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17/05/2022 | FRANCE | N°19/00966

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 5ème chambre sociale ph, 17 mai 2022, 19/00966


ARRÊT N°



N° RG 19/00966 - N° Portalis DBVH-V-B7D-HIXT



MS/EB



CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'ORANGE

07 février 2019



RG :16/00221





[Y]

S.C.I. SCI LES 7 B





C/



[C] [W]





































COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH



ARRÊT DU 17 MAI 2022

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APPELANTS :



Monsieur [L] [Y]

[Adresse 1]

[Localité 3]



Représenté par Me Bénédicte ANAV-ARLAUD de la SELARL ANAV-ARLAUD BÉNÉDICTE, avocat au barreau d'AVIGNON



SCI LES 7 B

[Adresse 7]

[Localité 4]



Représentée par Me Bénédicte ANAV-ARLAUD de la SELARL ANAV-ARLAUD BÉNÉDICTE, avocat au barreau d'...

ARRÊT N°

N° RG 19/00966 - N° Portalis DBVH-V-B7D-HIXT

MS/EB

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'ORANGE

07 février 2019

RG :16/00221

[Y]

S.C.I. SCI LES 7 B

C/

[C] [W]

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH

ARRÊT DU 17 MAI 2022

APPELANTS :

Monsieur [L] [Y]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Bénédicte ANAV-ARLAUD de la SELARL ANAV-ARLAUD BÉNÉDICTE, avocat au barreau d'AVIGNON

SCI LES 7 B

[Adresse 7]

[Localité 4]

Représentée par Me Bénédicte ANAV-ARLAUD de la SELARL ANAV-ARLAUD BÉNÉDICTE, avocat au barreau d'AVIGNON

INTIMÉ :

Monsieur [C] [C] [W]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Anne-france BREUILLOT de la SELARL BREUILLOT & AVOCATS, avocat au barreau de CARPENTRAS

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 13 Janvier 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

M. Michel SORIANO, Conseiller, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Madame Virginie HUET, Conseillère

M. Michel SORIANO, Conseiller

GREFFIER :

Mme Emmanuelle BERGERAS, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

à l'audience publique du 10 Mars 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 17 Mai 2022

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 17 Mai 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

M. [C] [C] [W] a été embauché par la SCI LES 7B selon contrat à durée déterminée sans terme précis du 2 février 2015 en qualité d'ouvrier pour effectuer des travaux de rénovation dans les locaux de cette dernière situés à Vaison-La Romaine, le contrat précisant une durée minimale d'un mois et prenant fin à l'issue des travaux.

En contrepartie, la rémunération mensuelle brute du salarié a été fixée à 1.840 euros pour 160 heures mensuelles.

Le 16 septembre 2016, M. [C] [C] [W] a saisi le conseil de prud'hommes d'Orange d'une action dirigée contre M. [L] [Y] et la SCI LES 7B aux fins de voir requalifier son contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, dire et juger que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et voir condamner M. [Y] et la SCI LES 7B à lui payer diverses sommes à caractère indemnitaire.

Par voie de citation en date du 20 novembre 2017, M. [C] [C] [W] a fait citer la SCI les 7B devant le conseil de prud'hommes d'Orange dans la mesure où le greffe de ladite juridiction avait omis de la convoquer.

Par jugement en date du 7 février 2019, le conseil de prud'hommes d'Orange a :

- condamné M. [L] [Y], SCI les 7B prise en la personne de son représentant légal à payer à M. [C] [C] [W] les sommes suivantes :

' 1 840 euros au titre du préavis

' 184 euros au titre des congés payés afférents

' 500 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

' 100 euros pour violation de l'article L 1232-2 du code du travail

' 900 euros au titre de l'article 700 du CPC

- Ordonné à M. [L] [Y], SCI les 7B à délivrer à M. [C] [C] [W] les documents sociaux rectifiés sous astreinte de 20 euros par jour de retard à partir du 30ème jour de la notification de la décision

- Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire

- Débouté M. [C] [C] [W] pour le surplus de ses demandes

- Débouté M. [L] [Y] de sa demande reconventionnelle

- Condamné M. [L] [Y], SCI les 7B aux entiers dépens de l'instance

Par acte du 4 mars 2019, M. [Y] et la SCI les 7B ont régulièrement interjeté appel de cette décision.

