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11/10/2022 | FRANCE | N°19/03731

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 5ème chambre sociale ph, 11 octobre 2022, 19/03731


ARRÊT N°



N° RG 19/03731 - N° Portalis DBVH-V-B7D-HP46



MS/EB



CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE NIMES

05 septembre 2019



RG :18/00022





[X]





C/



[L]





































COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH



ARRÊT DU 11 OCTOBRE 2022







AP

PELANT :



Monsieur [C] [X]

né le 25 Décembre 1980 à MAROC

[Adresse 1]

[Localité 2]



Représenté par Me Francis TROMBERT, avocat au barreau de NIMES



(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/9199 du 06/11/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Nîmes)





INTIMÉ :



Monsieur [D] [L]...

ARRÊT N°

N° RG 19/03731 - N° Portalis DBVH-V-B7D-HP46

MS/EB

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE NIMES

05 septembre 2019

RG :18/00022

[X]

C/

[L]

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH

ARRÊT DU 11 OCTOBRE 2022

APPELANT :

Monsieur [C] [X]

né le 25 Décembre 1980 à MAROC

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Francis TROMBERT, avocat au barreau de NIMES

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/9199 du 06/11/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Nîmes)

INTIMÉ :

Monsieur [D] [L]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représenté par Me Jean-marie CHABAUD de la SELARL SARLIN-CHABAUD-MARCHAL & ASSOCIES, avocat au barreau de NIMES

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 22 Juin 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

M. Michel SORIANO, Conseiller, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

M. Michel SORIANO, Conseiller

Madame Virginie HUET, Conseillère

GREFFIER :

Mme Emmanuelle BERGERAS, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

à l'audience publique du 07 Juillet 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 11 Octobre 2022

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 11 Octobre 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

M. [C] [X] a été engagé à compter du 1er octobre 2007 en qualité d'aide monteur suivant contrat à durée indéterminée à temps complet par la SARL BCLT.

Le 1er avril 2008, M. [C] [X] était incarcéré jusqu'au 7 septembre 2016.

Le 29 mars 2017, la SARL BCLT était radiée du Registre du Commerce et des Sociétés de Nîmes.

Le 25 octobre 2018, le tribunal de commerce de Nîmes désignait M. [L] [D] demeurant [Adresse 3] en qualité de mandataire ad'hoc afin de représenter la SARL BCLT dans le cadre de la procédure prud'homale.

Soutenant n'avoir jamais reçu de lettre de licenciement ni les documents de fin de contrat, M. [C] [X] va saisir le conseil de prud'hommes de Nîmes pour obtenir la condamnation de l'employeur au paiement de sommes à caractère indemnitaire et salarial, lequel par jugement contradictoire du 5 septembre 2019 :

- Fixe la créance de M. [C] [X] à la somme de 1383,48 euros bruts (salaire moyen des 5 mois) au titre de l'irrégularité de la procédure.

- Ordonne la délivrance du certificat de travail.

- Déboute M. [C] [X] du surplus de ses demandes, fins et conclusions.

- Dit l'exécution provisoire de plein droit selon l'article 515 du code de procédure civile.

- Dit que les dépens seront à la charge du mandataire ad hoc.

Par acte du 23 septembre 2019, M. [C] [X] a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 13 décembre 2019, M. [C] [X] demande à la cour de :

- Recevoir l'appel de M. [X] ,

- Le dire bien fondé en la forme et au fond,

- Confirmer le jugement en ce qu'il octroyait la somme de 1383.48 euros bruts au titre d'irrégularité de la procédure,

- Réformer le jugement pour le surplus,

En conséquence,

- Dire et juger que la rupture du contrat de M. [X] est abusive et emporte les effets d'un licenciement abusif,

- Dire et juger que le licenciement de M. [X] est abusif,

En conséquence,

- Condamner M. [D] [L], ès qualité de mandataire ad hoc de la SARL BCLT, à déclarer la créance de M. [X], comme suit :

- 15.000 euros à titre d'indemnité pour rupture abusive du contrat de travail

- 3003.28 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre 300.32 euros à titre de congés payés y afférents,

- La délivrance, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, des documents de fin de contrat, attestation Pôle emploi, certificat de travail, solde de tout compte,

- 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

M. [C] [X] soutient que :

- l'employeur n'a mis en place aucune procédure pour rompre le contrat de travail.

