La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/05/2022 | FRANCE | N°19/01498

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 5ème chambre sociale ph, 24 mai 2022, 19/01498


ARRÊT N°



N° RG 19/01498 - N° Portalis DBVH-V-B7D-HKD3



EM/DO



CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE NIMES

22 mars 2019



RG :17/00696





[H]



C/



[E]





































COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH



ARRÊT DU 24 MAI 2022







APPELANTE :



Madame [D] [H]

née le 12 Mars 1976 à [Localité 4]

[Adresse 1]

[Localité 2]



Représentée par Me Eve SOULIER de la SELARL EVE SOULIER - JEROME PRIVAT - THOMAS AUTRIC, avocat au barreau D'AVIGNON





INTIMÉE :



Madame [W] [E]

[Adresse 5]

[Localité 3]



Représentée par Me Diane MALLET-GRELLET de la SELAS PVB AVOCA...

ARRÊT N°

N° RG 19/01498 - N° Portalis DBVH-V-B7D-HKD3

EM/DO

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE NIMES

22 mars 2019

RG :17/00696

[H]

C/

[E]

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH

ARRÊT DU 24 MAI 2022

APPELANTE :

Madame [D] [H]

née le 12 Mars 1976 à [Localité 4]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Eve SOULIER de la SELARL EVE SOULIER - JEROME PRIVAT - THOMAS AUTRIC, avocat au barreau D'AVIGNON

INTIMÉE :

Madame [W] [E]

[Adresse 5]

[Localité 3]

Représentée par Me Diane MALLET-GRELLET de la SELAS PVB AVOCATS, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Nicolas CARRERAS de la SELARL LIVELY, avocat au barreau D'AVIGNON

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 08 Mars 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère

GREFFIER :

Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

à l'audience publique du 22 Mars 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 24 Mai 2022

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 24 Mai 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Mme [D] [H], docteur vétérinaire a été embauchée à compter du 1er juillet 2007 par le Docteur [W] [E] en qualité de vétérinaire.

Le 05 juillet 2011, les parties ont signé un avenant au contrat de travail précisant le temps de travail, à compter du 1er mai 2011, 136,50 heures et l'organisation journalière du temps de travail.

Le 24 juin 2017, les parties ont conclu une rupture conventionnelle du contrat de travail de Mme [D] [H], avec effet au 31 juillet 2017.

Le 22 septembre 2017, Mme [D] [H] a saisi le conseil de prud'hommes de Nîmes aux fins de requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet.

Suivant jugement du 22 mars 2019, le conseil de prud'hommes de Nîmes a :

- dit et jugé que le contrat de travail de Mme [D] [H] est un contrat de travail à temps partiel, que Mme [D] [H] n'était pas dans l'obligation de se tenir à la disposition permanente de la clinique vétérinaire, que la demande relative à un dépassement ponctuel de la durée légale du travail n'est pas justifiée,

- débouté Mme [D] [H] de l'ensemble de ses demandes,

- dit qu'il y n'y a pas lieu à application de l'article au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que les dépens seront à la charge du demandeur.

Suivant déclaration envoyée par voie électronique le 11 avril 2019, Mme [D] [H] a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 08 mars 2022 et a fixé l'affaire à l'audience du 22 mars 2022 à laquelle elle a été retenue.

Mme [D] [H] conclut à l'infirmation du jugement et demande à la cour de :

- recevoir son appel,

- réformer le jugement rendu en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes,

- dire et juger que le contrat de travail à temps partiel doit être requalifié en contrat de travail à temps complet,

- dire et juger que l'employeur n'a pas exécuté le contrat de travail de manière loyale,

En conséquence,

- condamner l'employeur à lui payer les sommes suivantes :

- 5 995,49 euros à titre de rappel de salaire sur la base d'un temps complet,

- 599,54 euros à titre de congés payés y afférents,

- 2 382 euros de rappel de prime d'ancienneté recalculée sur la base d'un temps complet,

- 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

- 1 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Elle fait valoir au visa de l'article L3123-6 du code du travail et de la jurisprudence y afférente, qu'au regard de ses bulletins de salaire, la durée de travail était fixée à 136,50 heures par mois, qu'elle a été embauchée à temps partiel, que cependant aucun contrat écrit venant notamment mentionner la répartition du temps de travail n'était conclu, de sorte que le contrat de travail doit être requalifié en contrat à temps complet.

