RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 20/01765 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HYDX
AV
TRIBUNAL DE COMMERCE D'AUBENAS
16 juin 2020 RG :
[F]
C/
[B]
S.A. BANQUE MARZE
Grosse délivrée le 05 octobre 2022 à :
- Me Christine MERE
- Me Sonia HARNIST
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
4ème chambre commerciale
ARRÊT DU 05 OCTOBRE 2022
Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce d'AUBENAS en date du 16 Juin 2020, N°
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Madame Agnès VAREILLES, Conseillère, a entendu les plaidoiries, en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Madame Christine CODOL, Présidente,
Madame Claire OUGIER, Conseillère,
Madame Agnès VAREILLES, Conseillère.
GREFFIER :
Monsieur Julian LAUNAY-BESTOSO, Greffier à la 4ème chambre commerciale, lors des débats et du prononcé de la décision.
DÉBATS :
A l'audience publique du 08 Septembre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 05 Octobre 2022.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANT :
Monsieur [L] [F]
né le [Date naissance 2] 1968 à [Localité 7]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représenté par Me Christine MERE, Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représenté par Me Antoine PILLOT, Plaidant, avocat au barreau d'AMIENS
INTIMÉES :
Madame [U] [B] épouse [F],
assignée à sa personne
née le [Date naissance 1] 1972 à [Localité 5]
[Adresse 8]
[Adresse 8]
[Adresse 8]
BANQUE POPULAIRE DU SUD, Société Anonyme Coopérative de Banque Populaire à capital variable, régie par les articles L 512-2 et suivants du Code monétaire et financier et l'ensemble des textes relatifs aux Banques Populaires et aux établissements de crédits, dont le siège social se situe au [Adresse 4], inscrite au RCS de Perpignan sous le n°554 200 808, exploitant également la marque SA BANQUE MARZE, dont le siège est [Adresse 6], et venant aux droits de celle-ci à compter du 1er juin 2019 suivant fusion absorption approuvée par les Conseils d'Administration des deux établissements les 8 et 15 février 2019 - Intermédiaire d'assurance inscrit à l'ORIAS sous le n° 07 02 3534 - TVA n° FR29 554 200 808, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège social
[Adresse 4]
[Adresse 4]
Représentée par Me Sonia HARNIST de la SCP RD AVOCATS & ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représentée par Me Victoria CABAYE de la SCP CABAYE - ROUSSEL - CABAYE, Plaidant, avocat au barreau de MARSEILLE
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Madame Christine CODOL, Présidente, le 05 Octobre 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour.
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Vu l'appel interjeté le 21 juillet 2020 par Monsieur [L] [F] à l'encontre du jugement prononcé le 16 juin 2020 par le tribunal de commerce d'Aubenas, dans l'instance n° 2018/002899,
Vu la constitution de la banque Marze en qualité d'intimée, transmise par voie électronique le 12 août 2020,
Vu la signification en date du 22 octobre 2020 de la déclaration d'appel à Madame [U] [B], intimée défaillante,
Vu l'ordonnance rendue 14 avril 2021 qui a notamment constaté l'incompétence du conseiller de la mise en état pour connaître de la demande en rectification de l'erreur matérielle présentée par la Banque Populaire du Sud, venant aux droits de la banque Marze, qui affecterait le jugement de première instance, rejeté l'exception d'irrecevabilité de la déclaration d'appel enregistrée le 21 juillet 2020 au nom de Monsieur [L] [F], constaté la recevabilité de la déclaration d'appel du 21 juillet 2020,
Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 4 août 2022 par l'appelant et le bordereau de pièces qui y est annexé,
Vu la signification en date du 11 août 2022 de ces conclusions à Madame [U] [B], intimée défaillante,
Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 2 août 2022, par la Banque Populaire du Sud, venant aux droits de la banque Marze, intimée, et le bordereau de pièces qui y est annexé,
Vu la signification en date du 3 août 2022 de ces conclusions à Madame [U] [B], intimée défaillante,
Vu l'ordonnance en date du 24 mars 2022 de clôture de la procédure à effet différé au 25 août 2022,
La SARL Le château, ayant pour associés Monsieur [L] [F] et son épouse, Madame [U] [B], a contracté divers prêts auprès de la banque Marze en vue de la rénovation d'un bien immobilier.
