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31/05/2022 | FRANCE | N°19/02311

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 5ème chambre sociale ph, 31 mai 2022, 19/02311


ARRÊT N°



N° RG 19/02311 - N° Portalis DBVH-V-B7D-HMEZ



MS/EB



CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DEPARTAGE D'AVIGNON

10 mai 2019



RG :16/00079





[O]





C/



Association FOOTBALL CLUB FÉMININ MONTEUX VAUCLUSE































COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH



ARRÊT DU 31 MAI 2022







APPELANT :



Monsieur [U] [O]

né le 18 Avril 1981 à AVIGNON

22 Lotissement Nello Borri

84700 SORGUES



Représenté par Me Bénédicte ANAV-ARLAUD de la SELARL ANAV-ARLAUD BÉNÉDICTE, avocat au barreau d'AVIGNON



INTIMÉE :



Association FOOTBALL CLUB FÉMININ [P] VAUCLUSE

Stade de la Pla...

ARRÊT N°

N° RG 19/02311 - N° Portalis DBVH-V-B7D-HMEZ

MS/EB

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DEPARTAGE D'AVIGNON

10 mai 2019

RG :16/00079

[O]

C/

Association FOOTBALL CLUB FÉMININ MONTEUX VAUCLUSE

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH

ARRÊT DU 31 MAI 2022

APPELANT :

Monsieur [U] [O]

né le 18 Avril 1981 à AVIGNON

22 Lotissement Nello Borri

84700 SORGUES

Représenté par Me Bénédicte ANAV-ARLAUD de la SELARL ANAV-ARLAUD BÉNÉDICTE, avocat au barreau d'AVIGNON

INTIMÉE :

Association FOOTBALL CLUB FÉMININ [P] VAUCLUSE

Stade de la Plaine des Sports

384 Chemin de Saint Hilaire

84170 [P]

Représentée par Me Enza MESSINA de la SELARL SELARL MESSINA-COPOIS, avocat au barreau de CARPENTRAS

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 10 Mars 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

M. Michel SORIANO, Conseiller, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

M. Michel SORIANO, Conseiller

Madame Virginie HUET, Conseillère

GREFFIER :

Mme Emmanuelle BERGERAS, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

à l'audience publique du 31 Mai 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 31 Mai 2022

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 31 Mai 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

Suivant contrat de travail à durée indéterminée, M. [U] [O] a été engagé à compter du 4 septembre 2009, en qualité d'agent de développement sportif, par l'Association Football Club Féminin [P] Vaucluse (l'association).

Par lettre en date du 30 novembre 2015, l'Association Football Club Féminin [P] Vaucluse a convoqué M. [O] à un entretien préalable, fixé le 17 décembre 2015.

Le salarié a été licencié pour faute grave par lettre du 6 janvier 2016, en ces termes :

' Vous refusez d'effectuer les missions que nous vous confions qui relèvent de votre contrat de travail. Ainsi, vous n'avez pas exécuté les tâches qui vous ont été confiées pour les mois de novembre et décembre 2015 conformément aux fiches de missions qui vous ont été adressées le 03 novembre 2015 et en avez fait de même pour les missions précédentes.

Vous n'avez pas assuré l'entrainement ni les compétitions de l'équipe senior dont vous avez la charge avec Monsieur [I] [X] comme nous vous l'avions demandé.

Vous deviez animer les séances d'entrainement de l'Ecole de foot de [P] les mercredis ; or, vous ne vous êtes pas presenté aux séances des mercredis 2 et 9 décembre 2015 sans avoir justifié de vos absences.

De même, malgré nos demandes reitérées concernant le renouvellement de votre licence d'éducateur au sein de notre club de football, vous avez refusé de nous faire retour du formulaire à compléter, que nous vous avions adressé.

De la même manière et malgré nos demandes tant verbales qu'écrites, vous n'êtes pas venu récuperer les clés du nouveau local du club sis 384 chemin de Saint Hilaire à [P] mises à votre disposition, ni ne vous êtes présenté dans nos nouveaux locaux.

Vous ne nous avez pas non plus restitué les clés de l'ancien local de l'avenue Jean Rioufol afin que nous puissions les rendre à la Mairie de [P].

Nous vous avons demandé d'organiser un stage de football pour les vacances de Toussaint du mois de novembre 2015 mais vous n'avez rien fait.

Nous vous avons pareillement demandé d'organiser des stages de football pour les jeunes pendant les vacances d'hiver et de printemps ainsi que de commencer à préparer le tournoi annuel du 1er mai, avec recherche de sponsors pour ces différentes manifestations mais, là encore, nous n'avons reçu aucune nouvelle, ni proposition de vorte part.

Nos demandes aux fins d'obtenir un compte rendu hebdomadaire des tâches effectuées pour le club suite aux fiches de missions qui vous ont été remises sont également demeurées vaines.

Enfin, nous avons découvert récemment que vous occupez les fonctions d'entraîneur d'une équipe de football féminine au sein d'un club concurrent à savoir 'l'Avenir Club Avignonnais'.

Ces faits mettent en cause la bonne marche de notre association et les explications recueillies auprès de vous, lors de notre entretien, ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation à ce sujet.

Nous vous informons en conséquence que nous avons décidé de vous licencier pour faute grave.

Compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés, votre maintien dans l'entreprise s'avère impossible. »

Contestant la légitimité de la rupture, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes d'Avignon afin de voir prononcer la requalification du licenciement pour faute grave en licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'obtenir la condamnation de l'employeur à diverses sommes à caractère indemnitaire, lequel, par jugement contradictoire du 10 mai 2019 l'a débouté de toutes ses demandes et l'a condamné aux dépens.

Par acte du 7 juin 2019, M. [O] a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions récapitulatives, en date du 10 mars 2022, il demande à la cour de :

Réformer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- Dit que le licenciement de M. [O] reposait sur une faute grave

- Débouté M. [O] de ses demandes de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité légale de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis et d'incidence de congés payés

- Débouté M. [O] de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, ainsi que de sa demande au titre des frais de déplacements

- Condamné M. [O] aux entiers dépens de l'instance

Statuant de nouveau,

' Sur l'exécution du contrat

Annuler les avertissements qui ont été notifiés à M. [O]

Condamner l'Association Football Club Féminin [P] Vaucluse à verser à M. [O] la somme de 3 000 euros à titre de dommage et intérêts en réparation de son préjudice moral.