Elle soutient qu'en août 2014, elle a effectué plus de 166 heures de travail, qu'elle a donc dépassé la durée légale de travail fixée à 151,67 heures, que pour ce motif le contrat de travail doit également être requalifié en contrat à temps complet.

Elle soutient que ses bulletins de salaire attestent de variations de la durée de travail dépassant largement les 136,50 heures mensuelles, et qu'elle devait se tenir constamment à la disposition de l'employeur ne pouvant pas prévoir son rythme de travail, qu'il lui était donc impossible de chercher un travail régulier à temps partiel dans une autre structure.

Elle réfute que sa demande soit prescrite dans la mesure où la jurisprudence indique que le délai de prescription prend effet à compter de la première irrégularité, soit en l'espèce, le 1er juillet 2007.

Elle conteste également les affirmations de Mme [W] [E] selon lesquelles elle travaillait seulement dans le respect des horaires fixés contractuellement et que les derniers rendez-vous du soir étaient toujours planifiés au plus tard à 18h30. Elle dit produire plusieurs attestations qui corroborent ce qu'elle prétend, ajoute que les heures complémentaires et supplémentaires étaient dissociées sur les bulletins de salaire, de sorte qu'il n'y a aucun doute sur le fait qu'elle effectuait un grand nombre d'heures complémentaires en dehors de ses astreintes. Elle conteste également le fait que c'est Mme [W] [E] qui assurait les urgences en dehors du planning.

Elle conclut que Mme [W] [E] n'a pas exécuté le contrat de travail de manière loyale contrairement à l'article L1222-1 du code du travail et qu'elle est donc fondée à demander des dommages et intérêts à hauteur de 5 000 euros.

Elle soutient que la prime d'ancienneté doit être recalculée sur la base d'un temps complet et qu'elle aurait dû percevoir à ce titre 6 856,54 euros pour la période d'octobre 2014 à juin 2017.

Mme [W] [E] conclut à la confirmation du jugement entrepris et demande à la cour de :

- confirmer le jugement dont appel,

- débouter Mme [D] [H] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner Mme [D] [H] à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [D] [H] aux entiers dépens.

Elle fait valoir, au visa de l'article L3123-14 du code du travail et de la jurisprudence y afférente, que le contrat de travail à temps partiel doit contenir notamment la répartition de la durée de travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, que ce n'est qu'en l'absence d'indication dans le contrat à temps partiel de la durée exacte de travail convenue et de sa réparation que le contrat est présumé avoir été conclu à temps complet. Elle soutient que le contrat de travail écrit a été signé par les parties, qu'il précise la durée de travail mensuelle et sa répartition sur la semaine, que la salariée n'était pas dans l'obligation de rester en permanence à sa disposition, contrairement à ce qu'elle prétend.

Elle soutient que la demande de Mme [D] [H] au titre du mois d'août 2014 est prescrite puisque le délai de prescription a expiré le 1er septembre 2016 et qu'elle a saisi le conseil de prud'hommes de Nîmes le 22 septembre 2017, soit plus d'un an après, et indique par ailleurs que la durée légale n'a pas été atteinte au cours des deux dernières années non prescrites.

Elle considère que les éléments de preuve que Mme [D] [H] a communiqués, soit des attestations de deux anciens salariés et une copie de l'agenda des rendez-vous 2016, ne sont pas probants.

S'agissant de la demande de rappel de prime d'ancienneté, elle soutient au visa de l'article 31 de la convention collective applicable que c'est à bon droit que le conseil de prud'hommes l'a rejetée, dans la mesure où la prime qu'elle lui a versée est calculée conformément aux dispositions conventionnelles. Elle indique subsidiairement, que pour le cas où la requalification sera accordée, la demande de Mme [D] [H] doit être également rejetée conformément aux dispositions de la convention applicable.

