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24/05/2022 | FRANCE | N°19/01356

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 5ème chambre sociale ph, 24 mai 2022, 19/01356


ARRÊT N°



N° RG 19/01356 - N° Portalis DBVH-V-B7D-HJXH



EM/DO



CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'AVIGNON

28 février 2019



RG :17/00403





[N]



C/



S.A. SNEF































COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH



ARRÊT DU 24 MAI 2022







APPELANT :



Monsie

ur [M] [N]

né le 24 Février 1985 à [Localité 3] TUNISIE

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Représenté par Me Alexandra BOUILLARD, avocat au barreau d'AVIGNON





INTIMÉE :



S.A. SNEF

[Adresse 2]

[Adresse 2]



Représentée par Me Stéphane GUILLEMIN de la SELARL GUILLEMIN, avocat au barreau de NIMES

Représentée p...

ARRÊT N°

N° RG 19/01356 - N° Portalis DBVH-V-B7D-HJXH

EM/DO

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'AVIGNON

28 février 2019

RG :17/00403

[N]

C/

S.A. SNEF

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH

ARRÊT DU 24 MAI 2022

APPELANT :

Monsieur [M] [N]

né le 24 Février 1985 à [Localité 3] TUNISIE

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Alexandra BOUILLARD, avocat au barreau d'AVIGNON

INTIMÉE :

S.A. SNEF

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Stéphane GUILLEMIN de la SELARL GUILLEMIN, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Géraud DE MAINTENANT de la SCP CABINET GRAVIER ET FRIBURGER, avocat au barreau de MARSEILLE

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 01 Mars 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère

GREFFIER :

Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

à l'audience publique du 22 Mars 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 24 Mai 2022

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 24 Mai 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

M. [M] [N] a été engagé par la Sa Snef en qualité d'ouvrier professionnel, coefficient 185, niveau II dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à temps complet signé le 08 décembre 2008.

A compter de 2011, la Sa Snef a demandé à M. [M] [N] des interventions dans le domaine de la climatisation, ventilation et chauffage (Cvc).

Souhaitant obtenir la qualification de technicien Cvc, M. [M] [N] a formulé auprès de son employeur, le 28 avril 2011, une demande écrite en ce sens. Le 27 mai 2011, la Sa Snef lui répond qu'il est considéré comme électricien et devait s'adresser directement au Fongecif pour obtenir un changement de compétence.

La Sa Snef a adressé à M. [M] [N] un premier avertissement le 15 juin 2015 au motif qu'il a refusé à plusieurs reprises de réaliser des interventions préventives sur Cvc, puis un second avertissement le 04 février 2012 au motif que le salarié a été victime d'un accident de trajet avec un véhicule appartenant à l'entreprise.

Par courrier du 09 octobre 2015, la Sa Snef a convoqué M. [M] [N] à un entretien préalable à une sanction disciplinaire prévu le 22 octobre 2015, à l'issu duquel M. [M] [N] n'a pas été sanctionné.

La Sa Snef a convoqué M. [M] [N] à un entretien préalable prévu le 14 décembre 2016 à l'issu duquel une mise à pied de trois jours a été notifiée au salarié le 13 janvier 2017 au motif qu'il a refusé de façon persistante de se conformer aux directives de sa hiérarchie.

Sollicitant la résiliation judiciaire de son contrat de travail, M. [M] [N] a saisi le conseil de prud'hommes d'Avignon le 04 août 2017 à cet effet, lequel, suivant jugement du 28 février 2019, a :

- dit et jugé que la Sa Snef n'a pas commis de fautes suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat à durée indéterminée,

- débouté M. [M] [N] de l'ensemble de ses demandes,

- débouté la Sa Snef de ses demandes,

- dit que les dépens éventuels seront à la charge de M. [M] [N].

Suivant déclaration envoyée par voie électronique le 03 avril 2019 M. [M] [N] a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 01 mars 2022 et a fixé l'affaire à l'audience du 15 mars 2022 puis déplacée à celle du 22 mars 2022 à laquelle elle a été retenue.