Aux termes de leurs dernières conclusions d'appelants, en date du 13 janvier 2022, M. [Y] et la SCI les 7B demandent à la cour de :

Recevoir l'appel de M. [L] [Y] et celui de la SCI 7 B

Le déclarer recevable et bien fondé,

Réformer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- Condamné M. [L] [Y], SCI les 7B prise en la personne de son représentant légal à payer à M. [C] [C] [W] les sommes suivantes :

' 500 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

' 100 euros pour violation de l'article L 1232-2 du Code du Travail

- Condamné M. [L] [Y], SCI les 7B prise en la personne de son représentant légal à payer à M. [C] [C] [W] les sommes suivantes :

' 1840 euros au titre de l'indemnité de préavis

' 184 euros au titre des congés payés afférents

' 900 euros au titre de l'article 700 du CPC

- Ordonné à M. [L] [Y], SCI les 7B à délivrer à M. [C] [C] [W] les documents sociaux rectifiés sous astreinte de 20 euros par jour de retard à partir du 30ème jour de la notification de la décision

- Débouté M. [L] [Y] de sa demande reconventionnelle

- Condamné M. [L] [Y], SCI les 7B aux entiers dépens de l'instance

Statuant de nouveau,

Sur les demandes initiales formées à l'encontre de M. [L] [Y],

Mettre hors de cause M. [L] [Y] lequel n'est pas l'employeur de M. [C] [C] [W] au titre du CDD du 02/02/2015

Sur les nouvelles demandes formées en cause d'appel à l'encontre de M. [L] [Y],

Les dires nulles et irrecevables d'office en application de l'article 564 du code de procédure civile et de la disparition de l'unicité de l'instance,

Les dire en tout état de cause prescrites et infondées

Sur les demandes formées à l'encontre de la SCI les 7 B

Déclarer l'action de M. [C] [C] [W] nulle

La dire à défaut prescrite

Déclarer en conséquence M. [C] [C] [W] forclos en ses demandes

A défaut,

Déclarer les demandes de M. [C] [C] [W] irrégulières et infondées

Débouter en conséquence M. [C] [C] [W] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions

Confirmer pour le surplus le jugement en ce qu'il a débouté M. [C] [C] [W] pour le surplus de ses demandes

En tout état de cause,

Débouter M. [C] [C] [W] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

Condamner M. [C] [C] [W] à verser la somme de 2.500 euros à M. [L] [Y] en application des dispositions de l'article 700 du CPC outre 2500 euros à la SCI les 7B sur le même fondement.

Condamner M. [C] [C] [W] aux entiers dépens.

M. [Y] et la SCI les 7B soutiennent essentiellement que :

- sur les demandes formées à l'encontre de M.[L] [Y]

- aucune condamnation solidaire ne peut intervenir, en l'absence de tout lien contractuel avec M. [C] [C] [W],

- le contrat de travail en cause a été conclu entre la SCI les 7B et M. [C] [C] [W],

- ce dernier ne pouvait ignorer qu'il n'était pas son employeur,

- au terme de ses conclusions d'appelant, M. [C] [C] [W] soutient une nouvelle position et évoque le co-emploi pour justifier de la solidarité évoquée. Il s'agit d'une prétention nouvelle qui est par nature irrecevable au terme de l'article 564 du code de procédure civile,

- sur le fond, M. [C] [C] [W] ne rapporte pas la preuve des conditions exigées pour retenir le coemploi, à savoir un lien de subordination avec le coemployeur revendiqué et une confusion d'intérêts, d'activité et de direction entre les sociétés désignées,

- le conseil de prud'hommes d'Orange l'a débouté de sa demande de mise hors de cause, sans pour autant motiver sa décision,

