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11/10/2022 | FRANCE | N°19/03684

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 5ème chambre sociale ph, 11 octobre 2022, 19/03684


ARRÊT N°



N° RG 19/03684 - N° Portalis DBVH-V-B7D-HPYT



MS/EB



CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'AVIGNON

10 septembre 2019



RG :18/00274





S.A.R.L. BEST OF SECURITY SOLUTIONS





C/



[I]





































COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH



ARRÊT DU 11 OCTOBRE 2022<

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APPELANTE :



S.A.R.L. BEST OF SECURITY SOLUTIONS

[Adresse 3]

[Localité 4]



Représentée par Me Frédéric GAULT de la SELARL RIVIERE - GAULT ASSOCIES, avocat au barreau d'AVIGNON







INTIMÉ :



Monsieur [B] [I]

né le 07 Avril 1965 à [Localité 6]

[Adresse 1]

[Localité 2]



Représent...

ARRÊT N°

N° RG 19/03684 - N° Portalis DBVH-V-B7D-HPYT

MS/EB

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'AVIGNON

10 septembre 2019

RG :18/00274

S.A.R.L. BEST OF SECURITY SOLUTIONS

C/

[I]

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH

ARRÊT DU 11 OCTOBRE 2022

APPELANTE :

S.A.R.L. BEST OF SECURITY SOLUTIONS

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Frédéric GAULT de la SELARL RIVIERE - GAULT ASSOCIES, avocat au barreau d'AVIGNON

INTIMÉ :

Monsieur [B] [I]

né le 07 Avril 1965 à [Localité 6]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Jean-gabriel MONCIERO de la SELARL PARA FERRI MONCIERO, avocat au barreau de NIMES substitué par Me Nancy PAILHES, avocate au barreau de NIMES

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 22 Juin 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

M. Michel SORIANO, Conseiller, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

M. Michel SORIANO, Conseiller

Madame Virginie HUET, Conseillère

GREFFIER :

Mme Emmanuelle BERGERAS, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

à l'audience publique du 07 Juillet 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 11 Octobre 2022

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 11 Octobre 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

M. [B] [I] a été engagé à compter du 31 juillet 2017 par contrat à durée indéterminée à temps plein, en qualité d'agent de maitrise au Casino de [Localité 5] par la SARL Best of Security Solutions ( la société BOSS).

Reprochant à M. [B] [I] d'avoir dépassé la durée maximale hebdomadaire du travail, la SARL Best of Security Solutions va le licencier pour faute grave le 18 janvier 2018 en ces termes :

'Vous êtes affecté sur le site PASINO Plein Air à la Ciotat. En date du 31 décembre 2017, nous avons été informés des faits suivants, faits s 'étant déroulés le 31 décembre 2017.

Vous avez travaillé directement pour le client durant la soirée du 31/12/201 7 en « CDD

extra Agent de sécurité ». Vous ne nous avez pas informé de la situation alors que vous aviez déjà effectué 48 h de travail sur la semaine avec notre société.

Monsieur [O] vous a informe de votre mise à pied à titre conservatoire le 1er janvier 2018 à 8h58, mise à pied confirmée par courrier LRAR 1A 146 903 5241 7 en date du 02/01/2018.

Vous estimez que vous n'aviez pas à nous informer de la situation, que c'est votre vie personnelle et que vous faites ce que vous voulez. Vous n 'avezpas commis d'erreur et vous avez fait votre travail.

Ma responsabilité pénale et civile pourrait être engagée en raison de cette situation car aucun salarié ne peut travailler plus de 48 heures semaines, quel que soit le nombre d'employeurs concernés. De plus, le fait de travailler en qualité d'agent de sécurité pour un employeur qui ne dispose pas de l'autorisatíon d'exercer, délivrée par le CNAPS à cet effet, vous plaçait en situation d'exercer illégalement la profession d'agent de sécurité. Je ne peux tolérer un tel comportement.

Vos explications ne m'ont pas convaincue. En tout état de cause, votre comportement dénote d'une particulière déloyauté, vous conduisant à méconnaître les règles élémentaires de la profession d'agent de sécurité et celle de votre contrat de travail.

Je suis donc au regret de vous licencier pour faute grave, votre maintien étant rendu impossible par votre comportement.'

Contestant la légitimité de la rupture, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes d'Avignon afin de voir prononcer la requalification du licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'obtenir la condamnation de l'employeur à diverses sommes à caractère indemnitaire, lequel, par jugement contradictoire du 10 septembre 2019 :

- Dit que le licenciement de M. [B] [I] est sans cause réelle et sérieuse.

- Condamne la SARL Best of Security Solutions à payer à M. [B] [I] les sommes suivantes :

- 2l55,88 € (1 mois de salaire) à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 1077,94 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre la somme de 107,79 € de congés payés y afférents,

- 1000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- Ordonne l'exécution provisoire

- Déboute M. [B] [I] du surplus de ses demandes.

- Déboute la SARL Best of Security Solutions de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- Condamne la SARL Best of Security Solutions aux entiers dépens de l'instance.

Par acte du 18 septembre 2019, la SARL Best of Security Solutions a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 3 juin 2020 la SARL Best of Security Solutions demande à la cour de :

- recevoir la société Best of Security Solutions en son appel

-le dire recevable en la forme et bien fondé au fond

-réformer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Best of Security Solutions à verser à M. [B] [I] la somme de 2155,88 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre 1077,94 euros à titre d'indemnité de préavis et 107,79 euros au titre des congés payés afférents ainsi que 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Et statuant à nouveau des chefs critiqués

-dire bien fondé le licenciement pour faute grave de M. [B] [I] en date du 18 janvier 2018

Et en conséquence

-dire n'y avoir lieu au versement d'aucune somme à son endroit au titre d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, congés payés afférents, indemnité légale de licenciement et d'une indemnité au titre de ses frais irrépétibles en première instance.

Et reconventionnellement

- condamner M. [B] [I] à verser à la société Boss la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel

La société BOSS soutient essentiellement que :

- Le respect de la législation sociale s'impose au salarié au regard des dispositions du code du travail, de la convention collective, de la prévention et de la sécurité ainsi qu'au regard du code de déontologie intégré au code de la sécurité intérieure.

En effet, le problème repose tout d'abord sur la méconnaissance par M. [I] de la limite absolue de la durée hebdomadaire du travail, mais également, de la signature d'un contrat de travail en qualité d'agent de sécurité au profit d'une entreprise non habilitée et n'entrant pas dans le champ des dispositions légales délimitant très strictement les entreprises susceptibles d'être dénommées acteur de la sécurité privée.

- le licenciement pour faute grave est justifié par :

- l'embauche d'un agent de sécurité par une entreprise non-habilitée :

M. [I] ne pouvait pas être embauché en qualité d'agent de sécurité par Le Casino de [Localité 5] qui n'est pas une entreprise entrant dans le champ d'application des dispositions du code de la sécurité intérieure.

M. [I] ne pouvait ignorer cette interdiction car elle est rappelée lors des sessions de formation du CNAPS au moment de la délivrance et du renouvellement des habilitations professionnelles. M. [I] n'était pas un simple exécutant (agent d'exploitation) mais le représentant de la société auprès du client Casino.

- le cumul d'emploi entraînant un dépassement de la durée absolue du travail :

M. [I] a méconnu ses obligations contractuelles et légales en proposant ou acceptant un deuxième emploi d'agent de sécurité dans une structure non habilitée à une telle embauche et au surplus pour y travailler au-delà de la limite maximale hebdomadaire de 48 heures.

De surcroît, M. [I] n'a pas informé son employeur ou sollicité son agrément.

Ce type de comportement la place dans une situation délicate puisque la méconnaissance par l'employeur de cette durée maximale peut engager sa responsabilité pénale.

En l'état de ses dernières écritures en date du 11 mars 2020, contenant appel incident, M. [I] a sollicité la confirmation du jugement, sauf en ce qu'il l'a débouté de sa demande au titre du rappel de salaire sur mise à pied conservatoire et les congés payés afférents, ainsi que la condamnation de l'appelante au paiement de la somme de 1.500,00 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [I] fait valoir que :

- le licenciement n'est pas fondé sur une cause réelle et sérieuse :

La faute grave, justifiant une mise à pied du salarié, doit être fondée sur l'impossibilité du maintien du salarié dans l'entreprise.

La cause réelle et sérieuse doit, quant à elle, être fondée sur des faits établis, objectifs et matériellement vérifiables.

- le manquement du salarié que constitue le cumul d'emploi ne justifie pas nécessairement une rupture de contrat. En effet, l'employeur doit avoir, au préalable, mis en demeure le salarié de régulariser sa situation. En l'espèce, l'employeur ne lui a adressé aucune mise en demeure.

De surcroît, ce cumul d'emploi l'ayant amené à dépasser la durée maximale hebdomadaire du travail n'est caractérisé en l'espèce que de quelques heures et pour une seule soirée.

Enfin, l'appelante n'est pas compétente pour juger du fait qu'il ait travaillé pour un employeur qui ne dispose pas de l'autorisation d'exercer délivrée par le CNAPS.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.

Par ordonnance en date du 25 mars 2022 , le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 22 juin 2022.

MOTIFS

Sur le licenciement

La faute grave résulte de tout fait ou ensemble de faits imputables au salarié, qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail et des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible son maintien dans l'entreprise et exige son départ immédiat, ce, même pendant la durée du préavis.

Il incombe à l'employeur qui l'invoque d'en rapporter la preuve.

La lettre de licenciement vise deux griefs :

- avoir dépassé la durée maximale de 48 heures de travail sur une semaine

- avoir travaillé directement pour un client de la société, en qualité d'agent de sécurité, alors que celui-ci ne disposait pas de l'autorisation d'exercer délivrée par le CNAPS, de sorte que M. [I] a exercé illégalement la profession d'agent de sécurité.

Il n'est pas contestable que M. [I] a signé un contrat d'extra en qualité de chargé de sécurité, pour le réveillon du 31 décembre 2017, avec la société Plein air Casino à [Localité 5].

Selon l'article L8261-1 du code du travail, aucun salarié ne peut accomplir des travaux rémunérés au-delà de la durée maximale du travail, telle qu'elle ressort des dispositions légales de sa profession.

L'article L. 3121-20 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, dispose qu'au cours d'une même semaine, la durée maximale hebdomadaire de travail est de quarante-huit heures.

L'article L8261-2 du code du travail prévoit que nul ne peut recourir aux services d'une personne qui méconnaît les dispositions de la présente section.

En application de l'article R. 8262-1 du code du travail, le fait, pour un salarié, d'accomplir des travaux rémunérés au-delà de la durée maximale hebdomadaire du travail, est sanctionné pénalement.

Le cumul d'emploi est autorisé dès lors que le salarié respecte la durée maximale hebdomadaire de travail fixée à 48 heures.

Il résulte des articles L. 8261-1 et L. 8261-2 de ce même code qu'en cas de cumul par le salarié de deux emplois entraînant un dépassement de la durée maximale de travail, l'employeur doit mettre le salarié en demeure de choisir l'emploi qu'il souhaite conserver et qu'en cas d'inertie du salarié invité à se conformer aux prescriptions légales, il appartient à l'employeur qui entend respecter l'interdiction légale de mettre en oeuvre une procédure de licenciement.

Il s'ensuit que le salarié qui, occupant simultanément deux emplois, travaille au-delà de 10 heures par jour ou 48 heures par semaine est en situation de cumul illicite d'emplois et expose l'employeur à des poursuites pénales.

M. [I] ne conteste pas avoir dépassé la durée maximale hebdomadaire de 48 heures reprochée par l'employeur 'de quelques heures'.

Pour autant, la seule circonstance que, du fait d'un cumul d'emplois, le salarié dépasse la durée maximale d'emploi, ne constitue pas en soi une cause de licenciement. Il appartient dans ce cas à l'employeur d'inviter le salarié à choisir l'emploi qu'il souhaite conserver.

Cependant, les parties conviennent que le cumul d'emploi n'a concerné qu'une journée de sorte qu'il était impossible pour l'employeur d'inviter le salarié à choisir entre les deux emplois.

Ce cumul d'emploi limité dans le temps et le dépassement de la durée maximale de travail hebdomadaire subséquente également limitée ne sauraient constituer un juste motif de licenciement, la sanction devant être proportionnée à la faute commise.

Concernant le second grief, la situation de la société Plein air Casino au regard de la législation sur les entreprises de sécurité ne concerne en rien l'appelante et ne peut avoir aucune conséquence de quelque nature que ce soit sur cette dernière.

Il résulte des éléments développés supra que le licenciement pour faute grave de M. [I] n'est pas justifié, le jugement entrepris devant être confirmé sur ce point.

Sur le rappel de salaire correspondant à la mise à pied conservatoire

M. [I] a fait l'objet d'une mise à pied conservatoire et sollicite la condamnation de l'employeur à lui verser la somme de 892,66 euros bruts à ce titre, outre les congés payés afférents d'un montant de 89,26 euros.

Le conseil a considéré que ladite demande 'n'a pas été reprise dans le 'Par ces motifs' des conclusions de Monsieur [I], elle est irrecevable en vertu de l'article 753" du code de procédure civile.

La cour rappelle que la procédure prud'homale est orale par application de l'article R.1453-3 du code du travail et que l'article R.1453-5 du code du travail prévoit , lorsque toutes les parties comparantes formulent leurs prétentions par écrit et sont assistées ou représentées par un avocat, elles sont tenues, dans leurs conclusions, de formuler expressément les prétentions ainsi que les moyens en fait et en droit sur lesquels chacune de ses prétentions est fondée, avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées. Un bordereau énumérant les pièces justifiant ses prétentions est annexé aux conclusions. Les prétentions sont récapitulées sous forme de dispositif. Le bureau de jugement ou la formation de référé ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif. Les parties doivent reprendre leurs dernières conclusions les prétentions et moyens présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. À défaut, elles sont réputées les avoirs abandonnés et il n'est statué que sur les dernières conclusions communiquées.

C'est donc à bon droit que le conseil de prud'hommes a considéré que la demande en paiement du salaire correspondant à la mise à pied conservatoire et des congés payés afférents, ne figurant pas dans le dispositif des conclusions du salarié, était irrecevable.

Sur les demandes accessoires

Il serait inéquitable de laisser à la charge de l'intimé les frais irrépétibles qu'il a été contraint d'exposer en cause d'appel et qui ne sont pas compris dans les dépens.

Les dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens du jugement critiqué seront confirmées.

Les dépens d'appel seront mis à la charge l'appelante.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Par arrêt contradictoire, rendu publiquement en dernier ressort

Confirme le jugement rendu le 10 septembre 2019 par le conseil de prud'hommes d'Avignon en toutes ses dispositions,

Déboute la Sarl Best of Security Solutions de ses demandes,

Condamne la Sarl Best of Security Solutions à payer à M. [B] [I] la somme de 1000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la Sarl Best of Security Solutions aux dépens d'appel,

Arrêt signé par Monsieur ROUQUETTE-DUGARET, Président et par Mme BERGERAS, Greffier.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 5ème chambre sociale ph
Numéro d'arrêt : 19/03684
Date de la décision : 11/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-11;19.03684 ?
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