblement diminué" en raison d'aides à la manutention et d'ergonomie. Le caractère habituel des manutentions manuelles est donc établi.

Il n'est pas contesté que les charges manipulées sont des sacs de mortier de 25 à 30 kg par unité manipulée. Il résulte des écritures et éléments produits par l'employeur, reportage photographique ou extraction de données du logiciel de gestion de production, que "les charges manipulées le sont dans une très large mesure avec des aides à la manutention : trémie mobile, gerbeur sur le poste de préparation 1 de la chaîne 3, ce qui en diminue d'autant le poids", lequel est ramené selon les décomptes de l'employeur en raison des aides à la manutention à des valeurs comprises entre 53 et 75kg par préparateur et par poste.

Il se déduit de ces éléments que tous les gestes de manutention ne se font pas avec ses aides, et que le salarié est amené sur son poste de travail à manipuler des charges de l'ordre de 25 kg ; le fait de ramener le poids manipulé à un poids théorique par minute ou par heure est totalement abstrait dès lors que le poids effectivement porté à un instant donné est de 25 kg, ce qui est une charge lourde.

De plus, les données chiffrées proposées par l'employeur ne permettent pas de connaître, pour les manipulations concernées, l'allégement effectif des charges manipulées avec les aides, ni ce qu'elles représentent sur une journée.

L'extraction du logiciel Syntax est inexploitable sur ce point, dans la mesure où n'apparaissent que les données du mois de mai 2013, desquelles il ressort que 14443 sacs entiers de consommables ont été utilisés, outre 2547 kg de pesées manuelles.

Ainsi, les charges manipulées par M. [W] [M] sur son poste de travail peuvent être qualifiées de lourdes.

Il s'en déduit que c'est à juste titre que les premiers juges ont considérés que la condition liée la liste limitative des travaux était remplie.

* s'agissant du délai de prise en charge et de la durée d'exposition au risque

Il se déduit des éléments précédemment développés que M. [W] [M] a été exposé au risque pendant toute la durée de son emploi au sein de la SA Parexgroup soit de 2001 à son arrêt de travail de 2010. La durée d'exposition au risque est donc d'au moins 5 ans.

La maladie professionnelle a été constatée médicalement pour la première fois, ainsi que celà résulte du certificat médical initial du Dr [E] du 11 janvier 2013, le 15 novembre 2010.

Il ressort du questionnaire employeur que le dernier jour de travail effectif de M. [W] [M] a été le 10 octobre 2010 et qu'il a été placé en arrêt maladie le 15 novembre 2010, date de première constatation de sa maladie professionnelle.

Le fait que le certificat médical initial et la demande de reconnaissance de maladie professionnelle soient postérieurs à ces dates est sans incidence, dès lors que la maladie professionnelle a été constatée pour la première fois le 15 novembre 2010, et que l'exposition au risque a cessé le dernier jour travaillé par M. [W] [M], soit le 10 octobre 2010.

Le délai entre cette fin d'exposition au risque et la constatation de la maladie professionnelle étant en conséquence de moins de 6 mois, cette condition du tableau 98 des maladies professionnelles est également remplie.

En conséquence, les conditions du tableau 98 des maladies professionnelles étant remplies, c'est à juste titre que les premiers juges ont déclaré opposable à la SA Parexgroup la prise en charge au titre de la législation relative aux risques professionnels de la pathologie en date du 15 novembre 2010, déclarée par M. [W] [M] le 11 janvier 2013, et leur décision sera confirmée.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, en matière de sécurité sociale, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 27 février 2020 par le tribunal judiciaire d'Avignon,

Juge n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de M. [W] [M],

Rejette les demandes plus amples ou contraires,

Condamne la SA Parexgroup aux dépens de la procédure d'appel.

Arrêt signé par le président et par le greffier.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de nîmes
Formation : 4r
Numéro d'arrêt : 20/016241
Date de la décision : 22/11/2022
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.nimes;arret;2022-11-22;20.016241 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award