Enfin, elle conteste avoir exécuté le contrat de travail de façon déloyale à défaut pour Mme [D] [H] de rapporter la preuve qu'elle aurait commis un manquement à l'obligation de loyauté et de justifier d'un quelconque préjudice, précisant que l'appelante n'a jamais été empêchée de quelque manière que ce soit de cumuler son travail à temps partiel avec un travail régulier dans une autre structure, qu'elle disposait de plusieurs jours disponibles dans la semaine où elle pouvait exercer un autre emploi, et où contrairement à la majorité des vétérinaire salariés, elle n'assumait pas de période de garde et ne travaillait que de jour.

MOTIFS :

Sur la demande de requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet :

Selon l'article L212-4-3 du code du travail applicable du 27 juillet 2005 au 01 mai 2008, le contrat de travail des salariés à temps partiel est un contrat écrit. Il mentionne la qualification du salarié, les éléments de la rémunération, la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et, sauf pour les salariés des associations et entreprises d'aide à domicile, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois. Il définit en outre les cas dans lesquels une modification éventuelle de cette répartition peut intervenir ainsi que la nature de cette modification. Toute modification doit être notifiée au salarié sept jours au moins avant la date à laquelle elle doit avoir lieu. Le contrat de travail détermine également les modalités selon lesquelles les horaires de travail pour chaque journée travaillée sont communiqués par écrit au salarié. Dans les associations et entreprises d'aide à domicile, les horaires de travail sont communiqués par écrit chaque mois au salarié.

Le contrat de travail précise par ailleurs les limites dans lesquelles peuvent être effectuées des heures complémentaires au-delà de la durée de travail fixée par le contrat. Le nombre d'heures complémentaires effectuées par un salarié à temps partiel au cours d'une même semaine ou d'un même mois ne peut être supérieur au dixième de la durée hebdomadaire ou mensuelle de travail prévue dans son contrat.

Les heures complémentaires ne peuvent avoir pour effet de porter la durée du travail effectuée par un salarié au niveau de la durée légale du travail ou à la durée fixée conventionnellement.

Le refus d'effectuer les heures complémentaires proposées par l'employeur au-delà des limites fixées par le contrat ne constitue pas une faute ou un motif de licenciement. Il en est de même, à l'intérieur de ces limites, lorsque le salarié est informé moins de trois jours avant la date à laquelle les heures complémentaires sont prévues.

Lorsque l'employeur demande au salarié de changer la répartition de sa durée du travail, alors que le contrat de travail n'a pas prévu les cas et la nature de telles modifications, le refus du salarié d'accepter ce changement ne constitue pas une faute ou un motif de licenciement.

Lorsque l'employeur demande au salarié de changer la répartition de sa durée du travail dans un des cas et selon les modalités préalablement définis dans le contrat de travail, le refus du salarié d'accepter ce changement ne constitue pas une faute ou un motif de licenciement dès lors que ce changement n'est pas compatible avec des obligations familiales impérieuses, avec le suivi d'un enseignement scolaire ou supérieur, avec une période d'activité fixée chez un autre employeur ou avec une activité professionnelle non salariée. Il en va de même en cas de changement des horaires de travail au sein de chaque journée travaillée qui figurent dans le document devant être transmis au salarié en vertu du premier alinéa.

Lorsque, pendant une période de douze semaines consécutives ou pendant douze semaines au cours d'une période de quinze semaines, l'horaire moyen réellement effectué par un salarié a dépassé de deux heures au moins par semaine, ou de l'équivalent mensuel de cette durée, l'horaire prévu dans son contrat, celui-ci est modifié, sous réserve d'un préavis de sept jours et sauf opposition du salarié intéressé, en ajoutant à l'horaire antérieurement fixé la différence entre cet horaire et l'horaire moyen réellement effectué.

Selon l'article L 3123-6 du code du travail dans sa version applicable à compter du 10 août 2016:

Le contrat de travail du salarié à temps partiel est un contrat écrit. Il mentionne:

1° La qualification du salarié, les éléments de la rémunération, la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et, sauf pour les salariés des associations et entreprises d'aide à domicile et les salariés relevant d'un accord collectif conclu en application de l'article L3121-44, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ;

2° Les cas dans lesquels une modification éventuelle de cette répartition peut intervenir ainsi que la nature de cette modification ;

3° Les modalités selon lesquelles les horaires de travail pour chaque journée travaillée sont communiqués par écrit au salarié. Dans les associations et entreprises d'aide à domicile, les horaires de travail sont communiqués par écrit chaque mois au salarié ;

4° Les limites dans lesquelles peuvent être accomplies des heures complémentaires au delà de la durée de travail fixée par le contrat.

