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04/05/2022 | FRANCE | N°21/02199

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 4ème chambre commerciale, 04 mai 2022, 21/02199


ARRÊT N°





N° RG 21/02199 - N° Portalis DBVH-V-B7F-ICHT





CO









JUGE COMMISSAIRE DE CARPENTRAS

21 mai 2021

RG:19/00006











LE COMPTABLE DU SIP DE CARPENTRAS



C/



[P]

[V]





Grosse délivrée le 04 mai 2022 à :



- Me Izalde VINCENTI

- Me Frédéric FRANC

- Me Stéphane GOUIN

+MP




















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COUR D'APPEL DE NÎMES



4ème CHAMBRE COMMERCIALE





ARRÊT DU 04 MAI 2022







APPELANT :



Monsieur LE COMPTABLE DU SERVICE DES IMPÔTS DES PARTICULIERS DE CARPENTRAS

[Adresse 3]

[Localité 6]



Représenté par Me AUBERY Laura, substituant Me Izalde VINCENTI, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de CARPE...

ARRÊT N°

N° RG 21/02199 - N° Portalis DBVH-V-B7F-ICHT

CO

JUGE COMMISSAIRE DE CARPENTRAS

21 mai 2021

RG:19/00006

LE COMPTABLE DU SIP DE CARPENTRAS

C/

[P]

[V]

Grosse délivrée le 04 mai 2022 à :

- Me Izalde VINCENTI

- Me Frédéric FRANC

- Me Stéphane GOUIN

+MP

COUR D'APPEL DE NÎMES

4ème CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU 04 MAI 2022

APPELANT :

Monsieur LE COMPTABLE DU SERVICE DES IMPÔTS DES PARTICULIERS DE CARPENTRAS

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représenté par Me AUBERY Laura, substituant Me Izalde VINCENTI, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de CARPENTRAS

INTIMÉS :

Monsieur [N] [P]

né le [Date naissance 1] 1959 à [Localité 6]

[Adresse 7]

[Localité 6]

Représenté par Me Frédéric FRANC, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d'AVIGNON

Maître SELARL BRMJ, prise en la personne de Maître [G] [V],pris en sa qualité de Mandataire Liquidateur de Monsieur [N] [P], désigné à cette fonction par jugement du Tribunal Judiciaire de CARPENTRAS du 12 Décembre 2019.

né le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 5]

[Adresse 8],

[Adresse 8]

[Localité 5]

Représenté par Me Julien VOLLE, substituant Me Stéphane GOUIN de la SCP LOBIER & ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre,

Mme Corinne STRUNK, Conseillère,

Madame Claire OUGIER, Conseillère,

GREFFIER :

Monsieur Julian LAUNAY-BESTOSO, Greffier à la 4ème chambre commerciale, lors des débats et du prononcé de la décision.

MINISTERE PUBLIC :

L'affaire a été communiquée au Ministère Public qui a présenté ses observations écrites, transmises aux conseils constitués.

DÉBATS :

A l'audience publique du 07 Avril 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 04 Mai 2022.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre, le 04 Mai 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour

EXPOSÉ

Vu l'appel interjeté le 4 juin 2021 par Monsieur le comptable du service des impôrs des particuliers de Carpentras -ci-après le SIP- à l'encontre de l'ordonnance prononcée le 21 mai 2021 par le juge-commissaire du tribunal judiciaire de Carpentras dans l'instance n°19/00006 ;

Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 2 mars 2022 par l'appelant et le bordereau de pièces qui y est annexé ;

Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 8 novembre 2021 par Monsieur [N] [P], intimé -ci-après l'intimé, et le bordereau de pièces qui y est annexé ;

Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 9 septembre 2021 par la SELARL BRMJ ès-qualités de mandataire judiciaire de Monsieur [N] [P], intimée -ci-après le mandataire judiciaire, et le bordereau de pièces qui y est annexé ;

Vu la communication de la procédure au ministère public qui l'a visée le 14 mars 2022 en y portant la mention : « qui s'en rapporte à l'appréciation de la Cour », avis porté le 21 mars 2022 à la connaissance des parties constituées ;

Vu l'ordonnance du 30 novembre 2021 de clôture de la procédure à effet différé au 24 mars 2022.

* * *

Par jugement du 12 décembre 2019 publié au Bulletin Officiel Des Annonces civiles et Commerciales (BODACC) le 26 décembre 2019, le tribunal judiciaire de Carpentras a prononcé le redressement judiciaire de l'intimé.

Le 4 mars 2020, le SIP a saisi le juge commissaire d'une requête en constat de non-forclusion, sollicitant qu'il prononce l'admission définitive de ses créances pour un montant total de 37.506 euros à titre hypothécaire.

Par courrier du 26 mai 2020, le SIP a déclaré sa créance pour une somme globale de 37.506 euros au titre des taxes foncières impayées pour la période de 2012 à 2019, soit 9.577 euros à titre privilégié et hypothécaire, et 27.929 euros à titre privilégié.