Condamner l'Association Football Club Féminin [P] Vaucluse à verser à M. [O] la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour déloyauté contractuelle.

Condamner la même à verser la somme de 420 euros au titre des frais de déplacement juin, novembre et décembre 2015.

Dire que la demande de l'Association Football Club Féminin [P] Vaucluse tendant à la condamnation de M. [O] au paiement de la somme de 10 000 euros au titre d'une prétendue déloyauté contractuelle est irrecevable.

Dire que cette demande est de plus fort infondée,

Débouter l'Association Football Club Féminin [P] Vaucluse de sa demande incidente,

' Sur le licenciement

A titre principal,

Juger le licenciement pour faute grave dépourvu de cause réelle et sérieuse

Condamner l'Association Football Club Féminin [P] Vaucluse à verser à M. [O] les sommes suivantes :

Dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 30 000 euros

Indemnité légale de licenciement : 2 659.93 euros

Indemnité compensatrice de préavis (2 mois) : 3 545.86 euros

Incidence de congés payés : 354.58 euros

A titre subsidiaire,

Requalifier le licenciement pour faute grave en faute sérieuse,

Condamner l'Association Football Club Féminin [P] Vaucluse à verser à M. [O] les sommes suivantes :

Indemnité légale de licenciement : 2 659.93 euros

Indemnité compensatrice de préavis (2 mois) : 3 545.86 euros

Incidence de congés payés : 354.58 euros

En tout état de cause,

Débouter l'Association Football Club Féminin [P] Vaucluse de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions,

Condamner l'Association Football Club Féminin [P] Vaucluse au versement de la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du CPC

Condamner l'Association Football Club Féminin [P] Vaucluse à supporter les entiers frais et dépens de la présente procédure.

M. [O] soutient essentiellement que :

- sur l'avertissement du 10 juin 2014 : pour avoir fait participer une joueuse à une rencontre, alors qu'elle était interdite de jeu

- les attestations produites en cause d'appel par l'employeur sont partiales et de pure opportunité,

- sur l'avertissement du 17 juin 2014 : pour avoir publié un article sur le compte Facebook du club portant prétendument atteinte à ses intérêts

- l'employeur prétend que ses propos auraient été de nature à créer une polémique, laquelle n'est pas démontrée,

- il ne peut être responsable des réactions des internautes, qui disposent tous d'une liberté d'expression,

- sur l'avertissement du 4 novembre 2016 : pour avoir refusé de participer à un déplacement

- cet avertissement a été infligé 3 semaines après les faits, ce qui suffit à remettre en cause sa légitimité,

- sur la déloyauté contractuelle

- il a subi un véritable isolement au sein du club, qu'il a explicitement dénoncé,

- l'association fait état d'une réunion du 5 décembre 2014 qui n'a jamais eu lieu,

- une réunion avait été prévue le 3 décembre mais elle a été annulée par sms,

- il en sera de même pour la réunion du 19 août 2015 pour laquelle il n'a jamais été convoqué,

- malgré ses multiples demandes, l'association n'a jamais réagi et ne lui a pas donné les moyens d'exécuter correctement sa mission,

- il était prévenu le matin pour l'après-midi même de sa nouvelle équipe, au milieu de la saison,

- l'accès à sa boîte mail avait été verrouillé,

- l'association a refusé d'appliquer la convention de consolidation des emplois du 20 juin 2013,

- la demande présentée par l'association au titre d'une déloyauté contractuelle de sa part est irrecevable s'agissant d'une prétention nouvelle en appel,

- elle est en outre infondée, les faits invoqués par l'employeur étant identiques à ceux qui lui sont reprochés dans la lettre de licenciement,

- de plus, la responsabilité du salarié envers son employeur ne peut être engagée qu'en cas de faute lourde,

- sur le licenciement

- la seule chose reprochée est de ne pas avoir communiqué de comptes rendus

d'activité, ce qui ne saurait constituer un motif disciplinaire de licenciement,

- ses fonctions au sein du club étaient de nature sportives et non administratives,

- l'employeur ne peut dès lors lui reprocher de ne pas avoir effectué des missions non prévues à son contrat de travail,

- il rédigeait néanmoins les comptes rendus avec son ordinateur personnel, ne disposant d'aucun ordinateur professionnel jusqu'au mois d'avril 2014,

- il avait interpellé sa hiérarchie sur sa surcharge de travail à compter du mois d'avril 2015 et des moyens refusés par le club,

- le fait de ne pas avoir assuré l'entraînement des seniors ne peut justifier un licenciement disciplinaire,

- ce grief est de plus imprécis et non daté,

- cette tâche ne relevait pas de son contrat de travail,

- il n'a pas animé les séances d'entrainement des mercredis 2 et 9 décembre 2015 étant dans l'impossibilité de les assurer, mais s'était néanmoins assuré de son remplacement,

- l'école de football de [P] n'a donc été pénalisée, les séances ayant bien eu lieu,

- concernant le formulaire de licence d'éducateur, il n'est nulle part indiqué qu'il avait l'obligation de prendre une licence,

- en réalité, l'association souhaitait qu'il prenne une licence afin d'apparaître sur les feuilles de match de l'équipe seniors DH. Or, il n'a jamais accepté le poste d'adjoint de l'équipe réserve senior,

- à la date du 11 septembre 2015, il ne possédait donc aucune de ces licences,

- les pièces produites ne démontrent aucunement que l'exigence d'une licence s'appliquait à son poste, en charge uniquement d'équipes de jeunes conformément aux termes de son contrat de travail,

- le grief tenant aux clés du nouveau et de l'ancien local ne saurait justifier un licenciement pour faute grave,

- les clés du nouveau local auraient pu lui être remises par la secrétaire du club, avec laquelle il intervenait 3 jours par semaine dans l'encadrement des jeunes du club,

- le grief tenant à l'organisation du stage de football pour le mois de novembre 2015 pour les vacances de la Toussaint, du tournoi annuel du 1er mai 2016 et à la recherche de sponsors relèvent d'une insuffisance professionnelle et ne peut constituer une faute disciplinaire,

- le tournoi de mai 2016 s'est déroulé après son licenciement,

- s'agissant du tournoi de novembre, il y a eu des mailings sur sa boite professionnelle qui a été ensuite bloquée, ainsi que des flyers. Il a tenu son employeur au courant de l'évolution de l'organisation,

- la clause d'exclusivité figurant dans son contrat de travail n'est pas valable de sorte que le grief tenant aux fonctions d'entraîneur d'une équipe de football au sein d'un club concurrent ne tient pas,

- en outre, il n'a jamais occupé les fonctions d'entraineur et s'est contenté, à une reprise, d'observer les entrainements d'un autre club,

- l'association ne démontre nullement qu'il aurait été entraineur d'une autre équipe féminine et partant que l'activité reprochée aurait porté atteinte à ses intérêts,

- sur les frais de déplacement

- il lui est dû les frais de déplacement pour les mois de juin, novembre et décembre 2015, à hauteur de 140 euros par mois.