M. [M] [N] conclut à l'infirmation du jugement dont appel et demande à la cour de :

- déclarer son action bien fondée,

A titre principal,

Sur l'exécution du contrat :

- déclarer que la Sa Snef a lourdement manqué à ses obligations contractuelles à son égard de façon répétée depuis 2011,

- condamner la Sa Snef à l'indemniser à hauteur de 14 593 euros en réparation du préjudice moral subi,

Sur la rupture du contrat :

- prononcer la requalification de la rupture du contrat de travail aux torts exclusifs de la Sa Snef à effet au jour de la rupture effective de son contrat, soit au 22 mai 2019,

- déclarer que cette requalification prendra les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- condamner la Sa Snef à lui payer la somme de 43 779 euros soit 18 mois de salaire en indemnisation du préjudice né de la résiliation judiciaire de son contrat,

- enjoindre à la Sa Snef de lui remettre sous astreinte de 50 euros par jour de retard sous huitaine à compter de la notification du jugement à intervenir :

- son solde de tout compte, l'attestation pôle emploi mentionnant une rupture aux torts exclusifs de la société et son certificat de travail,

- déclarer que la cour se réserve la faculté de liquider les astreintes par lui instituées,

- rappeler l'exécution provisoire de droit qui s'attache aux dispositions qui précèdent, en application des articles R1454-14 et R1454-28 du code du travail,

- déclarer que les sommes allouées au titre d'indemnité compensatrice de congés payés de rappel de salaires, d'indemnité compensatrice de préavis conventionnel, d'incidence de congés payés et d'indemnité conventionnelle de licenciement produiront intérêt de droit à compter de la demande en justice, avec capitalisation,

A titre subsidiaire,

- désigner avant dire droit tel expert qu'il plaira à la cour dans le domaine du chauffage de la ventilation et de la climatisation avec pour mission d'entendre les parties, de se faire délivrer tous documents utiles, et de dire si les missions imparties par la Sa Snef dans le domaine de la Cvc relevaient de ses attributions et s'il en avait les habilitations requises,

En tout état de cause,

- débouter la Sa Snef de l'ensemble de ses prétentions,

- condamner la Sa Snef au paiement de la somme de 2 000 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Il fait valoir que la Sa Snef lui impose des missions qui sont totalement hors de son champ de compétence sans démontrer qu'il en a la qualification et que la société le sanctionne systématiquement alors qu'il ne peut pas réaliser ces missions n'ayant pas la formation de frigoriste. Il fait observer que la remise des certificats de manipulation de fluide frigorigène ou d'étanchéité de circuit frigorifique sont des interventions qui sont réglementées et nécessitent notamment une véritable connaissance du matériel. Il considère qu'à défaut de disposer d'une attestation d'aptitude correspondant aux types d'activités exercées et aux types d'équipements utilisés délivrée par un organisme certifié ou d'un certificat équivalent à l'attestation d'aptitude, les demandes d'interventions sont illégales. Il ajoute que la Sa Snef ne produit aucune fiche de poste à laquelle il serait soumis et affirme, sans aucun fondement contractuel, que la maintenance Cvc relevait de ses attributions tout en lui ayant expressément écrit qu'il n'avait aucune habilitation pour intervenir dans ce domaine, de sorte que la société engage sa responsabilité contractuelle à son égard.

Il prétend que la Sa Snef a violé son obligation de formation dans la mesure où elle lui a proposé une formation qui imposait des pré-requis qu'il ne disposait pas.

Il soutient que la Sa Snef a violé son obligation de sécurité de résultat en l'exposant potentiellement à un danger lors d'interventions sur des climatisations et du chauffage sans qu'il en ait la moindre capacité, précisant avoir exercé un droit de retrait pour lequel il a été sanctionné. Il indique avoir subi également des pressions injustifiées et récurrentes de sa hiérarchie depuis 2011, le poussant ainsi à la démission en lui adressant un avertissement le jour où il a été victime d'un accident de la circulation.

