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10/05/2022 | FRANCE | N°19/01272

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 5ème chambre sociale ph, 10 mai 2022, 19/01272


ARRÊT N°



N° RG 19/01272 - N° Portalis DBVH-V-B7D-HJQG



VH/ID



CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DEPARTAGE DE NIMES

04 mars 2019



RG :F 16/00220





Société QOVANS INDUSTRIE





C/



[H]





































COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH



ARRÊT DU 10 MAI 2022


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APPELANTE :



Société QOVANS INDUSTRIE

[Adresse 6]

[Localité 1]



Représentée par Me Marie MAZARS de la SELARL FAVRE DE THIERRENS BARNOUIN VRIGNAUD MAZARS DRIMARACCI, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Jean-jacques SALMON de la SELARL SALMON & ASSOCIES, avocat au barreau de CAEN



INTIMÉ :

...

ARRÊT N°

N° RG 19/01272 - N° Portalis DBVH-V-B7D-HJQG

VH/ID

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DEPARTAGE DE NIMES

04 mars 2019

RG :F 16/00220

Société QOVANS INDUSTRIE

C/

[H]

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH

ARRÊT DU 10 MAI 2022

APPELANTE :

Société QOVANS INDUSTRIE

[Adresse 6]

[Localité 1]

Représentée par Me Marie MAZARS de la SELARL FAVRE DE THIERRENS BARNOUIN VRIGNAUD MAZARS DRIMARACCI, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Jean-jacques SALMON de la SELARL SALMON & ASSOCIES, avocat au barreau de CAEN

INTIMÉ :

Monsieur [Y] [H]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représenté par Me Michel THEVENIN de la SCP JURI-OC, avocat au barreau de NIMES

Représenté par Me Jean-michel CHARBIT de la SCP JURI-OC, avocat au barreau de MONTPELLIER

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 08 Février 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Madame Virginie HUET, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Madame Virginie HUET, Conseillère

M. Michel SORIANO, Conseiller

GREFFIER :

Madame Isabelle DELOR, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

À l'audience publique du 02 Mars 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 10 Mai 2022

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 10 Mai 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS

M. [Y] [H] a été embauché par la société CLIPS (devenue en 2015 la société QOVANS INDUSTRIE), et qui est une filiale du groupe Saint Gobain, et dont l'activité est de vendre des cloisons de bureaux, dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet, à compter du 14 novembre 2011, en qualité de délégué technico-commercial, cadre, niveau C2, coefficient 360.

Au dernier état des relations contractuelles au sein du groupe SAINT-GOBAIN, M. [H] occupait un poste de chargé d'affaires aménagements intérieurs.

Par avenant en date du 26 mai 2014, avec effet au 1er janvier 2014, les parties ont modifié le contrat de travail.

La société QOVANS INDUSTRIE a convoqué M. [H] à un entretien préalable selon correspondance du 11 septembre 2015 pour un entretien fixé au 23 septembre 2015.

M. [H] était licencié pour insuffisance de résultat selon courrier envoyé en recommandé du 4 novembre 2015.

* * *

M. [H] a saisi le conseil de prud'hommes de Nîmes aux fins de voir son licenciement requalifié en licenciement sans cause réelle et sérieuse et qu'il lui soit alloué les sommes suivantes :

- 75 000 euros au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse;

- 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le conseil de prud'hommes de Nîmes en formation de départage selon jugement du 04 mars 2019 a requalifié le licenciement de M. [H] en licenciement sans cause réelle et sérieuse et a condamné la société QOVANS INDUSTRIE à payer à M. [H] la somme de 40 608,00 euros à titre de dommages et intérêts outre la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par acte du 27 mars 2019, la Société QOVANS INDUSTRIE a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 25 octobre 2010 la société demande à la cour de :

Réformer le jugement dont appel,

A titre principal,

Dire et juger le licenciement de M. [H] comme parfaitement justifié,

Débouter purement et simplement M. [H] de l'intégralité de ses demandes,

Condamner M. [H] à payer à la société QOVANS INDUSTRIE la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner M. [H] aux entiers dépens,

A titre subsidiaire,

Vu l'article L1235-3 du code du travail,

Réduire dans les plus amples proportions les demandes présentées par M. [H],

Dire expressément que les éventuels dommages et intérêts seront en brut,

La société QOVANS INDUSTRIE soutient que :

- l'insuffisance professionnelle de M. [H] est caractérisée :

- Il est reproché aux termes de la correspondance de notification de licenciement à M. [H] une baisse forte de l'activité sur son secteur de prospection, liée à une absence de prospection de sa part.