Dans le dernier état de ses conclusions récapitulatives en date du 2 mars 2022, l'association demande à la cour de :

Recevoir l'appel de M. [O] et le dire mal fondé,

Confirmer le jugement rendue par le conseil des prud'hommes d'Avignon le 10 mai 2019 en ce qu'il a dit que le licenciement de M. [O] repose sur une faute grave, deboute M. [O] de ses demandes de dommages et intéréts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité légale de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis et congés payés y afférents, ainsi que de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et celle au titre des frais de déplacements

En conséquence,

Débouter M. [O] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions

Y ajoutant

Condamner M. [O] à payer à l'Association Football Club Féminin [P] Vaucluse, la somme de 10.000 euros de dommages et intérêts au titre de l'exécution déloyale par le salarié de son contrat de travail

Condamner M. [O] au paiement de la somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

L'association fait essentiellement valoir que :

- sur le licenciement

Le refus de M. [O] d'effectuer les missions qui lui étaient confiées et de rendre compte de son activité

- en 2014, le président du club a instauré des fiches de missions aux termes desquelles il donnait au salarié ses directives de travail et les tâches à accomplir en lui demandant de lui rendre un compte rendu hebdomadaire de son activité,

- jusqu'au jeudi 30 avril 2015, l'appelant a adressé ses comptes rendus d'activité,

- afin d'être informé du suivi médical des joueuses, elle avait demandé à M. [O], par note du 21 novembre 2014, de lui remettre le lundi matin, les attestations de suivi médical complétées et signées par les professionnels qui s'étaient occupés des joueuses durant la semaine précédente.

M. [O] ne lui a jamais remis aucune attestation de suivi médical signée et complétée,

- de juillet 2015 jusqu'à son licenciement en janvier 2016,M. [O] a continué d'entrainer trois fois par semaine les élèves de la section féminine de football du lycée Victor Hugo dans le cadre de la convention signée avec l'Avenir club avignonnais, plutôt que d'effectuer les missions qui lui étaient confiées et pour lesquelles il était rémunéré ,

- la convention collective du sport prévoit en son article 9.3 relatif à la grille de classification que le salarié relevant du groupe 4 doit rendre compte périodiquement de l'exécution de ses missions,

- M. [O] ne saurait s'exonérer des dispositions de la convention collective qui lui sont applicables,

- le salarié pouvait parfaitement établir ses comptes rendus d'activités de

manière manuscrite sur papier libre, de sorte que l'argument tenant à un défaut de matériel informatique ne peut être retenu. Le contrat de travail de M. [O] ne prévoit d'ailleurs pas la mise à disposition d'un ordinateur individuel,

Ne pas avoir assuré l'entrainement ni les compétitions de l'équipe

senior

- le salarié ne conteste pas ces faits,

- le contrat de travail prévoit que M. [O] devait ' assurer l'entrainement et les compétitions amicales et officielles de l'équipe dont il a la charge',

- de 2010 à 2014, il a entrainé et participé aux compétitions de l'équipe senior,

- M. [O] ne renouvellera pas de licence au sein du Football Club Féminin de [P], ne se rendra à aucun entrainement, ni aucune compétition faisant ainsi preuve d'insubordination,

Les absences injustifiées des mercredis 2 et 9 decembre 2015

- le fait que les entrainements étaient assurés par deux personnes ne saurait exonérer l'appelant de son obligation de prévenir l'association de ses absences,

- elle a dû à deux reprises joindre en urgence un bénévole pour pallier les absences de M. [O],

- les faits reprochés datant des 2 et 9 décembre 2015, ils n'étaient nullement prescrits à la date du licenciement,

Le refus de M. [O] de renouveler sa licence d'éducateur

- pour pouvoir occuper un poste d'éducateur et prendre place sur un banc

de touche à l'occasion des entrainements, des matchs ou des compétitions et quelque soit l'équipe entrainée, senior ou junior, M. [O] devait pouvoir justifier d'une licence prise au nom du club,

- si l'appelant a refusé de prendre sa licence technique nationale auprès du Football Club de Féminin de [P] qui l'employait, c'est à dessein car il avait déjà pris ses licences d'entraineur et de dirigeant pour le club concurrent à savoir l'Avenir Club Avignonnais,

Le fait pour M. [O] de s'abstenir de venir récupérer les clés du nouveau local du club et de se présenter dans les nouveaux locaux

- le salarié n'étant pas venu chercher ces clés, par lettre recommandée du 11 septembre 2015, le président du club le priera de venir les chercher et lui fixera un rendez-vous pour le 18 septembre à 19 heures, en vain,

- une seconde lettre du 3 novembre 2015 n'aura pas plus d'effet,

- ce comportement démontre une fois de plus l'insubordination de M. [O],

L'organisation des stages de football

- les demandes pour ces stages ont été adressées à M. [O] tant par fiches de missions des mois d'avril, septembre, octobre, novembre et décembre 2015 que par email du 09 janvier 2015 et courriers en date des 27 avril 2015 et 11 septembre 2015,

- le salarié disposait ainsi du temps nécessaire pour organiser ces manifestations sportives et rechercher des partenaires financiers,

- le tournoi du 1er mai 2015 n'a pas eu lieu,

Les fonctions d'entraineur occupées par M. [O] au sein d'un club concurrent

- malgré la clause d'exclusivité figurant dans le contrat de travail, il résulte du procès-verbal de constat dressé par la SCP HIELY- KLUCZYNSKI, Huissier de justice, que le 21 novembre 2015 M. [O] entrainait une équipe de

football féminine au stade Leon Dulcy situé avenue de la Croix Rouge à Avignon,

- il résulte égalernent du relevé des licences de M. [O] en date du 26/02/2016 que celui-ci avait pris diverses licences d'entraineur et de dirigeant pour les saisons 2014-2015 et 2015-2016 pour l'Avenir Club Avignonnais,