- l'intimé forme, à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où le co-emploi ne serait pas retenu, et pour la première fois en cause d'appel, des demandes dirigées à son encontre au titre d'un précédent contrat de travail conclu avec M. [W],

- ce dernier sollicite la résiliation judiciaire d'un contrat de travail conclu le 1er septembre 2011 et qui a pris fin le 31 janvier 2013,

- ces demandes formées pour la première fois en cause d'appel sont irrecevables,

- M. [W] n'a nullement formé cette demande en première instance. Il n'est donc pas recevable à la formuler pour la première fois en cause d'appel, cette demande ne visant nullement le même contrat que celui pour lequel la cour de céans est saisie,

- cette demande nouvelle encourt la nullité pour défaut de préalable de conciliation,

- compte tenu de la date de fin du CDI au 31 janvier 2013, l'action est prescrite,

- sur l'irrecevabilité des demandes formées à l'encontre de la SCI 7B

- le contrat de travail en cause a été établi le 2 février 2015 et rompu le 1er mars 2015. La prescription devait en conséquence être interrompue avant le 2 mars 2017. Or, la SCI 7B a été citée le 20 novembre 2017,

- le conseil de prud'hommes n'a nullement examiné cette fin de non-recevoir,

- les demandes de M. [W] visées à l'encontre de la SCI 7 B ne respectent pas le principe de la conciliation préalable,

- sur le fond, M. [W] conteste les conditions dans lesquelles son contrat de travail a pris fin alors que c'est lui, une fois l'objet de sa mission réalisé, qui ne s'est plus présenté à son poste,

- le contrat a démarré le 2 février 2015 et pris fin le 1er mars 2015,

- le salarié va saisir la juridiction prud'hommale plus d'un an et demi après la

rupture de son contrat (le 7 octobre 2016),

- le contrat de travail passé avec la SCI les 7 B prévoyait la réalisation d'une tâche précise d'une durée minimale de 1 mois,

- sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- l'indemnisation du salarié est subordonnée à la démonstration d'un préjudice. Or, M. [W] ne produit aucun élément à ce titre,

- sur les dommages et intérêts pour violation de l'article L 1232-2 du code du travail

- le contrat de travail étant à durée déterminée, celui-ci a naturellement pris fin à l'issue des travaux réalisés par M. [W]. Elle n'avait pas à convoquer le salarié à un entretien préalable,

- sur la demande au titre de l'indemnité de préavis et congés payés

- l'ancienneté du salarié ne lui permet pas de prétendre à une indemnité de préavis.

Dans le dernier état de ses conclusions récapitulatives en date du 12 janvier 2022, M. [C] [C] [W] demande à la cour de :

Confirmant le jugement dont appel ;

Requalifier le contrat à durée déterminée sans terme précis conclu entre M. [C] [C] [W] et la SCI LES 7B en contrat à durée indéterminée

En conséquence,

Dire sans cause réelle et sérieuse le licenciement notifié par la S.C.I LES 7B,

Y ajoutant ;

Constater que M. [L] [Y] a la qualité de co-employeur de M. [C] [C] [W] ;

Condamner solidairement la S.C.I LES 7B et M. [L] [Y] à payer à M. [C] [C] [W] les sommes suivantes :

1.840 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis du 1er mars 2015 au 1er avril 2016 ;

184 euros à titre de congés payés y afférents ;

7.120 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et abusif ;

500 euros à titre de dommages et intérêts pour violation de l'article L 1232-2 du code du travail ;

Remise de bulletins de salaires rectifiés, d'un certificat de travail et d'une attestation Pôle emploi conformes sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de 15 jours après la notification de la décision à intervenirn;

Intérêts au taux légal à compter de la saisine ;

Subsidiairement ;

Condamner la S.C.I LES 7B à payer à M. [C] [C] [W] les sommes suivantes :

1.840 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis du 1er mars 2015 au 1er avril 2016 ;

184 euros à titre de congés payés y afférents ;

7.120 eruos à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et abusif ;

500 euros à titre de dommages et intérêts pour violation de l'article L 1232-2 du code du travail ;