Il dit avoir subi des préjudices financier et moral incontestables en considération desquels il sollicite une indemnisation à hauteur de 14 593 euros correspondant à six mois de salaire bruts.

Il considère que l'annulation de la mesure disciplinaire du 13 janvier 2017 doit être prononcée.

Elle conteste la prescription des griefs relevés à l'encontre de la Sa Snef, les manquements s'inscrivant dans la durée et la continuité, qu'en tout état de cause, si certains faits sont prescrits, ils devront être pris en compte comme éléments contextuels du dossier pour se forger une conviction.

Il considère que la Sa Snef n'a pas rendu possible la poursuite de la relation contractuelle, a prononcé à son encontre plusieurs sanctions disciplinaires injustifiées, ce qui justifie une résiliation judiciaire du contrat aux torts de l'employeur laquelle doit produire les mêmes effets qu'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La Sa Snef conclut à la confirmation du jugement entrepris et demande à la cour de :

- constater qu'elle n'a commis aucun manquement,

- constater que la mise à pied notifiée le 13 janvier 2017 est parfaitement fondée,

- confirmer la décision entreprise,

- débouter M. [M] [N] de l'ensemble de ses demandes,

y ajoutant,

- condamner M. [M] [N] à lui verser la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile au titre des frais de première instance et d'appel.

Elle soutient que M. [M] [N] ne peut plus former de demandes portant sur l'exécution ou la rupture du contrat si ces demandes trouvent leur fondement sur des faits de plus de deux ans antérieurs à la saisine de la juridiction prud'homale, ce qui est bien le cas en l'espèce, et conclut que les faits antérieurs au 04 août 2015 sont donc prescrits.

Elle fait observer que M. [M] [N] avait, lors de son embauche, des expériences professionnelles variées et que compte tenu de ses compétences, il a été affecté à des missions de maintenance multi technique correspondant notamment à des missions préventives sur les systèmes cvc et non pas correctives, que l'agent de maintenance est par définition un agent multi technique et donc polyvalent. Elle soutient qu'elle n'avait aucune raison de fournir à M. [M] [N] une formation qualifiante dans le secteur de la Cvc pour lequel il n'avait pas été engagé, indique que M. [M] [N] n'a pas supporté son refus d'accéder à sa demande et que par mesure de représailles, il a refusé d'effectuer toutes les missions occasionnelles dans ce secteur.

Elle considère que le premier avertissement était justifié en raison du refus d'effectuer la maintenance préventive Cvc, que le second avertissement était également justifié dans la mesure où M. [M] [N] était impliqué dans un accident de la circulation avec le véhicule mis à sa disposition et alors que le salarié avait reconnu avoir manqué de vigilance.

Concernant la mise à pied du 13 janvier 2017, elle indique qu'il ressort des comptes rendus d'activité que M. [M] [N] pouvait passer plus d'une heure sur site à ne rien faire sous prétexte qu'il n'était pas compétent, de sorte qu'elle n'avait pas d'autre choix que de le convoquer à un entretien préalable à une éventuelle sanction disciplinaire.

Elle fait valoir, au visa de l'article L1471-1 du code du travail et de la jurisprudence y afférente qu'elle n'a commis aucun manquement :

- la convention applicable n'exclut pas la réalisation de missions annexes à sa spécialité ; M. [M] [N] effectue déjà des travaux courants dans le domaine électrique dans le cadre de son poste de mainteneur multi technique,

- elle ne saurait être tenue de fournir à M. [M] [N] une formation de base différente de la sienne, que sa demande de formation était une réorientation de carrière puisqu'il demandait à être technicien Cvc, poste qu'il n'occupait pas et pour lequel il n'était pas formé et qu'elle n'a pas néanmoins manqué de s'assurer de l'adaptabilité de M. [M] [N] à son poste de travail,

