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14/06/2022 | FRANCE | N°19/02398

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 5ème chambre sociale ph, 14 juin 2022, 19/02398


ARRÊT N°



N° RG 19/02398 - N° Portalis DBVH-V-B7D-HML4



MS/EB



CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'AVIGNON

14 mai 2019



RG :17/00558





[B]





C/



[X]































COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH



ARRÊT DU 14 JUIN 2022







APPELANT :



Monsieur

[V] [B]

né le 28 Mars 1957 à THONON LES BAINS (74200)

18 rue Antoine de St Exupery

84000 AVIGNON



Représenté par Me Alexandra BOUILLARD, avocat au barreau d'AVIGNON





INTIMÉE :



Madame [G] [X] épouse [C]

née le 15 Juin 1988 à TIZI BOUDRISS (MAROC)

3 place Borodine

Résidence les Tilleuls

84000 AVIGNON

...

ARRÊT N°

N° RG 19/02398 - N° Portalis DBVH-V-B7D-HML4

MS/EB

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'AVIGNON

14 mai 2019

RG :17/00558

[B]

C/

[X]

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH

ARRÊT DU 14 JUIN 2022

APPELANT :

Monsieur [V] [B]

né le 28 Mars 1957 à THONON LES BAINS (74200)

18 rue Antoine de St Exupery

84000 AVIGNON

Représenté par Me Alexandra BOUILLARD, avocat au barreau d'AVIGNON

INTIMÉE :

Madame [G] [X] épouse [C]

née le 15 Juin 1988 à TIZI BOUDRISS (MAROC)

3 place Borodine

Résidence les Tilleuls

84000 AVIGNON

Représentée par M. [R] [Y] (Délégué syndical ouvrier)

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 24 Mars 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

M. Michel SORIANO, Conseiller, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Madame Virginie HUET, Conseillère

M. Michel SORIANO, Conseiller

GREFFIER :

Mme Emmanuelle BERGERAS, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

à l'audience publique du 07 Avril 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 14 Juin 2022

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 14 Juin 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

Mme [C] [M] a eté embauchée le 1er avril 2012 par M. [V] [B], médecin généraliste, en qualité de secrétaire au coefficient 203, en contrat à durée déterminée à temps partiel, moyennant un salaire mensuel brut de 793 euros pour 91 heures de travail mensuelles.

Suivant avenant en date du 12 septembre 2012, la durée de travail de Mme [C] était porté à 104 heures mensuelles, pour un salaire de 982 euros brut.

A compter du 1er avril 2013, Mme [C] était embauchée par contrat à durée indéterminée à temps partiel pour 27 heures de travail par semaine, moyennant la rémunération de 1.150 euros bruts par mois.

Mme [C] a bénéficié d'un congé maternité.

En avril 2014, elle sollicitait l'autorisation de son employeur pour prolonger son absence en congé parental d'éducation, ce qui a été accepté par celui-ci.

La salariée recevait deux avertissements par courrier AR, en date du 22 janvier 2015 et du 28 janvier 2015.

Mme [C] est restée en arrêt de travail du 2 février 2015 au 4 mai 2015.

La CPAM de Vaucluse a refusé de reconnaître la qualification d'accident de travail à cet arrêt de travail.

La salariée a été convoquée à un entretien préalable par lettre du 13 mai 2015, fixé au 21 mai suivant.

Par courrier en date du 28 mai 2015, M. [B] notifiait à Mme [C] son licenciement pour cause réelle et sérieuse :

'Madame,

...

Depuis votre reprise après congé parental, en date du 27 décembre 2014, vous multipliez les absences injustifiées, les erreurs professionnelles, et les actes d'insubordination à mon égard.

...

Je vous reproche :

- votre manque de loyauté, et vos déclarations mensongères auprès de la sécurité sociale

- vos absences injustifiées sans délai de prévenance qui désorganisent totalement le cabinet et génèrent une perte de chiffre d'affaires, car je dois annuler des RDV extérieurs pour gérer le cabinet médical lorsque j'apprends que vous ne vous êtes pas présentée pour ouvrir

- votre négligence dans la gestion de vos tâches, et l'irrespect de mes patients

- vos actes d'insubordination et le mépris que vous m'affichez

- votre refus de signer vos horaires de travail et de respecter l'organisation du cabinet

Ces manquements professionnels réitérés et volontaires constituent une cause réelle et sérieuse de licenciement.