- à sa sortie d'incarcération, il se trouvait sans possibilité de reprendre son poste du fait de la fermeture de l'entreprise et il est fondé à considérer que l'employeur est à l'origine de la rupture du contrat de travail.

- une résiliation judiciaire du contrat devra être prononcée aux torts de l'employeur avec les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

- la rupture du contrat est intervenue sans motif pertinent :

Il n'a pas reçu de lettre de licenciement ; aucune procédure de licenciement n'a été initiée par la société BCLT et il n'a pas été convoqué à un entretien préalable.

La rupture du contrat est intervenue du fait de l'employeur sans motif de sorte qu'elle présente un caractère abusif.

En l'état de ses dernières écritures en date du 28 octobre 2020 contenant appel incident, la société BCLT a sollicité la confirmation du jugement et la condamnation de l'appelant au paiement de la somme de 2500,00 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La société BCLT fait valoir que :

- M. [X] est mal fondé dans ses demandes car il aurait pu se rapprocher du liquidateur judiciaire de la société, Maître [Z] [H], les opérations liquidatives étant toujours ouvertes à la date du 7 septembre 2016.

- l'absence du salarié placé en garde à vue ou en détention provisoire ou définitivement condamné à une peine d'emprisonnement suspend l'exécution du contrat de travail.

- Dans tous les cas, la liquidation judiciaire de la SARL BCLT emportait la mise en 'uvre de la procédure de licenciement pour motif économique des salariés de l'entreprise. Cette obligation est celle du liquidateur judiciaire désigné, seul représentant de la SARL BCLT.

- ce n'est donc pas du fait de l'employeur mais celui de l'ouverture de la procédure collective que le contrat de travail suspendu de M. [X] devait être rompu.

Ce constat induit que les demandes de M. [X] ne peuvent utilement prospérer à l'égard de la SARL BCLT représentée par son mandataire ad hoc.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.

Par ordonnance en date du 25 mars 2022, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 22 juin 2022.

MOTIFS

Sur la rupture des relations contractuelles

Il résulte des dossiers respectifs des parties que :

- M. [C] [X] a été embauché par la société BCLT à compter du 1er octobre 2007,

- M. [C] [X] a été incarcéré du 1er avril 2008 au 7 septembre 2016,

- par jugement du 23 mars 2011, le tribunal de commerce de Nîmes a prononcé la liquidation judiciaire de la société BCLT,

- par jugement du 29 mars 2017, le tribunal de commerce a prononcé la clôture pour insuffisance d'actifs de la liquidation judiciaire de la SARL BCLT.

La cour relève que dans les motifs de ses écritures, l'appelant soutient qu' 'une résiliation judiciaire du contrat devra être prononcée aux torts de l'employeur avec les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse', sans que cette demande ne soit reprise dans le dispositif, lequel ne fait référence qu'à un licenciement abusif.

La cour n'est dès lors pas saisi de ce chef de prétention.

Lorsque la rupture émane de l'employeur, l'acte de rupture se situe au moment où ce dernier a manifesté sa volonté de rompre le contrat de travail ; en présence d'une lettre de licenciement, c'est l'envoi de cette lettre qui emporte, de la part de l'employeur, manifestation de sa volonté de rompre le contrat de travail.

Si le licenciement recouvre toute rupture du contrat de travail à l'initiative de l'employeur formalisée comme telle, cette qualification peut également être retenue même si l'employeur n'exprime pas formellement la volonté de mettre fin au contrat de travail du salarié.

L'appelant n'a fait l'objet d'aucun licenciement et il ne peut être considéré comme démissionnaire.

Ce faisant, il a trouvé porte close lorsqu'il s'est présenté à l'entreprise à sa sortie de prison.

La fermeture de l'entreprise quel qu'en soit le motif constitue non seulement un motif de rupture du contrat de travail, mais également une manifestation de volonté de l'employeur de ne pas poursuivre l'exécution des contrats de travail en cours, constitutive d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, qui, en l'espèce, doit prendre effet à compter de l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire.

Le jugement sera réformé de ce chef.

Sur les conséquences de la rupture

L'indemnité compensatrice de préavis

L'article L.1234-8 du code du travail précise que les périodes de suspension du contrat de travail n'entrent pas en compte pour la détermination de la durée d'ancienneté exigée pour bénéficier des dispositions relatives à l'indemnité compensatrice de préavis.