Remise de bulletins de salaires rectifiés, d'un certificat de travail et d'une attestation Pôle emploi conformes sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de 15 jours après la notification de la décision à intervenir ;

Intérêts au taux légal à compter de la saisine ;

Prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail liant M. [C] [C] [W] à M. [L] [Y] au torts de M. [L] [Y] ;

Condamner M. [L] [Y] à payer à M. [C] [C] [W] les sommes suivantes :

4.783,98 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

478,39 euros à titre de congés payés y afférents ;

7.120 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et abusif ;

4.767,37 euros à titre d'indemnité légale de licenciement ;

Remise de bulletins de salaires rectifiés, d'un certificat de travail et d'une attestation Pôle emploi conformes sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de 15 jours après la notification de la décision à intervenir ;

Intérêts au taux légal à compter de la saisine ;

Débouter la SCI LES 7B et M. [L] [Y] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

Condamner la S.C.I LES 7B et M. [L] [Y] à payer à M. [C] [C] [W] la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens ;

M. [W] fait essentiellement valoir que :

- sur la recevabilité des demandes invoquées à l'encontre de la SCI 7 B

- la requête datée du 7 septembre 2016, envoyée le 14 septembre et notifiée le 16 septembre 2016 au greffe du conseil des prud'hommes par présentation de la lettre recommandée était bien une requête dirigée contre :

1. M. [L] [Y] ' particulier / employeur, de nationalité Française domicilié [Adresse 1] à [Localité 5] ;

2. La société Les 7B S.C.I dont le siège social est [Adresse 7] à [Localité 6] dont le numéro SIREN est 332847581, prise en la personne de son représentant légal ;

- l'interruption de la prescription ou du délai d'action n'exige pas que l'acte interruptif soit porté à la connaissance du débiteur, ni même de la juridiction saisie, dans le délai de prescription,

- il suffit que la demande en justice ait été formée ou adressée au greffe par lettre recommandée avant l'expiration du délai d'action ou de la prescription pour que l'action soit recevable,

- la SCI LES 7 B n'était pas une nouvelle partie à l'instance, puisqu'elle était personnellement visée dans la requête à côté de M. [Y],

- par ailleurs, rien n'interdit à une partie de former en cours d'instance des demandes additionnelles dès lors qu'elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant,

- sur la prétendue nullité de la procédure

- la nullité tenant à l'absence de conciliation est susceptible d'être couverte lorsqu'elle n'est pas imputable aux parties, y compris devant la cour d'appel,

- dans la mesure où ses demandes portaient notamment sur la requalification de son contrat de travail, la formalité préalable de conciliation ne s'imposait pas,

- sur le bien-fondé de la condamnation in solidum de M. [Y]

- il existe manifestement une confusion de patrimoine, d'intérêt, d'activité et de direction entre M. [L] [Y] à titre personnel, pour lequel il a travaillé par chèques emploi- service entre septembre 2011 et janvier 2013, sans que le contrat ne soit jamais rompu, d'une part, et la SCI LES 7 B, d'autre part,

- sa demande de dommages et intérêts tient compte de son ancienneté globale et de la qualité manifeste de co-employeur de M. [Y], qui justifie de ce fait une condamnation solidaire,

- subsidiairement, la cour devra constater les graves manquements de M. [Y], concernant le contrat conclu avec ce dernier, justifiant la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de M. [Y],

- les demandes en cause d'appel ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises aux premiers juges, à savoir la condamnation solidaire de M. [Y] et de la SCI LES 7 B à lui payer l'indemnité de requalification de son contrat de travail, ses salaires encore dus

et ses indemnités de rupture,

- il a effectué un travail de même nature sur les mêmes immeubles appartenant à M. [Y] via sa SCI et sous sa direction,

- aucune prescription ne saurait être encourue au titre de la rupture du contrat de travail avec M. [Y], dans la mesure où celui-ci n'a jamais été rompu s'il n'y a pas eu continuité avec la SCI, et que le contrat de travail serait donc toujours en cours,