- M. [M] [N] ne démontre pas qu'il a été contraint d'effectuer des interventions nécessitant une aptitude particulière, que le conseil de prud'hommes a justement relevé qu'il n'a pas montré avoir été contraint de réaliser des travaux ne relevant pas de sa compétence,

- M. [M] [N] ne rapporte pas la preuve qu'elle aurait exercé des pressions pour le pousser à la démission,

Elle fait observer que le Conseil de prud'hommes a justement relevé que la mise à pied était justifiée, M. [M] [N] ne contestant pas avoir refusé d'effectuer plusieurs interventions et avoir suivi une formation au Cvc, ce dernier soutenant toutefois avoir reçu des missions de technicien Cvc, ce qui est faux.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens de parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues à l'audience.

MOTIFS :

Sur la demande de résiliation judiciaire du contrat présentée par M. [M] [N] :

C'est au moment où il statue que le juge examine la gravité des manquements invoqués, et non en se plaçant à la date où ils se sont prétendument déroulés et les manquements de l'employeur susceptibles de justifier la résiliation judiciaire à ses torts doivent être d'une gravité suffisante pour empêcher la poursuite de la relation de travail.

- sur la prescription soulevée par la Sa Snef :

L'article L1471-1 du code du travail dans sa version applicable issue de la loi n°2013-504 du 14 juin 2013, dispose que toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit.
Le premier alinéa n'est toutefois pas applicable aux actions en réparation d'un dommage corporel causé à l'occasion de l'exécution du contrat de travail, aux actions en paiement ou en répétition du salaire et aux actions exercées en application des articles L1132-1,L1152-1 et L1153-1. Elles ne font obstacle ni aux délais de prescription plus courts prévus par le présent code et notamment ceux prévus aux articles L1233-67, L1234-20,L1235-7 et L1237-14, ni à l'application du dernier alinéa de l'article L1134-5.

En l'espèce, M. [M] [N] ayant saisi la juridiction prud'homale le 04 août 2017, de sorte que son action en résiliation judiciaire qui est fondée sur l'exécution déloyale du contrat de travail est prescrite pour les manquements qui auraient été commis avant le 04 août 2015.

- sur les manquements invoqués par M. [M] [N] relatifs à l'attribution de missions qui ne correspondent pas à sa qualification et à ses compétences :

Tout contrat de travail comporte une obligation de loyauté qui impose à l'employeur d'exécuter le contrat de bonne foi.

Selon l'article R543-106 du code de l'environnement dans sa version applicable, l'opérateur satisfait aux conditions de capacité professionnelle lorsque les personnes qui procèdent sous sa responsabilité aux opérations décrites sont titulaires :

1° Soit d'une attestation d'aptitude, correspondant aux types d'activités exercées et aux types d'équipements utilisés, délivrée par un organisme certifié ;

2° Soit d'un certificat équivalant à l'attestation d'aptitude mentionnée au 1°, délivrée dans un Etat membre de l'Union européenne et correspondant aux types d'activités exercées et aux types d'équipements utilisés (...)

Un arrêté conjoint des ministres chargés de l'environnement et de l'industrie fixe les modalités d'application des articles 5.3,5.4 et 11 du règlement (CE) n° 303/2008.

L'article R543-76 du même code dans sa version applicable, pour l'application de la présente section, sont considérés comme :

1° " Equipements " les systèmes et installations de réfrigération, de climatisation, y compris les pompes à chaleur et de climatisation des véhicules, contenant des fluides frigorigènes, seuls ou en mélange ;

2° " Détenteurs des équipements " les personnes exerçant un pouvoir réel sur le fonctionnement technique des équipements mentionnés à l'alinéa précédent, qu'elles en soient ou non propriétaires ;

3° " Producteurs de fluides frigorigènes " non seulement les personnes qui produisent des fluides frigorigènes mais également celles qui importent ou introduisent sur le territoire national ces fluides à titre professionnel ;