- M. [H] est affecté sur un secteur extrêmement dynamique Rhône-Alpes et [Localité 5], et qu'il s'agit pour [Localité 5] de la troisième plus grande ville de France à forte concentration de sites tertiaires et que M. [H] n'a réalisé strictement aucun développement.

- Il est reproché à M. [H] de n'avoir réalisé aucune action de prospection.

- l'insuffisance professionnelle peut constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement lorsqu'elle repose sur des éléments précis, objectifs et imputables au salarié.

En l'état de ses dernières écritures en date du 07 février 2022 contenant appel incident M. [H] demande à la cour de :

- Confirmer le jugement de départage du 4 mars 2019 rendu par le conseil de prud'hommes de Nîmes en ce qu'il a déclaré sans cause réelle et sérieuse le licenciement opéré à l'encontre de M. [H], sauf à majorer le quantum des dommages et intérêts,

En conséquence :

-condamner la société QOVANS INDUSTRIE à lui payer les sommes de :

-75.000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle au lieu des 40 608 euros obtenus en première instance ;

-2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

Il fait valoir que :

-aucun reproche préalable ne lui aurait jamais été fait

- tous les secteurs d'activité de l'entreprise sont en baisse

- on ne lui a pas donné les moyens de travailler

- les produits QOVANS INDUSTRIE sont trop chers

- il a dû faire le constat d'une baisse de la qualité des produits QOVANS INDUSTRIE

- le siège aurait traité des affaires en direct sur son secteur

- les plans d'action relevaient de la direction et que M. [H] devait simplement les suivre

- son licenciement cache en réalité une suppression de poste.

* * *

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.

Par ordonnance en date du 1er décembre 2022, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 8 février 2022.

MOTIFS

A titre préliminaire :

La cour constate qu'à l'audience, les parties se sont accordées pour que soit retirée des débats la pièce n° 59 de M. [H].

Sur le licenciement :

La lettre de licenciement qui fixe les limites du litige est ainsi rédigée :

'Monsieur,

Nous faisons suite à l'entretien préalable du 23 septembre 2015 où nous vous avons reçu pour recueillir vos explications sur les faits reprochés. Compte tenu des éléments évoqués, nous sommes au regret de vous notifier votre licenciement pour insuffisance professionnelle.

Nous avons tout d'abord à déplorer sur vos 2 secteurs une baisse significative du volume d'activité sans corrélation directe avec une diminution d'activité sur le marché local du tertiaire.

L'analyse comparative des chiffres du ler semestre fait apparaître une très forte érosion du volume de CA enregistré sur le secteur RAA. Entre 2015 et 2014 le secteur enregistre une perte de 33% des volumes, cette baisse se porte à 37% si on compare l'activité 2015 avec 2013.

L'analyse des résultats annuels du secteur Sud-.Est est similaire à celle du Rhône-Alpes, l'activité connaît un recul net et «continu depuis 2 ans. Nous vous rappelons que la baisse de CA de ces 2 secteurs sur le 1er semestre est nettement supérieure à celle constatée sur l'ensemble de l'activité QOVANS INDUSTRIE -(hors périmètre stratégique de la région IDF en pleine restructuration depuis deux ans).