- sur le bien-fondé des demandes formées à l'encontre de la SCI 7 B

- le contrat à durée déterminée sans terme précis conclu avec la SCI LES 7 B doit être requalifié en contrat à durée indéterminée au motif qu'il a été conclu hors des 5 cas limitativement énumérés par l'article L.1247-7 du code du travail,

- il s'agit d'ailleurs de la continuité du contrat non signé qui le liait à M. [Y] depuis le 1er septembre 2011 et qui n'a jamais été rompu, ce qui empêchait la SCI LES 7 B de lui faire régulariser un contrat de travail à durée déterminée, du fait de sa qualité de co-employeur,

- la rupture du contrat de travail doit dès lors être requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- il a eu à subir à deux reprises les manquements de M. [L] [Y] à son endroit, d'abord en qualité d'employeur à titre personnel puis en qualité de gérant de la SCI LES 7B.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures,

Par ordonnance en date du 25 novembre 2021, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet du 13 janvier 2022.

MOTIFS

Sur les demandes formées à l'encontre de M. [Y]

Il n'est pas contestable que le contrat de travail a été conclu entre M. [W] et la SCI LES 7B.

L'intimé invoque en cause d'appel le co emploi pour fonder sa demande de condamnation solidaire de M. [Y] et de la SCI LES 7 B.

Les appelants estiment qu'il s'agit d'une prétention nouvelle irrecevable.

L'article 563 du code de procédure civile dispose que pour justifier en appel les prétentions qu'elles avaient soumises au premier juge, les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux, produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves.

Les parties peuvent ainsi invoquer des moyens nouveaux et produire de nouvelles pièces à l'appui de leurs prétentions, mais elles ne peuvent former de nouvelles prétentions. Elles ne doivent pas modifier la demande primitive.

En l'espèce, il s'agit de la part de l'intimé d'un nouvel argument tendant aux mêmes fins qu'en première instance, à savoir la condamnation in solidum des appelants.

M. [W] n'a en aucun cas modifié l'objet de sa prétention et n'a ajouté aucune demande.

Concernant le co emploi, il convient de relever que l'intimé fonde sa demande sur une confusion de patrimoine, d'intérêt, d'activité de direction entre M. [Y] à titre personnel et la SCI LES 7 B.

Les pièces des parties montrent que l'intimé a effectivement travaillé pour le compte de M. [Y] à titre personnel entre septembre 2011 et janvier 2013 et qu'il a été embauché par la SCI LES 7B par contrat de travail du 2 février 2015.

Les emplois qu'il a occupés respectivement pour l'un et pour l'autre sont différents, homme à tout faire pour M. [Y] et ouvrier qualifié pour la SCI LES 7B afin de réaliser des travaux définis sur un lieu précis.

Le fait que M. [Y] soit également le gérant de la SCI ne suffit pas à caractériser une situation de co emploi, laquelle concerne plus spécifiquement les groupes de sociétés.

Bien plus, M. [W] indique ne plus travailler pour le compte personnel de M. [Y] depuis janvier 2013, soit deux avant la conclusion du contrat de travail avec le SCI LES 7B, ce qui exclut d'autant plus une situation de co emploi.

Il conviendra dans ces circonstances de mettre hors de cause M. [Y] et de réformer le jugement dont appel sur ce point, justifiant en outre la condamnation de l'intimé au versement d'une somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur les demandes nouvelles présentées pour la première fois en cause d'appel liées à un contrat de travail conclu avec M. [Y] du 01/09/2011 au 31/01/2013

Aux termes des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile, 'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.'

Il n'est pas contestable que le salarié n'avait présenté en première instance aucune demande de quelque nature que ce soit concernant un contrat de travail conclu avec M. [Y] le 1er septembre 2011 et qui aurait pris fin le 31 janvier 2013.

L'intimé considère que sa nouvelle prétention est légitime eu égard à la révélation d'un fait, à savoir l'absence de tout lien entre les appelants qui 'soutiennent qu'il n'y aurait aucune continuité entre les salaires payés par M. [Y] jusqu'en 2013 et le CDD signé avec la SCI LES 7B'.