...'

Contestant la légitimité de la rupture, la salariée a saisi le conseil de prud'hommes d'Avignon afin de voir prononcer la requalification du licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'obtenir la condamnation de l'employeur à diverses sommes à caractère indemnitaire, lequel, par jugement contradictoire du 14 mai 2019 a :

Dit que le licenciement de Mme [C] était dénué de cause réelle et sérieuse ;

Condamné M. [B] à payer à Mme [C] les sommes de :

- 3300 euros au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 100 euros à titre de dommages et intérêts en raison de l'absence de visite médicale,

- 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Ordonné l'exécution provisoire du jugement en application des dispositions de l'article 515 du code de procédure civile ;

Débouté Mme [C] du surplus de ses demandes

Débouté M. [B] de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles.

Par acte du 13 juin 2019, M. [B] a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Dans le dernier état de ses conclusions récapitulatives en date du 23 mars 2022, il demande à la cour de :

A titre principal :

Infirmer le jugement du conseil de prud'hommes d'Avignon en date du 14 mai 2019 en ce qu'il a :

Dit le licenciement de Mme [C] dénué de cause réelle et sérieuse ;

Condamné M. [B] à payer à Mme [C] les sommes suivantes :

-3330 euros au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

-100 euros à titre de dommages et intérêts en raison de l'absence de visite

médicale ;

-1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Ordonné l'exécution provisoire de la décision ;

Débouté M. [B] de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles.

En conséquence, statuant à nouveau :

Déclarer que les avertissements des 22 et 30 janvier 2015 sont bien fondés;

Déclarer qu'il n'a existé aucun harcèlement moral ;

Déclarer que le licenciement notifié à Mme [C] le 28 mai 2015 repose sur une cause réelle et sérieuse ;

Débouter la salariée de l'ensemble de ses demandes ;

La condamner à verser à M. [B] la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

La condamner aux entiers dépens.

A titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour devait confirmer la requalification du licenciement de Mme [C] en licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, il lui est demandé de :

Réformer le jugement sur le quantum indemnitaire alloué à la salariée.

Réduire le quantum indemnitaire alloué à la salariée.

Le ramener à de plus justes proportions.

Il soutient essentiellement que :

- Sur la prétendue absence de visite médicale d'embauche et de reprise

- Mme [C] se prévaut d'une absence de visite médicale d'embauche et de reprise pour solliciter la somme de 1500 euros de dommages et intérêts, sans justifier du moindre préjudice qui en découlerait

- Sur l'avertissement du 22 janvier 2015

- La salariée a refusé les nouveaux horaires de travail et se présentait sur le lieu de travail en dehors de ses horaires contractuels

- Afin de prévoir un créneau pour les visites domiciliaires, l'organisation interne du cabinet a été modifiée et il a été obligé de fermer son cabinet les jeudis matin

- En l'état d'une réorganisation interne, il pouvait modifier unilatéralement les horaires de travail de la salariée

- Mme [C] a refusé de signer son avenant contractuel, sans apporter aucune explication

- Mme [C] se présentait sur son lieu de travail à 14h00 et ne venait plus travailler le vendredi après-midi

- La salariée refusait à certains patients des rendez-vous, des visites à

domicile ou simplement de parler au téléphone avec le docteur, ce qui est démontré par les attestations de patients

- Les délégués de laboratoire étaient tous éconduits

- L'attitude de la salariée n'était pas compatible avec le poste d'accueil

- Mme [C] a procédé au lancement de la mise à jour du logiciel entrainant un blocage informatique, des pertes de données et un préjudice économique, alors qu'aucune consigne ne lui avait été donnée pour ce faire

- Il a enfin rappelé à sa salariée qu'elle devait cesser ses propos

irrespectueux, actes d'insubordination à son égard et modifier son comportement envers les patients

- Sur l'avertissement du 30 janvier 2015

- Le comportement de Mme [C] ne s'est pas amélioré à réception de ce premier avertissement

- La salariée donnaient de fausses informations aux patients, ce qui est attesté par la fille d'une patiente

- Il lui rappelait qu'en une semaine, elle avait saisi à peine dix courriers. Presque une centaine de courriers étaient restés en attente.