Cette baisse de chiffres s'explique notamment par votre manque de compétences dans les actions de conquête de clientèle pour faire face à l'érosion de votre portefeuille. Cette érosion, principalement liée à une mauvaise gestion de vos secteurs commerciaux sur lesquels, aucun renouvellement, aucun vivier de futurs clients ou consolidation n'ont été mis en ouvre. Vous êtes notamment responsable de la perte de chiffre d'affaires sur les clients "supports", base de la rentabilité et d'apport de marge pour le groupe. Vous avez plutôt fait le choix de vous reposer sur un chiffre d'affaires facile apportés par des clients captifs d'un système technique au lieu de diversifier votre clientèle. L'exemple de l'impact actuel de l'entreprise LAMY MAILLARD en est la parfaite illustration. Ces reproches vous avaient d'ailleurs déjà été faits par l'ancienne direction commerciale sans que cela ait engendré une prise de conscience ou un changement de votre part.

Le manque d'actions ciblées sur votre secteur se retrouve notamment sur [Localité 5], la 3ème plus grande ville de France à forte concentration de sites tertiaires. Nous avons a y déplorer une absence totale de développement commercial de votre part. En effet, malgré des observations et relances répétées de la Direction depuis 2012,aucune prescription n'a été réalisée et aucun portefeuille clients a été créé dans la gamme prioritaire aluminium de Qovans industrie sur cette zone.

Sur le secteur Rhône Alpes vous n'avez pas su jouer votre rôle de prescription et d'apporteur d'affaires attendu par nos clients ' Partenaires', notamment CDL. Plus généralement, vous n'avez pas assumé et su tenir ce secteur malgré votre engagement à gérer deux secteurs en avançant des compétences qui n'ont jamais pu être démontrées. Malheureusement l'attrait financier de la rémunération proposée et de la notoriété a pris le dessus sur les responsabilités et les charges de travail à assumer.

La conséquence est d'autant plus impactante pour l'entité que les secteurs RAA et Sud-Est représentent la deuxième zone économique en termes de potentiel pour la société QOVANS INDUSTRIE.

Afin de vous aider dans la prescription, la Direction commerciale a pourtant essayé de vous soutenir dans différents projets. Prenons l'exemple de la Mutuelle des motards (dossier de grande ampleur) pour lequel la Direction avait fait le nécessaire depuis plus d'un an pour vous obtenir un créneau de soutenance par une prescription ciblée et pilotée. Malgré les efforts faits en amont sur ce projet par la Direction pour vous préparer le terrain, vous n'avez pas su mener votre soutenance et votre prestation a été jugée décevante et non appropriée par les donneurs d'ordre.

Autre exemfple, dans ce dossier AMDM vous n'avez même pas contacté l'entreprise locale AC2R malgré la démarche commerciale entamée en amont par la direction.

Les différents transferts d'informations qui vous ont été fait notamment via Explore n'ont été suivi d'aucune action engagée de votre part.

Malgré ces chiffres critiques que vous avez constatés comme nous sur les tableaux de bord communiqués de manière journalière aucune proposition concrète traction n'a été présentée de votre part à la direction commerciale. Nous ne constatons aucune efficacité dans les démarches entreprises limitées trop souvent à des invitations restaurants des clients entraînant un dépassement conséquent du montant de frais professionnels par rapport au budget qui vous été alloué.

Sur ce point aussi il n'y a eu aucune prise en compte et correctif apporté de votre part sur le souci de gestion du budget dont nous vous avons fait part à plusieurs reprises.

Pour finir, sur votre mission liée au dépôt de [Localité 3], nous ne pouvons que constater la montée en charge totalement insuffisante de ce dépôt malgré des moyens mis à votre disposition. Nous vous rappelons que ce projet était initié en collaboration avec vous afin de capter des clients 'Supports' et répondre aux besoins de proximité clients que évoquiez constamment pour réussir sur ce segment clientèle. Vous avez pour autant défini cette mission comme votre c'ur d'expertise (négoce matériaux). Nous vous avons donc mis à disposition le choix du site et du personnel afin de vous mettre dans les meilleures conditions possibles de réussite. Nous vous avons accordé l'autonomie nécessaire pour le développement et les choix stratégiques, coûts logistiques, conditionnements et mises en stock. Malgré cela, force est de constater que c'est un échec total notamment sur la prise de chiffre d'affaires attendu.

