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29/06/2022 | FRANCE | N°20/01732

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 4ème chambre commerciale, 29 juin 2022, 20/01732


ARRÊT N°





N° RG 20/01732 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HYBD





CC









TRIBUNAL DE COMMERCE DE NIMES

16 juin 2020

RG:2018J203











Société DUPESSEY IBERICA

S.A. GROUPE DUPESSEY

S.A. MMA IARD

S.A. MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES



C/



Société TRANSPORTES INTERNACIONALES Y NACIONALES ISOTERMOS FLORES



Grosse délivrée le 29 juin 2022 à :



- Me VEZIAN

- Me VAJOU























COUR D'APPEL DE NÎMES



4ème CHAMBRE COMMERCIALE





ARRÊT DU 29 JUIN 2022







APPELANTES :



DUPESSEY IBERICA, immatriculée au RCS de BARCELONE n°032 109 248, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exerc...

ARRÊT N°

N° RG 20/01732 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HYBD

CC

TRIBUNAL DE COMMERCE DE NIMES

16 juin 2020

RG:2018J203

Société DUPESSEY IBERICA

S.A. GROUPE DUPESSEY

S.A. MMA IARD

S.A. MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES

C/

Société TRANSPORTES INTERNACIONALES Y NACIONALES ISOTERMOS FLORES

Grosse délivrée le 29 juin 2022 à :

- Me VEZIAN

- Me VAJOU

COUR D'APPEL DE NÎMES

4ème CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU 29 JUIN 2022

APPELANTES :

DUPESSEY IBERICA, immatriculée au RCS de BARCELONE n°032 109 248, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice domicilié en cette qualité qualité audit siège

[Adresse 9]

[Localité 1] Espagn

Représentée par Me Aurore VEZIAN de la SELARL LEONARD VEZIAN CURAT AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Florent VIGNY de la SELARL CAUSIDICOR, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

GROUPE DUPESSEY, société anonyme, immatriculée au RCS d'Annecy n° 410 271 654, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 8]

[Localité 5]

Représentée par Me Aurore VEZIAN de la SELARL LEONARD VEZIAN CURAT AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Florent VIGNY de la SELARL CAUSIDICOR, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

MMA IARD, société anonyme, immatriculée au RCSdu Mans sous le n°440 048 882, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice domicilié qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Aurore VEZIAN de la SELARL LEONARD VEZIAN CURAT AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Florent VIGNY de la SELARL CAUSIDICOR, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES, société civile d'asssurance mutuelle à cotisations fixes fonds d'établissement, immatriculée au RCS du Mans sous le numéro 775 652 126, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Aurore VEZIAN de la SELARL LEONARD VEZIAN CURAT AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Florent VIGNY de la SELARL CAUSIDICOR, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :

Société TRANSPORTES INTERNACIONALES Y NACIONALES ISOTERMOS FLORES poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité en son siège social sis

P.I. Lomo C/ Gladiolo 7

Lo, 7,

[Localité 3] (ESPAGNE)

Représentée par Me LAPLACE-TREYTURE Lina, substituant Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOUE NIMES, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Stéphanie GRIGNON DUMOULIN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre,

Mme Corinne STRUNK, Conseillère,

Madame Claire OUGIER, Conseillère,

GREFFIER :

Monsieur Julian LAUNAY-BESTOSO, Greffier à la 4ème chambre commerciale, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

À l'audience publique du 02 Juin 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 29 Juin 2022.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre, le 29 Juin 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour

EXPOSÉ

Vu l'appel interjeté le 17 juillet 2020 par la société Dupessey Iberica, la SA Groupe Dupessey, la SA MMA Iard [A] et la SA MMA Iard Assurances Mutuelles [B] à l'encontre du jugement rendu le 16 juin 2020 le tribunal de commerce de Nîmes dans l'instance n° RG 2018J203 ;

Vu les dernières conclusions de la Société Dupessey Iberica, SA Groupe Dupessey, la SA MMA Iard et la SA MMA Iard Assurances Mutuelles, appelantes remises par la voie électronique le 23 février 2021, et le bordereau de pièces qui y est annexé ;

Vu les dernières conclusions de la société Transportes Internacionales y Nacionales Isotermos Flores (ci-après l'intimée), intimée, remises par la voie électronique le 24 novembre 2020, et le bordereau de pièces qui y est annexé (pièces adverses) ;

Vu l'ordonnance du 10 décembre 2021 de clôture de la procédure à effet différé au 19 mai 2022 avec fixation de l'audience de plaidoiries au 2 juin 2022.