L'absence de contrat de travail écrit fait présumer que l'emploi est à temps complet et c'est à l'employeur qui conteste cette présomption qu'il incombe de rapporter la preuve, d'une part,

qu'il s'agissait d'un emploi à temps partiel, d'autre part, que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur.

En présence d'un contrat de travail écrit, conforme aux dispositions de l'article L 3123-14 du code du travail, il appartient au salarié qui soutient que le contrat de travail est à temps complet de démontrer qu'il n'avait pas eu préalablement connaissance de ses horaires de travail et qu'il devait ainsi se tenir en permanence à la disposition de l'employeur.

A défaut, le contrat de travail n'est pas automatiquement requalifié mais est simplement présumé être à temps plein.

Ainsi, en absence d'écrit ou en cas d'insuffisance des mentions figurant au contrat, au regard des exigences légales, l'employeur peut renverser cette présomption simple de l'existence d'un contrat de travail à temps plein s'il établit que le salarié travaille effectivement à temps partiel et qu'il peut connaître ses rythmes de travail et n'est pas tenu d'être en permanence à la disposition de l'employeur.

La charge de la preuve qui incombe à l'employeur porte sur deux points distincts cumulatifs, à savoir, d'une part, la durée exacte, hebdomadaire ou mensuelle, de travail convenue, d'autre part, le fait que le salarié n'était pas dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il ne devait pas se tenir constamment à la disposition de l'employeur.

La durée légale du travail effectif des salariés est fixée à trente-cinq heures par semaine civile.

En l'espèce, Mme [D] [H] et Mme [W] [E] ont signé deux avenants au contrat de travail à durée indéterminée, le premier en date du 1er juillet 2007 qui confirme l'embauche de Mme [D] [H] en qualité de vétérinaire, rappelle que la convention collective applicable est la convention collective des vétérinaires du 05 juillet 1995 étendue par arrêté du 16 janvier 1996 JO 24 janvier 1996, le second en date du 05 juillet 2011 qui mentionne une modification du contrat à compter du 1er mai 2011 au titre de la rémunération et une durée de travail fixée à 136,50 heures mensuellement organisée comme suit :

semaines

1

2

lundi

8 heures

8 heures

mardi

8 heures

8 heures

mercredi

non travaillé

non travaillé

jeudi

8 heures

8 heures

vendredi

8 heures

non travaillé

samedi

non travaillé

7 heures

Mme [W] [E] justifie que les deux avenants ont été enregistrés à l'ordre des vétérinaires conformément à l'article R242-38 du code rural et de la pêche maritime.

Il résulte de ce tableau que la durée hebdomadaire de travail est de 31,50 heures, soit 136,50 heures en moyenne mensuelle.

Force est de constater d'une part, que Mme [D] [H] disposait bien d'un contrat de travail écrit sur lequel figurent les mentions exigées à l'article L3123-14 signé entre les parties le 05 juillet 2011, la durée hebdomadaire et la répartition de la durée du travail entre les semaines du mois, de sorte que la présomption de temps complet ne s'applique pas et que la demande de requalification du contrat n'est pas justifiée.

Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point.

Sur le dépassement de la durée légale soulevée par Mme [D] [H]

- sur prescription des demandes pour le mois d'août 2014 :

L'article L3245-1 du code du travail dispose que l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.

La durée de la prescription étant déterminée par la nature de la créance invoquée, la demande de rappel de salaire fondée sur la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet est soumise à la prescription triennale prévue par l'article L 3245-1 du Code du travail.

En l'espèce, Mme [W] [E] soutient que la demande de Mme [D] [H] au titre du mois d'août 2014 est prescrite.