- M. [O] n'hésitera d'ailleurs pas au mois d'octobre 2015 à poster et vanter sur les réseaux sociaux les résultats du match de l'équipe féminine concurrente avignonnaise qu'il entraine avec en sus, une photographie où il apparait au côté de son équipe,

- sur l'avertissement du 10 juin 2014

- malgré le fait que l'employeur ait demandé en début de saison à M. [O] de ne plus faire participer une jeune mineure aux compétitions, le 1er juin 2014 à l'insu du président du club, M. [O] a pris la liberté de faire participer cette jeune mineure à une compétition de football,

- cette jeune fille était placée en foyer et ne pouvait sortir et participer aux

activités du club que sous la responsabilité du président,

- sur l'avertissement du 17 juin 2014

- suite à la publication de M. [O] sur Facebook du 2 juin 2014, de

nombreuses personnes ont réagi avec des commentaires ne faisant pas bonne presse pour le club, commentaires qui sont restés visibles sur le site jusqu'au 17 juin 2014 soit durant 15 jours, sans que M. [O] ne soit intervenu pour apaiser les critiques,

- aux termes de son contrat de travail, le salarié est tenu d'observer une discrétion professionnelle absolue en ce qui concerne les faits ou informations dont il aura connaissance dans l'exercice de ses fonctions,

- sur l'avertissement du 4 novembre 2014

- en vertu des fonctions qui lui était attribuées par son contrat de travail, M. [O] devait ' dans un cadre général assister et participer aux différentes manifestations organisées dans l'intérêt du club',

- c'est à ce titre qu'elle lui a demandé de participer au déplacement de la catégorie U19, le dimanche 19 octobre 2014 à Albi, étant précisé que son contrat de travail prévoyait expressément que son jour de repos n'était pas le dimanche mais le mardi eu égard à la nature de l'activité du FCF de [P] et de ses fonctions,

- sur l'exécution déloyale du contrat de travail

- M. [O] ne produit aucun élément démontrant ses allégations à ce titre,

- c'est au contraire M. [O] qui a fait preuve d'exécution déloyale de son contrat de travail,

- le comportement déloyal de ce salarié a en outre conduit à la perte de sept joueuses,

- l'appelant a de nouveau tenté de capter une autre jeune joueuse [V] K., licenciée U15 au sein du Football Club Féminin Monteux en usant cette fois-ci

de manipulations à l'égard de cette jeune mineure et de propos discriminatoires à l'égard du club,

- sur les frais de déplacement

- M. [O] indique avoir engagé des frais de déplacement pour les mois de juin, novembre, décembre 2015 sans pour autant produire aucun justificatif des déplacements et frais qu'il aurait engagés.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures,

Par ordonnance en date du 23 décembre 2021, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet du 10 mars 2022.

MOTIFS

Sur le licenciement

La faute grave résulte de tout fait ou ensemble de faits imputables au salarié, qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail et des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible son maintien dans l'entreprise et exige son départ immédiat, ce, même pendant la durée du préavis.

Il incombe à l'employeur qui l'invoque d'en rapporter la preuve.

La lettre de rupture vise les griefs suivants :

'Vous refusez d'effectuer les missions que nous vous confions qui relèvent de votre contrat de travail. Ainsi, vous n'avez pas exécuté les tâches qui vous ont été confiées pour les mois de novembre et décembre 2015 conformément aux fiches de missions qui vous ont été adressées le 03 novembre 2015 et en avez fait de même pour les missions précédentes.'

Les fiches de mission produites par l'employeur indiquent que le salarié doit établir un compte rendu hebdomadaire de son activité, l'employeur lui reprochant l'absence de tout compte rendu à compter du 30 avril 2015.

M. [O] reconnait ne plus avoir rédigé de compte rendu après cette date, estimant qu'il s'agissait de tâches administratives et que ses fonctions étaient uniquement sportives.

Le contrat de travail prévoit au titre des fonctions :

'M [O] exercera ses fonctions sous l'autorité et selon les directives de la présidence du club et du responsable de la commission technique.

Dans le cadre de ses fonctions, M. [O] sera responsable de la section Jeunes du FCF [P].

Il sera chargé d'assurer :

- l'entraînement et les compétitions amicales et officielles de l'équipe dont il a la charge.

- la coordination de l'ensemble des équipes de jeunes (organisation et planification des entraînements)

- la formation avec l'entraîneur général des éducateurs des équipes de jeunes.

- l'organisation de manifestations sportives pour les jeunes (tournoi, stage...)

- la recherche de partenaires financiers pour les équipes de jeunes.

- le développement du football féminin en direction des publics scolaires et des habitants de quartiers en difficulté.

- le développement de la section jeunes du FCFM Vaucluse.

Dans un cadre plus général, il devra :

- assister et participer aux différentes manifestations organisées dans l'intérêt du club

- proposer au comité directeur un plan annuel des activités sportives à mettre en place

- adopter une attitude qui ne puisse porter atteinte aux intérêts de son club, au renom de son équipe et à l'image du football.

M. [O] sera amené à exercer des activités à l'extérieur de l'association pendant ses horaires de travail, toutefois ces interventions devront faire l'objet d'une convention signée par la direction du club.'

Le pouvoir de direction de l'employeur lui permet de contrôler et surveiller l'activité de ses salariés.

La possibilité donnée à l'employeur de fixer le contenu du travail à réaliser, de définir des objectifs, est assortie, de façon corrélative, de prérogatives réservées pour juger de la prestation fournie et apprécier les résultats.

L'appréciation des aptitudes professionnelles et de l'adaptation à l'emploi relève du pouvoir patronal. La règle a été maintes fois exprimée selon laquelle 'il appartient à l'employeur d'apprécier les capacités professionnelles de son salarié'.

Pour ce faire, il peut solliciter l'établissement de rapports et comptes rendus d'activités, lesquels ne relèvent aucunement d'une tâche administrative.

Dès lors, le refus de M. [O] de rédiger lesdits comptes rendus est un acte d'insubordination pouvant justifier à lui seul la rupture du contrat de travail.

L'employeur reproche encore à M. [O] de ne pas avoir exécuté les tâches qui lui ont été confiées pour les mois de novembre et décembre 2015 conformément aux fiches de missions ainsi que pour les missions précédentes, à savoir : assurer l'entraînement et les compétitions de l'équipe senior

M. [O] ne conteste pas ce fait mais soutient qu'il n'était pas en charge de l'équipe senior.

Les pièces produites par l'employeur montrent que le salarié a assuré l'entraînement des seniors lors des saisons 2010 à 2014.