Par actes sous signature privée des 13 avril 2010, 23 mai 2013 et 20 mai 2014, les associés se sont porté caution des engagements pris par la SARL au titre des prêts immobiliers suivants:
-prêt n°0021422 d'un montant de 100.000 euros, à concurrence de 50.000 euros chacun
-prêt n°0024169 d'un montant de 50.000 euros, à concurrence de 60.000 euros chacun
-prêt n°0025084 d'un montant de 50.000 euros, à concurrence de 60.000 euros chacun.
Par jugement du 9 février 2016, le tribunal de commerce d'Aubenas a prononcé la liquidation judiciaire de la société emprunteuse.
Par courrier recommandé du 25 mars 2016, le prêteur a déclaré sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société emprunteuse pour un montant total de 286.233,96 euros.
Par exploits d'huissier de justice du 30 mai 2016, le prêteur a fait citer les cautions devant le tribunal de commerce d'Aubenas aux fins de les voir condamner solidairement au paiement des sommes de:
-40.982,45 euros au titre du prêt n°0025084, outre intérêts au taux conventionnel de 2,90% à compter du 29 mars 2016
-34.951,14 euros au titre du prêt n°0024169, outre intérêts au taux conventionnel de 2,95% à compter du 29 mars 2016
-19.128,14 euros au titre du prêt n°0021422, outre intérêts au taux conventionnel de 3,80% à compter du 29 mars 2016.
Par jugement du 16 juin 2020, le tribunal de commerce d'Aubenas a :
-débouté Monsieur [L] [F] de l'ensemble de ses moyens, fins et conclusions,
-donné acte de ce que Madame [U] [B] ne contestait, ni son engagement de caution solidaire de la SARL, ni le montant des sommes réclamées à cet égard par la banque Marze
-condamné Monsieur [L] [F] à payer à la banque Marze la somme de 39.797,88 euros au titre du prêt n°0025084, la somme de 34.028,83 euros au titre du prêt n°0024169 et la somme de 19.128,14 euros, au titre du prêt n°0021422, le tout avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation
-condamné Madame [U] [F] à payer à la banque Marze la somme de 40.982,45 euros au titre du prêt n°0025084, la somme de 34.951,14 euros au titre du prêt n°0024169 et la somme de 19.128,14 euros au titre du prêt n°0021422, le tout avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation
-dit bien fondée Madame [U] [F], dès lors qu'elle aura payé sa dette à la banque Marze en son action récursoire à l'encontre de son époux
-dit que Monsieur [F] devra payer à son épouse la moitié des sommes qu'elle aura versées à la banque Marze
-condamné Monsieur [F] à payer à la banque Marze la somme de 800 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
-condamné Monsieur [F] à payer à son épouse la somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
-condamné Monsieur [F] aux entiers dépens dont les frais de greffe liquidés à la somme de 94,34 euros TTC
-dit n'y avoir pas lieu à exécution provisoire.
Le 21 juillet 2020, Monsieur [L] [F] a interjeté appel de cette décision aux fins de la voir réformer en toutes ses dispositions.
La Banque Populaire du Sud, qui vient aux droits de la Banque Marze, à la suite d'une opération de fusion absorption, est intervenue volontairement à l'instance.
Madame [U] [B] n'a pas constitué d'avocat.
Par ordonnance du 24 mars 2022, la clôture a été prononcée avec effet au 25 août 2022.
EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 4 août 2022, l'appelant demande à la cour de :
-Infirmer en toutes ses dispositions le jugement de première instance
STATUANT DE NOUVEAU
-Déclarer nuls ou à tout le moins disproportionnés les cautionnements recueillis par la banque Marze (aux droits de qui la Banque Populaire du Sud vient aux droits) et consentis par lui-même
-Débouter la Banque Populaire du Sud venant aux droits de la banque Marze de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions
-Débouter l'autre intimée de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions
-Condamner la Banque Populaire du Sud à payer à l'appelant la somme de 4.000 euros au titre des frais irrépétibles (article 700 du code de procédure civile)
-Condamner l'autre intimée à payer à l'appelant la somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles (article 700 du code de procédure civile)
-Condamner la Banque Populaire du Sud aux entiers dépens dont distraction est requise au profit de Maître Christine Mere, Avocat constitué pour l'appelant .