4° " Producteurs d'équipements " non seulement les personnes qui produisent des équipements préchargés contenant des fluides frigorigènes mais également celles qui importent ou introduisent sur le territoire national ces équipements préchargés à titre professionnel ;

5° Distributeurs de fluides frigorigènes. Les personnes qui cèdent à titre onéreux ou gratuit, dans le cadre d'une activité professionnelle, des fluides frigorigènes à un opérateur, à d'autres distributeurs ou aux personnes produisant, dans des installations relevant des dispositions du titre Ier du présent livre, des équipements préchargés contenant de tels fluides ;

6° " Opérateurs " les entreprises et les organismes qui procèdent à titre professionnel à tout ou partie des opérations suivantes :

a) La mise en service d'équipements ;

b) L'entretien et la réparation d'équipements, dès lors que ces opérations nécessitent une intervention sur le circuit contenant des fluides frigorigènes ;

c) Le contrôle de l'étanchéité des équipements ;(...)

e) La récupération et la charge des fluides frigorigènes dans les équipements ;

f) Toute autre opération réalisée sur des équipements nécessitant la manipulation de fluides frigorigènes.

Les organismes de formation et les concepteurs d'équipements sont aussi considérés comme des opérateurs dès lors que leur personnel manipule des fluides frigorigènes.

Les producteurs d'équipements ne sont pas considérés comme des opérateurs dès lors qu'ils ne réalisent pas d'autres opérations nécessitant la manipulation des fluides frigorigènes que la charge initiale de leurs équipements dans des installations relevant des dispositions du titre Ier du présent livre.

La circonstance que la tâche donnée à un salarié soit différente de celle qu'il effectuait antérieurement ou pour laquelle il a été engagé, dès lors qu'elle correspond à sa qualification, ne constitue pas une modification du contrat de travail.

Il appartient au juge de caractériser en quoi les tâches dévolues au salarié n'entraient pas dans les attributions correspondant à la qualification de comptable unique pour laquelle il avait été engagé.

En l'espèce, M. [M] [N] qui a été embauché par la Sa Snef suivant contrat à durée indéterminée le 17 novembre 2008 avec effet au 1er décembre 2008 en qualité d'ouvrier professionnel, coefficient 185 niveau II, soutient que la Sa Snef a violé de façon délibérée le contrat de travail en lui confiant des missions qui ne correspondent pas à sa fonction et à ses compétences.

Selon la convention collective applicable des ouvriers dans le bâtiment, 'les ouvriers de son niveau (niveau II ) exécutent les travaux courants de leur spécialité, à partir de directives générales et sous contrôle ponctuel. Ils ont une certaine initiative dans le choix des moyens leur permettant d'accomplir ces travaux'.

Il résulte du curriculum vitae que M. [M] [N] a présenté à la Sa Snef lors de son embauche, que son domaine de compétences s'exerce en électricité -installations, dépannage, maintenance, pose d'appareillages et de baguettes électriques, vérification et contrôle des installations, application des normes en vigueur, lecture des schémas de montage, préparation sur plan d'exécution, adaptation aux exigences des chantiers -, en énergie renouvelable, en informatique et, concernant ses expériences professionnelles, elles mettent en évidence des fonctions de responsable technique au cours desquelles il a été amené à poser des panneaux solaires, d'électricien, d'opérateur de machine et préparateur de commande, de manutentionnaire.

Manifestement, M. [M] [N] n'a pas travaillé dans le domaine cvc avant son embauche par la Sa Snef et n'a pas de compétence particulière dans ce domaine.

Il est constant que la Sa Snef a confié à M. [M] [N] des missions d'interventions sur des systèmes de climatisations, ventilations et chauffage depuis le début de l'année 2011.

Des éléments produits aux débats, photocopies de captures d'écran de la tablette numérique de M. [M] [N] , il apparaît que la seule mission qui lui a été confiée pendant la période non prescrite date du 08 septembre 2015 laquelle est évoquée par la Sa Snef qui produit, sur ce point, des échanges de courriels avec son salarié le 08 septembre 2015 : 'lundi 21/09/2015 je t'ai mis au planning pour faire du filtre avec Joel à Mercure Cavaillon pour la journée...' et la réponse de M. [M] [N] le 25 septembre 2015 'je vois que les harcèlements continue toujours!!!Je le répète, je ne ferais pas de préventives cvc tant que je n'ai pas eu de formation et d'habilitation dans la matière..'.

Si un courrier de la Sa Snef adressé à M. [M] [N] , daté du 07 juillet 2011, établit que des opérations de préventive Cvc avaient été confiées à compter de cette date lesquelles consistaient notamment à un nettoyage et au remplacement de filtres et à un contrôle de bon fonctionnement - prise de température, vérification du soufflage...-, et que les documents que M. [M] [N] a versés aux débats, intitulés 'détail d'une intervention préventive' rédigés par la Sa Snef et qui mettent en évidence que figuraient parmi les interventions préventives les opérations suivantes : sur le Split, vérification de l'étanchéité du circuit frigorifique, contrôles des pressions HP et BP, des intensités moteurs, de l'état du calorifuge, du bilan thermique du site, et sur le groupe froid : contrôles des pressions HP et BP, de l'étanchéité du circuit froid, sur la pompe à chaleur : essai du thermostat antigel, il n'en demeure pas moins que la seule intervention sollicitée par la Sa Snef le 08 septembre 2015 se rapportait manifestement exclusivement à un changement de filtres.

Par ailleurs, la convention collective applicable permet à un ouvrier niveau II de réaliser des missions annexes à sa spécialité, étant rappelé que si M. [M] [N] a été embauché dans un premier temps, dans le cadre de deux contrats à durée déterminée du 03 novembre 2008 et du 25 septembre 2008 pour réaliser des opérations de maintenance et d'entretien en électricité, par contre, c'est bien en qualité d'ouvrier professionnel niveau II qu'il a signé le contrat à durée indéterminée du 17 novembre 2008, étendant ainsi son champ d'interventions dans des domaines qui ne sont plus exclusifs de celui de l'électricité.

En outre, si, comme le rappelle justement M. [M] [N], certaines interventions sur le Cvc nécessitent des connaissances et des aptitudes préalables concernant la manipulation des fluides notamment frigorigènes, cependant le salarié ne rapporte pas la preuve que la mission qui lui a été confiée le 08 septembre 2015 nécessitait l'une des manipulations prévues aux dispositions réglementaires susvisés à savoir : mise en service d'équipement, entretien et réparation d'équipements, contrôle de l'étanchéité des équipements, récupération et charge des fluides frigorigènes dans les équipements, toute autre opération réalisée sur des équipements nécessitant la manipulation de fluides frigorigènes.

Dès lors, il résulte des éléments qui précèdent que M. [M] [N] ne rapporte pas la preuve qu'en lui demandant d'intervenir sur un système de Cvc pour changer des filtres, la Sa Snef a exécuté le contrat de travail de façon déloyale.

C'est donc à bon droit que les premiers juges ont retenu que 'M. [M] [N] n'a pas montré avoir été contraint de réaliser des travaux ne relevant pas de sa compétence (interventions sur le circuit contenant des fluides frigorigènes par exemple' et que la 'qualification d'ouvrier ou de compagnon professionnel n'instaure aucun champ d'intervention professionnel exclusif'.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris sur ce point.

- sur les manquements invoqués par M. [M] [N] relatifs à la formation professionnelle:

L'article L6321-1 du code du travail dispose que l'employeur assure l'adaptation des salariés à leur poste de travail. Il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations. Il peut proposer des formations qui participent au développement des compétences, ainsi qu'à la lutte contre l'illettrisme. Les actions de formation mises en oeuvre à ces fins sont prévues, le cas échéant, par le plan de formation mentionné au 1° de l'article L. 6312-1.

