La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/06/2022 | FRANCE | N°20/00671

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 5e chambre pole social, 21 juin 2022, 20/00671


ARRÊT N°



R.G : N° RG 20/00671 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HVAV

EM/DO



POLE SOCIAL DU TJ DE NIMES

22 janvier 2020





RG:17/00458





[C]



C/



CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCES MALADIE DU GARD









































COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE SOCIALE



ARRÊT DU 21 JUIN 2022









APPE

LANTE :



Madame [W] [C]

[Adresse 6]

[Localité 4]



représentée par Me Anne-sophie CHAGNAUD, avocat au barreau de NIMES





INTIMÉE :



CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCES MALADIE DU GARD

[Adresse 3]

[Localité 5]



représentée par M. [R] en vertu d'un pouvoir général





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :



Madame Ev...

ARRÊT N°

R.G : N° RG 20/00671 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HVAV

EM/DO

POLE SOCIAL DU TJ DE NIMES

22 janvier 2020

RG:17/00458

[C]

C/

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCES MALADIE DU GARD

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 21 JUIN 2022

APPELANTE :

Madame [W] [C]

[Adresse 6]

[Localité 4]

représentée par Me Anne-sophie CHAGNAUD, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉE :

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCES MALADIE DU GARD

[Adresse 3]

[Localité 5]

représentée par M. [R] en vertu d'un pouvoir général

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 945-1 du code de Procédure Civile, sans opposition des parties.

Elle en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère

GREFFIER :

Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

à l'audience publique du 05 Avril 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 14 Juin 2022 et prorogé ce jour ;

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 21 Juin 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

Le 02 septembre 2016, Mme [W] [C] a souscrit une déclaration de maladie professionnelle sur la base d'un certificat médical initial établi le 30 août 2016 par le Docteur [I] qui mentionnait une 'dissection sous clavière gauche et thrombose axe huméro-radial et cubital responsable d'une ischémie du MSG'.

Le 19 janvier 2017, la caisse primaire d'assurance maladie du Gard a rejeté la prise en charge de l'affection déclarée au titre de la législation sur les risques professionnels au motif que les conditions médicales réglementaires du tableau 69C ne sont pas remplies.

Le 22 février 2017, Mme [W] [C] a saisi la commission de recours amiable de la caisse primaire d'assurance maladie du Gard d'un recours contre cette décision laquelle l'a rejeté par une décision du 20 avril 2017.

Par courrier recommandé du 06 juin 2017, Mme [W] [C] a saisi le tribunal de grande instance de Nîmes, contentieux de la protection sociale d'un recours contre cette décision, lequel, suivant jugement du 22 janvier 2020, a :

- confirmé la décision de la commission de recours amiable en date du 20 avril 2017,

- débouté Mme [W] [C] de l'ensemble de ses demandes,

- condamné Mme [W] [C] aux dépens.

Suivant déclaration envoyée par voie électronique le 20 février 2021, Mme [W] [C] a régulièrement interjeté appel de cette décision.

L'affaire a été appelée à l'audience du 05 avril 2022 à laquelle elle a été retenue.

Suivant conclusions écrites, déposées et soutenues oralement à l'audience, Mme [W] [C] demande à la cour de :

- réformer la décision rendue par le tribunal de grande instance de Nîmes, contentieux de la protection sociale le 22 janvier 2020 en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes,

A titre principal,

- annuler la décision de la commission de recours amiable de la caisse primaire d'assurance maladie du Gard du 20 avril 2017 qui a refusé de reconnaître le caractère professionnel de la maladie qu'elle a souscrite le 27 septembre 2016,

- rejeter toutes prétentions contraires comme injustes et mal fondées,

- reconnaître le caractère professionnel de la maladie qu'elle a souscrite le 27 septembre 2016 avec toutes les conséquences de droit qui y sont attachées,

A titre subsidiaire,

- ordonner la saisine du comité de reconnaissance des maladies professionnelles pour avis,

A titre infiniment subsidiaire,

- désigner un expert médical aux fins de déterminer si la maladie qu'elle a souscrite est en lien avec son activité professionnelle,

En toute hypothèse,

- condamner la caisse primaire d'assurance maladie du Gard à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Elle fait valoir qu'elle a été amenée à porter en sa qualité de manutentionnaire des bobines de fils de fibre de verre très lourdes, que ces gestes répétés sont à l'origine d'une atteinte physique grave et d'un handicap au niveau du bras gauche qu'elle ne peut plus utiliser en raison d'une artère bouchée et qu'elle a dû subir quatre opérations chirurgicales.

Au visa de l'article L461-1 du code de la sécurité sociale, elle soutient que l'affection qu'elle a déclarée doit bénéficier de la présomption d'origine professionnelle, précisant qu'il y a bien une atteinte vasculaire cubito palmaire de la main gauche entraînant des manifestations ischémiques.

Subsidiairement, elle estime être fondée à solliciter la désignation d'un comité de reconnaissance des maladies professionnelles pour déterminer si sa maladie est en lien avec son activité professionnelle, et à titre très subsidiaire, elle sollicite une expertise médicale judiciaire.