Pour autant, il n'est pas contestable que l'employeur a sollicité M. [O] pour assister M. [X], et ce par lettre du 11 septembre 2015, cette fonction ne correspondant pas, de toute évidence, aux tâches figurant dans son contrat de travail.

Le refus de M. [O] ne saurait dès lors être considéré comme fautif.

'Vous deviez animer les séances d'entrainement de l'Ecole de foot de [P] les mercredis ; or, vous ne vous êtes pas presenté aux séances des mercredis 2 et 9 décembre 2015 sans avoir justifié de vos absences.'

Ce fait n'est pas contesté par le salarié qui soutient que l'employeur ne peut arguer d'aucun préjudice, l'entraînement ayant quand même eu lieu.

M. [O] indique avoir prévenu de son absence mais ne produit aucun élément permettant de confirmer cette allégation.

Les retards et les absences non autorisés ou non justifiés par des motifs légitimes constituent des manquements que l'employeur est fondé à sanctionner en vertu de son pouvoir disciplinaire ou encore en licenciant le salarié.

Ainsi que l'ont fort jugement relevé les premiers juges, tout salarié doit prévenir son employeur de ses absences, toute carence sur ce point pouvant justifier une sanction disciplinaire, sans que l'employeur ait à justifier d'un quelconque préjudice.

Dans le cas d'espèce, l'association démontre avoir dû pallier l'absence de M. [O] au dernier moment en faisant appel à un bénévole afin de ne pas pénaliser l'équipe.

Ce grief est dès lors justifié.

'malgré nos demandes reitérées concernant le renouvellement de votre licence d'éducateur au sein de notre club de football, vous avez refusé de nous faire retour du formulaire à compléter, que nous vous avions adressé.'

Le règlement d'administration générale de la Ligue Méditerranéenne de Football (LMF) prévoit en son article 31 :

'Pour pouvoir prendre part aux activités officielles organisées par la fédération, la LMF, ses districts ou les clubs affiliés, tout joueur, dirigeants, éducateur ou arbitre doit être titulaire d'une licence pour son club régulièrement établie au titre de la saison en cours. Cette obligation vise en outre, toute personne prenant place sur le banc de touche et plus généralement, assumant une fonction ou une mission dans l'intérêt et/ou au nom du club. En cas de non respect de ces obligations, le club sera sanctionné d'une amende...'

Les fonctions de M. [O], telles que définies dans son contrat de travail, impliquaient nécessairement, au vu des dispositions visées ci-dessus, que celui-là soit titulaire d'une licence pour son club employeur.

En effet, le salarié devait notamment assurer l'entraînement et les compétitions amicales et officielles de l'équipe dont il avait la charge, ainsi que l'organisation de manifestations sportives pour les jeunes (tournoi, stages...), de sorte que la présence du salarié sur et au bord du terrain était indispensable.

Le refus de M. [O] d'exécuter les instructions de l'employeur quant à la licence est fautif et le jugement déféré sera réformé sur ce point.

'malgré nos demandes tant verbales qu'écrites, vous n'êtes pas venu récuperer les clés du nouveau local du club sis 384 chemin de Saint Hilaire à [P] mises à votre disposition, ni ne vous êtes présenté dans nos nouveaux locaux.

Vous ne nous avez pas non plus restitué les clés de l'ancien local de l'avenue Jean Rioufol afin que nous puissions les rendre à la Mairie de [P].'

Les pièces du dossier montrent que :

- par lettre recommandée avec accusé de réception du 11 septembre 2015, l'employeur va 'prier' le salarié de venir récupérer la clé des nouveaux locaux le 18 septembre à 19h.

- par email du 3 novembre 2015, l'employeur a réitéré sa demande auprès de M. [O], et ce pour le 6 novembre à 18h30.

- par lettre du 4 février 2016, Mme [G], pour le maire de [P], a demandé à M. [O] la restitution du passe du stade de la Plaine des sports, propriété de la commune.

Les premiers juges ont estimé à tort que la carence de l'appelant n'était pas fautive, ce fait ne pouvant lui être imputé exclusivement. Ils ont en outre considéré que ce refus ne pouvait être assimilé à une insubordination, laquelle n'était pas visée dans la lettre de licenciement.

Cependant, il s'agit de la part de M. [O] d'un refus d'exécuter les instructions de l'employeur, qui constitue une insubordination dès lors que le salarié ne donne aucune explication sur les raisons pour lesquelles il n'a pas déféré à la demande réitérée de son employeur, alors surtout qu'il s'est abstenu de toute réponse au courrier et à l'email qui lui avaient été adressés.

La réformation sur ce point s'impose.

'Nous vous avons pareillement demandé d'organiser des stages de football pour les jeunes pendant les vacances d'hiver et de printemps ainsi que de commencer à préparer le tournoi annuel du 1er mai, avec recherche de sponsors pour ces différentes manifestations mais, là encore, nous n'avons reçu aucune nouvelle, ni proposition de vorte part.'

C'est par une exacte appréciation des faits et des pièces produites par les parties que les premiers juges ont considéré que ce grief était avéré.

En effet, et contrairement à ce qui est indiqué par M. [O], les juges n'ont en aucun cas inversé la charge de la preuve dans la mesure où ils ont apprécié les pièces produites par l'employeur pour démontrer le grief litigieux.

Il en résulte que :

- dès le mois d'octobre 2014, il a été demandé à M. [O] de préparer le tournoi du 1er mai 2015 (date butoir le 31/10/2014),

- la fiche de mission de novembre 2014 comporte comme instruction de 'préparer l'organisation de manifestations sportives pour les jeunes (tournoi, stage...)'

- la fiche de mission de décembre 2014 rappelle à M. [O] de 'préparer l'organisation du tournoi du 1er mai'

- l'employeur a confirmé ses instructions par courriers des 27 avril et 11 septembre 2015.

M. [O] soutient que sa messagerie électronique a été bloquée et qu'il a tenu son employeur au courant de l'évolution de l'organisation, ce qu'il ne démontre aucunement.

Il n'est pas contestable qu'il entrait dans les attributions de l'appelant d'organiser des manifestations sportives pour les jeunes.

Il ne s'agit pas d'une insuffisance professionnelle mais d'une inexécution volontaire des instructions données par l'employeur.