Au soutien de ses prétentions, l'appelant fait valoir:
-qu'il résulte des dispositions des articles L341-2 et L341-3 du code de la consommation que le cautionnement consenti par une personne physique au bénéfice d'un créancier professionnel doit comporter des mentions manuscrites de la main de celui qui s'engage
-que la désignation du débiteur cautionné ne figure pas dans la mention manuscrite des trois cautionnements dont se prévaut la banque
-que ces trois cautionnements sont donc nuls
-que la qualité de l'appelant de gérant du bénéficiaire du crédit et le fait que le nom du bénéficiaire du crédit figurait sur certaines pages qu'il a paraphées dans le document sur lequel il a reproduit manuscritement la mention litigieuse, constituent des circonstances totalement indifférentes
-que la disproportion des trois cautionnements à ses biens et ses revenus aurait du être retenue par le tribunal de commerce d'Aubenas, sur le fondement de l'article L341-4 du code de la consommation, et la banque déclarée dans l'impossibilité de se prévaloir des cautionnements
-que s'agissant de l'engagement souscrit le 13 avril 2010, la fiche de renseignements doit être écartée, faute par la banque de produire les documents annexes auxquels elle se réfère expressément
-qu'en tout état de cause, cette fiche qui fait état du patrimoine immobilier valorisé par son épouse n'est d'aucune pertinence
-que, de plus, cette fiche contient des anomalies que la banque ne pouvait ignorer
-que la banque est mal fondée à se référer à la fiche de renseignements établie au nom de l'épouse de l'appelant, le 20 mai 2014, qui n'est pas contemporaine de l'engagement de ce dernier
-que la caution est bien fondée à rapporter la preuve de la disproportion manifeste de son engagement au visa de sa situation réelle
-que les éléments d'actifs de son patrimoine s'élevaient en 2010 à 199.299 euros
-qu'il avait un endettement de 99.931,77 euros au titre de ses engagements de caution souscrits précédemment auprès de la Banque Marze
-que son engagement de caution de 50.000 euros représentait plus de 49% de son patrimoine net
-que ses revenus modestes de 12.000 euros par an permettaient seulement de faire face aux charges courantes de la famille alors qu'il avait quatre enfants à charge
-que, s'agissant de l'engagement souscrit le 23 mai 2013, la banque n'a pas cru nécessaire d'établir une fiche de renseignement concernant la caution, contrairement à l'obligation qui lui en est faite
-qu'en 2013, ses revenus annuels se sont élevés à 19.000 euros
-que l'actif de son patrimoine n'atteignait pas les 200.000 euros
-que son endettement dépassait les 124.000 euros
-que s'agissant de l'engagement souscrit le 20 mai 2014, le patrimoine de la caution, à cette date, était composé en négatif d'engagements de cautions antérieurs
-que la déclaration patrimoniale établie au nom de l'épouse était inopposable au mari, quand bien même il l'aurait signée en qualité de conjoint, le couple étant séparé de biens
-que cette déclaration était entachée d'erreur apparente, connue de la banque.
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 2 août 2022, la Banque Populaire du Sud, venant aux droits de la banque Marze, intimée, demande à la cour, au visa des dispositions des articles L332-1 du code de la consommation et L313-22 du code monétaire et financier, de :
-Confirmer le jugement de première instance dans toutes ses dispositions,
-Dire et juger que les mentions manuscrites des engagements de caution sont régulières,
-Dire et juger que les cautions de l'appelant ne peuvent pas être considérées comme manifestement disproportionnées au jour de chaque engagement, eu égard à son patrimoine mobilier d'une valeur de 150.000 euros au titre de la SARL et de 450.000 euros au titre de la SCI et un revenu annuel 18.000 euros
-Condamner l'appelant au paiement de la somme de :
' au titre du contrat de prêt n°0025084 :5.881,17 euros outre intérêts au taux légal à compter du 27 juin 2022
' au titre du contrat de prêt n°0024169 : 571,31 euros outre intérêts au taux légal à compter du 27 juin 2022
' 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
-Constater qu'un accord est intervenu avec l'épouse de l'appelant et que cette dernière n'est plus redevable auprès de la banque
-Condamner l'appelant au paiement de la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
-Ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir conformément aux articles 514 et suivants du code de procédure civile
-Condamner 'aux dépens' conformément aux articles 695 et suivants du code de procédure civile.