* * *

Une entreprise suisse, la SA T' décide d'expédier une cargaison de bouteilles de vodka en Espagne. Elle mandate la société Groupe D', commissionnaire de transport contractuel. La filiale de ce groupe, la société D'I', commissionnaire de transport réel, confie la marchandise au voiturier espagnol, société T'I'F'

Cette marchandise devait être livrée dans l'entrepôt de Monsieur [R] [X]' à [Adresse 7].

Les palettes ont été chargées à [Localité 6] le 2 juin 2017 et le véhicule avec chargement est arrivé sur le site le 4 juin 2017. Il a stationné en bordure de site. Le personnel du transporteur, qui s'était absenté, a constaté à son retour le vol de la remorque avec son chargement et des dégradations sur le tracteur.

La direction centrale des assureurs mandate un expert amiable qui évalue le montant du sinistre à la somme de 83 087,81 euros.

Le commissionnaire de transport contractuel règle une somme de 4 000 euros au mandataire de l'expéditeur (la société R'). Ce même mandataire délivre en outre, le 16 mai 2018, aux deux sociétés d'assurance appelantes une quittance subrogative d'un montant de 79.087,81 €.

Par exploit du 18 mai 2018, le commissionnaire de transport réel, le commissionnaire de transport contractuel, les deux sociétés d'assurance ont fait assigner l'intimée devant le tribunal de commerce de Nîmes afin de la voir condamner à leur payer les sommes suivantes:

-aux sociétés d'assurance : 79 087,81 € à titre principal, 904,58 € au titre des frais d'expertise, 6000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-au commissionnaire de transport contractuel, la somme de 4 000 € au titre de la franchise et 1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 16 juin 2020, le tribunal de commerce de Nîmes a :

dit et jugé le tribunal territorialement compétent,

dit les demandes des sociétés d'assurance recevables individuellement ou in solidum,

dit et jugé les sociétés d'assurance dépourvues du droit d'agir en vertu d'une subrogation légale ou conventionnelle,

débouté les sociétés d'assurance de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

dit recevable la pièce 7 du demandeur,

dit et jugé le commissionnaire de transport contractuel recevable et bien fondé en son action,

condamné l'intimée à payer au commissionnaire de transport contractuel la somme de 4 000 € au titre de la franchise payée,

condamné l'intimée à payer au commissionnaire de transport contractuel un intérêt de 5% sur la somme de 4 000 € à compter de la date de l'assignation,

débouté la demanderesse de l'anatocisme et de ses autres demandes, fins et conclusions,

ordonné l'exécution provisoire,

condamné l'intimée à payer au commissionnaire de transport contractuel la somme de 1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

débouté toutes les autres parties de leur demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

rejeté toutes autres demandes, fins et conclusions contraires ;

condamné l'intimée « au paiement de la moitié des dépens et à l'autre moitié des dépens », ces dépens comprenant en outre les frais d'expertise contradictoire de 649,48 € engagés en avance par une des sociétés d'assurance pour la solution amiable de ce litige,

condamné l'intimée et les sociétés d'assurance aux dépens de l'instance, » ainsi qu'il a été relevé ci avant, » que le tribunal a liquidé et taxé à la somme de 137,54 euros en ce non compris le coût de la citation introductive d'instance, le coût de la signification de la présente décision, ainsi que tous autres frais et accessoires.

Le 17 juillet 2020, les appelantes ont relevé partiellement appel de ce jugement pour le voir réformer sur des dispositions expressément critiquées.

L'intimée a formé appel incident en ce qui concerne les autres dispositions du jugement déféré.

* * *

Au terme de leurs dernières conclusions, le commissionnaire de transport contractuel, le commissionnaire de transport réel, la société d'assurance [A] et la société d'assurance [B], appelants, demandent à la cour, de :

confirmer le jugement (RG 2018J00203) en ce qu'il a retenu sa compétence et condamné l'intimée à payer au commissionnaire de transport contractuel : 4.000 € au titre de la franchise, et 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

infirmer le jugement pour le surplus et, statuant à nouveau, condamner l'intimée à payer aux sociétés d'assurance [A] et [B] : 79.087,81 € à titre principal, 904,58 € au titre des frais d'expertise, et 6.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner l'intimée à payer au commissionnaire de transport contractuel, la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

assortir ces condamnations des intérêts CMR de 5 % à compter du 3 juin 2017 (date du vol) (Art. 27-1 de la Convention CMR).

prononcer l'anatocisme (Art. 1343-2 du code civil).

condamner l'intimée à l'intégralité des dépens qui comprendront notamment les frais de traduction et de signification dans l'Union européenne.