M. [M] [N] soutient que la Sa Snef a refusé de le former, a bloqué toute possibilité de s'adapter à l'évolution de son poste de travail caractérisé par les demandes qu'il lui avait fait parvenir en Cvc et que la formation qui lui a été finalement proposée en 2016 n'était pas adaptée puisqu'il ne disposait pas des pré-requis, à savoir une connaissance de base en thermique et être en possession d'une attestation d'aptitude à la manipulation des fluides frigorigènes.

Si M. [M] [N] n'a pas obtenu la formation qualifiante pour devenir technicien Cvc comme il l'avait souhaité depuis en avril 2011, il n'en demeure pas moins que la Sa Snef justifie avoir fait bénéficier le salarié de plusieurs formations depuis son embauche :

- 'exercer le mandat de membre de CHSCT' en janvier 2015,

- 'plate forme élévatrice mobile de personnes catégorie 1B 3B' en juillet 2015,

- 'recyclage NFC18510" en avril 2016,

- compagnonnage pour maintenance Cvc en mai 2011.

La Sa Snef soutient par ailleurs que M. [M] [N] aurait suivi d'autres formations : attestation Caces en 2009, prévention des risques électriques en 2012, certificat de sauveteur en mai 2015, ce que ne conteste pas sérieusement le salarié.

Enfin, la Sa Snef justifie que M. [M] [N] a participé à une formation organisée par l'Apave du 12 au 16 septembre 2016 portant sur l'exploitation des installations de climatisation et de conditionnement d'air, par la production d'une attestation de stage et de présence.

Quand bien même la formation ainsi suivie ne correspond pas à celle que M. [M] [N] avait sollicitée en 2011 il n'en demeure pas moins que la société a rempli son obligation de formation.

- sur l'obligation de sécurité de résultat :

M. [M] [N] soutient que la Sa Snef l'a obligé à intervenir sur des climatisations et du chauffage sans qu'il en ait la capacité, et qu'elle l'a exposé ainsi à un potentiel danger ; mais force est de constater qu'à l'exception de la production d'images de matériel et d'équipements sur lesquels il était susceptible d'intervenir, M. [M] [N] ne rapporte pas la preuve de la dangerosité de ses interventions, tout comme il ne rapporte pas la preuve qu'il a subi des pressions injustifiées et récurrentes de la part de son employeur depuis le 04 août 2015.

Au vu de l'ensemble des éléments qui précèdent, M. [M] [N] ne justifie que d'un seul manquement dans l'exécution du contrat de travail consistant à lui confier une mission en septembre 2015 qui ne correspondait manifestement pas à ses compétence, de sorte qu'il ne rapporte pas la preuve que depuis le 04 août 2015 la Sa Snef a gravement manqué à ses obligations contractuelles.

La demande de résiliation judiciaire aux torts de la Sa Snef formée par M. [M] [N] n'est donc pas fondée et sera rejetée.

Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

Sur la demande d'annulation de la mise à pied notifiée le 13 janvier 2017 :

L'article L1333-1 du code du travail, en cas de litige, le conseil de prud'hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction. L'employeur fournit au conseil de prud'hommes les éléments retenus pour prendre la sanction. Au vu de ces éléments et de ceux qui sont

fournis par le salarié à l'appui de ses allégations, le conseil de prud'hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

Le conseil de prud'hommes, juge du contrat de travail, saisi de la contestation sur le bien-fondé d'une sanction disciplinaire, peut l'annuler si elle apparaît irrégulière dans la forme, injustifiée ou disproportionnée à la faute commise.

La mise à pied est une mesure de suspension temporaire du contrat de travail, sa durée doit être fixée et connue du salarié au moment où elle lui est notifiée.

