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17/05/2022 | FRANCE | N°20/00335

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 5e chambre pole social, 17 mai 2022, 20/00335


ARRÊT N°



R.G : N° RG 20/00335 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HUA3

EM/DO



TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NIMES

08 janvier 2020





RG:17/00604





Société BASTIDE LE CONFORT MEDICAL



C/



CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE HAUTE SAVOIE



































COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE SOCIALE



ARRÊT DU 17 MAI 2022



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APPELANTE :



Société BASTIDE LE CONFORT MEDICAL

[Adresse 5]

[Adresse 1]

[Localité 3]



représentée par Me Jérémy CREPIN de la SELARL JC AVOCAT, avocat au barreau de NIMES





INTIMÉE :



CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE HAUTE SAVOIE

[Adresse 2]

74984 ANNECY CEDEX 9



représe...

ARRÊT N°

R.G : N° RG 20/00335 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HUA3

EM/DO

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NIMES

08 janvier 2020

RG:17/00604

Société BASTIDE LE CONFORT MEDICAL

C/

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE HAUTE SAVOIE

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 17 MAI 2022

APPELANTE :

Société BASTIDE LE CONFORT MEDICAL

[Adresse 5]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Jérémy CREPIN de la SELARL JC AVOCAT, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉE :

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE HAUTE SAVOIE

[Adresse 2]

74984 ANNECY CEDEX 9

représentée par M. [W] [T] en vertu d'un pouvoir général

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 945-1 du code de Procédure Civile, sans opposition des parties.

Elle en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère

GREFFIER :

Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

à l'audience publique du 08 Mars 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 17 Mai 2022

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 17 Mai 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

Le 28 mars 2013, M. [J] [Y], salarié de la Sa Bastide Le Confort Médical a été victime d'un accident pour lequel son employeur a établi une déclaration d'accident de travail le 29 mars 2013 qui mentionnait : 'livraison d'un concentrateur ; en sortant le concentrateur du véhicule, la victime a ressenti une douleur dans le poignet'.

Le certificat médical initial établi le 28 mars 2013 par un médecin du centre hospitalier de la région d'Annecy mentionnait : 'traumatisme poignet gauche, possible fracture scaphoïde'.

Le 10 avril 2013, la Caisse primaire d'assurance maladie de Haute Savoie a notifié à la Sa Bastide Le Confort Médical sa décision de prise en charge de cet accident au titre de la législation sur les risques professionnels.

Le 14 novembre 2013, la caisse primaire d'assurance maladie de Haute Savoie a notifié à M. [J] [Y] sa décision de fixer la date de guérison de ses lésions à la date du 15 septembre 2013.

Le 13 novembre 2016, la Sa Bastide Le Confort Médical a saisi la commission de recours amiable de la caisse primaire en contestation de la longueur des arrêts de travail de M. [J] [Y] et leur imputabilité au fait accidentel du 28 mars 2013.

La commission de recours amiable de la caisse primaire a rejeté la contestation par décision du 27 avril 2016.

La Sa Bastide Le Confort Médical a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale du Gard par courrier du 28 juillet 2017 d'un recours contre cette décision.

Suivant jugement du 08 janvier 2020, le Tribunal de grande instance de Nîmes, contentieux de la protection sociale, désormais compétent pour statuer sur ce litige, a :

- rejeté la demande de la Sa Bastide Le Confort Médical en contestation de la décision rendue par la commission de recours amiable de la Caisse primaire d'assurance maladie du Gard du 27 avril 2016,

- confirmé la décision rendue par la commission de recours amiable en date du 27 avril 2016,

- rejeté la demande de la Sa Bastide Le Confort Médical tendant à la mise en oeuvre d'une expertise,

- dit que la totalité des soins et arrêts de travail prescrits à M. [J] [Y] consécutivement à l'accident de travail dont il a été victime le 28 mars 2013 sont imputables audit accident,

- dit que les soins et arrêts de travail prescrits à M. [J] [Y] consécutivement à l'accident de travail dont il a été victime le 28 mars 2013 sont opposables à la Sa Bastide Le Confort Médical,

- rejeté les autres demandes plus amples ou contraires,

- condamné la Sa Bastide Le Confort Médical aux entiers dépens.