Le commissionnaire de transport contractuel, le commissionnaire de transport réel, la société d'assurance [A] et la société d'assurance [B], appelants, soutiennent, tout d'abord, la compétence matérielle et territoriale du tribunal de commerce de Nîmes conformément à l'article 31.1 b) de la Convention de Genève du 19 mai 1956, les marchandises ayant été retirées en France dans le département du Gard.

Ils exposent que la clause attributive d'une juridiction, rédigée en langue espagnole, invoquée par l'intimée est en réalité une clause compromissoire désignant le tribunal arbitral des transports terrestres de Madrid et qu'elle ne leur est pas opposable car elle est imprécise et non signée.

Ils soutiennent également la recevabilité de l'action du commissionnaire de transport contractuel étant donné qu'il a réglé une franchise de 4 000 € entre les mains du mandataire, ce qui lui donne un intérêt à agir.

Ils relèvent que l'intimée ne discute pas de sa responsabilité au fond.

En ce qui concerne plus précisément les assureurs, ils font valoir être légalement subrogés dans les droits de l'expéditeur, par application des articles L.121-12 et L.172-29 du code des assurances. Ils le sont également conventionnellement en vertu de la quittance subrogative.

* * *

Aux termes de ses dernières conclusions, l'intimée demande à la cour, au visa des articles 31, 32 et 122 du code du procédure civile, des articles 1309 et suivants du code civil, des articles 1346 et suivant du code civil, de l'article 121-12 du code des assurances, de :

Statuant sur l'appel formé par les appelants et sur son appel incident à l'encontre du jugement rendu le 16 juin 2020 par le tribunal de commerce de Nîmes,

A titre liminaire,

infirmer le jugement du tribunal de commerce de Nîmes du 16 juin 2020 en ce qu'il s'est déclaré territorialement compétent,

Statuant à nouveau :

- dire et juger que le tribunal de commerce de Nîmes était incompétent

- dire et juger que seul le tribunal de commerce de Madrid était compétent

Pour le cas où par extraordinaire la Cour confirmerait la compétence du tribunal de commerce de Nîmes, il lui est demandé de :

confirmer le jugement du tribunal de commerce de Nîmes du 16 juin 2020 en ce qu'il a jugé les sociétés d'assurance [A] et [B] dépourvus du droit d'agir en vertu d'une subrogation légale ou conventionnelle,

confirmer le jugement du tribunal de commerce de Nîmes du 16 juin 2020 en ce qu'il a débouté le commissionnaire de transport contractuel et le commissionnaire de transport réel de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

confirmer le jugement du tribunal de commerce de Nîmes du 16 juin 2020 en ce qu'il a débouté la demanderesse de l'anatocisme et de ses autres demandes fins et conclusions,

confirmer le jugement du tribunal de commerce de Nîmes du 16 juin 2020 en ce qu'il a débouté les sociétés [A] et [B] de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

infirmer le jugement du tribunal de commerce de Nîmes du 16 juin 2020 pour le surplus

Et statuant à nouveau,

dire et juger que la demande unique et globale de condamnations formée ensemble par le commissionnaire de transport contractuel et le commissionnaire de transport réel est irrecevable en ce qu'elle est imprécise et non individualisée, en l'absence de solidarité active d'une part et de justification par chacun d'eux d'une subrogation régulière à leur profit, d'autre part,

dire et juger que les deux assureurs ne sont pas recevables individuellement ou in solidum,

dire et juger que le commissionnaire de transport contractuel et le commissionnaire de transport réel ne justifient pas être régulièrement subrogées,

dire et juger que le commissionnaire de transport contractuel et le commissionnaire de transport réel ne justifient pas de leur intérêt à agir,

dire et juger que le commissionnaire de transport contractuel et le commissionnaire de transport réel ne sont pas recevables et bien fondées en leur action,

En conséquence :

débouter purement et simplement les appelantes principales de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

A titre subsidiaire,

Si par extraordinaire, la Cour jugeait que les appelantes présentaient un intérêt à agir et seraient recevables, il y aurait néanmoins lieu de :

dire et juger que les appelantes ne justifient pas du préjudice qui aurait été subi par le mandataire de l'expéditeur au titre des droits d'accises espagnols, tant son principe que dans son montant à hauteur de 47.348.81 €,

dire et juger que les demandes au titre des droits d'accises espagnols à hauteur de 47.348.81 € ne sont pas fondées,

En conséquence,

débouter purement et simplement les appelantes de leurs demandes formées à ce titre,

Dans tous les cas,

faire application des limites et conditions de la police d'assurance qui prévoit en cas de vol une franchise de 30% à la charge de l'assuré,

En conséquence,

dire que les assureurs ne pourraient être éventuellement subrogés qu'à hauteur de la somme de 25 017,30 euros,

condamner solidairement les appelants à lui payer la somme de 7 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle soulève, à titre liminaire, l'incompétence territoriale du tribunal de commerce de Nîmes au profit de celui de Madrid arguant que l'article 31 de la CMR, détermine uniquement le pays dans lequel une action peut être introduite, de sorte que le tribunal compétent est celui de Madrid, par application des articles 42 et suivants du code de procédure civile, donnant compétence au tribunal du lieu de domicile du défendeur.

Elle soutient que la clause attributive de juridiction, figurant dans la case n°19 de la lettre voiture CMR et désignant le tribunal de Madrid, est opposable aux appelants car les parties au contrat sont de droit espagnol. La clause est par voie de conséquence opposable aux parties subrogées.

Puis, elle conclut, à titre principal, à l'irrecevabilité de la demande en paiement unique émanant de deux compagnies d'assurance qui sont deux sociétés totalement distinctes qui ne justifient pas d'une solidarité active. Dès lors, il appartient aux deux assureurs de justifier séparément leur intérêt à agir et d'individualiser les sommes qui seraient, le cas échéant, dues à chacun d'entre eux.

Ensuite, elle conteste l'existence d'un paiement effectif par les assureurs, les pièces versées au débat ne démontrant pas la réalité d'un paiement, l'acte de subrogation ne permettant pas de pallier à cette carence probatoire. Cet acte de subrogation n'est d'ailleurs pas régulier car il ne précise pas l'identité du payeur et mentionne les deux assureurs.

Enfin, les deux assureurs ne justifient d'un paiement effectué en exécution de la police d'assurance, laquelle comporte une condition de garantie. L'intimée fait valoir que la condition n'est pas satisfaite en l'espèce et que, par conséquent, la garantie est limitée à 70% du montant des dommages.

De surcroît, il n'est pas démontré que l'expéditeur ait effectivement subi un préjudice, ce qui rend contestable son intérêt à agir en tant que subrogeant.

En ce qui concerne le commissionnaire de transport contractuel et le commissionnaire réel, il n'est pas démontré l'existence d'une subrogation conventionnelle et donc leur intérêt à agir.

A titre subsidiaire, l'intimée fait valoir l'absence d'un préjudice subi justifié au titre des taxes espagnoles sur l'alcool et que les sommes réclamées ne sont pas justifiées tant dans leur principe que dans leur quantum, alors que les droits d'accises n'ont pas été réglés. En tout état de cause, il convient, selon elle et si l'intérêt à agir des assureurs est retenu, de retenir uniquement la seule facture commerciale de l'expéditeur et de faire application des limites et conditions de la police d'assurance prévoyant, en cas de vol, une franchise de 30 % à la charge de l'assuré.

Pour un plus ample exposé il convient de se référer à la décision déférée et aux conclusions visées supra.

DISCUSSION

Sur la compétence :

La convention de Genève relative au contrat de transport international de marchandises par route, d'ordre public, dit en son article 31, que le demandeur peut saisir les juridictions du pays sur le territoire duquel a eu lieu la prise en charge de la marchandise.

Le lieu du domicile du défendeur est une autre faculté retenue par l'article 31 de la convention mais ce n'est pas le choix qu'a fait le demandeur, ce qui est son droit en vertu de ce texte d'ordre public.

La ville de Beaucaire relève de la compétence territoriale de Nîmes et le tribunal de commerce de Nîmes a ainsi valablement retenu sa compétence.

Il n'y a pas de clause attributive de juridiction dans les pièces contractuelles produites mais une clause compromissoire libellée en espagnol dont la traduction faite par les appelantes n'est pas contestée.

Cette clause figure dans la lettre de voiture signée par l'expéditeur et le transporteur et indique que les parties se soumettent pour la solution d'un quelconque litige relatif à l'interprétation et l'exécution du contrat de transport auquel fait référence le présent document à l'assemblée arbitrale de transports terrestres de Madrid (Espagne) conformément aux termes de la loi 15/1987 d'orientation des transports terrestres et de ses normes d'application.

Cepndant, l'article 33 de la convention CMR prévoir que la clause attribuant compétence à un tribunal arbitral n'est valable que si la clause mentionne que le tribunal arbitral doit appliquer la convention CMR.

Tel n'est pas le cas en l'espèce, de sorte que la juridiction étatique qu'est le tribunal de commerce de Nîmes est compétente pour statuer sur les demandes des parties.

Sur la demande en paiement des commissionnaires :

Le contrat d'assurance du commissionnaire de transport contractuel (avenant n°12, police n°113 424 799) stipule que les garanties du chapitre I RC contractuelle bénéficient également pour l'activité de commissionnaire de transport à la filiale ibérique. A défaut d'avoir donné connaissance par écrit au transporteur sous-traitant ou affrété de l'ensemble des instructions reprises dans le cadre des conditions de garantie de vol, une franchise minimale des dommages est fixée à 4 000 euros.

Les pièces annexées au rapport d'expertise amiable comprennent l'acte de confirmation d'affrètement du commissionnaire contractuel à sa filiale, commissionnaire réel, pour une livraison en Espagne.

Il n'est pas établi que le transporteur ait eu connaissance des instructions de la compagnie d'assurance du commissionnaire. La franchise contractuelle a donc vocation à s'appliquer.

En application des articles L. 132-2 et suivants du code de commerce, le commissionnaire est tenu d'une obligation de résultat à l'égard du commettant. Il doit donc supporter le risque inhérent à l'application de la franchise par son assureur.

Le mécanisme de la subrogation invoqué par l'intimé étant inopérant dans ce contexte, le commissionnaire est recevable à agir, dès lors qu'il justifie avoir réglé le montant de la franchise au commettant. Ainsi que l'a relevé le jugement, les commissionnaires produisent l'avis d'opération de virement de la somme de 4 000 euros prélevé sur le compte du groupe en faveur du mandataire de l'expéditeur.

L'article 17 de la convention CMR précise que le transporteur est responsable de la perte totale ou partielle ou de l'avarie qui se produit entre le moment de la prise en charge de la marchandise et celui de la livraison.

Il n'est pas discuté le fait que le camion n'était pas stationné dans le site de livraison mais en bordure et qu'il a été laissé sans surveillance, ce qui a conduit au vol de la cargaison. Au visa des articles 1231-1 du code civil et de l'article 17 de la convention CMR, l'entreprise de transport a, de ce fait, commis une faute dont elle doit réparer les conséquences, à savoir le paiement de la somme de 4 000 euros par le commissionnaire à l'expéditeur.

Sur la demande en paiement des assureurs :

Les assureurs produisent la décision n°2015-C-83 aux termes de laquelle sont approuvés, dans les conditions prévues à l'article L.324-1 du code des assurances, les transferts d'une partie des portefeuilles de contrats à l'assureur [B] et le transfert des portefeuilles de contrats à l'assureur [A]

Les conditions générales et les conditions particulières « transfleet » garantissant la responsabilité civile des entreprises transport et des commissionnaires de transport sont citées dans l'avenant à effet du 1er janvier 2017 signé par le commissionnaire de transport et les deux assureurs. En effet, le tampon humide cite en première ligne l'assureur [B] avec à la ligne suivante son numéro de RCS, à la suite de quoi est cité l'assureur [A] avec reproduction de son propre numéro de RCS, le siège social des deux personnes morales étant situé au même endroit.

Les deux assureurs étant parties au contrat d'assurance, sont ainsi recevables à agir en exécution de l'obligation découlant de ce contrat.

Il leur incombe ensuite de rapporter la preuve qu'ils ont effectué un paiement correspondant à l'exécution de leur obligation.

Or, il ressort des pièces 10b et 10c - justifiant d'un ordre de virement du 28 mai 2017, réglé le 30 mai suivant - produites par les appelantes que ce paiement a été effectué par l'assureur [A].

Les conditions de la subrogation légale ne sont donc pas remplies en ce qui concerne l'assureur [B].