La Banque Populaire du Sud réplique :
-que l'appelant avait parfaitement conscience qu'il cautionnait la société qu'il dirigeait
-qu'il a paraphé chaque page des actes de caution
-qu'il connaissait parfaitement la portée et le sens de ses engagements
-que la réforme du droit des sûretés est venue simplifier la mention de la caution pour éviter des contestations de pure mauvaise foi et dilatoires
-que les mentions manuscrites doivent être déclarées régulières
-que les engagements de caution ne sont pas manifestement disproportionnés
-que s'agissant de l'engagement souscrit le 13 avril 2010, la fiche de renseignements n'a pas à être écartée, l'appelant ayant communiqué le bilan de la SARL en première instance et étant le mieux placé pour communiquer le bilan de la SCI dont il est le gérant
-que lors de l'engagement de caution, l'appelant disposait d'un montant total d'actifs de 234.479,85 euros alors qu'il s'était engagé à hauteur de 50.000 euros en qualité de caution et que les créances garanties au titre de ses précédents engagements s'élevaient à 57.866,16 euros
-que la banque avait parfaite connaissance des encours garantis par l'appelant et qu'il n'était donc pas nécessaire que ceux-ci figurent dans la déclaration patrimoniale
-que l'engagement souscrit le 23 mai 2013 n'était pas manifestement disproportionné alors que l'appelant garantissait un passif total de 123.795,12 euros et que son actif avait une valeur de 218.299 euros
-qu'il n'y a pas de disproportion manifeste même en prenant compte son engagement de caution souscrit auprès du CIC pour un montant de 66.000 euros
-que s'agissant de l'engagement souscrit le 20 mai 2014, l'appelant a signé la déclaration patrimoniale non pas en sa qualité de conjoint de la caution mais bien en sa qualité de caution
-qu'il en découlait une absence totale de disproportion manifeste d'engagements de caution à hauteur de 245.261,31 euros, face à un actif de 618.000 euros
-que l'appelant qui a certifié l'exactitude des renseignements mentionnés ne peut venir contester le contenu de sa déclaration
-que le couple n'avait pas de charges de la vie courante, les frais liés à leur hébergement étant intégralement réglés par la SARL.
Les conclusions de l'appelant et de la Banque Populaire du Sud ont été signifiées respectivement les 11 et 3 août 2022 à Madame [U] [B], intimée défaillante.
MOTIFS
1) Sur la nullité de l'engagement de caution de l'appelant
L'article 2297 du code civil, issu de l'ordonnance n°2021-1192 du 15 septembre 2021, a abrogé le titre III du livre III du code de la consommation qui régissait le cautionnement et notamment les articles L. 331-1 et L. 331-2 qui reprenaient les dispositions des articles L. 341-2 et L. 341-3, en vigueur jusqu'au 1er juillet 2016, s'agissant de la mention portée par la caution.
Aux termes de l'article 37 de l'ordonnance n°2021-1192 du 15 septembre 2021, les cautionnements conclus avant le 1er janvier 2022 demeurent soumis à la loi ancienne, y compris pour leurs effets légaux et pour les dispositions d'ordre public.
La validité des engagements de caution de l'appelant doit donc être appréciée au regard des articles L. 341-2 et L. 341-3 du code de la consommation qui étaient alors en vigueur, lors de la signature des actes des 13 avril 2010, 23 mai 2013 et 20 mai 2014.
Aux termes de l'ancien article L. 341-2 du code de la consommation, applicable au présent litige, toute personne physique qui s'engage par acte sous seing privé en qualité de caution envers un créancier professionnel doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante, et uniquement de celle-ci : "En me portant caution de X..., dans la limite de la somme de ... couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de ..., je m'engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X... n'y satisfait pas lui-même."
De plus, l'ancien article L. 341-3 du même code prévoyait que lorsque le créancier professionnel demandait un cautionnement solidaire, la personne physique qui se portait caution devait, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante: "En renonçant au bénéfice de discussion défini à l'article 2298 du code civil et en m'obligeant solidairement avec X..., je m'engage à rembourser le créancier sans pouvoir exiger qu'il poursuive préalablement X...".
L'identité du bénéficiaire du débiteur garanti constitue l'un des éléments essentiels du cautionnement qui doit figurer dans la mention manuscrite.
En l'espèce, l'appelant a indiqué manuscritement sur les actes de cautionnement litigieux qu'il se portait caution 'du bénéficiaire du crédit' ... et qu'il s'engageait à rembourser au prêteur les sommes dues sur ses revenus et ses biens si 'le bénéficiaire du crédit' n'y satisfaisait pas lui-même. L'appelant a également mentionné manuscritement qu'en renonçant au bénéfice de discussion défini à l'article 2298 du code civil et en s'obligeant solidairement avec 'le bénéficiaire du crédit', il s'engageait à rembourser le créancier sans pouvoir exiger qu'il poursuive préalablement ' le bénéficiaire du crédit'.
L'appelant n'a donc jamais désigné, à la place de la lettre 'X' de la formule légale, par sa dénomination sociale, le bénéficiaire du cautionnement dans les mentions manuscrites précédant sa signature, sur les actes sous signature privée des 13 avril 2010, 23 mai 2013 et 20 mai 2014.