Suivant courrier réceptionné le 27 janvier 2020, la Sa Bastide Le Confort Médical a régulièrement interjeté appel de cette décision qui lui a été notifiée le 21 janvier 2020.

L'affaire a été appelée à l'audience du 08 mars 2022 à laquelle elle a été retenue.

Suivant conclusions écrites, déposées et soutenues oralement à l'audience, la Sa Bastide Le Confort Médical demande à la cour de :

- infirmer le jugement du 08 janvier 2020,

En conséquence,

- ordonner avant dire droit une expertise médicale judiciaire aux frais de la caisse permettant de déterminer la durée des arrêts de travail de M. [J] [Y] en lien de causalité directe avec le prétendu accident de travail initial,

- se faire remettre tous documents médicaux ou pièces utiles concernant la maladie professionnelle (sic ) de M. [J] [Y] prise en charge à compter du 28 mars 2013 et décrire les lésions présentées par l'intéressé,

- préciser la nature de l'affection dont la victime a souffert à la suite de l'accident et indiquer si la totalité des soins et arrêts de travail pris en charge par la Caisse primaire d'assurance maladie de Haute Savoie sont imputables à l'accident,

- dans la négative, préciser ceux qui sont en relation directe avec cet accident et ceux qui au contraire sont totalement étrangers à l'accident de travail initial,

- dresser de ces opérations un rapport précis contenant ses conclusions,

En tout état de cause,

- condamner la caisse à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner la caisse aux entiers dépens,

- ordonner l'exécution provisoire.

Elle fait valoir, au visa notamment de l'article 1353 du code civil, qu'il appartient à la caisse primaire de produire tout élément médical sur lequel elle s'est basée pour prendre en charge au titre de la la législation sur les risques professionnels, des prolongations d'arrêt de travail.

Elle ajoute avoir consulté le Docteur [H] qui a estimé que l'arrêt de travail ne pouvait légitimement être supérieur à 84 jours, considère ainsi apporter un commencement de preuve consistant en la production de l'avis médical d'un médecin et rapporter la preuve qu'il existe un doute sérieux sur l'existence d'un lien de causalité entre l'accident initial et l'ensemble des arrêts. Elle considère être également légitime à solliciter dans ces conditions une expertise médicale judiciaire pour que l'expert puisse se prononcer sur la durée des arrêts de travail de M. [J] [Y] à compter du 28 mars 2013 et sur l'éventuel lien avec le fait accidentel.

Suivant conclusions écrites, déposées et soutenues oralement à l'audience, la Caisse primaire d'assurance maladie de Haute Savoie demande à la cour de :

- confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Nîmes du 08 janvier 2020,

- confirmer le bien fondé des arrêts de travail indemnisés du 28 mars 2013 au 15 septembre 2013 au titre de l'accident de travail du 28 mars 2013,

- confirmer cette prise en charge opposable à la Sa Bastide Le Confort Médical,

- rejeter la demande d'expertise médicale,

- rejeter la demande fondée au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner la Sa Bastide Le Confort Médical à lui payer la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Elle fait valoir, au visa de l'article L411-1 du Code de la sécurité sociale et de la jurisprudence y afférente, que la présomption d'imputabilité s'applique pendant toute la durée de l'incapacité du salarié précédant soit la guérison soit la consolidation de l'état de santé du salarié, dès lors qu'un arrêt de travail était initialement prescrit ou que le certificat médical initial était assorti d'un arrêt de travail, abandonnant ainsi sa référence à la continuité de symptômes et de soins.

Elle ajoute qu'il appartient à l'employeur qui conteste cette présomption d'apporter la preuve contraire, que dans le cas d'espèce, la Sa Bastide Le Confort Médical n'apporte pas à l'appui de sa requête une telle preuve, se contentant de mettre en doute l'imputabilité des soins et arrêts de travail prescrits postérieurement au premier arrêt et contestant donc l'opposabilité de ces derniers Elle fait observer que l'avis du Docteur [H] que la société produit s'appuie sur le référentiel de la Haute autorité de santé, sans pour autant avoir d'élément médical du dossier de M. [J] [Y], à l'exception de la déclaration d'accident de travail. Elle ajoute que les prescriptions d'arrêts de travail successifs sont médicalement justifiés par le centre hospitalier d'[Localité 4] et font expressément référence à l'accident du travail du 28 mars 2013 et la lésion comme étant une fracture du scaphoïde du poignet gauche, ce qui caractérise la continuité des symptômes et des soins contestés par la société.

Elle ajoute que la mise en place d'une expertise n'est pas un droit, que la Sa Bastide Le Confort Médical n'étaye pas son recours par des éléments sérieux pouvant constituer un commencement de preuve, de sorte que l'expertise viendrait la dispenser de la charge de la preuve.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens de parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues à l'audience.

MOTIFS :

L'article L411-1 du code de la sécurité sociale dispose qu'est considéré comme accident du travail quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail de toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise.

L'accident survenu alors que la victime était au temps et au lieu de travail est présumé imputable au travail, cette présomption s'appliquant dans les rapports du salarié victime avec la caisse mais également en cas de litige entre l'employeur et la caisse.

La présomption d'imputabilité au travail des lésions apparues à la suite d'un accident du travail, instituée par l'article L411-1 du code de la sécurité sociale s'étend pendant toute la durée d'incapacité de travail précédant soit la guérison complète, soit la consolidation de l'état de la victime.

Il en résulte que la présomption d'imputabilité au travail s'applique non seulement au fait accidentel ou à la maladie professionnelle, mais également à l'ensemble des évolutions constatées et des prestations délivrées jusqu'à la complète guérison ou la consolidation de l'état du salarié.

La présomption s'appliquant à l'ensemble des prestations délivrées jusqu'à la complète guérison ou la consolidation de l'état du salarié, elle concerne les soins et les arrêts de travail prescrits au salarié, sans qu'il soit nécessaire qu'un arrêt de travail ait été délivré dès l'accident de travail.

L'employeur peut combattre cette présomption simple et devra, sauf rupture dans la continuité des soins ou de l'arrêt de travail, renverser la présomption d'imputabilité en démontrant que les nouvelles prescriptions ne sont pas rattachables au sinistre initial.

En l'espèce, la Caisse primaire d'assurance maladie de Haute Savoie produit aux débats les différents arrêts de travail prescrits des suites de l'accident de travail dont M. [J] [Y] a été victime le 28 mars 2013, et établis le :

- 28 mars 2013, prescrivant un arrêt jusqu'au 05 avril 2013 pour 'traumatisme poignet gauche, possible fracture scaphoïde',

- 04 avril 2013 prescrivant un arrêt jusqu'au 18 avril 2013 pour 'fracture scaphoïde G avec immobilisation plâtrée',

- 09 avril 2013 prescrivant un arrêt jusqu'au 05 mai 2013 pour 'traumatisme poignet gauche',

- 16 avril 2013 prescrivant un arrêt jusqu'au 24 mai 2013 pour 'entorse grave poignet gauche',

- 24 mai 2013 prescrivant un arrêt jusqu'au 07 juillet 2013 pour 'entorse grave du poignet gauche chirurgie du 24.05.2013",

- 05 juillet 2013 prescrivant un arrêt jusqu'au 31 juillet 2013 pour 'ablation de broche poignet gauche chirurgie du 05/07/2013",

- 30 juillet 2013 prescrivant un arrêt jusqu'au 15 septembre 2013 pour 'entorse grave poignet gauche'.

Ces éléments établissent une continuité des arrêts de travail prescrits des suites de l'accident de travail dont M. [J] [Y] a été victime du 28 mars 2013, date de l'accident et du certificat médical initial jusqu'à la date de guérison des lésions, le 15 septembre 2013.

Par ailleurs, les avis d'arrêt de travail successifs pendant cette période se réfèrent à une même lésion , un traumatisme du poignet gauche.

Pour combattre cette présomption, la Sa Bastide Le Confort Médical soutient que l'arrêt de travail est disproportionné par rapport à la nature de la lésion et produit, à l'appui de ses prétentions un courrier établi le 03 janvier 2019 par le Docteur [N] [H] qui indique notamment :

'nous ne connaissons rien des éléments iconographiques lésionnels ou de la prise en charge inaugurale, dont chirurgicale. Nous ne savons pas s'il existait des signes d'atteinte indépendante, dont dégénérative, de découverte fortuite ou non. A ce stade, nous n'avons pas lu de rapport médical de la CPAM. Or, il est annoncé arrêt continu de 172 jours.

Nous avons mené des recherches référentielles et n'avons pas trouvé plus explicite que la proposition commune Haute autorité de santé/CPAM.

J'ai retranscrit le tableau synoptique en page 3 : ce dernier nous impose d'imagnier le cas le plus grave, car nous ne connaissons pas la fiche de poste précise et aussi les activités spécifiques, notamment lors de l'installation de matériel et de son déplacement chez le client...Ainsi et au plus long, il était cohérent de retenir 84 jours d'arrêt de travail imputable dans cette histoire'.

L'avis du Docteur [H] repose exclusivement sur les recommandations faites par la Haute autorité de la santé.

Si ces recommandations sont utiles pour donner un cadre référentiel, elles sont cependant trop générales pour être appliquées de façon automatique, sans que soient prises en compte les spécificités de la ou des pathologie(s) présentée(s) par la victime et ne peuvent faire l'objet d'une application stricte et sans discernement.

La référence à ces recommandations est donc insuffisante pour renverser la présomption d'imputabilité à défaut d'apporter aux débats des éléments médicaux se rapportant directement à la situation personnelle de la victime, M. [J] [Y].

Force est de constater que l'employeur ne produit au soutien de sa demande aucun élément permettant de retenir la présence d'une pathologie préexistante, susceptible d'expliquer la durée qu'il estime excessive, de l'arrêt de travail, le courrier médical produit ne faisant qu'émettre des hypothèses théoriques sur la base de l'analyse d'une seule pièce du dossier, la déclaration d'accident de travail, sans référence ni démonstration de l'existence d'un état antérieur.

La Sa Bastide Le Confort Médical ne rapporte pas non plus la preuve d'un différend d'ordre médical pouvant justifier l'instauration d'une mesure d'expertise médicale.

Au vu de l'ensemble de ces considérations, il apparaît que c'est à bon droit que les premiers juges ont retenu que 'la totalité des soins et arrêts de travail pris en charge par la caisse primaire de Haute Savoie suite à l'accident de travail dont a été victime M. [J] [Y] le 28 mars 2018 seront déclarés imputables à l'accident et opposables à la société'.

Le jugement entrepris sera donc confirmé en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS:

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière de sécurité sociale et en dernier ressort;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 08 janvier 2020 par le tribunal judiciaire de Nîmes, contentieux de la protection sociale,

Déboute la Sa Bastide Le Confort Médical de l'intégralité de ses prétentions,

Condamne la Sa Bastide Le Confort Médical à payer à la Caisse primaire d'assurance maladie des Haute Savoie la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, en cause d'appel,

Rejette les demandes plus amples ou contraires,

Condamne la Sa Bastide Le Confort Médical aux dépens de la procédure d'appel.

Arrêt signé par M. ROUQUETTE-DUGARET, Président et par Mme OLLMANN, Greffier.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 5e chambre pole social
Numéro d'arrêt : 20/00335
Date de la décision : 17/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-17;20.00335 ?
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