Elle ne peut être prononcée dans les entreprises tenues d'avoir un règlement intérieur que si elle est prévue dans celui-ci et que sa durée maximale y est bien fixée, à défaut, les mises à pied prononcées sont nulles.Un accord collectif ne peut pas suppléer les carences du règlement intérieur.

Le juge du fond a pleine compétence pour examiner la réalité des faits reprochés au salarié. À cet effet, il examine tous les éléments de preuve fournis par les parties au soutien de leurs prétentions.

L'employeur doit fournir au conseil de prud'hommes les éléments qu'il a retenus pour prendre la sanction ; le salarié fournit également les éléments qui viennent à l'appui de ses allégations.

En l'espèce, la Sa Snef a adressé à M. [M] [N] une lettre de notification de mise à pied disciplinaire de trois jours, datée du 13 janvier 2017 qui visait les griefs suivants : refus persistant de se conformer aux directives de la hiérarchie dans le cadre de sa mission de maintenance malgré plusieurs relances, - interventions pour des préventives et suivi d'avancement de la Société générale et un dépannage sur le Thor - , ce qu'elle a considéré comme de l'insubordination fautive.

M. [M] [N] ne conteste pas avoir refusé les interventions demandées par son employeur postérieurement au 04 août 2015, et contrairement à ce qu'il soutient, il n'apparaît pas que certaines des interventions que la Sa Snef lui a confiées notamment en novembre 2016 ne relevaient pas de sa compétence, les opérations relatives à la vérification de l'étanchéité du circuit frigorifique du Split, ou de recherche de fuite de fluide frigorifique concernant les Roof Top qui sont listées dans un bon de commande établi par la Sa Snef daté du 18 novembre 2016 et qui est établi à son nom, que la société produit aux débats, ayant été déjà faites, la lettre F qui signifie 'fait' étant mentionnée devant chacune de ces opérations.

M. [M] [N] maintient que les travaux que la Sa Snef lui confiait ne relevaient pas de ses compétences et produit aux débats, à cet effet, des documents intitulés 'détail d'une intervention préventive' type d'intervention 'équipement' établis par la Sa Snef qui listent les instructions de gamme de l'équipement dans les domaines de la plomberie, de la climatisation, de la ventilation concernant les contrats signés avec Cepac MMT/Vaucluse/Cavaillon, Auchan, Bnp Paribas Multi services Groupe Avignon/Le Pontet qui relèvent du niveau de maintenance 3 ; toutefois, le salarié ne démontre pas qu'il s'agit d'opérations qui lui ont été personnellement confiées dans le cadre de missions qu'il a refusées.

Manifestement, il résulte de l'ensemble de ces éléments que les travaux que la Sa Snef a confiés à M. [M] [N] concernant les systèmes Cvc consistaient pour l'essentiel à des 'petits travaux d'entretien préventif', qui entraient dans le champ de sa compétence et pour lesquels le salarié a suivi une formation dispensée en septembre 2016, de sorte que la mesure disciplinaire prononcée par la Sa Snef à son encontre est fondée.

C'est donc à bon droit que les premiers juges ont retenue que 'si M. [M] [N] pouvait et peut encore refuser d'effectuer des opérations du ressort d'un technicien qualifié Cvc, il ne peut s'abstenir de réaliser des petits travaux d'entretien préventif demandés par son employeur qui restent dans le champ de ses attributions'.

En conséquence, le jugement entrepris sera confirmé également sur ce point.

Au vu de l'ensemble de ces considérations, il convient de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS:

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière prud'homale et en dernier ressort;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le conseil de prud'hommes d'Avignon le 28 février 2019,

Dit n'y avoir lieu à application au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

Rejette les demandes plus amples ou contraires,

Condamne M. [M] [N] aux dépens de la procédure d'appel.

Arrêt signé par Monsieur ROUQUETTE-DUGARET, Président et par Madame OLLMANN, Greffière.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 5ème chambre sociale ph
Numéro d'arrêt : 19/01356
Date de la décision : 24/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-24;19.01356 ?
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