De plus, les analyses n'étaient pas enregistrées depuis près de 10 jours, de même que la gestion des tiers payants et les réclamations faites aux caisses de sécurité sociale.

Ce alors même qu'elle était toujours parvenue sans difficulté à effectuer son travail dans des délais raisonnables

- Mme [C] a effectué une nouvelle fois des manipulations informatiques inappropriées engendrant une nouvelle panne informatique

- La salariée ne s'est pas présentée à son poste de travail le vendredi 30 janvier 2015 après-midi

- Sur le harcèlement moral

- Mme [C] ne rapporte aucun commencement de preuve de la moindre pression psychologique qui aurait pu être exercée sur sa personne

- Les avertissements traduisent le pouvoir disciplinaire de l'employeur et ne sauraient caractériser une infraction de harcèlement moral dès lors qu'ils sont parfaitement justifiés

- Les arrêts de travail et le certificat médical ne prouvent rien ; il s'agit de la retranscription des propos rapportés par la salariée

- La notification d'une lettre de licenciement fondée sur des griefs réels, sérieux et objectifs ne saurait s'analyser en un acte de harcèlement moral

- Sur le licenciement

- La lettre de licenciement notifiée à Mme [C] rappelle son passé disciplinaire

- La persistance et la réitération du comportement fautif de la salariée ont justifié la rupture du contrat de travail : de nouvelles absences injustifiées, des négligences dans la gestion des tâches, un comportement irrespectueux avec les patients et des prises de décisions dangereuses

- Les pièces produites démontrent la réalité de ces nouveaux griefs.

En l'état de ses dernières conclusions adressées par voie postale au greffe de la cour le 22 juin 2020, reçues le 25 juin 2010, Mme [C] demande :

'Vu les pièces visées au bordereau annexé aux présentes et régulièrement communiquées

Statuant sur l'appel formé par Monsieur [V] [B] à l'encontre du jugement rendu le 14 mai 2019 par le Conseil de Prud'hommes d'Avignon (n°F17/00558)

L'appelante irrecevable et mal fondée.

Confirmer le jugement entreprise en ce qu'il a :

Dit que le licenciement de Madame [C] [G] est sans cause réelle et sérieuse,

Condamne Monsieur [V] [B] :

- au titre indemnité du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- au titre de dommages et intérêts en raison de l'absence de visite médicale,

- au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Ordonne l'exécution provisoire sur le fondement de l'article 515 du code de procédure civile ;

Infirmer le jugement entreprise en ce qu'il a :

Déboute Madame [C] du surplus de ses demandes.

STATUANT A NOUVEAU :

Dire et juger Madame [C] [G] bien fondée dans ses demandes.

Dire et juger le licenciement de Madame [C] [G], sans cause réelle et sérieuse ;

Dire et juger Madame [C] [G], victime de harcèlement moral.

En conséquence, condamner Monsieur [V] [B] à porter et payer à Madame [C] [G] les sommes suivantes :

- indemnité licenciement sans cause réelle et sérieuse 10.500,00 €

- harcèlement moral 5.000,00 €

- préjudice distinct 5.000,00 €

Ordonner l'exécution provisoire pour l'intégralité de toutes les condamnations susdites, conformément à l'article 515 du CPC

Dire et juger que l'ensemble des condamnations, en ce compris l'article 700 du CPC et les dépends, constituent des créances nées de l'exécution d'un contrat de travail et bénéficie de l'exonération prévue à l'article 11, 2ème alinéa du Décret du 8 mars 2001, portant modification de Décret du 12 décembre 1996, relatif aux tarifs des huissiers.

Dire et juger à défaut, que le montant des sommes retenues, en application de l'article 10 du Décret du 8 mars 2001 portant modification de Décret du 12 décembre 1996, par l'Huissier de justice dans le cadre de l'exécution forcée des condamnations, sera supporté directement et intégralement par le débiteur, aux lieu et place du créancier en sus de l'article 700 du CPC.

Assortir l'ensemble des condamnations des intérêts au taux légal à compter de la date du jugement à intervenir, conformément à l'article 1153 du Code Civil.

Condamner Monsieur [V] [B] aux entiers dépens.'

Le conseil de M. [B] a indiqué à l'audience n'avoir jamais reçu les conclusions de l'intimée et en a sollicité le rejet.

La cour a dès lors demandé aux parties de lui adresser, en cours de délibéré une note en délibéré sur ce point.