L'intimé et le mandataire judiciaire ayant contesté cette dernière créance qu'ils estimaient forclose, par ordonnance du 21 mai 2021 -dont appel, le juge commissaire a :

dit que le SIP doit être admis au passif hypothécaire de l'intimé à hauteur de 9.557 euros au titre des taxes foncières référencées 15/22102 et 16/22101,

dit que les autres créances déclarées à titre privilégié par le SIP à hauteur de 27.929 euros doivent être écartées du passif de l'intimé,

dit que les dépens seront employés en frais de procédure collective,

ordonné la transcription de la décision sur l'état des créances, sa notification et son dépôt au rang des minutes du greffe.

Le SIP a relevé appel de ce jugement en toutes ses dispositions.

***

L'appelant fait valoir qu'en vertu des articles L622-24 et R622-21 du code de commerce, le délai de déclaration de créance ne court à l'égard du créancier titulaire d'une sûreté ou lié au débiteur par un contrat publié qu'à compter de l'avis qui lui est notifié, dans les quinze jours à compter du jugement d'ouverture, par le mandataire judiciaire d'avoir à lui déclarer les créances.

En l'espèce, il est créancier titulaire d'une sûreté publiée pour avoir pris le 11 avril 2017 une hypothèque légale sur les successions solidaires des parents de l'intimé, respectivement décédés les [Date décès 4] 1995, et dont il est héritier.

Faute pour le mandataire de l'avoir averti personnellement dans le délai requis -son courrier en ce sens datant du 9 juin 2020 seulement, le délai pour déclarer sa créance n'a pas couru avant cette date, de sorte que la déclaration de créances effectuée le 26 mai 2020 et réceptionnée le 29 mai 2020 doit être entièrement validée, et toute forclusion écartée.

C'est donc à juste titre qu'il a présenté une requête en constat de non-forclusion et non pas en relevé de forclusion puisqu'il n'était de fait pas forclos.

Le SIP demande donc à la Cour, au visa des articles L622-6 et R622-24 et suivants du code de commerce, de :

« réformer l'ordonnance rendue par le juge-commissaire le 21 mai 2021 (en toutes ses dispositions),

statuant à nouveau,

dire et juger régulière la requête en constat de non-forclusion en date du 4 mars 2020,

prendre acte de ce que l'intimé accepte l'admission au passif de la créance du SIP à hauteur de 9.577 euros,

dire et juger admettre la créance du (SIP) pour la somme de 37.506 euros, respectivement à titre hypothécaire, privilégié et définitif à hauteur de 9.577 euros et à titre privilégié et définitif à hauteur de 27.929 euros,

débouter (l'intimé) de l'ensemble de ses demandes,

enrôler les dépens en frais privilégiés de redressement ».

***

L'intimé conclut pour sa part au débouté de l'appelant et à sa condamnation au paiement d'une somme de 2.000 euros à son profit en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Il fait valoir que le SIP disposait d'un délai de deux mois à compter de la publicité au Bodacc du jugement d'ouverture, délai expirant donc le 26 février 2020, pour déclarer sa créance. Il ne l'a fait que le 26 mai 2020 et n'a saisi le juge commissaire que d'une requête en constat de non-forclusion au visa de l'article L622-24 du code de commerce, et non pas d'une requête en relevé de forclusion.

Si l'article L.622-24 prévoit un avertissement personnel pour les créanciers titulaires d'une sûreté publiée, le délai de déclaration ne courant qu'à compter de cet avertissement, le SIP ne justifie pas que sa créance de 37.506 euros soit en totalité assortie d'une publicité foncière. Bien au contraire, seules les taxes foncières 2015 et 2016 bénéficient d'une hypothèque pour 9.577 euros, et elles seules peuvent en conséquence être admises au passif, le surplus devant être rejeté.

***

Le mandataire judiciaire fait valoir pour sa part que l'intimé ne lui ayant remis aucune liste de ses créanciers à l'ouverture de la procédure collective, ce n'est qu'après avoir levé un état hypothécaire le concernant qu'il a été informé de la sûreté publiée par le SIP et a pu l'inviter à déclarer sa créance, par courrier du 9 juin 2020.

Il ajoute que seule la créance assortie d'une sûreté publiée bénéficie des dispositions dérogatoires de l'article L622-24 alinea 3, tandis que pour ses autres créances, le créancier demeure soumis au délai de droit commun de deux mois à compter de la publication du jugement d'ouverture au Bodacc.

En l'espèce, seules les créances relatives aux taxes foncières référencées 15/22102 et 16/22101 pour 9.577 euros sont assorties d'une sûreté publiée peuvent donc être admises, les autres ayant été déclarées trop tardivement et alors qu'il était forclos.

Le mandataire judiciaire demande donc à la Cour, au visa des articles L622-24 et L631-14 ainsi que des articles R622-24 et R622-25 du code de commerce, de :

« débouter le SIP de son appel, de toutes ses demandes, fins et conclusions,

En conséquence,

confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance (déférée),

condamner le comptable du SIP à lui porter et payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

le condamner aux entiers dépens ».