Suivant conclusions écrites, déposées et soutenues oralement à l'audience, la caisse primaire d'assurance maladie du Gard demande à la cour de :

- confirmer purement et simplement le jugement rendu le 22 janvier 2020 par le tribunal judiciaire,

- rejeter les demandes de Mme [W] [C],

Si par extraordinaire la cour estimait que l'affection présentée par Mme [W] [C] relevait du tableau n°69C, renvoyer l'assurée devant elle pour reprise de l'instruction de son dossier,

Si par extraordinaire la cour diligentait une expertise judiciaire, la mission de l'expert serait de déterminer si l'affection de Mme [W] [C] correspond à celle désignée dans le tableau n°69 C des maladie professionnelles.

Elle fait valoir au visa de l'article L461-1 du code de la sécurité sociale que le médecin conseil a considéré que Mme [W] [C] présente une dissection sous clavière gauche mais ne présente pas de phénomène de [G] de sorte qu'elle ne remplit pas les conditions médicales du tableau 69C des maladies professionnelles et qu'il ne lui appartient pas de porter un quelconque jugement sur cet avis.

Elle ajoute que seule la condition médicale n'étant pas remplie et le dossier de Mme [W] [C] ayant été instruit sur la base du tableau 69C , la désignation d'un comité de reconnaissance des maladies professionnelles n'est pas fondée, tout comme la désignation d'un expert médical dans la mesure où le litige ne porte pas sur le lien entre la pathologie dont souffre Mme [W] [C] et son activité professionnelle mais sur la désignation de la maladie.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens de parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues à l'audience.

MOTIFS

Selon l'article L461-1 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable issu de la loi n°215-994 du 17 août 2015, les dispositions du présent livre sont applicables aux maladies d'origine professionnelle sous réserve des dispositions du présent titre.

En ce qui concerne les maladies professionnelles, la date à laquelle la victime est informée par un certificat médical du lien possible entre sa maladie et une activité professionnelle est assimilée à la date de l'accident.

Est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau.

Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime.

Peut être également reconnue d'origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau de maladies professionnelles lorsqu'il est établi qu'elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu'elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente d'un taux évalué dans les conditions mentionnées à l'article'L. 434-2'et au moins égal à un pourcentage déterminé.

Dans les cas mentionnés aux deux alinéas précédents, la caisse primaire reconnaît l'origine professionnelle de la maladie après avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles. La composition, le fonctionnement et le ressort territorial de ce comité ainsi que les éléments du dossier au vu duquel il rend son avis sont fixés par décret. L'avis du comité s'impose à la caisse dans les mêmes conditions que celles fixées à l'article'L. 315-1.

Les pathologies psychiques peuvent être reconnues comme maladies d'origine professionnelle, dans les conditions prévues aux quatrième et avant-dernier alinéas du présent article. Les modalités spécifiques de traitement de ces dossiers sont fixées par voie réglementaire.

La reconnaissance des maladies professionnelles repose ainsi sur des tableaux de maladies professionnelles annexés au livre IV du code de la sécurité sociale. Chaque tableau précise la nature des travaux susceptibles de provoquer la ou les maladies et énumère les affections provoquées. Ces tableaux instituent une présomption d'imputabilité entre la maladie qu'ils décrivent et les travaux qu'ils mentionnent. Les affections ainsi listées sont présumées d'origine professionnelle lorsqu'il est établi que le salarié qui en est atteint a été exposé, de façon habituelle, au cours de son activité professionnelle, à l'action d'agents nocifs.

Fixés par décret et annexés au code de la sécurité sociale, les tableaux des maladies professionnelles ont un caractère réglementaire. Leur application est d'ordre public.

Lorsque la demande de la victime réunit les trois conditions, affection désignée dans le tableau, délai dans lequel la maladie doit être constatée après la cessation de l'exposition du salarié au risque identifié pour être pris en charge et travaux susceptibles de provoquer la maladie, la maladie est présumée d'origine professionnelle, sans que la victime ait à prouver le lien de causalité entre son affection et son travail.

La maladie telle qu'elle est désignée dans les tableaux de maladies professionnelles est celle définie par les éléments de description et les critères d'appréciation fixés par chacun des tableaux.

S'il n'y a pas lieu à procéder à une analyse littérale du certificat médical initial, par contre, la maladie déclarée doit correspondre précisément à celle décrite au tableau, avec tous ses éléments constitutifs et doit être constatée conformément aux éléments de diagnostic éventuellement prévus, et la charge de la preuve de la réunion des conditions exigées par l'article L. 461-1 susvisé, pèse sur l'organisme social, lorsque ce dernier a décidé d'une prise en charge contestée par l'employeur.

Il entre dans les compétences du médecin conseil de la caisse, en application de l'article L.315-1 du code de la sécurité sociale, de vérifier si la pathologie mentionnée au certificat médical initial correspond à une maladie mentionnée dans un tableau de maladies professionnelles.