L'ensemble de ces constats d'insuffisance professionnelle ,nous amène aujourd'hui à devoir prendre la décision d'un licenciement à votre encontre. La première présentation de cette lettre sera donc le point de départ d'un préavis de 3 mois que nous vous dispensons de réaliser. Nous vous dispensons de travail pendant votre préavis cependant nous vous rappelons que l'inexécution du préavis de licenciement n'a pas pour conséquence d'avancer la date à laquelle le contrat prend fin.

L'ensemble de vos documents de fin de contrat et votre solde de tout compte vous seront envoyés par lettre recommandée à la fin de votre période de préavis.

Concernant le matériel mis à votre disposition par l'entreprise (ordinateur et ses accessoires, téléphone portable avec accessoires, et tout matériel ou documentation -en votre possession), nous vous invitons à le restituer à [I] [J] au dépôt de [Localité 3] le mardi 17 novembre 2015 à 14h00.

Enfin, le véhicule de fonction étant un avantage en nature nous vous confirmons que vous continuez de bénéficier de son usage même en cas de dispense de préavis Nous vous demanderons de le restituer le dernier jour de votre contrat. Nous reviendrons vers vous ultérieurement pour convenir de la date et l' heure de la restitution (...).

L'insuffisance professionnelle peut constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement lorsqu'elle repose sur des éléments précis, objectifs et imputables au salarié.

L'insuffisance de résultats peut résulter, en l'absence de faute du salarié, de son incapacité à atteindre les objectifs fixés, en dépit de ses efforts. Il importe toutefois que ces objectifs correspondent à des normes sérieuses et raisonnables.

L'insuffisance de résultats ne légitime le licenciement que si elle est « établie et imputable au salarié », même s'il n'est pas exigé que celui-ci ait commis une faute.

En l'espèce, il est reproché au salarié une baisse de son chiffre d'affaires sur ses deux secteurs (Sud-Est et Rhône-Alpes-Auvergne).

Le salarié explique la baisse du chiffre d'affaires par :

- une baisse générale du CA

- une conjoncture économique générale délicate

- une politique tarifaire excessive

- une baisse de qualité des produits

- des affaires directement traitées par le siège social

* * *

L'employeur affirme qu'il ressort de sa pièce numéro 12 que le chiffre d'affaires réalisé par M. [H] sur le secteur Sud-Est et le secteur RAA placé sous sa responsabilité n'est pas atteint. Il affirme qu'à fin novembre 2015, l'objectif était à 1,131.000 euros, et que M. [H] a réalisé seulement 515.000 euros de chiffre d'affaires à comparer avec 800.000 euros sur l'année précédente pour le secteur Sud-Est. Pour le secteur RAA l'objectif était à 1,8 millions d'euros à comparer avec un chiffre d'affaires réalisé l'année précédente à un peu moins de 1,4 millions d'euros, M. [H] réalisant 1,3 millions d'euros. La société en déduit qu'elle démontre que d'une part M. [H] ne réalise pas ses objectifs, mais d'autre part réalise des chiffres en forte baisse par rapport à l'exercice précédent.

La pièce n°12 est un assemblage de 69 pages toujours numérotées de 1 à 3 constituées de tableaux et de schémas peu exploitables et non exploités dans les conclusions des parties. La société ne démontre pas la baisse du chiffre d'affaires de M. [H] par ce biais.

En revanche, il résulte de l'entretien annuel d'évaluation de la performance en date du 20 mars 2013 (pièce numéro 10) que la réalisation des objectifs fixés a été réalisée à 77 % pour le secteur global et à 53 % pour les cloisons ALU. La note attribuée est ainsi sur ces deux points de 'D' (notation allant de A à D).

L'employeur ne verse cependant aucun autre élément permettant de justifier avoir informé le salarié des reproches relatif à son chiffre d'affaires. Il n'est par exemple pas versé aux débats les entretiens annuels suivant l'année 2013 alors que le licenciement intervient fin 2015.