La partie qui invoque l'évènement nouveau doit démontrer qu'elle n'en a pas eu ou n'a pas pu en avoir connaissance antérieurement et que la nouvelle prétention concerne une question qui est bien née de la survenance d'un fait postérieure au jugement.

L'intimé ne peut valablement soutenir découvrir en cause d'appel l'absence de tout lien entre les appelants dans le cadre du présent litige dans la mesure où M. [Y] a contesté en première instance être son employeur, seule la SCI LES 7B étant liée contractuellement avec M. [W].

Les demandes présentées par ce dernier à l'encontre de M. [Y] au titre du contrat de travail entre eux conclu entre le 1er septembre 2011 et le 31 janvier 2013 sont dès lors irrecevables.

Sur l'irrecevabilité des demandes formées à l'encontre de la SCI 7B

La SCI LES 7B estime que les demandes présentées à son encontre sont prescrites.

L'article L.1471-1 du code du travail dispose :

« Toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit. »

Aux termes de l'article 2241 du code civil, la demande en justice interrompt le cours de la prescription.

Lorsque l'action est fondée sur la réalité du motif du recours au contrat à durée déterminée indiqué sur le contrat, le point de départ du délai de prescription est le terme du contrat, en l'espèce le 1er mars 2015.

L'article R. 1452-1 du code du travail dans sa version applicable au litige précise que 'La demande en justice est formée soit par une requête, soit par la présentation volontaire des parties devant le bureau de conciliation et d'orientation.

La saisine du conseil de prud'hommes, même incompétent, interrompt la prescription.'

Aux termes des dispositions de l'article 2242 du code civil, « l'interruption résultant de la demande en justice produit ses effets jusqu'à l'extinction de l'instance ».

Il résulte de l'ensemble de ces observations que c'est la date d'envoi, au conseil de prud'hommes, de la lettre recommandée le saisissant qui fixe la date d'introduction de l'instance et, par conséquent, la date d'interruption de la prescription.

En effet, ce n'est pas la date à laquelle le défendeur reçoit sa convocation devant le bureau de conciliation qui compte, mais la date de la demande.

En l'espèce, par requête envoyée par lettre recommandée avec accusé de réception le 14 septembre 2016, M. [W] a saisi le conseil de prud'hommes d'Orange contre M. [Y] et la société LES 7B SCI aux fins de voir requalifier son contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, dire et juger que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et voir condamner M. [Y], la SCI LES 7B à lui verser diverses sommes.

Pour interrompre la prescription ainsi que les délais pour agir, une citation en justice, même en référé, un commandement ou une saisie doivent être signifiés à celui qu'on veut empêcher de prescrire.

Il apparaît que la SCI LES 7B, bien que mentionnée en tant que partie à convoquer, n'a pas fait l'objet d'une convocation par le greffe du conseil de prud'hommes d'Orange, ce qui ne peut avoir aucun effet dans la mesure où pour la Cour de cassation, c'est la date d'envoi au conseil de prud'hommes de la lettre recommandée le saisissant qui fixe la date d'introduction de l'instance et, par conséquent, la date d'interruption de la prescription. Ce n'est donc pas la date à laquelle le défendeur reçoit sa convocation devant le bureau de conciliation qui compte, mais la date de la demande.

Les demandes présentées à l'encontre de la SCI LES 7B ne sont dès lors pas prescrites.

Sur l'absence de tentative de conciliation

Aux termes des dispositions de l'article L. 1411-1 du code du travail : ' Le conseil de prud'hommes règle par voie de conciliation les différends qui peuvent s'élever à l'occasion de tout contrat de travail soumis aux dispositions du présent code entre les employeurs, ou leurs représentants, et les salariés qu'ils emploient.

Il juge les litiges lorsque la conciliation n'a pas abouti.'

Cette irrecevabilité des demandes présentées par la SCI LES 7B est sans objet tenant la recevabilité des prétentions émises par le salarié à l'encontre de celle-ci telles que figurant dans la requête du 14 septembre 2016, étant précisé que par citation de cette SCI en date du 20 novembre 2017, les demandes y figurant sont identiques à celles présentées dans la requête primitive.