'nous avons découvert récemment que vous occupez les fonctions d'entraîneur d'une équipe de football féminine au sein d'un club concurrent à savoir 'l'Avenir Club Avignonnais'.

Le contrat de travail comporte une clause d'exclusivité ainsi rédigée :

' M. [O] s'engage à travailler exclusivement pour le compte de son employeur et s'interdit de s'intéresser directement ou indirectement à toute affaire susceptible de concurrencer par son activité celle de son employeur.

...

Tout manquement à ces obligations serait constitutif d'une faute grave pouvant justifier un licenciement.'

Le salarié considère que cette clause est illicite car portant atteinte à sa liberté de travail.

Pour être valable, la clause d'exclusivité doit être :

' indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise ;

' justifiée par la nature de la tâche à accomplir ;

' et proportionnée au but recherché.

La clause doit être précise quant aux activités auxquelles renonce le salarié.

En présence d'une clause rédigée en termes généraux et imprécis, ne spécifiant pas les contours de l'activité complémentaire concernée, le salarié n'a aucun moyen de vérifier son étendue, la clause restrictive ainsi de la liberté du travail n'est ni justifiée ni proportionnée.

En l'espèce, la clause contenue au contrat empêchait seulement M. [O] de travailler pour un concurrent de l'employeur, ce qui est parfaitement licite et ne limitait pas sa liberté de travailler dans une activité autre que celle dans laquelle il était employé, à condition de ne pas concurrencer l'association sportive de [P].

Cette interdiction se justifie dans un contexte sportif où les clubs sont en concurrence les uns avec les autres, les résultats conditionnant notamment les subventions pouvant être accordées.

La clause litigieuse doit dès lors recevoir application.

Bien plus, et même en l'absence de stipulation spécifique du contrat de travail, le salarié est tenu pendant l'exécution de son contrat de travail d'une obligation de loyauté et de fidélité. Cette obligation lui impose une règle de discrétion et lui interdit les agissements qui constitueraient une concurrence à l'égard de l'employeur.

En l'espèce, les pièces produites par l'employeur démontrent la violation par le salarié de son obligation de loyauté et de la clause d'exclusivité insérée dans le contrat de travail.

Il résulte d'un procès-verbal de constat en date du 20 novembre 2015 à 19h18 que :

'Il est indiqué sur la fiche de mission pour les mois de novembre et décembre 2015 que le vendredi entre 17h30 et 21h30 Mr [O] doit accomplir les tâches suivantes dans le cadre du contrat le liant à la requérante.

- recherche de partenaires financiers

- co entrainer l'équipe senior DH

- rendre le compte rendu des taches effectuées.

Depuis l'extérieur du stade Léon Dulcy derrière le muret et le grillage, à environ une vingtaine de mètres à l'ouest de l'entrée du stade.

Là étant, nous constatons le présence de deux équipes de 10 jeunes filles environ, dont certaines portent une chasuble jaune, qui pratiquent du football.

Nous constatons la présence d'une personne de sexe masculin portant un jogging bleu debout en bordure du terrain au niveau de la ligne de touche qui procède vraisemblablement à l'entraînement des jeunes filles par de la gestuelle et de la prise de notes.

Cette personne correspond visiblement à la personne figurant sur les deux photographies annexées aux coupures de journaux qui m'ont été précédemment remises.'

Est annexé à ce constat d'huissier :

- un extrait du Dauphiné libéré du 22 juin 2015, soit pendant la période contractuelle en cause, intitulé 'La section féminine de l'AC Avignon se structure :

La saison réussie des joueuses de l'AC Avignon a incité les dirigeants à se pencher un peu plus sur l'avenir du football féminin dans la cité des Papes. C'est pour cette raison que [U] [O] a décidé de revenir dans son club de coeur pour participer, comme coordinateur, à cette belle aventure avec plein d'ambition et d'enthousiasme...'

- un extrait du site internet de l'AC Avignon du 16 juin :

'Une figure emblématique...

[U] [O] rejoint les rangs de la section féminine de l'AC Avignon. Il revient dans sa ville de coeur avec un grand projet et d'énormes ambitions. Il prendra sous ses ailes l'équipe senior à 11 et s'occupera de toute la coordination des équipes.'

M. [O] soutient qu'il n'a jamais exercé les fonctions d'entraîneur et qu'il s'est contenté, à une reprise, d'observer les entraînements d'un autre club, notamment en qualité de tuteur de stage de deux entraîneurs de l'AC Avignon, ce qui ne constitue aucunement une activité qui porterait préjudice à l'association.

La clause d'exclusivité n'interdit pas au salarié d'apporter son aide bénévole à l'organisation d'une manifestation désintéressée dès lors que celle-ci ne porte en rien préjudice à l'employeur.

En l'espèce, la cour ne saurait suivre l'argumentation de l'appelant dans la mesure où cette dernière est en totale contradiction avec la coupure du journal le Dauphiné libéré et les déclarations du club de l'AC Avignon reprises supra.

Il en résulte que M. [O] s'est investi notamment en tant que coordinateur pour développer la section féminine de l'AC Avignon, alors qu'il devait également procéder au développement du football féminin au sein de l'association.

Enfin, il apparaît que M. [O], pendant ses heures de travail, à savoir entre 17h30 et 21h30, s'adonnait à une activité qu'il qualifie de bénévole mais qui constitue en réalité une activité concurrentielle à celle de son employeur.

L'ensemble des griefs retenus, et notamment le refus réitéré du salarié d'exécuter des tâches relevant de son contrat de travail, pris dans leur ensemble, caractérise la faute grave justifiant la rupture immédiate du contrat de travail et le rejet des demandes financières présentées par M. [O].

Le jugement critiqué sera confirmé sur ces points.

Sur la demande liée à l'exécution du contrat de travail

M. [O] estime que l'employeur n'a pas exécuté loyalement le contrat de travail pour les motifs suivants :

- il a subi un véritable isolement au sein du club, qu'il a explicitement dénoncé par courrier du 19 août 2015 :

'...

Cela fait plus d'un an que je n'ai pas été convié à une réunion au sein de l'association ... je n'ai aucune communication concernant l'équipe sportive dont je suis sensé avoir la charge pour la saison 2015/2016 et mes autres missions au sein du club.'

L'employeur répondra au salarié le 11 septembre 2015 en ces termes :

'...