Le tableau n°69C du tableau des maladies professionnelles relatif aux affections provoquées par les vibrations et chocs transmis par certaines machines-outils, outils et objets et par les chocs itératifs du talon de la main sur des éléments fixes :

- désigne au paragraphe C la maladie suivante : atteinte vasculaire cubito-palmaire en règle unilatérale (syndrome du marteau hypothénar) entraînant un phénomène de [G] ou des manifestations ischémiques des doigts confirmée par l'artériographie objectivant un anévrisme ou une thrombose de l'artère cubitale ou de l'arcade palmaire superficielle,

- fixe un délai de prise en charge de 1 an sous réserve d'une durée d'exposition de 5 ans,

- liste les travaux à l'origine de cette maladie : travaux exposant habituellement à l'utilisation du talon de la main en percussion directe itérative sur un plan fixe ou aux chocs transmis à l'éminence hypothénar par un outil percuté ou percutant.

Mme [W] [C] a déclaré le 27 janvier 2016 une affection pour une 'dissection sous clavière gauche et thrombose de l'huméro-radial et cubital responsable d'une ischémie' ; le certificat médical initial mentionne une 'dissection sous clavière gauche et thrombose axe huméro-radial et cubital responsable d'une ischémie du MSG'.

Le médecin conseil de la caisse primaire d'assurance maladie du Gard a considèré dans son colloque médico-administratif le 19 décembre 2016 que les conditions médicales réglementaires du tableau 69C n'étaient pas remplies en raison de l'absence du 'phénomène de [G]. Dissection sous clavière gauche'.

Cependant, la maladie désignée au tableau 69C prévoit soit l'apparition d'un phénomène de [G], soit une manifestation ischémique des doigts confirmée par artériographie objectivant un anévrisme ou une thrombose de l'artère cubitale ou de l'arcade palmaire superficielle.

A l'appui de ses prétentions, Mme [W] [C] produit notamment :

- un compte rendu d'une artériographie de la crosse de l'aorte du 30 mai 2016 qui conclut de la façon suivante 'thrombose du stend de la sous-clavière gauche. Réopacification de la sous clavière gauche par une collatéralité provenant des vaisseaux droits et des cervicales ascendantes. Thrombose de l'artère humérale droite et au niveau de l'avant bras, persistent une cubitale et une inter osseuse',

- un compte rendu opératoire du 25 mars 2016 concernant une 'thrombectomie huméro axillaire gauche et une dilatation stenting sous clavière gauche par abord huméral gauche.'

Les éléments ainsi apportés par l'appelante mettent en évidence une thrombose de la sous-clavière gauche qui est différente de l'artère cubitale, cependant, ces même pièces médicales font également état de la persistance d'une 'cubitale'.

Enfin, si Mme [W] [C] n'établit pas être atteinte du syndrome de [G], par contre, le certificat médical initial mentionne une ischémie.

La cour n'étant pas en mesure de statuer sur ce litige d'ordre médical, il convient de faire droit à la demande de Mme [W] [C] et d'ordonner une mesure d'expertise médicale.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière de sécurité sociale et en dernier ressort;

Avant dire droit,

Ordonne une expertise médicale sur pièces du dossier médical de Mme [W] [C],

Commet pour y procéder le Docteur [M] [L], [Adresse 7] ( Tél : [XXXXXXXX01] - Port. : [XXXXXXXX02] Mèl : [Courriel 8]) avec pour mission de':

- se faire communiquer l'entier dossier médical de Mme [W] [C] en possession du service médical de la caisse primaire d'assurance maladie du Gard,

- dire si l'affection que Mme [W] [C] a déclarée le 27 janvier 2016 correspond à la maladie désignée dans le tableau 69C des maladies professionnelles,

- fournir les seuls éléments médicaux de nature à apporter une réponse à la question posée.

Rappelle que la caisse primaire d'assurance maladie du Gard doit communiquer à l'expert désigné le dossier de Mme [W] [C] détenu par son service médical, sauf au juge à tirer toutes conséquences de droit de son abstention ou refus,

Ordonne la consignation par la Caisse primaire d'assurance maladie du Gard auprès du régisseur de la cour dans les deux mois de la notification du présent arrêt de la somme de 600 euros à valoir sur la rémunération del'expert par chèque libellé à 'l'ordre du régisseur d'avances et de recttes de la cour d'appel de Nimes',

Dit que l'expert déposera son rapport au greffe de la cour d'appel dans les quatre mois de sa saisine et au plus tard le 30 octobre 2022 et en transmettra copie à chacune des parties,

Désigne M [V] [J] président, ou un délégataire, pour suivre les opérations d'expertise,

Renvoie la cause et les parties à l'audience du 22 novembre 2022 à 14 heures,

Dit que la notification du présent arrêt vaudra convocation à l'audience,

Sursoit à statuer sur les dépens.

Arrêt signé par Monsieur ROUQUETTE-DUGARET, Président et par Madame OLLMANN, Greffière.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 5e chambre pole social
Numéro d'arrêt : 20/00671
Date de la décision : 21/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-21;20.00671 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award