M. [B], par l'intermédiaire de son conseil, a adressé une note en délibéré par RPVA le 20 avril 2022, dans laquelle il indique :

- les conclusions de l'intimée ont été envoyées à l'ancienne adresse de son conseil et ne lui sont pas parvenues,

- la nouvelle adresse de son avocat était parfaitement opposable à Mme [C] au regard de l'intégralité des actes de procédure la retranscrivant et lui ayant été régulièrement notifiés,

- son conseil a adressé ses conclusions d'appelant à la cour le 22 juillet 2019 et les a adressées par lettre recommandée avec accusé de réception du 23 juillet 2019 au défenseur syndical de Madame [C], lequel en a accusé réception le 25 juillet 2019. L'adresse du cabinet figure en première page desdites écritures. Il en a été de même pour son second jeu d'écriture,

- celui-ci ne peut soutenir qu'il ignorait l'adresse du cabinet de son avocat,

- il a, par la suite, sollicité l'arrêt de l'exécution provisoire devant Monsieur le Premier Président de la cour d'appel, l'assignation ainsi délivrée comportement également la nouvelle adresse,

- le règlement des causes du jugement prud'homal a été envoyé depuis la nouvelle adresse le 6 mars 2020,

- l'accusé de réception produit par l'intimée est inopérant dans la mesure où la signature y figurant n'est pas celle de son avocat,

- les conclusions de l'intimée n°2 ont également été envoyées à une mauvaise adresse et n'ont pas été réceptionnées,

- les deux jeux de conclusions de Mme [C] doivent dès lors être écartées des débats au visa de l'article 16 du code de procédure civile.

Mme [C] a adressé une note en délibéré en date du 2 mai 2022, reçu au greffe le 4 mai 2022, dans laquelle elle soutient que :

- elle a communiqué ses conclusions, par l'intermédiaire de son défenseur syndical, le 26 septembre 2019, réceptionnées par le conseil de M. [V] [B] le 30 septembre 2019,

- le 21 novembre 2019, le conseil de l'appelant, communiquera ses conclusions n02, en réponse aux conclusions du défenseur syndical,

- le 22 juin 2020, le défenseur syndical communiquera ses conclusions n02 en réponse par courrier RAR. Le courrier reviendra avec la mention « Pli avisé et non réclamé »,

- les défenseurs syndicaux, n'ayant pas accès au mode de communication par RPVA, la communication par voie postale lui est ouverte,

- il est surprenant que le conseil de M. [V] [B], n'aurait pas conclu avec la poste, un suivi de courrier pour changement d'adresse,

- lorsqu'une partie soutient n'avoir reçu ni conclusions ni communication de pièces, le juge de fond ne peut néanmoins statuer sans avoir vérifié que la partie a été à même de débattre des moyens et des documents invoqués par l'autre partie et retenus dans la décision,

- ses conclusions et pièces n02 sont à l'identique des conclusions no 1 sauf à ce qu'il est fait état de l'ordonnance rendue le 29 novembre 2019 par Monsieur le Premier Président,

- il est ainsi démontré que M. [V] [B] a été à même de débattre des moyens et des documents invoqués par l'intimée,

- si toutefois, par extraordinaire, les conclusions n02 devaient être écartées, pour autant, les conclusions no 1 doivent être retenues en ce qu'elles ont été réceptionnées le 30 septembre 2019.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures,

Par ordonnance en date du 24 décembre 2021, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet du 24 mars 2022.

MOTIFS

Sur la demande de rejet des conclusions de l'intimée

Aux termes de l'article 15 du code de procédure civile les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense.

Aux termes de l'article 16 du code de procédure civile, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement. Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations.

L'article 906 du code de procédure civile prévoit encore que 'Les conclusions sont notifiées et les pièces communiquées simultanément par l'« avocat » de chacune des parties à celui de l'autre partie ; en cas de pluralité de demandeurs ou de défendeurs, elles doivent l'être à tous les « avocats » constitués.

Copie des conclusions est remise au greffe avec la justification de leur notification.

Les pièces communiquées et déposées au soutien de conclusions irrecevables sont elles-mêmes irrecevables.'

Il n'est pas contestable en l'espèce que Mme [C] a déposé des conclusions d'intimée auprès de la cour dans le délai de l'article 909 du code de procédure civile.