***

Pour un plus ample exposé il convient de se référer à la décision déférée et aux conclusions visées supra.

DISCUSSION

Sur le fond :

Contrairement à ce qui est mentionné dans la requête en constat de non-forclusion, le SIP n'est pas titulaire à l'égard de l'intimé de créances « pour un montant de 37.506 euros à titre hypothécaire », mais, selon la déclaration de créances adressée par ses soins au mandataire judiciaire le 25 mai 2020, d'une créance à titre hypothécaire et privilégié pour un total de 9.577 euros au titre des taxes foncières mises en recouvrement en 2015 et 2016, et d'une créance à titre privilégié pour un total de 27.929 euros au titre des taxes foncières mises en recouvrement de 2012 à 2014 et de 2017 à 2019 -ce qui n'est en soi pas contesté.

L'article L622-24 du code de commerce dispose que « à partir de la publication du jugement, tous les créanciers dont la créance est née antérieurement au jugement d'ouverture, à l'exception des salariés, adressent la déclaration de leurs créances au mandataire judiciaire dans les délais fixés par décret en Conseil d'Etat. (') Les créanciers titulaires d'une sûreté publiée ou liés au débiteur par un contrat publié sont avertis personnellement ou, s'il y a lieu, à domicile élu. Le délai de déclaration court à l'égard de ceux-ci à compter de la notification de cet avertissement ».

L'article L622-26 ajoute que « à défaut de déclaration dans les délais prévus à l'article L622-24, les créanciers ne sont pas admis dans les répartitions et les dividendes à moins que le juge-commissaire ne les relève de leur forclusion (...) ».

Et l'article R622-24 précise enfin que « le délai de déclaration fixé en application de l'article L622-26 est de deux mois à compter de la publication du jugement d'ouverture au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales ».

De ces textes, il résulte que le délai de droit commun pour la déclaration des créances est de deux mois à compter de la publication du jugement d'ouverture au Bodacc, et que par dérogation pour les créances assorties d'une sûreté publiée ou résultant d'un contrat publié, le même délai ne court que de l'avertissement personnel reçu du mandataire judiciaire.

Il a été retenu que la fixation par ces textes de délais différents selon, notamment, la publicité dont les droits du créancier ont fait l'objet, ne relève pas d'une distinction injustifiée qui romprait l'égalité devant la loi. Com 5 septembre 2013 n°13-40.034

La dérogation au délai de droit commun doit, pour rester conforme à ce principe, être appliquée strictement aux seules créances objets de la dérogation.

Ainsi, si un créancier est titulaire d'une créance lui ouvrant droit à l'avertissement et d'une créance chirographaire, l'inopposabilité de la forclusion ne peut jouer que pour la première.

En l'espèce, il est justifié par le mandataire judiciaire en pièce 2 de ce que le jugement d'ouverture de redressement judiciaire a été publié au Bodacc les mercredi 25 et jeudi 26 décembre 2019.

Le délai de droit commun des créanciers pour déclarer leur créance auprès du mandataire judiciaire expirait donc le mardi 26 février 2019.

La déclaration de créances du SIP a été effectuée par courrier daté du 25 mai 2020 réceptionné le 26 mai 2020 (pièces 3 et 4 de l'appelant).

Il n'est pas justifié, avant cette date, de la réception par le SIP de l'avertissement personnel d'avoir à déclarer sa créance en sa qualité de créancier hypothécaire pour ses créances au titre des taxes foncières 15/11102 et 16/22101 mises en recouvrement en 2015 et 2016.

Le délai de deux mois qui devait courir à compter de cet avertissement n'avait donc pas seulement commencé à courir quand la déclaration a été effectuée et ces créances, régulièrement déclarées et non contestées doivent être admises.

En revanche, en sa qualité de créancier non hypothécaire pour les créances qui n'étaient ainsi assorties d'aucune sûreté publiée et ne résultaient pas d'un contrat publié, le SIP n'a pas procédé à la déclaration avant le 26 février 2019 et il était donc forclos pour le faire le 26 mai 2020.

Il lui appartenait donc de présenter une requête en relevé de forclusion, ce qu'il n'a pas fait. Ces créances ne peuvent donc qu'être rejetées.

L'ordonnance déférée doit ainsi être confirmée en toutes ses dispositions.

Sur les frais de l'instance :

Le SIP, qui succombe, devra supporter les dépens de l'instance d'appel.

L'équité ne commande pas de faire droit aux demandes formulées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions ;

Et y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Dit que l'appelant supportera les dépens d'appel.

La minute du présent arrêt a été signée par Madame Christine CODOL, Présidente, et par Monsieur Julian LAUNAY-BESTOSO, Greffier.

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 4ème chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 21/02199
Date de la décision : 04/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-04;21.02199 ?
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