Ainsi, le formalisme imposé par le législateur, à peine de nullité, pour protéger la caution en attirant son attention sur la portée de ses engagements et l'étendue des risques pris n'a pas été respecté.
Il importe peu à cet égard que l'appelant ait paraphé la première page de chacun des actes de caution sur laquelle la dénomination sociale de la société emprunteuse apparaissait et qu'il n'ait pu ignorer la teneur des prêts contractés par la société qu'il dirigeait. Seule la mention manuscrite doit permettre à la caution de connaître l'étendue de son engagement et l'identité de la personne bénéficiaire du crédit.
Dès lors, il convient de déclarer nuls les cautionnements consentis par l'appelant et d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné ce dernier à payer à la banque Marze la somme de 39.797,88 euros au titre du prêt n°0025084, la somme de 34.028,83 euros au titre du prêt n°0024169 et la somme de 19.128,14 euros, au titre du prêt n°0021422.
L'appelant n'étant pas tenu solidairement avec son épouse, séparée de biens, des sommes dues à la banque Marze, aux droits de laquelle vient la Banque Populaire du Sud, la décision rendue le 16 juin 2020 par le tribunal de commerce d'Aubenas sera également infirmée en ce qu'elle a dit bien fondée l'autre caution, dès lors qu'elle aura payé sa dette à la banque Marze, en son action récursoire à l'encontre de l'appelant, dit que l'appelant devra payer à l'autre caution la moitié des sommes qu'elle aura versées à la banque, condamné l'appelant à payer à la banque la somme de 800 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, condamné l'appelant à payer à l'autre caution la somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et condamné l'appelant aux entiers dépens dont les frais de greffe liquidés à la somme de 94,34 euros TTC.
Aux termes de l'article 954, alinéa 3, du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
Il est précisé à l'alinéa 5 du même article que la partie qui conclut à l'infirmation du jugement doit expressément énoncer les moyens qu'elle invoque sans pouvoir procéder par voie de référence à ses conclusions de première instance.
L'appelant qui a sollicité l'infirmation en toutes ses dispositions du jugement de première instance n'a développé aucun moyen relatif à la condamnation prononcée à l'encontre de son épouse au paiement à la Banque Marze des sommes de 40.982,45 euros au titre du prêt n°0025084, 34.951,14 euros au titre du prêt n°0024169 et 19.128,14 euros au titre du prêt n°0021422, le tout avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation.
La Banque Populaire du Sud, qui vient aux droits de la banque Marze, a sollicité la confirmation du jugement de première instance dans toutes ses dispositions, tout en demandant à la cour de 'constater qu'un accord est intervenu avec Madame [U] [B] et que cette dernière n'est plus redevable auprès de la banque'.
La cour n'a pas à statuer sur une demande tendant à 'constater' qui ne constitue pas une prétention au sens de l'article 4 du code de procédure civile.
Il convient, par conséquent, au vu des décomptes de créance produits par la banque, de confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la condamnation de l'épouse de l'appelant à payer les sommes de 40.982,45 euros au titre du prêt n°0025084, 34.951,14 euros au titre du prêt n°0024169 et 19.128,14 euros au titre du prêt n°0021422, le tout avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation.
2) sur les mesures accessoires
La Banque Populaire du Sud sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel, dont distraction pour ceux d'appel au profit de Me Mere, Avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de l'appelant.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Infirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu'il a condamné Madame [U] [B] à payer à la Banque Marze, aux droits de laquelle vient la Banque Populaire du Sud, la somme de 40.982,45 euros au titre du prêt n°0025084, la somme de 34.951,14 euros au titre du prêt n°0024169 et la somme de 19.128,14 euros au titre du prêt n°0021422, le tout avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation les sommes de 40.982,45 euros au titre du prêt n°0025084, 34.951,14 euros au titre du prêt n°0024169 et 19.128,14 euros au titre du prêt n°0021422, le tout avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation
Y ajoutant
Déclare nuls les cautionnements consentis par Monsieur [L] [F]
Déboute la Banque Populaire du Sud, qui vient aux droits de la Banque Marze, de ses demandes à l'encontre de Monsieur [L] [F]
Condamne la Banque Populaire du Sud, qui vient aux droits de la Banque Marze, aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction pour ceux d'appel au profit de Me Mere, Avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile
Déboute Monsieur [L] [F] de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile
Arrêt signé par Madame Christine CODOL, Présidente, et par Monsieur Julian LAUNAY-BESTOSO, Greffier.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE