ARRÊT N°
N° RG 19/01388 - N° Portalis DBVH-V-B7D-HJ2H
EM/DO
CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DEPARTAGE DE NIMES
04 mars 2019
RG :15/00226
Etablissement Public EPLEFPA DE [Localité 7]
C/
[E]
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
5ème chambre sociale PH
ARRÊT DU 24 MAI 2022
APPELANTE :
Etablissement Public EPLEFPA DE [Localité 7]
[Adresse 5]
[Localité 1]
Représentée par Me Sophie MEISSONNIER-CAYEZ de la SELAS PVB AVOCATS, avocat au barreau de NIMES
INTIMÉE :
Madame [U] [E]
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentée par Me Eve SOULIER de la SELARL EVE SOULIER - JEROME PRIVAT - THOMAS AUTRIC, avocat au barreau d'AVIGNON
ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 01 Mars 2022
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère
GREFFIER :
Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS :
à l'audience publique du 22 Mars 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 24 Mai 2022
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 24 Mai 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Mme [U] [E] a été embauchée le 02 avril 1990 par le lycée agricole [6] à [Localité 7] selon contrat à durée déterminée à temps complet en qualité d'agent technique d'exploitation, puis selon contrat à durée indéterminée à temps complet à compter de février 1991.
A compter du 1er janvier 1996, Mme [U] [E] a occupé un poste d'ouvrier hautement qualifié échelon 2 coefficient 160.
Suivant arrêtés du 1er janvier 2013 et du 05 janvier 2015., Mme [U] [E] a été nommée régisseur de recettes puis régisseur de la régie d'avance.
Suivant courrier recommandé du 06 février 2015, l'EPLEFPA de [Localité 7] [Localité 8] a notifié à Mme [U] [E] son licenciement à titre conservatoire pour motif économique.
Le 16 février 2015, Mme [U] [E] a accepté le contrat de sécurisation professionnelle.
Suivant courrier du 07 mars 2015, Mme [U] [E] a saisi le conseil de prud'hommes de Nîmes aux fins de voir condamner l'EPLEFA [Localité 7] [Localité 8] au paiement de diverses sommes indemnitaires.
Suivant jugement du 04 mars 2019, le conseil de prud'hommes de Nîmes a :
- déclaré sans cause réelle et sérieuse le motif du licenciement invoqué par le défendeur à l'encontre de Mme [U] [E],
- condamné le défendeur à payer à la requérante les sommes suivantes :
- 30 921,12 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 7 659 euros de dommages et intérêts en raison de la remise tardive de l'attestation Pôle emploi,
- 421,22 euros de rappels de salaires au titre des heures supplémentaires ainsi que la somme de 42,12 euros au titre des congés payés afférents,
- ordonné l'exécution provisoire du jugement,
- débouté la requérante de ses autres demandes principales,
- condamné le défendeur au paiement des entiers dépens,
- condamné le défendeur à payer au requérant la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Suivant déclaration envoyée par voie électronique le 04 avril 2019, l'EPLEFA [Localité 7] [Localité 8] a régulièrement interjeté appel de cette décision.
Le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 08 mars 2022 et a fixé l'affaire à l'audience du 22 mars 2022 à laquelle elle a été retenue.
En l'état de ses dernières écritures, l'EPLEFA [Localité 7] [Localité 8] conclut à l'infirmation du jugement dont appel et demande à la cour de :
Sur le licenciement:
- dire et juger qu'il entre dans son champ d'application,
- infirmer la décision du conseil de prud'hommes de Nîmes,
- dire et juger que le licenciement pour motif économique est fondé,
- débouter Mme [U] [E] de ses demandes,
Sur les autres demandes :
- juger qu'il n'a commis aucun manquement dans la remise des documents de fin de contrat,
- infirmer la décision du conseil de prud'hommes de Nîmes,
- débouter Mme [U] [E] de sa demande indemnitaire,
- confirmer pour le surplus la décision du conseil de prud'hommes de Nîmes,
A titre reconventionnel,
- condamner Mme [U] [E] à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.
Il fait valoir :
- au visa des articles L1233-1 code du travail et L811-8 du code rural, que les personnels qu'il a recrutés sont des agents publics relevant du droit administratif à l'exclusion de l'ensemble des dispositions du code du travail, que contrairement à ce qu'indique Pôle emploi, les établissements publics entrent dans le champ d'application du licenciement économique sauf dispositions particulières, qu'aucune disposition particulière n'exclut les salariés des EPFLPA affectés à l'exploitation agricole, que le code rural précise que ces contrats sont régis par les dispositions du code du travail,
- que le licenciement économique était justifié, que la situation économique du [Adresse 5] et plus largement de l'établissement ont rendu nécessaire la modification du contrat de travail de Mme [U] [E] pour sauvegarder sa compétitivité, compte tenu notamment la baisse du chiffre d'affaires du caveau et de sa fréquentation, d'une marge brute insuffisante et d'un fonds de roulement négatif,
- qu'il a respecté son obligation de reclassement, que le seul poste disponible en interne a été refusé par Mme [U] [E],
- il n'a pas manqué à son obligation de remise de l'attestation de Pôle emploi à la fin du contrat de travail, que la circonstance que l'attestation n'a pas été acceptée par Pôle emploi ne saurait lui être reproché,
- que le harcèlement moral dont Mme [U] [E] se prévaut n'est pas justifié, qu'aucune suite n'a été donnée aux deux courriers que la salariée avait envoyés à l'inspection du travail et au médecin du travail, que le courrier qu'elle lui a adressé ne fait pas état de faits répétitifs à son encontre constitutifs de harcèlement moral, que les attestations que Mme [U] [E] a produites ne permettent pas non plus de justifier de la demande de Mme [U] [E],
- que s'agissant de la demande au titre des heures supplémentaires, il expose que le décompte d'heures, non précis produit pas Mme [U] [E] n'est corroboré par aucun élément extérieur et qu'elle est donc défaillante dans la charge de la preuve qui lui incombe.
Dans le dernier état de ses écritures, Mme [U] [E] conclut à la confirmation du jugement dont appel et demande à la cour de :
Sur l'exécution du contrat de travail :
- dire et juger que l'employeur a manqué à son obligation de sécurité de résultat,
- dire et juger que l'employeur a commis une résistance abusive dans la délivrance de l'attestation destinée à Pôle emploi,
- dire et juger que l'employeur est redevable du paiement d'heures supplémentaires,
- dire et juger que l'employeur a exécuté le contrat de travail de façon déloyale,
En conséquence,
- condamner l'employeur au paiement des sommes suivantes :
- 21 500 euros de dommages et intérêts en raison du manquement de l'employeur à son obligation de sécurité de résultat,
- 10 000 euros de dommages et intérêts en raison de la délivrance tardive de l'attestation Pôle emploi,
- 7 500 euros de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail par l'employeur,
- 421,22 euros de rappels de salaires au titre des heures supplémentaires,
- 41,12 euros de congés payés y afférents,
Sur la rupture du contrat de travail :
- dire et juger que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
- condamner l'employeur au paiement de la somme de 40 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
En toute hypothèse,
- condamner l'employeur au paiement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Elle fait valoir que :
- elle a fait l'objet de harcèlement moral de la part de son employeur, qu'elle a rencontré des difficultés depuis l'arrivée du nouveau directeur d'exploitation, M. [O] [L] en août 2011 qui n'a pas cessé de la critiquer et d'exercer des pressions à son encontre, qu'après un retour d'arrêt maladie, ses affaires personnelles avaient disparu de son bureau lequel avait été déplacé à l'étage et des modifications de son contrat de travail avaient été décidées sans qu'elle ait été consultée préalablement, qu'elle a dénoncé ces faits auprès du médecin du travail et de l'inspection du travail,
- que son employeur lui a délivré une attestation pôle emploi conforme le 05 novembre 2015 alors qu'elle avait accepté le CSP le 16 février 2015 et que son travail a pris fin le 08 avril 2015, que cette remise est donc tardive, que l'incurie et la résistance abusive de l'employeur lui ont nécessairement engendré un préjudice puisqu'elle a dû attendre 9 mois avant de percevoir des indemnités chômage et qu'elle s'est retrouvée pendant cette période sans salaire ni revenu,
- elle considère que les éléments qu'elle produit aux débats, courrier adressé à l'employeur et décompte précis des heures de travail effectuées, établissent suffisamment sa demande au titre des heures supplémentaires,
- elle considère que l'employeur a exécuté le contrat de travail de façon déloyale, en ne lui réglant pas les heures supplémentaires dues, en exerçant à son encontre des pressions et en ne daignant pas réagir malgré ses dénonciations, en s'abstenant de la protéger et en tardant à lui délivrer une attestation de Pôle emploi conforme,
- le licenciement prononcé à son encontre présente un caractère abusif, que l'employeur relève du secteur public et ne pouvait donc pas la licencier pour motif économique, qu'à titre subsidiaire, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse en l'absence de démonstration du motif économique et en l'absence de recherche loyale et sérieuse de reclassement.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens de parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues à l'audience.
MOTIFS :
Sur le licenciement économique :
Sur le statut de L'EPLEFPA de [Localité 8] et la compétence judiciaire pour statuer sur le licenciement économique de Mme [U] [E] :
Selon l'article L1233-1 du code du travail, les dispositions du présent chapitre sont applicables dans les entreprises et établissements privés de toute nature ainsi que, sauf dispositions particulières, dans les entreprises publiques et les établissements publics industriels et commerciaux.
Selon l'article L811-8 du code rural et de la pêche tout établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricole assure une formation générale, technologique et professionnelle initiale et peut dispenser une formation continue, dans les métiers énoncés à l'article L811-1.
A ce titre, il regroupe plusieurs centres :
1° Un ou plusieurs lycées d'enseignement général et technologique agricole, lycées professionnels agricoles ou lycées d'enseignement général, technologique et professionnel agricole ;
2° Un ou plusieurs centres de formation professionnelle et de promotion agricoles ou centres de formation d'apprentis qui dispensent les formations mentionnées au présent chapitre ;
3° Un ou plusieurs ateliers technologiques ou exploitations agricoles qui assurent l'adaptation et la formation aux pratiques professionnelles et qui contribuent à la démonstration, à l'expérimentation et à la diffusion des techniques nouvelles, en cohérence avec les orientations des politiques publiques pour l'agriculture.
Il a pour siège soit un lycée d'enseignement général et technologique agricole, soit un lycée professionnel agricole, soit un lycée d'enseignement général, technologique et professionnel agricole et dispose d'un centre relevant de chacune des catégories mentionnées aux 2° et 3°.
Les agents contractuels recrutés pour exercer leurs fonctions dans les centres de formation professionnelle et de promotion agricoles ou dans les centres de formation d'apprentis mentionnés au 2° peuvent être recrutés sur les emplois ouverts par le conseil d'administration de l'établissement, à temps complet ou incomplet en fonction des besoins du service.
Les personnels, autres que le directeur, recrutés pour exercer leurs fonctions dans les ateliers technologiques ou exploitations agricoles mentionnés au 3° sont des salariés de droit privé qui sont régis par les dispositions du livre VII du présent code ou par celles du code du travail.
Ces établissements sont dotés de la personnalité civile et de l'autonomie administrative et financière. Ils peuvent être implantés sur plusieurs sites si la nature ou l'importance des activités le justifie. Chaque centre de formation dispose de l'autonomie pédagogique et éducative. (...)
L'article R811-23 du même code dans sa version applicable, le conseil d'administration règle par ses délibérations les affaires de l'établissement public local et des centres qui le constituent, après avis des conseils compétents et après avoir entendu le rapport du directeur de l'établissement public local. Il arrête son règlement intérieur. Ses délibérations portent notamment sur (..) 16° la création et la définition des emplois rémunérés sur le budget de l'établissement public local ainsi que les conditions d'emploi, de travail et de rémunération fixées dans le respect des lois et règlements en vigueur (...)
L'article D811-93-1 du code rural dispose que': «'-Lorsque les établissements publics locaux d'enseignement et de formation professionnelle agricole recrutent des agents contractuels de droit public, ces recrutements s'effectuent dans les conditions prévues par les articles 1. 4 à 6 sexies de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, à l'exception de ceux effectués sur le fondement du septième alinéa du I de l'article L. 811-8 pour répondre aux besoins permanents des centres de formation professionnelle et de promotion agricoles ou des centres de formation d'apprentis.
II.-Les contrats des agents recrutés sur le fondement du septième alinéa du I de l'article L. 811-8 pour pourvoir un emploi correspondant à un besoin permanent sont conclus et renouvelés dans les mêmes conditions que celles fixées par les articles 6 bis et 6 ter de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat. Toutefois:
1° La durée de services publics effectifs de six ans mentionnée à l'article 6 bis est comptabilisée au titre de l'ensemble des services effectués dans le cadre d'un emploi occupé en application du septième alinéa du I de l'article L. 811-8 ou des articles 4, 6, 6 quater, 6 quinquies, 6 sexies de cette loi ;
2° Un contrat conclu en application du septième alinéa du I de l'article L. 811-8 peut être renouvelé à l'issue d'une durée de trois ans, par une décision expresse, pour une durée indéterminée.
III.-Les dispositions prévues par le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de l'Etat pris pour l'application de l'article 7 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat sont applicables aux agents mentionnés au II.
Le directeur peut également sans délibération préalable du conseil d'administration procéder au licenciement d'un agent pour suppression du besoin ou de l'emploi, pour motif disciplinaire, pour insuffisance professionnelle ou décider de ne pas renouveler son contrat de travail. Ces décisions doivent être motivées par l'intérêt du service et sont prises sous le contrôle du juge.'»
Seuls les EPLEFPA sont dotés de la personnalité juridique et soumis aux droits et obligations qui en résultent.
Le régime des EPLE a été établi par le décret N° 85-924 du 30 août 1985 désormais abrogé car codifié dans le code de l'éducation et est fixé au titre II du livre IV de la partie réglementaire du code de l'éducation. Les EPLE ont le statut d'établissements publics à caractère administratif, représentent juridiquement des personnes morales de droit public, sont placés sous la responsabilité d'un chef d'établissement et sont gérés par un conseil d'administration, et disposent d'une relative autonomie administrative, financière et pédagogique.
En tant que personne morale, l'EPLEFPA constitue un organisme administratif chargé de la gestion d'un service public, est soumis aux obligations du droit public et dispose de prérogatives de puissance publique qu'il lui appartient de mettre en oeuvre pour la réalisation de ses missions, dans le domaine de compétence qui lui a été assigné par la loi.
Différentes catégories de personnels interviennent dans les EPLEFPA : agents de l'État, agents de la collectivité territoriale de rattachement et agents de l'établissement.
Dans le cadre de ses missions l'établissement peut recruter du personnel, ce sont des agents contractuels sur budget (ACB). Les personnels recrutés par l'EPLEFPA relèvent soit du droit public (D 811-93-1 du code rural et de la pêche maritime) en vertu de la jurisprudence (arrêt Berkani 1996) soit du droit privé par détermination de la loi (emplois aidés, salariés des exploitations et ateliers technologiques).
Si la création et la suppression des emplois prévus au budget de l'établissement public local font l'objet de délibérations du conseil d'administration pour être ensuite transmises par le directeur de l'établissement, au représentant de l'Etat, au président de la collectivité de rattachement et au directeur régional de l'agriculture et de la forêt, en revanche, la décision de licencier le salarié concerné par la suppression d'emploi est prise par le directeur de l'établissement sans qu'il ait à solliciter une décision préalable du conseil d'administration.
L'Etablissement public local d'enseignement et de formation professionnelles agricoles de [Localité 7] [Localité 8] soutient qu'il est un établissement public administratif qui gère une mission de service public d'enseignement et ses personnels sont des agents publics relevant du droit administratif à l'exclusion de l'ensemble des dispositions du code du travail et qu'aucune disposition particulière n'exclut les salariés des EPLEFPA affectés à l'exploitation agricole du champ du licenciement économique.
En l'espèce, le contrat de travail à durée déterminée signé entre Mme [U] [E] et l'établissement public ne donne aucune indication sur les dispositions applicables, l'employeur s'engageant seulement à ne pas la licencier pour motifs autre que disciplinaires pendant 6 mois à compter de la date d'embauche, et indique que les dispositions de la convention collective applicable et le règlement intérieur de l'entreprise s'appliquent à Mme [U] [E] laquelle a été ensuite employée à temps complet en qualité d'ouvrière agricole à temps complet selon une attestation du 21 mai 1991 établie par le directeur de l'établissement, à compter du 1er janvier 1996 en qualité d'ouvrier hautement qualifié échelon 2, puis à compter du 1er 2013 en qualité de régisseur de la régie de recettes du Domaine.
Dans la mesure où l'exploitation agricole de l'EPLEFPA est, au plan juridique, considérée comme exploitant agricole et que le dernier poste occupé par Mme [U] [E] se rattache directement au secteur «'exploitation agricole'» de l'établissement, il en résulte que les dispositions du code du travail relatives au licenciement économique s'appliquent bien en l'espèce.
Contrairement à ce que retiennent les premiers juges, il ne peut se déduire seulement, d'une part, d'une attestation délivrée par Pôle emploi datée du 06 mai 2015 relative à un refus d'adhésion au contrat de sécurisation professionnelle du 06 mai 2015 selon laquelle 'votre ancien employeur ne relève pas du champ d'application du licenciement économique', d'autre part, d'un second courrier du même organisme, du 23 juillet 2015, selon lequel la Direction de la Réglementation de Pôle emploi a confirmé sa position, que l'EPLEFA ne pouvait pas licencier Mme [U] [E], sans avoir analysé préalablement la nature juridique des relations juridiques existant entre l'Etablissement et la salariée et n'étant pas compétent pour trancher le litige.
Il convient dès lors d'infirmer le jugement dans ce sens.
Sur la procédure de licenciement économique :
Selon l'article L1233-3 du code du travail dans sa version applicable, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail,
La réorganisation de l'entreprise constitue un motif économique de licenciement si elle est effectuée pour en sauvegarder la compétitivité ou celle du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient, et répond à ce critère la réorganisation mise en oeuvre pour prévenir des difficultés économiques à venir liées à des évolutions technologiques et leurs conséquences sur l'emploi, sans être subordonnée à l'existence de difficultés économiques à la date du licenciement ; les modifications des contrats de travail résultant de cette réorganisation ont eux-mêmes une cause économique ce qui implique que la compétitivité soit déjà atteinte ou menacée de manière certaine.
Il revient à l'employeur, sur qui repose la charge de la preuve, de produire des documents ou autres éléments qui établissent des signes concrets et objectifs d'une menace sur l'avenir de l'entreprise, autrement dit de démontrer le caractère inéluctable des difficultés économiques si la situation reste en l'état.
La seule intention de l'employeur de faire des économies ou d'améliorer la rentabilité de l'entreprise ne peut constituer une cause de rupture du contrat de travail.
Bien que le juge n'ait pas à se substituer à l'employeur dans les choix économiques, lesquels relèvent de son pouvoir de gestion, il doit toutefois vérifier que l'opération était nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise.
En vertu de l'article L1233-16 du code du travail, la lettre de licenciement comporte l'énoncé des motifs économiques invoqués par l'employeur ; cette obligation légale a pour objet de permettre au salarié de connaître les limites du litige quant aux motifs énoncés.
Si la lettre de licenciement doit énoncer la cause économique du licenciement telle que prévue par l'article L1233-1 du code du travail et l'incidence matérielle de cette cause économique sur l'emploi ou le contrat de travail du salarié, l'appréciation de l'existence du motif invoqué relève de la discussion devant le juge en cas de litige.
Il en résulte que la lettre de licenciement qui mentionne que le licenciement a pour motifs économiques la suppression de l'emploi du salarié consécutive à la réorganisation de l'entreprise justifiée par des difficultés économiques et/ou la nécessité de la sauvegarde de sa compétitivité répond aux exigences légales, sans qu'il soit nécessaire qu'elle précise le niveau d'appréciation de la cause économique quand l'entreprise appartient à un groupe ; c'est seulement en cas de litige qu'il appartient à l'employeur de démontrer dans le périmètre pertinent, la réalité et le sérieux du motif invoqué.
Selon l'article 1232-6 alinéa 2 du même code, dans sa rédaction applicable, la lettre de licenciement comporte l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur.
En l'espèce, Mme [U] [E] a été convoquée, par lettre datée du 03 février 2015, à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour motif économique par lettre ainsi motivée:
'Dans le cadre du projet de licenciement pour motif économique dont vous faîtes l'objet, vous avez la possibilité de bénéficier d'un contrat de sécurisation professionnelle aux conditions définies dans le document d'information remis.
Ce projet de licenciement repose sur les motifs suivants :
Le chiffre d'affaires généré par le Caveau ne permet pas d'assumer la masse salariale affectée.
Le chiffre d'affaires s'élevait à 160 000 euros en 2013, lié notamment à une activité connexe à hauteur de 30 000 euros.
Pour 2014, le chiffre d'affaires s'élève à 125 000 euros. Les projections pour 2015 laissent à penser que le chiffre d'affaires sera ramené à 110 000/120 000 euros.
Par ailleurs, la marge bute est de l'ordre de 12 000 euros par an, soit environ 10%, et ne permet ainsi pas de couvrir le salaire d'un salarié à temps complet.
Enfin, le nombre de visiteurs au caveau se situe, les jours de grande affluence, entre 5 et 7 par jour.
Au regard de ces éléments, nous ne disposons effectivement pas des ressources financières, de quelque nature que ce soit, pour assurer le maintien de votre poste en l'état.
Nous sommes contraints de supprimer pour moitié la masse salariale affectée au Caveau, soit de maintenir uniquement 0,5 salarié en équivalent temps plein.
Au regard de ces éléments et afin d'assurer la pérennité de votre poste, nous vous avions proposé la modification de vos fonctions sous respect d'un délai de réflexion d'un mois.
Ainsi, il était envisagé que votre temps de travail soit réparti pour moitié à l'activité Caveau, et pour l'autre moitié aux travaux de vignes, eu égard notamment à votre statut d'ouvrier horticole.
Par retour du courrier, vous nous avez fait connaître votre refus.
Au regard de ces éléments, nous sommes amenés à envisager la suppression du poste que vous occupez.
Nous avons engagé des recherches de reclassement en interne.
A ce titre, nous vous avons proposé le reclassement suivant : intitulé poste : salariée agricole affectée au caveau, classification : coef 160, convention collective applicable: exploitation agricole du Gard, durée du travail : 24 heures hebdomadaires répartis de la façon suivante : salaire : taux horaire de 11,27 euros, lieu de travail [Adresse 5], date de prise de poste : lundi 19 janvier 2015.
Vous nous avez fait part de votre refus d'occuper ce poste.
Nous avons étendu nos recherches de reclassement en externe auprès de la FDSEA, de la chambre de l'agriculture et de Pôle emploi, sans succès.
Nous constatons donc l'impossibilité absolue d'assurer votre reclassement en interne comme en externe.
Nous sommes par conséquent contraints d'engager une procédure en vue de votre éventuel licenciement pour motif économique, ce que nous vous avons exposé lors de notre entretien préalable de ce jour.
Nous vous rappelons que vous disposez d'un délai de 21 jours pour nous faire part de votre adhésion au contrat de sécurisation professionnelle en nous retournant le bulletin d'adhésion figurant dans le dossier. En cas d'adhésion, votre contrat de travail sera réputé rompu à la date d'expiration de ce délai de réflexion, soit le 25 février 2014.
En cas d'adhésion au contrat de sécurisation professionnelle, il vous sera alors versé, outre l'indemnité compensatrice de congés payés, l'indemnité de licenciement à laquelle votre ancienneté ouvre droit (éventuellement et le surplus de l'indemnité de préavis pour la part excédant les trois mois reversés au Pôle emploi). De même conformément à l'article L1233-45 du code du travail, vous pourrez bénéficier en pareil cas, d'une priorité de réembauchage durant un délai d'un an à compter de la date de rupture de votre contrat de travail. Pour ce faire, vous devrez nous faire part de votre désir d'user de cette priorité au cours de cette année. Cette priorité concerne les emplois compatibles avec votre qualification actuelle ou avec celles que vous viendriez à acquérir sous réserve que vous nous ayez informé de celles-ci.'