Premièrement, concernant le fait que depuis plus d'un an vous n'avez pas été convié à une réunion au sein de l'association, nous vous informons qu'il y a eu quelques réunions dirigeants (environ 5) durant la saison et quelques réunions entraîneurs seniors et jeunes (U17/U19), il n'y a pas eu de réunions éducateurs pour la catégorie enfant.'

Le salarié fait ainsi référence à diverses réunions auxquelles il n'a pas été convié mais il ne démontre en aucun cas qu'elles concernaient les catégories de sportifs dont il avait la charge.

La seule réunion à laquelle il devait participer est celle du 3 décembre 2014, qui a été annulée.

Il apparaît ensuite qu'une nouvelle réunion a eu lieu le 5 décembre 2014, sans la présence de M. [O], l'employeur ne produisant aucune pièce au terme de laquelle il aurait averti le salarié de cette nouvelle date.

Tenant l'absence de M. [O] à la réunion du 5 décembre 2014, il appartenait à l'employeur d'informer son salarié des divers changements intervenus au sein de l'association et qui pourraient le concerner.

Ce faisant, le salarié ne justifie d'aucun préjudice en lien avec cette carence de l'employeur.

- Malgré ses multiples demandes, l'association n'a pas réagi et ne lui a pas donné les moyens d'exécuter correctement sa mission :

Il n'est pas contestable que par courriel du 9 janvier 2015, le salarié a été informé par son employeur qu'il serait le jour même éducateur principal d'une équipe poussins garçon.

La cour reprend l'argumentation développée ci-dessus au titre de la carence de l'employeur sur ce point et de l'absence de préjudice démontré.

- l'accès à sa boîte email professionnelle avait été verrouillé :

La seule pièce produite par M. [O] ne permet en aucun cas de conclure à un blocage de sa messagerie professionnelle, et surtout que ce verrouillage aurait été initié par l'employeur.

En effet, la pièce n°12 est constituée par une impression d'une page du site Orange, concernant la réinitialisation du mot de passe de la messagerie de M. [O].

Il apparaît encore que lors de la création de cette messagerie, un mot de passe provisoire avait été attribué à charge pour M. [O] de le réinitialiser à sa convenance, ce qu'il a bien pu réaliser lorsqu'il a imprimé la pièce n°12.

- l'association a refusé d'appliquer la convention de consolidation des emplois du 20 juin 2013 :

Le plan de développement de l'emploi sportif qualifié permet à des associations sportives de bénéficier de salariés qualifiés (jeunes de niveau II, diplômés STAPS en priorité) chargés du développement des activités physiques et sportives auprès de publics qui en sont éloignés.

Le dispositif de consolidation des emplois sportifs qualifiés (CESQ) vise à pérenniser ces postes en CDI, avec un maintien de la rémunération à hauteur de 140 % du SMIC.

En l'espèce, M. [O] a été embauché en 2009, la convention de consolidation des emplois ayant été signée le 20 juin 2013.

Celle-ci prévoit que le salarié concerné doit avoir au minimum un niveau II pour pouvoir bénéficier de la majoration du SMIC à hauteur de 140%.

Aucune des parties ne donne de précision sur le niveau en question de sorte que la cour est dans l'impossibilité de déterminer si M. [O] pouvait bénéficier de ladite majoration, sachant qu'étant classé en groupe 4 de la convention collective nationale du sport, il bénéficiait d'ores et déjà d'un SMIC majoré de 24,75%.

Il résulte des explications développées supra que M. [O] ne justifie d'aucune exécution déloyale du contrat de travail par l'employeur, le seul élément pouvant être retenu à l'encontre de ce dernier étant un fait isolé (défaut de convocation du salarié à la réunion du 5 décembre 2014 et défaut de l'avoir informé des changements intervenus) pour lequel l'appelant ne démontre aucun préjudice.

Sur les frais de déplacement

La Cour de cassation pose, en forme de principe, que les frais professionnels exposés par le salarié pour les besoins de son activité et dans l'intérêt de l'entreprise doivent lui être remboursés par l'employeur.

La charge des frais professionnels nécessaires à l'exécution du contrat de travail ou de rembourser les dépenses engagées par le salarié pour le compte de l'entreprise est un prolongement de l'obligation de paiement du salaire.

Les dépenses exposées doivent l'être "pour les besoins de l'activité professionnelle du salarié" et "dans l'intérêt de l'employeur ".

C'est au salarié de prouver la réalité des frais exposés.

C'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté la demande présentée par M. [O] qui ne justifie aucunement des frais exposés pour les mois de juin, novembre et décembre 2015.

En effet, les seuls relevés bancaires produits par le salarié ne peuvent être suffisants en l'absence de justificatifs des frais prétendument engagés.

Sur les dommages et intérêts sollicités par l'intimé en raison d'une exécution déloyale du contrat de travail par l'appelant

M. [O] soulève l'irrecevabilité de cette demande comme nouvelle en appel.

Aux termes des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile, 'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.'

L'article 565 du code de procédure civile dispose que : 'les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent'.

L'article 566 du code de procédure civile dispose que : 'les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire'.

L'article 567 du code de procédure civile dispose que : 'les demandes reconventionnelles sont également recevables en appel'.

En application de l'article 70 du Code de procédure civile, applicable devant toutes les juridictions « les demandes reconventionnelles ou additionnelles ne sont recevables que si elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant ».

Il n'est pas contestable que l'employeur n'avait pas présenté en première instance une demande tendant à l'allocation de dommages et intérêts fondés sur l'exécution déloyale du contrat de travail par le salarié.

L'association soutient que sa demande est recevable en application des dispositions susvisées qui autorisent les prétentions nouvelles destinées à opposer compensation ou à faire écarter les prétentions adverses, ce qui est son cas en opposant une défense à la demande adverse.

Il résulte ainsi des dernières écritures prises en première instance par l'intimée que la demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail par le salarié constitue une demande nouvelle en cause d'appel qui n'a pas pour objet :

- d'opposer compensation,

- de faire écarter les prétentions adverses dans la mesure où le salarié présentant une demande identique, la charge de la preuve repose sur ce dernier et l'employeur dispose en outre de toute lattitude pour opposer contestation,

- de faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

Cette prétention ne constitue, par ailleurs, ni l'accessoire, ni la conséquence ou le complément d'une demande dont la cour est saisie et ne peut davantage être qualifiée de demande reconventionnelle.