En l'espèce, le contrat de travail du salarié a été suspendu pour cause d'incarcération du salarié du 1er avril 2008 au 7 septembre 2016, ces périodes devant être déduites de son ancienneté pour l'évaluation de son indemnité de préavis.

L'ancienneté du salarié est comprise entre 6 mois et 2 ans et il doit donc bénéficier d'un mois de préavis en application de l'article L 1234-1 du code du travail.

Le salaire moyen de l'appelant sur la période travaillée tel que retenu par les premiers juges est de 1383,48 euros bruts.

La somme devant revenir à M. [C] [X] s'élève ainsi à 1383,48 euros bruts correspondant à un mois de préavis outre celle de 138,53 euros bruts au titre des congés payés afférents.

L'indemnité pour licenciement abusif

En application des dispositions de l'article L1235-5 du code du travail, dans sa rédaction applicable au présent litige, le salarié ayant mois de deux ans d'ancienneté peut prétendre, en cas de licenciement abusif, à une indemnité correspondant au préjudice subi.

Force est constater en l'espèce que l'appelant ne produit aucun élément à ce titre, ni ne développe aucune argumentation sur un préjudice qu'il aurait pu subir du fait du licenciement abusif.

Ainsi, au regard de la durée de la période travaillée et de l'absence de toute pièce au dossier du salarié, le préjudice subi par ce dernier à ce titre sera évalué à la somme de 1000 euros.

L'indemnité pour procédure de licenciement irrégulière

En application des dispositions de l'article L1235-5 du code du travail, dans sa version en vigueur au moment du licenciement, ne sont pas applicables au licenciement d'un salarié de moins de deux ans d'ancienneté dans l'entreprise et au licenciement opéré dans une entreprise employant habituellement moins de onze salariés, les dispositions relatives aux irrégularités de procédure, prévues à l'article L1235-2.

Il est manifeste que la procédure de licenciement n'a pas été respectée dans le présent litige.

Cependant, toute demande d'indemnisation supposant la démonstration d'une faute et d'un préjudice en résultant, il convient, en l'absence de tout élément permettant de démontrer la réalité et la nature du préjudice de M. [C] [X] du fait de ce manquement, de rejeter la demande de dommages et intérêts présentée.

Le jugement critiqué sera réformé de ce chef.

Sur la remise des documents

M. [W] [O] [L], es qualité de mandataire ad hoc de la SARL BCLT devra remettre à M. [C] [X] une attestation Pôle emploi, un certificat de travail, un reçu pour solde de tout compte et un bulletin de paie conformes à l'arrêt dans un délai de deux mois à compter de sa signification sans qu'il y ait lieu à astreinte.

La décision sera infirmée de ce chef.

Sur les demandes accessoires

Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Les entiers dépens de première instance et d'appel seront fixés au passif de la SARL BCLT.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Par arrêt contradictoire, rendu publiquement en dernier ressort

Réforme le jugement rendu le 5 septembre 2019 par le conseil de prud'hommes de Nîmes en toutes ses dispositions,

Et statuant à nouveau,

Dit le licenciement de M. [C] [X] sans cause réelle et sérieuse,

Fixe au passif de la SARL BCLT la créance de M. [C] [X] au titre de l'indemnité compensatrice de préavis à la somme de 1383,48 euros bruts outre celle de 138,53 euros bruts au titre des congés payés afférents,

Fixe au passif de la SARL BCLT la créance de M. [C] [X] au titre des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait du licenciement abusif à la somme de 1000 euros,

Ordonne à M. [W] [O] [L], es qualité de mandataire ad hoc de la SARL BCLT de remettre à M. [C] [X] une attestation Pôle emploi, un certificat de travail, un reçu pour solde de tout compte et un bulletin de paie conformes à l'arrêt dans un délai de deux mois à compter de sa signification à compter de sa signification sans qu'il y ait lieu à astreinte,

Déboute M. [C] [X] du surplus de ses demandes,

Déboute M. [W] [O] [L], es qualité de mandataire ad hoc de la SARL BCLT de ses demandes,

Dit que les entiers dépens sont fixés au passif de la SARL BCLT,

Arrêt signé par Monsieur ROUQUETTE-DUGARET, Président et par Mme BERGERAS, Greffier.

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 5ème chambre sociale ph
Numéro d'arrêt : 19/03731
Date de la décision : 11/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-11;19.03731 ?
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