Il est constant que Mme [D] [H] a engagé son action en requalification fondée sur le dépassement du temps de travail en saisissant la juridiction prud'homale le 22 septembre 2017 ; dès lors que la salariée connaissait ou aurait dû connaître le nombre d'heures travaillées en août 2014 au plus tard le 1er septembre 2014, il s'en déduit que son action sur ce fondement est prescrite puisqu'un délai supérieur à trois ans s'est écoulé entre ces deux dates.

Il convient donc de faire droit à la demande de Mme [W] [E] sur ce point.

- sur la demande de requalification au motif d'une mise à disposition permanente de la salariée:

Mme [D] [H] soutient qu'elle a été amenée à effectuer de nombreuses heures complémentaires et supplémentaires dépassant ainsi la durée de base, qu'elle devait se tenir constamment à la disposition de l'employeur et qu'elle ne pouvait pas prévoir son rythme de travail, ce qui l'a placée dans l'impossibilité de prévoir son rythme de travail.

A l'examen des bulletins de salaires pour la période non prescrite, il ressort que si Mme [D] [H] a été amenée à réaliser des heures complémentaires et supplémentaires en mai 2015, septembre 2015, juillet 2016 et mars 2017, il n'en demeure pas moins que la durée légale de travail n'a pas été dépassée et que sur une période 22 mois entre octobre 2015 et juillet 2017, la durée de base a été dépassée pour 8 mois.

A l'appui de ses prétentions, Mme [D] [H] produit aux débats :

- photocopie d'extraits de son agenda pour les années 2015 et 2016,

- une attestation établie par Mme [F] [B] qui se présente comme une ancienne assistante vétérinaire qui a travaillé dans la clinique gérée par Mme [W] [E] et qui certifie que Mme [D] [H] 'finissait régulièrement son travail...au delà de 12h30 le midi et au delà de 19h30 le soir', que les consultations urgentes étaient régulièrement ajoutées après l'heure de fermeture théorique ou en cours de journée 'entraînant un décalage important des rendez-vous initialement programmés', et conclut qu'il impossible pour Mme [D] [H] de prévoir à l'avance si elle allait finir à l'heure au vu de la charge de travail qui lui était imposé,

- une attestation établie par M. [M] [Y] qui se présente comme un ancien salarié de la clinique qui a travaillé de 2002 à 2007, qui indique qu'il 'arrive fréquemment' que le 'vétérinaire en charge des consultations reste au delà des heures de fermeture au public pour assurer les soins des animaux...' plus particulièrement pendant la saison de chasse, que certains actes ont pu être réalisés après les 'consultations courantes' déjà prévues à l'agenda, que le vétérinaire 'doit pouvoir faire face à des horaires à rallonge', précisant qu' 'ils sont soumis à la permanence des soins déontologiquement...',

Les extraits de l'agenda que Mme [D] [H] produit aux débats sont manifestement insuffisants pour rapporter la preuve de sa disponibilité permanente : outre le fait que certaines pages sont difficilement lisibles s'agissant des heures de rendez-vous et que la plupart des mentions manuscrites sont raturées :

- ils ne permettent pas d'identifier avec certitude le nom du vétérinaire intervenant, Mme [F] [B] indiquant dans son attestation que 'les rendez-vous du Dr [H] étaient systématiquement notés sur la page de droite de l'agenda et ceux du Dr [E] sur celle de gauche', alors que certaines photocopies ne concernent qu'une page unique sans possibilité de déterminer s'il s'agit de la page de gauche ou de droite de l'agenda,

- ils établissent seulement que Mme [D] [H] a pu travailler occasionnellement au-delà des heures d'ouverture et de fermeture de la clinique vétérinaire fixés du lundi au vendredi de 09h à 12h et de 14h à 19h et le samedi de 09h à 12h et de 14h à 18h.

Les deux attestations qui ne sont pas circonstanciées s'agissant notamment des dates ou périodes concernées, qui sont trop générales - M. [M] [Y] qui indique avoir cessé de travaillé au sein de la clinique en 2007 ne cite pas le nom de Mme [D] [H] de sorte qu'il n'est même pas établi qu'il a pu travailler avec elle avant son départ - et peu précises, ne sont pas de nature à étayer les affirmations de l'appelante sur ce point.

Par ailleurs, comme le rappelle le conseil de prud'hommes dans le jugement dont appel, 'il n'est pas anormal dans un poste à responsabilité comme celui qu'occupait Mme [D] [H] que les horaires de travail doivent être occasionnellement assouplis'.