En l'espèce, la lettre de licenciement fait état de difficultés économiques, avec notamment une baisse significative du chiffre d'affaires, et un montant de la marge brute 'de l'ordre de 12 000 euros par an, soit environ 10%' qui ne 'ne permet ainsi pas de couvrir le salaire d'un salarié à temps complet', de la nécessité pour la société d'envisager une restructuration de son activité ainsi que de l'incidence matérielle de ces causes économiques consistant dans la suppression du poste occupé par la salariée.
Il s'ensuit que sa motivation répond aux exigences légales susvisées.
En revanche, compte tenu de la contestation par la salariée des difficultés économiques alléguées, il appartient à l'employeur de démontrer leur réalité.
La preuve de l'existence de difficultés économiques au moment de la rupture est suffisamment rapportée par l'employeur, lequel verse aux débats un rapport de l'agent comptable sur l'exercice 2015 qui met en évidence un solde du compte de résultat débiteur, la perte s'élevant à 95 134,90 euros, et les bilans de l'établissement pour cette même année qui font état de résultats contrastés selon les centres qui le composent : pour l'Epl (établissement public local), le lycée et le Cfa (centre de formation des apprentis), l'exploitation présente un bénéfice de 15 478,54 euros, de 10 811,81 euros et de 71 280,43 euros, tandis que le Cfppa (centre de formation professionnelle et de promotion agricole), présente un exercice comptable déficitaire de 192 705,68 euros et ce, malgré une baisse des charges notamment des charges d'exploitation à hauteur de 9,48% entre 2014 et 2015.
Cette situation s'explique essentiellement, selon les précisions apportées par l'agent comptable, par une baisse des produits de 13,17% en 2015 laquelle résulte d'une diminution des subventions d'exploitation elle-même liée à une baisse des effectifs.
L'agent comptable conclut à la nécessité de réduire les charges et d'augmenter les recettes notamment par le recrutement en matière de formations sur les différents centres de l'Epl.
Enfin, le fonds de roulement de l'établissement qui mesure les ressources dont l'entreprise dispose à moyen et long terme pour financer son exploitation courante, a évolué défavorablement entre 2014 et 2015 ( - 141 520,96 euros ) et, au sein de l'établissement celui du Domaine Donadille n'a pas progressé de façon significative, passant de - 339 735,96 euros à - 302 447,54 euros sur la même période.
L'Etablissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricole de [Localité 7] [Localité 8] justifie par ailleurs avoir déjà été confronté à des difficultés financières importantes dans un passé récent, enregistrées entre 2010 et 2012, lesquelles s'étaient traduites par des déficits budgétaires et comptables.
Mme [U] [E] soutient que l'EPLEFPA [Localité 7] [Localité 8] n'a pas en réalité voulu supprimer son poste mais l'évincer purement et simplement et produit aux débats une offre d'emploi déposée par l'établissement en mars 2015 'profil de poste : salarié polyvalent à compétence commerciale affirmée : fonction commerciale pour 60% du temps, gestion du caveau, gestion de la clientèle existante, gestion des stocks, des commandes et des livraison, une fonction technique pour 40% du temps, il complètera son emploi du temps avec le travail de cave et il viendra renforcer saisonnièrement les travaux au vignoble, contrat à durée indéterminée à temps plein avec période d'essai'.
Cette offre d'emploi ne correspond manifestement pas au poste de régisseur que Mme [U] [E] occupait jusqu'à la rupture du contrat, mais au poste polyvalent que l'établissement lui avait proposé en novembre 2014, qu'elle avait refusé et qui avait été accepté par une autre salariée.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la situation économique de l'EPLEFA justifiait une mesure de réorganisation, qu'outre qu'elle n'est pas abusive, la rupture n'apparaît pas brutale ni vexatoire.
Les demandes formées par Mme [U] [E] sur ce point seront donc rejetées et le jugement entrepris sera infirmé en ce sens.
Sur l'obligation de reclassement :
Aux termes de l'article L. 1233-4 du code du travail, dans sa rédaction applicable, le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie (al. 1). Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure (al. 2). Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises (al. 3).
L'article L. 1233-4-1 précise les modalités selon lesquelles les offres de reclassement à l'étranger sont proposées au salarié lorsque l'entreprise ou le groupe comporte des établissements en dehors du territoire national.
Il en résulte qu'un licenciement économique ne peut reposer sur une cause réelle et sérieuse que s'il a été précédé d'une recherche effective et sérieuse de reclassement.
La preuve de l'impossibilité de reclasser le salarié repose sur l'employeur qui doit justifier du sérieux de ses démarches, et, le cas échéant, qu'il s'est trouvé dans l'impossibilité de procéder à son reclassement.
Pour autant, l'obligation de reclassement qui incombe à l'employeur n'est pas une obligation de résultat, mais une obligation de moyen renforcée; l'employeur n'est ainsi pas tenu de proposer un poste qui n'est pas disponible, ni de créer un poste nouveau sans réelle utilité ou encore incompatible avec le bon fonctionnement de l'entreprise.
Si la preuve de l'exécution de l'obligation de reclassement incombe à l'employeur et s'étend au groupe quand l'entreprise en fait partie, il appartient au juge, en cas de contestation sur la consistance ou le périmètre du groupe de reclassement, de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments qui lui sont soumis par les parties.
Au soutien de sa demande tendant à voir considérer le licenciement sans cause réelle et sérieuse, la salariée prétend que l'employeur n'aurait pas respecté l'obligation de reclassement qui lui incombait.
En l'espèce, l'EPLEFPA [Localité 7] [Localité 8] justifie avoir proposé à Mme [U] [E] une modification de ses fonctions par courrier en date du 24 novembre 2014 laquelle consistait à répartir son temps de travail entre la vente au caveau et les travaux de vigne, sa rémunération et les avantages dont elle bénéficiait étant maintenus aux mêmes conditions, que ce poste a été refusé par la salariée mais a été accepté par une autre salariée, Mme [M] [D] qui a signé le contrat de travail le 17 août 2015 (employée polyvalente avec la qualification ouvrier hautement qualifié, coefficient 150 de la convention collective applicable).
L'employeur dit avoir étendu ses recherches de reclassement, en vain, en externe, auprès de la FDSEA et de la chambre de l'agriculture et de Pôle emploi.
Il s'en déduit que l'EPLEFPA n'a pas manqué à son obligation de reclassement et la demande de Mme [U] [E] à ce titre sera donc rejetée.
Sur les demandes formées par Mme [U] [E] pour manquement de l'employeur à son obligation de délivrance de l'attestation pôle emploi :
L'article R1234-9 du code du travail, dans sa version applicable, dispose que l'employeur délivre au salarié, au moment de l'expiration ou de la rupture du contrat de travail, les attestations et justifications qui lui permettent d'exercer ses droits aux prestations mentionnées à l'article L. 5421-2 et transmet sans délai ces mêmes attestations à Pôle emploi.
Les employeurs de dix salariés et plus effectuent cette transmission à Pôle emploi par voie électronique, sauf impossibilité pour une cause qui leur est étrangère, selon des modalités précisées par un arrêté du ministre chargé de l'emploi. (1)
L'effectif des salariés est celui de l'établissement au 31 décembre de l'année précédant l'expiration ou la rupture du contrat de travail. Pour les établissements créés en cours d'année, l'effectif est apprécié à la date de leur création. (1)
En l'espèce, il ressort des pièces produites aux débats, notamment d'un courrier du 06 mai 2015, que Pôle emploi a refusé de 'donner une suite favorable' à la demande de Mme [U] [E] d'allocation de sécurisation professionnelle au motif qu'il n'est pas 'compétent pour gérer l'indemnisation des bénéficiaires du contrat de sécurisations dont l'ancien employeur ne relève pas du champ d'application de l'assurance chômage', et qu'il appartient au lycée agricole Nîme [Localité 8] de l'indemniser.
Or, selon les éléments développés précédemment, il apparaît que c'est à tort que le Pôle emploi s'est déclaré incompétent.
Dès lors que l'EPLEFA a remis dans les délais requis l'attestation Pôle emploi, il ne peut pas lui être reproché d'avoir manqué à ses obligations à ce titre.
Pour permettre une régularisation de la situation de Mme [U] [E], l'EPLEFA a modifié les motifs de la rupture du contrat en précisant 'pour l'intérêt du service', sans pour autant que cette rectification ne soit un aveu de son incompétence en matière de licenciement économique comme cela a été démontré précédemment.
C'est donc à tort que les premiers juges ont indiqué que 'il ressort de ces constatations que les envois tardifs à Mme [U] [E] d'attestations Pôle emploi qui comportaient des mentions erronées concernant le motif de rupture du contrat de travail de la requise présentait bien un caractère intentionnel et a causé un préjudice financier et administratif à cette dernière...'.
A défaut pour Mme [U] [E] de rapporter la preuve que l'EPLEFA a commis une manquement, sa demande de dommages et intérêts sera rejetée.
Le jugement entrepris sera donc infirmé en ce sens.
Sur la demande formée par Mme [U] [E] au titre du harcèlement moral :
Aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
En vertu de l'article L. 1154-1 du code du travail, lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement.
Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail.
Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Sous réserve d'exercer son office dans les conditions qui précèdent, le juge apprécie souverainement si le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et si l'employeur prouve que les agissements invoqués sont étrangers à tout harcèlement.
En l'espèce, Mme [U] [E] soutient avoir fait l'objet d'un harcèlement moral caractérisé par des critiques incessantes du directeur d'exploitation M. [O] [L] en poste depuis 2011 et des pressions qu'il a exercées à son encontre, de modifications de son contrat de travail notamment sur les heures et missions de travail alors qu'elle revenait d'un arrêt maladie, la disparition d'effets personnels et le déplacement de son bureau sans en avoir été avisée préalablement, comportements qui sont à l'origine d'une dépression à compter du 19 septembre 2014 qui a nécessité un lourd traitement.
Au soutien de ses déclarations, Mme [U] [E] verse aux débats :
- des avis d'arrêts de travail maladie datés entre le 19 septembre 2014 et le 29 mai 2015, un avis d'arrêt de travail de prolongation maladie du 10 juillet 2015 prescrivant un arrêt jusqu'au 21 août 2015, un avis d'arrêt de travail maladie de prolongation du 21 août 2015 prescrivant un arrêt jusqu'au 10 septembre 2015 et mentionnant au titre des renseignements médicaux 'anxio dépressive suivi psychologique régulier',
- un protocole de soins signé le 24 décembre 2014 pour 'dépression nerveuse sévère' lequel mentionne que Mme [U] [E] est 'très angoissée, dépressive, suivi psychologique nécessaire avec Dr [A] [Y] à [Localité 4]',
- une attestation non conforme aux dispositions de l'article 202 du code de procédure civile rédigée par M. [N] [B] qui se présente comme un ancien salarié du [Adresse 5] et qui indique que 'depuis mars 2003 il a été victime de harcèlement au travail par mon directeur d'exploitation et aussi pour que j'accepte une forme de licenciement qui n'était pas à mon avantage...que ma collègue de travail [U] [E] subit les mêmes pressions et même davantage car c'est bien plus facile avec une femme... la situation pour elle semble ne pas s'améliorer bien au contraire. Je pense que si rien n'est fait pour empêcher le directeur de lui mettre une pression quasi quotidienne avec parfois des menaces sur son emploi, elle sombrera sans doute dans la dépression. Je pense qu'il faut faire quelque chose contre ce genre d'attitude qui tend à briser une personne et à l'humilier',
- une attestation établie par M. [J] [T] du 09 avril 2015 qui certifie 'avoir reçu dans mon bureau le 19 septembre à 08h00 Mme [U] [E] en pleurs. Selon celle-ci elle subissait une pression énorme depuis quelques temps je lui ai donc conseillé vivement d'aller consulter un médecin et de s'arrêter, car elle n'était pas capable d'assumer son travail vu son état.',
- un courrier rédigé par l'appelante daté du 08 septembre 2014 adressé à l'inspection du travail, pour signaler des 'faits graves' dans son travail dans lequel elle indique 'à la fin du mois d'avril le 28, victime d'une chute à mon domicile...j'ai un arrêt de travail de 3 mois. Quelques jours avant la fin de cet arrêt, j'ai été informée par le responsable de service, par lettre recommandée avec accusé de réception que j'étais d'autorité mise en congé imposé pour 4 semaines... à mon retour, le 26 août, j'ai constaté la disparition de mes affaires, documents en cours au moment de mon absence, de tous les documents qui étaient sur mon bureau, de mon matériel...J'ai retrouvé tout cela dans un coin. J'ai été immédiatement convoquée dans le bureau du responsable. Au cours de l'entretien, j'ai été informée d'importantes modifications de mon poste de travail, et de changements d'horaires d'ouverture de la boutique. J'ai eu la surprise d'apprendre que l'on me changeait de bureau pour la partie administrative de mon emploi, me reléguant à l'étage. Mon responsable m'a signifié : le retrait de mon autonomie dans l'organisation quotidienne de mon travail me signalant que je devais à l'avenir respecter ses seules consignes, l'obligation d'entretenir et désherber les espaces verts autour du caveau, tâches jusque là effectuées par les professeurs et les élèves...l'obligation d'effectuer le ménage du caveau jusqu'alors fait par les agents d'entretien du lycée, l'application de nouvelles règles impopulaires auprès de la clientèle, la modification des horaires d'ouverture du caveau : fermeture le mardi après midi pour profiter de ce dégagement horaire afin de m'imposer de nouvelles tâches, ma participation aux 'foires à vins 'ou marché de pays tard dans la soirée, pendant les week-end refusant de me payer ces heures en heures supplémentaires pour les récupérer en heures normales, au cours de cet entretien, j'ai été humiliée : pour mon responsable, mon temps de travail effectif ne représente que 30% de mes 35 heures en ajoutant que lui et ses collègues pensent que le chiffre d'affaires du caveau ne justifie pas mon salaire'.
- un second courrier rédigé par Mme [U] [E] daté du 08 septembre 2014 adressé au Docteur [P] pour lui faire part des pressions qu'elle subit par son employeur depuis plusieurs années, reprenant les griefs évoqués dans le courrier précédent, et précisant 'depuis cet entretien, je ne dors que 2 à 3 heures par nuit, j'ai un noeud dans l'estomac dès que je me rends au travail ( mes mains tremblent, mon coeur bat plus vite)...Cet acharnement m'amène aussi à un autre constat : il y a 3 ans, nous étions 4 employés sur l'exploitation et l'un après l'autre nous avons été traités de la même manière : l'un a été licencié, l'autre est en cours de licenciement, le 3ème est en départ volontaire; je suis la dernière...Je pense ne pas mériter le mépris dont fait preuve à mon égard d'autant qu'en 24 ans aucune faute professionnelle n'a pu m'être reprochée. Je souhaite tout faire pour ne pas tomber en dépression',
- un courrier de Mme [U] [E] du 06 mars 2012 adressé au Docteur [P] pour lui signaler être victime tout comme ses collègues de l'exploitation agricole du [Adresse 5] de pressions lorsqu'ils se trouvent en arrêt maladie, les menaces proférées par le directeur de 'prendre des prestations de service pour remplacer le personnel si cela doit se reproduire...', que le 18 février elle n'a pas osé consulter son médecin pour une grippe qui a évolué de façon péjorative de peur de s''arrêter', et souhaite malgré tout réagir avec le nouveau directeur 'avant qu'il ne se croit tout permis et qu'il n'aille trop loin',
- un courrier de la salariée datée du 12 mars 2012 adressé à l'inspection du travail dans lequel elle évoque les mêmes griefs que ceux évoqués dans la lettre adressée au médecin, et précisant avoir reçu des menaces du directeur pour le cas où elle refuserait de signer un nouveau contrat de travail qui n'est pas à son 'avantage' ,
- un courrier de la salariée daté du 16 septembre 2014 adressé à son employeur dans lequel elle indique vouloir alerter sur les pressions dont elle fait l'objet dans lequel elle formule des griefs évoqués dans le courrier du 08 septembre 2014 et avoir été humiliée régulièrement par des reproches sur son temps de travail effectif le 26 août, le 12 septembre et le 16 septembre,
- un courrier de Mme [C] [X], assistante sociale rattachée au Ministère de l'agriculture de l'agroalimentaire et de la forêt du 03 octobre 2014 adressé à Mme [U] [E] qui mentionne avoir été alertée par la direction du lycée de sa situation d'arrêt de travail et des difficultés actuelles sur l'exploitation, et qu'elle se tient à sa disposition pour un éventuel entretien ; un mail adressé par l'assistante sociale adressé à Mme [U] [E] le 06 septembre 2012 dans lequel elle l'informe qu'elle sera présente dans les locaux du lycée pour assurer une permanence le 11 septembre,
- un courrier du Docteur [P], du 27 novembre 2014 qui indique que Mme [U] [E] présente un état d'anxiété qu'elle attribue aux difficultés personnelles qu'elle rencontre dans son entreprise, et qui lui demande son avis sur la possibilité d'une reprise d'activité dans l'entreprise à moyen terme et sur les conséquences envisageables sur son état de santé,
- un certificat médical établi le 04 janvier 2016 par le docteur [Y] [A] qui atteste que Mme [U] [E] bénéficie d'une prise en charge au centre médico-psychologique de [Localité 4] depuis le 16 octobre 2014, qu'elle présente un état anxio-dépressif directement réactionnel aux difficultés professionnelles encourues.
Ces éléments pris dans leur ensemble ne laissent pas présumer l'existence d'un harcèlement moral.
Les pièces médicales si elles établissent l'état de fragilité psychologique dans lequel Mme [U] [E] s'est trouvée à compter de septembre 2014, elles ne permettent de connaître les causes de la dépression et donc de présumer un harcèlement.
Le courrier du Docteur [P] du 27 novembre 2014, le certificat médical du 04 janvier 2016 et le protocole de soins ne font que reprendre les doléances de Mme [U] [E] et ne permettent en aucun cas d'établir un lien direct entre des faits de harcèlement et l'état de santé dégradé de Mme [U] [E].
Le courrier et le courriel de l'assistante sociale établissent que Mme [U] [E] rencontre des difficultés personnelles et que l'employeur lui a transmis des informations sur la situation de Mme [U] [E] dans le but de l'aider.
Les deux attestations se contentent d'affirmer que Mme [U] [E] a subi un harcèlement et des pressions de la part de son employeur et qu'elle était fatiguée sur le plan psychologique, sans pour autant donner des faits précis et circonstanciés susceptibles d'être constitutifs dudit harcèlement.
Les courriers que Mme [U] [E] a adressés au Docteur [P] et à l'inspection du travail ne sont corroborés par aucun élément de nature à corroborer les faits qu'elle dénonce de la part de son employeur.
Les éléments que Mme [U] [E] produit aux débats ne constituent donc pas des éléments suffisants de nature à laisser présumer l'existence d'un harcèlement faute pour le salarié de rapporter l'existence d'agissements répétés ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
La demande formée par Mme [U] [E] à ce titre sera donc rejetée et le jugement entrepris confirmé sur ce point.
Sur la demande de Mme [U] [E] au titre des heures supplémentaires :
Aux termes de l'article L. 3171-2 alinéa 1er du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l'article 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016, l'employeur tient à la disposition de l'inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.
Selon l'article 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.
Il résulte de ces dispositions qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, la charge de la preuve n'incombe spécialement à aucune des parties; il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.
En l'espèce, Mme [U] [E] soutient que l'EPLEFA [Localité 7] [Localité 8] lui est redevable d'une somme de 421,22 euros correspondant à 29,5 heures supplémentaires effectuées en 2014, outre 42,12 euros de congés payés y afférents et produit à l'appui de ses prétentions :
- un courrier qu'elle a adressé à son employeur daté du 16 septembre 2014 dans lequel elle indique que 'sur 29,5 sup effectuées entre le 1er janvier et aujourd'hui, j'ai récupéré comme il me l'a été demandé 20 heures. On me doit dont 7,5 heures sup à 125% et 2 heures sup à 150% plus la majoration de 25% pour les 20 heures récupérées',
- un décompte du temps de travail réalisé entre le 1er janvier et le 29 décembre 2014 dans lequel Mme [U] [E] distingue les heures effectuées, les heures dues, les heures récupérées en heures normales à déduire des heures supplémentairees, la quantité d'heures supplémentaires, les heures supplémentaires à récupérer de la 35ème à la 43ème heure avant majoration de 125%, les heures supplémentaires à récupérer de la 44ème heure à la 48ème heure avant majoration de 150%.
Il apparaît que les éléments ainsi produits sont sufisammement précis pour permettre à l'employeur d'y répondre.
Or, force est de constater que l'EPLEFA [Localité 7] [Localité 8] se contente d'indiquer que les pièces ainsi communiquées sont peu précises et n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause sérieusement les éléments ainsi apportés par la salariée.
Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point.
Sur la demande relative à l'exécution déloyale du contrat de travail par l'EPLEFA [Localité 7] [Localité 8] :
L'articles L1221-1 et L1222-1 du code du travail dispose que le contrat de travail est soumis règles de droit commun et qu'il doit être exécuté de bonne foi.
En l'espèce, au vu des éléments qui précèdent, sur l'ensemble des manquements soulevés par Mme [U] [E], seul celui se rapportant au non paiement d'heures supplémentaires pour l'année 2014 est établi.
S'agissant de la prime de responsabilité pour l'année 2014, Mme [U] [E] établit que l'employeur lui a annoncé son versement prochain par un courrier du 03 avril 2015 mais ne demande pas pour autant la condamnation de l'EPLEFPA de [Localité 7] [Localité 8] au paiement de cette somme.
S'agissant de la période de carence passée de un jour à trois jours et qui lui a été appliquée dès le mois d'octobre 2014, Mme [U] [E] soutient ne pas en avoir été informée alors qu'elle produit un courrier qui lui est adressé, daté du 1er septembre 2014 ayant pour objet la subrogation aux salariés en arrêt de travail avec effet au 1er janvier 2015 et justifie que l'employeur a appliqué cette nouvelle règle par une carence de 3 jours en octobre 2014 comme en atteste la production du bulletin de salaire pour ce mois.
Néanmoins, ces seuls éléments ne permettent pas de retenir la mauvaise foi de l'employeur dans l'exécution du contrat de travail qui le lie à la salariée depuis 1991, de sorte que les demandes formées par Mme [U] [E] à ce titre seront rejetées.
Le jugement entrepris doit être en conséquence infirmé en ce sens.
Au vu de l'ensemble de ces considérations, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné l'EPLEFPA [Localité 7] [Localité 8] à payer à Mme [U] [E] la somme de 421,22 euros au titre du rappel de salaire au titre des heures supplémentaires ainsi que la somme de 42,12 euros au titre des congés payés afférents, et de l'infirmer pour le surplus.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière prud'homale et en dernier ressort;
Confirme le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Nîmes le 04 mars 2019 en ce qu'il a condamné l'EPLEFPA [Localité 7] [Localité 8] à payer à Mme [U] [E] la somme de 421,22 euros au titre d'un rappel de salaires pour des heures supplémentaires ainsi que la somme de 42,12 euros au titre des congés payés afférents,
L'infirme pour le surplus,
Y ajoutant,
Déboute Mme [U] [E] du surplus de ses prétentions,
Condamne Mme [U] [E] à payer à l'EPLEFPA [Localité 7] [Localité 8] la somme de 600 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel,
Rejette les demandes plus amples ou contraires,
Condamne Mme [U] [E] aux dépens de la procédure d'appel.
Arrêt signé par Monsieur ROUQUETTE-DUGARET, Président et par Madame OLLMANN, Greffière.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,