Il n'est pas plus contestable que lesdites écritures n'ont pas fait l'objet d'une communication au conseil de l'appelant.

Les pièces produites à ce titre par M. [B] montrent que son conseil a adressé, tant à Mme [C] qu'au défenseur syndical, ses conclusions, l'assignation en référé devant Monsieur le Prémier Président de la cour d'appel et divers courriers, lesquels portent tous l'adresse suivante :

Maître Alexandra Bouillard

Avocat

21 place Crillon

84000 Avignon

suivie du numéro de téléphone, d'un numéro de fax et d'une adresse électronique.

Le juge doit être en mesure de s'assurer que le contradictoire a été respecté, c'est à dire que les conclusions et les pièces ont bien été reçues.

L'intimée produit la copie d'un accusé de réception en date du 30 septembre 2019, concernant l'envoi de ses premières écritures, sur laquelle figure une signature attribuée au conseil de l'appelant, mais que celle-ci conteste.

Lesdites conclusions ont été envoyées à l'ancienne adresse de l'avocat de M. [B], alors que tant Mme [C] que son défenseur syndical ne pouvait ignorer qu'il y avait eu un changement de cabinet.

Pour autant, l'intimée a adressé des conclusions en réponse à l'ancien cabinet d'avocat, le pli étant revenu avec la mention "pli avisé non réclamé".

Il appartenait à ce moment là à l'intimée de prendre toute mesure pour permettre à son adversaire d'avoir communication de ses conclusions responsives et des pièces jointes, afin de parvenir à un débat contradictoire.

Ainsi et contrairement à ce qui est indiqué par Mme [C], M. [B] n'a pas été à même de débattre des moyens par elle développés dans des écritures dont il n'a jamais eu connaissance.

Enfin, si l'appelant a pu déposer plusieurs jeux d'écritures, à aucun moment il ne fait référence dans celles-ci à une réponse à des conclusions de l'intimée.

La seule référence aux écritures de Mme [C] est la suivante :

"Dans le cadre de ses écritures, Madame [X] reproche l'évocation des sanctions antérieures dans la notification de licenciement sur la base du principe « non bis in idem »."

Cependant, cette mention figure dans les premières conclusions de l'appelant et est ensuite reprise dans ses écrits postérieurs.

Dans ces circonstances, la preuve de la réception des conclusions de Mme [C] n'étant pas rapportée, celles-ci (ainsi que les pièces qui étaient jointes) seront déclarées irrecevables.

Il s'évince des prescriptions du dernier alinéa de l'article 954 du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.

Ainsi, compte tenu de l'irrecevabilité de ses conclusions, Mme [C] est réputée s'approprier les motifs du jugement querellé.

Sur l'absence de visite médicale d'embauche et de reprise

Les carences de l'employeur à ce titre ne sont pas contestées.

Cependant, il appartient à la salariée de démontrer un préjudice en lien avec la faute de l'employeur.

L'absence d'argumentation et de pièces de l'intimée obligent la cour à débouter Mme [C] de sa demande de ce chef par réformation du jugement critiqué.

Sur les avertissements

La confirmation du jugement critiqué s'impose dans la mesure où la salariée a été déboutée de toutes prétentions à ce titre et qu'aucune demande n'est présentée par la salariée en l'état de l'irrecevabilité de ses écritures.

Sur le harcèlement moral

La cour ne peut que reprendre l'argumentation ci-dessus développée et confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté l'intimée de sa demande de ce chef.

Sur le licenciement

En application de l'article L. 1232-1 du code du travail un licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse.

Si la charge de la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement n'appartient spécialement à aucune des parties, le juge formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toute mesure d'instruction qu'il juge utile, il appartient néanmoins à l'employeur de fournir au juge des éléments lui permettant de constater la réalité et le sérieux du motif invoqué.

La lettre de licenciement fixe les limites des débats et doivent être examinés tous les griefs qui y sont énoncés, lesquels doivent être suffisamment précis, objectifs et matériellement vérifiables.

La cause du licenciement doit être objective et reposer sur des faits matériellement vérifiables. Les faits doivent être établis et constituer la véritable cause de licenciement.