Enfin, force est de constater que Mme [D] [H] ne rapporte pas la preuve qu'elle aurait été dans l'obligation de travailler les jours pendant lesquels il a été convenu avec Mme [W] [E] qu'elle ne travaille pas, soit le mercredi, le vendredi semaine 2 et le samedi semaine 1.

Il résulte des éléments qui précèdent que contrairement à ce que soutient Mme [D] [H], elle n'était pas à la disposition permanente de son employeur de sorte que sa demande de requalification de son contrat de travail à temps partiel en temps complet pour ce motif n'est pas fondée et sera rejetée.

Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point.

Sur la demande de rappel de la prime d'ancienneté :

Selon l'article 31 de la convention collective nationale des vétérinaires praticiens salariés du 31 janvier 2006 dispose que la prime d'ancienneté est calculée sur le salaire minimum conventionnel de l'intéressé, proportionnellement au nombre d'heures effectives, mais sans tenir compte des heures supplémentaires ; elle s'ajoute à la rémunération mensuelle et est versée aux salariés dans les conditions suivantes :

- à partir de 3 ans d'ancienneté, 5 % ;

- à partir de 5 ans d'ancienneté, 7 % ;

- à partir de 10 ans d'ancienneté, 10 % ;

- à partir de 15 ans d'ancienneté, 15 % ;

- à partir de 20 ans d'ancienneté, 20 %.

On entend par ancienneté le temps pendant lequel le salarié a été occupé d'une façon continue dans l'entreprise. Cette prime d'ancienneté, s'ajoutant au salaire de base, devra figurer à part sur le bulletin de salaire à compter de cette date.

L'ancienneté est calculée à compter de la date d'embauche dans l'entreprise.

Conformément à l'article 5 définissant les avantages acquis, la prime d'ancienneté mise en place par la convention collective ne s'ajoutera pas au salaire si l'employeur peut justifier que, précédemment à la convention collective, une revalorisation régulière et constante du salaire était appliquée à des conditions au moins égales à celles édictées par la convention collective pour le calcul de la prime d'ancienneté.

Mme [D] [H] soutient que la prime d'ancienneté doit être recalculée sur la base d'un temps complet de sorte qu'elle aurait dû percevoir la somme de 6 86,54 euros au lieu de 4 474,54 euros.

Comme indiqué précédemment, la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet n'étant pas fondée, il en résulte que la demande de Mme [D] [H] formée au titre de la prime d'ancienneté doit être rejetée dès lors qu'elle ne formule de surcroît aucune critique sur le montant qu'elle a perçu entre octobre 2014 et juin 2017 au titre du contrat de travail à temps partiel litigieux, soit la somme de 4 474,54 euros.

Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point.

Sur la demande de Mme [D] [H] relative à l'exécution déloyale du contrat de travail par l'employeur :

L'article L1222-1 du code du travail dispose que le contrat de travail est exécuté de bonne foi.

En l'espèce, Mme [D] [H] soutient que Mme [W] [E] n'a pas exécuté le contrat de travail de manière loyale en se référant aux moyens qu'elle a soulevés au soutien de sa demande de requalification du contrat de travail à temps partiel.

Comme l'ont justement relevé les premiers juges, dans la mesure où les demandes de requalification et de rappel de la prime d'ancienneté présentées par Mme [D] [H] ont été rejetées, il y a lieu de constater que Mme [D] [H] ne rapporte pas la preuve que Mme [W] [E] ait failli dans son obligation de loyauté.

Le jugement entrepris sera donc confirmé en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière prud'homale et en dernier ressort ;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Nîmes le 22 mars 2019,

Condamne Mme [D] [H] à payer à Mme [W] [E] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, en cause d'appel,

Rejette les demandes plus amples ou contraires,

Condamne Mme [D] [H] aux dépens de la procédure d'appel.

Arrêt signé par Monsieur ROUQUETTE-DUGARET, Président et par Madame OLLMANN, Greffière.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 5ème chambre sociale ph
Numéro d'arrêt : 19/01498
Date de la décision : 24/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-24;19.01498 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award