Le salarié ne conteste pas la baisse de son chiffre d'affaires.

Le conseil de prud'hommes dans son jugement, retient que les objectifs auraient été fixés de manière tout à fait surévaluée et ce délibérément, aux fins de priver les commerciaux de leur part variable de rémunération. Le juge départiteur s'est appuyé pour retenir ce moyen sur la longue et très détaillée attestation de M. [E] (pièce n°30 du salarié).

La cour constate que l'employeur pour contester cette attestation renvoie simplement à la lecture de sa pièce n° 13 'synthèse activité par secteur année 2014 et 2015", et affirme ainsi que cette attestation est démentie par les résultats des commerciaux de l'entreprise, ce qui est largement insuffisant.

L'employeur affirme que la baisse d'activité de M. [H] est liée à l'absence de prospection réalisée par M. [H] mais ne verse aucun élément probant sur ce point afin de caractériser son insuffisance.

Le salarié verse aux débats une pièce n°9 représentant le tableau des CA des 6 commerciaux de la société avec l'évolution de leur chiffre d'affaires entre 2008 et fin novembre 2015. Il ressort de cette pièce qu'effectivement la baisse du chiffre d'affaires affecte chacun des six salariés commerciaux.

La cour constate de surcroît qu'il était effectivement confié au salarié en plus du secteur SE qui compte déjà 13 départements, le secteur RAA avec 12 départements outre la responsabilité d'une agence dans le sud (trouver le bâtiment, mettre en place les produits, former une personne, etc') et que cela pouvait le mettre en difficulté en terme de charge de travail.

La cour constate que l'employeur était conscient de cette difficulté comme en atteste son courriel dans lequel il indique ' statistiques 2015 : le niveau du retard atteint sur S1 et constaté depuis le début de l'année confirme que le secteur doit être piloté à temps complet (...) une redistribution des secteurs commerciaux RA et SE est à envisager ».

Il ressort des pièces versées aux débats, sans qu'elles soient utilement démenties par l'employeur, que les secteurs alloués à M. [H] ont été suite à son licenciement ré-attribués à deux commerciaux (M. [W] sur le secteur RAA et M. [T] sur le secteur SUD EST).

Il ressort par ailleurs du journal du groupe QOVANS du premier trimestre 2015 : « Un premier trimestre morose. Les activités du groupe sont en retrait par rapport au budget arrêté pour l'année 2015. Sur un montant annuel de chiffre d'affaires de 34,5 millions, la performance du premier trimestre est en retrait de 20% par rapport aux attentes. »

Il convient de souligner de manière surabondante que le juge départiteur a relevé le courriel produit par M. [H] en date du 21 juillet 201 5 de son directeur commercial M. [M] [A] adressé à M. [S] [D] ainsi libellé :

'Le dossier est transmis au SRC (service relation client).

Nous ouvrons le compte en 'prospects' le temps de l'ouvrir avec le KBIS.

J'ai demandé quand même au commercial (celui que je ne veux pas garder sur la région de te contacter pour présentation de la gamme).Tu me donneras ton avis sur le gars.

Bonne journée ».

Comme l'a justement relevé le juge départiteur, il ressort de la lecture de ce courriel que le directeur commercial dès le mois de juillet 2015 avant même d'attendre les résultats commerciaux en termes de chiffres d'affaires et objectifs de l'année 2015 savait déjà d'ores et déjà qu'il ne voulait pas conserver M. [H].

Enfin l'employeur ne démontre pas avoir fait part à son salarié de soucis de gestion du budget afin qu'il puisse le prendre en compte ou y apporter des correctifs. Il ne rapporte pas non plus la preuve des moyens qu'il allègue avoir mis à disposition du salarié concernant sa mission liée au dépôt de [Localité 3].

Sans qu'il soit nécessaire d'étudier les autres moyens soulevés par le salarié comme la baisse de la qualité des produits, l'augmentation des tarifs, le défaut de moyens informatique mis à sa disposition... la cour constate que la société ne rapporte pas la preuve, dont elle supporte pourtant la charge, de l'imputabilité de la baisse du chiffre d'affaires de M [H] et ainsi de son insuffisance professionnelle.