Sur la requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée

Le contrat de travail à durée déterminée sans terme précis a été signé entre les parties le 2 février 2015 'pour effectuer les travaux de rénovation dans les locaux de la SCI LES 7B située à [Localité 4]'.

Relève de la notion d'accroissement temporaire d'activité visée à l'article L. 1242-2, 2° du code du travail, l'exécution d'une tâche occasionnelle, précisément définie et non durable ne relevant pas de l'activité normale de l'entreprise.

Cette situation vise les tâches ponctuelles qui ne relèvent pas de l'activité principale de l'entreprise mais qui peuvent se reproduire (Circ. DRT no 18-90, 30 oct. 1990, BO Trav. 1990, no 24). Il peut s'agir de travaux exceptionnels auxquels l'entreprise ne peut faire face avec son personnel, compte tenu des compétences spécifiques qu'ils requièrent.

Le contrat doit ainsi prévoir :

- la réalisation d'une tâche occasionnelle,

- l'exécution d'une tâche déterminée, précise et temporaire,

- le lieu de l'exécution de la prestation.

Pour pallier l'insécurité à laquelle se trouve exposé le salarié, l'article L. 1242-7 du code du travail impose que le contrat conclu sans terme précis comporte impérativement une durée minimale. Cette période constitue une garantie minimale de ressources qui interdit à l'employeur de rompre le contrat à durée déterminée avant son expiration sauf à verser au salarié les salaires correspondant au temps restant à courir.

En l'espèce, la cour relève que le contrat litigieux respecte l'ensemble de ces critères de sorte que sa régularité ne saurait être remise en cause.

Il apparaît encore que les documents de fin de contrat prévoient que ce dernier s'est exécuté du 2 février au 1er mars soit sur une durée d'un mois de date à date, ce qui est d'ailleurs confirmé par le salarié lui-même dans un courrier qu'il adresse à la SCI LES 7B le 5 mai 2015 (pièce n°11 de M. [W]) :

'Monsieur,

Je me suis rendu le 27 avril 2015 au cabinet FIDUNEC EYNAUD expertise pour récupérer mon solde de tout compte pour la période de travail du 02 février 2015 au 1 mars 2015...'

Aucun élément ne vient contredire cette constatation et le jugement critiqué sera réformé en ce qu'il requalifié le contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée.

La réformation devra également intervenir sur les conséquences financières de la requalification ordonnée par les premiers juges.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

La décision entreprise sera réformée en ce qu'elle a condamné M. [Y], SCI LES 7B, prise en la personne de son représentant légal en exercice à payer à M. [W] la somme de 900 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il sera en outre fait application de ces dispositions au profit de la SCI LES 7B à hauteur de la somme de 1 000 euros.

Le jugement critiqué mérite encore la réformation en ce qui concerne les dépens de première instance qui devront être mis à la charge de M. [W], lequel sera également condamné aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Par arrêt contradictoire, rendu publiquement en dernier ressort,

Dit que les demandes présentées par M. [W] à l'encontre de M. [Y] au titre du contrat de travail entre eux conclu entre le 1er septembre 2011 et le 31 janvier 2013 sont irrecevables comme nouvelles en cause d'appel,

Rejette l'exception d'irrecevabilité tenant à la prescription des demandes présentées à l'encontre de la SCI LES 7B,

Dit que l'irrecevabilité des demandes présentées à l'encontre de la SCI LES 7B pour défaut de tentative de conciliation est sans objet,

Réforme le jugement rendu par le conseil de prud'hommes d'Orange le 7 février 2019 en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

Met hors de cause M. [Y],

Condamne M. [W] à payer à M. [Y] la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [W] à payer à la SCI LES 7B la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [W] aux dépens de premiere instance et d'appel,

Arrêt signé par Monsieur ROUQUETTE-DUGARET, Président et par Madame BERGERAS, Greffière .

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 5ème chambre sociale ph
Numéro d'arrêt : 19/00966
Date de la décision : 17/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-17;19.00966 ?
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