L'assureur [A] justifie par contre d'un règlement effectué en vertu du contrat d'assurances et est recevable à agir sur le fondement de la subrogation légale.

Il est établi par la pièce 7 des appelantes que l'expéditeur a désigné le 2 juin 2017 un mandataire pour exercer toutes les actions utiles et percevoir les fonds. Ce mandataire a accepté, le 16 mai 2018, de recevoir la somme de 79 087,81 euros HT pour règlement définitif du sinistre et a subrogé les deux assureurs dans leurs droits et actions pour tous recours qu'il y aurait lieu d'exercer contre les tiers (pièce 10). Contrairement à ce qui est mentionné dans le jugement, il est indifférent que l'une des pièces soit en anglais et l'autre en français. La quittance subrogative a été datée manuscritement au bon emplacement, le lieu a été également renseigné manuscritement au bon emplacement et le bénéficiaire a signé et apposé son tampon humide au bon endroit. Cela démontre une compréhension du document et donc une acceptation expresse du bénéficiaire, d'autant qu'il a effectivement accepté le règlement de la somme de la somme de 79 087,81 euros HT par l'assureur [A] (pièce 10b et 10c).

L'assureur [B], cité dans la quittance subrogative, est par conséquent irrecevable à agir sur le fondement de la subrogation conventionnelle car il n'a effectué aucun paiement.

Il n'est pas discuté le fait que le camion n'était pas stationné dans le site de livraison mais en bordure et qu'il a été laissé sans surveillance, ce qui a conduit au vol de la cargaison remise par l'expéditeur au commissionnaire. Au visa des articles 1231-1 du code civil et de l'article 17 de la convention CMR, l'entreprise de transport a, de ce fait, commis une faute dont elle doit réparer les conséquences, à savoir le paiement de la somme de 79 087,91 euros par l'assureur [A] à l'expéditeur. La réalité du préjudice est en effet démontrée par les pièces annexées au rapport d'expertise amiable, à savoir la facture commerciale de la marchandise et le document d'accompagnement EMCS pour les droits d'accises. Il sera ici rappelé que l'article 23.4 de la convention CMR prévoit le remboursement des droits de douane encourus à l'occasion du transport de marchandise et que le document d'accompagnement EMCS est généré lors de l'expédition afin de permettre un règlement différé des droits de douane.

Les assureurs se verront déboutés de leur demande en paiement des frais d'expertise car la pièce produite démontre seulement que le règlement a été effectué par le commissionnaire.

Enfin l'assureur [A] a droit, en vertu de l'article 27 de la convention CMR à des intérêts de 5% l'an à compter de l'assignation et non de la date du vol. Eu égard à ce taux d'intérêt, il n'y a pas lieu de décider la capitalisation des intérêts dans les conditions édictées par l'article 1343-2 du code civil.

Sur les frais de l'instance :

L'équité commande de condamner l'intimée à payer la somme complémentaire de 1000 euros au commissionnaire de transport contractuel et celle de 2 000 euros à l'assureur [A].

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a dit que MMA Iard était dépourvue d'agir en vertu de la subrogation légale et MMA Iard Assurances Mutuelles dépourvues d'agir en vertu d'une subrogation conventionnelle, débouté MMA Iard et MMA Assurances de toutes leurs demandes, condamné TIF à la moitié des dépens comprenant les frais d'expertise, condamné MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles aux dépens.

Et statuant sur les dispositions infirmées,

Dit que MMA Iard est recevable à agir en vertu d'une subrogation légale,

Condamne Transportes Internationales Y Nacionales Isotermos Flores SL à payer à MMA Iard la somme de 79 087,81 euros à titre principal, outre intérêts de 5% à compter du 18 mai 2018,

Déboute MMA Iard de sa demande en paiement de la somme de 904,58 euros au titre des frais d'expertise,

Rejette la demande d'anatocisme,

Condamne Transportes Internationales Y Nacionales Isotermos Flores SL à payer à MMA Iard la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et la somme complémentaire de 1000 euros à Groupe Dupessey SA,

Condamne Transportes Internationales Y Nacionales Isotermos Flores SL aux dépens de première instance et d'appel.

La minute du présent arrêt a été signée par Madame Christine CODOL, Présidente, et par Monsieur Julian LAUNAY-BESTOSO, Greffier.

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 4ème chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 20/01732
Date de la décision : 29/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-29;20.01732 ?
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