Ainsi c'est à bon droit que le juge départiteur du conseil de prud'hommes par des motifs non contradictoire avec ceux de la cour, a retenu que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse et qu'ainsi le jugement sur ce point sera confirmé.

Sur les conséquences du licenciement :

M. [H] sollicite l'allocation d'une somme de 75 000 euros à titre de dommages et intérêts.

L'employeur indique que M. [H] disposait d'un salaire de 4 434 euros.

M. [H] affirme qu'il disposait d'un salaire de 5.677,39 euros.

L'étude des bulletins de paie montre que le salaire moyen est de 4 434 euros, en effet le salarié a pris en compte dans son calcul le dernier bulletin de salaire lequel contient les indemnités de licenciement.

Conformément aux dispositions de l'article L.1235-3 du code du travail dans sa version applicable au litige, le salarié peut prétendre à une indemnité minimale forfaitaire à hauteur de 26 605 euros.

Par ailleurs, la cour constate que M. [H] ne communique aucun document justifiant de sa situation à l'égard du marché de l'emploi. L'employeur verse quant à lui une pièce du profil LINKEDIN du salarié qui indique avoir retrouvé un emploi en avril 2016 au sein de la société ABCD INTERNATIONAL en qualité de commercial, pièce non contredite par le salarié. Le salarié est donc resté deux mois sans emploi.

M. [H] argue avoir été licencié dans des conditions brutales et vexatoires justifiant l'allocation de dommages et intérêts, pour autant il ne verse aucun élément aux débats permettant de justifier son allégation, ni d'un quelconque préjudice supplémentaire. Le seul fait que le licenciement soit sans cause réelle et sérieuse n'est pas de nature vexatoire.

En conséquence, la décision du conseil de prud'hommes sera confirmée sauf dans le quantum de la somme allouée qui sera réduite à la somme de 26 605 euros.

Sur l'article 700 du code de procédure civile :

L'équité commande de condamner l'employeur au paiement de la somme de 1 000 euros au titre de l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Par arrêt contradictoire, rendu publiquement en dernier ressort

- Confirme la décision rendue par le conseil de prud'hommes de Nîmes en formation de départage le 04 mars 2019 sauf à réduire le montant de l'indemnisation allouée à la somme de 26 605 euros,

- Ordonne le remboursement par l'employeur aux organismes concernés de tout ou partie des indemnités de chômage payées au salarié licencié du jour de son licenciement au jour du prononcé de la présente décision, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage, et dit qu'une copie certifiée conforme de la présente sera adressée à ces organismes conformément aux dispositions de l'article L 1235-4 du code du travail,

- Rappelle que les intérêts au taux légal courent sur les sommes à caractère salarial à compter de la réception par l'employeur de la convocation à comparaître devant le bureau de conciliation, et à défaut de demande initiale, à compter de la date à laquelle ces sommes ont été réclamées, que s'agissant des créances salariales à venir au moment de la demande, les intérêts moratoires courent à compter de chaque échéance devenue exigible, et qu'ils courent sur les sommes à caractère indemnitaire, à compter du jugement déféré sur le montant de la somme allouée par les premiers juges et à compter du présent arrêt pour le surplus ;

- Rappelle en tant que de besoin que le présent arrêt infirmatif tient lieu de titre afin d'obtenir le remboursement des sommes versées en vertu de la décision de première instance assortie de l'exécution provisoire ;

- Condamne la SAS QOVANS INDUSTRIE à payer à M. [Y] [H] la somme de 1 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamne la SAS QOVANS INDUSTRIE aux dépens d'appel.

Arrêt signé par Monsieur ROUQUETTE-DUGARET, Président et par Madame DELOR, Greffière.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 5ème chambre sociale ph
Numéro d'arrêt : 19/01272
Date de la décision : 10/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-10;19.01272 ?
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