Selon l'article 64 du code de procédure civile, 'Constitue une demande reconventionnelle la demande par laquelle le défendeur originaire prétend obtenir un avantage autre que le simple rejet de la prétention de son adversaire'.

La demande de l'employeur pour exécution déloyale du contrat de travail par le salarié doit s'apprécier au regard du lien éventuel la rattachant à la prétention originaire de M. [O], demandeur initial, tendant à voir notamment reconnaître une exécution déloyale du même contrat de travail par l'employeur et obtenir de ce fait l'allocation de dommages et intérêts en réparation de son préjudice.

Une telle demande vise, comme l'indique l'article 64 précité, à répondre à la demande initiale, non pas pour simplement se défendre mais pour formuler une prétention autonome.

Les demandes ainsi présentées respectivement par les deux parties et résultant de l'introduction de l'instance engagée par M. [O] sont en lien direct et évident avec les prétentions originaires du salarié dès lors qu'elles concernent précisément l'action en justice engagée par M. [O] et la période d'exécution du contrat, période et contexte identiques aux supposés agissements déloyaux reprochés par l'une et l'autre partie.

Elle est donc recevable.

Sur le fond

L'employeur fonde sa demande de dommages et intérêts sur les griefs visés dans la lettre de licenciement et sur le comportement déloyal du salarié consistant en :

- la perte de 7 joueuses au profit de l'AC Avignon

- la tentative de capter une autre joueuse en usant de manipulations à l'égard de cette jeune mineure et de propos discriminatoires à l'égard du club de [P].

L'article L 1222-1 du code du travail dispose que le contrat de travail est exécuté de bonne foi.

La bonne foi se présumant, la charge de la preuve de l'exécution déloyale du contrat de travail par le salarié incombe à l'employeur.

En l'espèce, la cour relève que :

- le dossier de l'employeur comporte une liste officielle de joueuses ayant quitté le club pour rejoindre le club AC Avignon entre le 24 juin et le 10 juillet 2015, période pendant laquelle il a été constaté supra que M. [O] était engagé auprès de ce club en qualité notamment de coordinateur.

Cependant, il n'est justifié d'aucune intervention de l'appelant dans le recrutement de ces joueuses.

- M. [O] a fait l'objet d'une suspension de trois mois avec sursis par la commission régionale de discipline lors de sa réunion du 26 août 2020 pour avoir contrevenu aux dispositions de l'article 4 de la charte d'éthique et de déontologie du football aux termes desquels : 'Le développement des supports de communication et l'utilisation des réseaux sociaux, en raison de leur caractère public, poussent d'autant plus à l'exemplarité et supposent une vigilance accrue des acteurs du football... L'éducateur ou l'entraîneur doit relayer cette exemplarité sur un terrain en cadrant ses joueurs tout en ayant conscience que son comportement est leur premier exemple. Les dirigeants, notamment ceux qui sont les plus exposés aux médias, doivent être attentifs à leur comportement, à leur élocution et au choix des termes employés.'

Cette sanction fait suite à une conversation sur un réseau social entre M. [O] et une joueuse mineure du club de [P], le premier invitant la seconde à rejoindre le club de l'AC Avignon et à réfléchir sur la discrimination effectuée au sein du club de [P].

Pour apprécier la sanction, la commission a tenu compte de l'absence de témoignage de la joueuse et du fait que certains messages de la conversation transmis par le FCF [P] étaient manquants, ce que regrettait également M. [O].

Il apparaît encore à la lecture de la décision de la commission que M. [O] indique ne pas avoir divulgué le procès l'opposant au FCF [P], ce qui suppose que les faits se sont déroulés postérieurement à la rupture du contrat de travail, de sorte qu'ils ne peuvent ressortir de la compétence de la juridiction du travail.

L'association sera dans ces circonstances déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail par le salarié.

Sur les avertissements

La cour relève que M. [O] n'avait aucunement sollicité en première instance la nullité des avertissements litigieux, mais les avait évoqués dans ses écritures pour fonder sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail par l'employeur.

Il résulte des dispositions des articles 564 à 567 du code de procédure civile que la cour peut relever d'office le moyen tenant à l'irrecevabilité des demandes nouvelles en cause d'appel.

La demande présentée en cause d'appel par M. [O] n'a pas pour objet :

- d'opposer compensation,

- de faire écarter les prétentions adverses,

- de faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

Elle ne tend pas aux mêmes fins que celle soumise au premier juge, M. [O] sollicitant en cause d'appel l'annulation des avertissements infligés et l'attribution de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi, en sus d'une indemnisation pour exécution déloyale du contrat de travail seule réclamation présentée en première instance.

Enfin, cette demande ne constitue pas plus l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire d'une demande dont la cour est saisie et ne peut davantage être qualifiée de demande reconventionnelle.

Il en résulte qu'elle n'est pas de la nature de celles visées aux articles 565 à 567 du code de procédure civile et ne peut être rattachée aux exceptions mentionnées à l'article 564 du code de procédure civile, de sorte qu'elle devra être déclarée irrecevable.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'Association Football Club Féminin [P] Vaucluse.

Les dépens d'appel seront mis à la charge de M. [O].

Le jugement querellé sera confirmé en ce qu'il a condamné le salarié aux dépens de première instance.

PAR CES MOTIFS

LA COUR'

Par arrêt contradictoire, rendu publiquement en dernier ressort,

Dit que la demande présentée par l'Association Football Club Féminin [P] Vaucluse en dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail par le salarié est recevable,

Au fond, déboute l'Association Football Club Féminin [P] Vaucluse de sa demande à ce titre,

Dit que les demandes présentées par M. [U] [O] en annulation des avertissements des 10 juin 2014, 17 juin 2014 et 4 novembre 2014 et en dommages et intérêts en réparation du préjudice moral causé sont irrecevables comme nouvelles en cause d'appel,

Réforme le jugement rendu par le conseil de prud'hommes d'Avignon le 10 mai 2019 en ce qu'il a considéré que les griefs tenant au non renouvellement de la licence d'éducateur et aux clés n'étaient pas avérés,

Le confirme pour le surplus,

Condamne M. [U] [O] à payer à l'Association Football Club Féminin [P] Vaucluse la somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procedure civile,

Condamne le même aux dépens d'appel,

Arrêt signé par Monsieur ROUQUETTE-DUGARET, Président et par Madame BERGERAS, Greffier.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 5ème chambre sociale ph
Numéro d'arrêt : 19/02311
Date de la décision : 31/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-31;19.02311 ?
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