Ils doivent par ailleurs être suffisamment pertinents pour justifier le licenciement. Il appartient au juge du fond, qui n'est pas lié par la qualification donnée au licenciement, de vérifier la réalité des faits invoqués et reprochés au salarié et de les qualifier puis de décider s'ils constituent une cause réelle et sérieuse au sens de l'article L1232-1 du code du travail à la date du licenciement, l'employeur devant fournir au juge les éléments permettant à celui-ci de constater les caractères réel et sérieux du licenciement.

Les premiers juges ont considéré qu'il existait un doute devant profiter à la salariée.

La lettre de licenciement fait état de plusieurs griefs que la cour va examiner

Le manque de loyauté et les déclarations mensongères auprès de la sécurité sociale

M. [B] estime que Mme [C] a effectué une fausse déclaration d'accident du travail auprès de la CPAM en l'accusant de l'avoir insultée et menacée.

Il apparaît que la déclaration d'accident du travail du 2 février 2015 a fait l'objet d'un refus de prise en charge par courrier de la caisse du 12 mai 2015 au motif que 'le lien de subordination à l'employeur n'est pas établi au moment de l'accident, en effet celui-ci est survenu au cours d'activités personnelles n'ayant pas de relation avec le travail'.

Il s'agit de toute évidence d'une déclaration mensongère, entraînant une rupture de la confiance devant exister entre l'employeur et sa seule salariée et permettant de retenir un manque de loyauté de la salariée dans l'exécution du contrat de travail.

Les absences injustifiées

L'appelant produit un avenant au contrat de travail prévoyant une nouvelle répartition des heures de travail de Mme [C] non signé par cette dernière.

Celle-ci ne pourrait valablement soutenir ignorer cette nouvelle répartition dans la mesure où la lettre d'avertissement du 22 janvier lui faisait déjà reproche de ne pas respecter la nouvelle organisation.

Par courrier du 28 janvier 2015, l'intimée a fait l'objet d'un avertissement pour notamment une absence injustifiée le vendredi 30 janvier.

Il appartient ainsi à l'employeur de rapporter de nouvelles absences depuis le dernier avertissement.

Or, le dossier de M. [B] ne contient aucun élément justifiant une quelconque absence de la salariée après le 28 janvier 2015.

Ce grief ne sera dans ces circonstances pas retenu.

Il en sera de même pour les griefs tenant au refus de signer les nouveaux horaires de travail et de respecter l'organisation du cabinet, aucun élément n'étant produit par l'appelant.

La négligence dans l'exécution des tâches, l'irrespect des patients, les actes d'insubordination et le mépris à l'égard de l'employeur

Les nombreuses attestations de patients produites par M. [B] démontrent à suffisance ces griefs, Mme [C] étant décrite comme une secrétaire irrespectueuse, donnant de fausses informations, ayant une attitude méprisante, agressive et impolie, faisant passer en consultation en priorité ses connaissances sans rendez-vous, ayant des propos dénigrants à l'égard de son employeur.

Son manque de professionnalisme et l'accueil lamentable des patients est également mis en avant dans les témoignages figurant au dossier de l'employeur.

Il résulte des explications développées supra que le licenciement de Mme [C] est justifié, fondée sur une cause réelle et sérieuse, justifiant la réformation du jugement querellé

Sur les demandes accessoires

Le jugement dont appel sera réformé en ce qu'il a condamné l'appelant à la somme de 1.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de M. [B] les frais irrépétibles qu'il a exposés dans la présente instance et qui ne sont pas compris dans les dépens.

Partie succombante, Mme [C] sera condamnée aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Par arrêt contradictoire, rendu publiquement en dernier ressort,

Déclare irrecevables les conclusions de Mme [G] [C],

Réforme le jugement rendu le 14 mai 2019 par le conseil de prud'hommes d'Avignon,

Statuant à nouveau,

Déboute Mme [G] [C] de toutes ses demandes,

Rappelle en tant que de besoin que le présent arrêt infirmatif tient lieu de titre afin d'obtenir le remboursement des sommes versées en vertu de la décision de première instance assortie de l'exécution provisoire,

La condamne à payer à M. [V] [B] la somme de 2.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procedure civile,

Condamne la même aux dépens d'appel,

Arrêt signé par Monsieur ROUQUETTE-DUGARET, Président et par Madame BERGERAS, Greffier.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 5ème chambre sociale ph
Numéro d'arrêt : 19/02398
Date de la décision : 14/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-14;19.02398 ?
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