ARRET N 117
Magistrat Rédacteur : M. BERTRAND / DDP
R.G : 08/04743
TRIBUNAL DE COMMERCE D'AUBENAS
09 septembre 2008
X...
C/
S.A.R.L. MINOTERIE PHILIPPON
COUR D'APPEL DE NIMES
DEUXIEME CHAMBRE
Section B-COMMERCIALE
ARRET DU 06 AVRIL 2009
APPELANT :
Monsieur Ernest X...
né le 14 Avril 1956 à ROANNE (42300)
...
13013 MARSEILLE 13
représenté par la SCP CURAT- JARRICOT, avoués à la Cour
assisté de Me François MARCHIANI, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMEE :
S.A.R.L. MINOTERIE PHILIPPON, poursuites et diligences de son gérant en exercice, domicilié en cette qualité au siège social,
Quartier Ramas
07250 LE POUZIN
représentée par la SCP GUIZARD-SERVAIS, avoués à la Cour
assistée de Me Christine PENON, avocat au barreau de VALENCE
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Statuant selon l'article 910 du Code de Procédure Civile,
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS :
Monsieur Bruno BERTRAND, Conseiller, a entendu les plaidoiries en application de l'article 786 du CPC, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Monsieur Paul WEISBUCH, Président
Monsieur Bruno BERTRAND, Conseiller
Madame Catherine BRISSY-PROUVOST, Conseiller
GREFFIER :
Mme Dominique RIVOALLAN, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision
DEBATS :
à l'audience publique du 09 Mars 2009, où l'affaire a été mise en délibéré au 06 Avril 2009
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;
ARRET :
Arrêt contradictoire, prononcé et signé par Monsieur Bruno BERTRAND, Conseiller, le Président de Chambre empêché, , publiquement, le 06 Avril 2009, date indiquée à l'issue des débats, par mise à disposition au greffe de la Cour
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FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Vu l'assignation délivrée le 25 mai 2004 à M. Ernest X..., domicilié à Marseille (13013) devant le tribunal de grande instance de Marseille, par la SA Minoterie Philippon qui sollicitait notamment sa condamnation, en qualité de caution subrogée dans les droits du créancier, à lui payer une somme de 9.645,62 € avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement, outre une somme de 1.000,00 € par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Vu l'ordonnance du juge de la mise en état de la 10ème chambre civile du tribunal de grande instance de Marseille rendue le 18 décembre 2006, ayant rejeté l'exception d'incompétence soulevée par M. Ernest X... et déclaré le tribunal de grande instance de Marseille compétent pour statuer sur le litige l'opposant à la SA Minoterie Philippon ;
Vu l'appel interjeté le 26 décembre 2006 par M. Ernest X..., de cette ordonnance ;
Vu l'arrêt n 06/21802 du 22 janvier 2008, rectifié par l'arrêt n 08/1802 de la cour d'appel d'Aix-en-Provence rendu le 28 février 2008, ayant renvoyé la cause et les parties devant le tribunal de commerce d'Aubenas, compétent ;
Vu la décision en date du 9 septembre 2008 de cette juridiction qui a, notamment :
- condamné M. Ernest X... à payer à la SA Minoterie Philippon la somme de 9.645,62 €, avec intérêts de droit à compter de la signification du jugement,
- condamné M. Ernest X... à payer à la SA Minoterie Philippon la somme de 1.500,00 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive au paiement,
- condamné M. Ernest X... aux dépens ainsi qu'à payer à son adversaire une somme de 500,00 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté les parties de leurs autres demandes,
- ordonné l'exécution provisoire de cette décision ;
Vu l'appel de cette décision interjeté le 24 septembre 2008 par M. Ernest X..., qui a intimé la SARL Minoterie Philippon, représentée par son gérant domicilié en cette qualité au siège social sis quartier Ramas à Le Pouzin (07250) ;
Vu l'ordonnance du président de cette chambre de la cour d'appel de Nîmes, rendue le 20 janvier 2009, fixant l'affaire à l'audience du lundi 9 mars 2009 à 14 h 30, au vu de la requête présentée le 19 décembre 2008 par M. X..., sur le fondement des dispositions de l'article 910 du code de procédure civile ;
Vu l'ordonnance du conseiller de la mise en état, saisi sur requête par la SARL Minoterie Philippon, rendue le 9 mars 2009, ayant déclaré irrecevable devant le conseiller de la mise en état, non saisi, la demande de la Minoterie Philippon sollicitant la radiation de l'appel interjeté par M. X..., au visa de l'article 526 du code de procédure civile ;
Vu les dernières conclusions récapitulatives déposées au greffe de la cour le 20 février 2009 et signifiées à son adversaire le même jour, auxquelles est joint un bordereau récapitulatif des pièces communiquées, dans lesquelles M. Ernest X... soutient notamment que :
- il a été mis, en sa qualité de boulanger, en liquidation judiciaire et sa procédure collective a été clôturée pour insuffisance d'actif le 23 avril 2001,
- il est fondé à invoquer les dispositions de l'article 2308 du code civil, faute d'avoir été averti du paiement effectué par la caution, de sa créancière, alors même qu'elle n'était pas poursuivie, ce qui lui interdit de faire valoir ses moyens pour faire déclarer la dette éteinte,
- comme moyen il aurait pu invoquer, vis à vis de la banque créancière, la responsabilité de celle-ci qui lui avait accordé un crédit inapproprié et manqué à ses obligations de conseils, d'information et de mise en garde envers un emprunteur profane,
- la banque, prêtant des fonds destinés à l'achat d'un fonds de commerce, aurait dû s'assurer au préalable de la viabilité du projet, de sa rentabilité réelle, ce qu'elle a omis de faire, alors que selon les mentions de l'acte, celui-ci avait perdu sa clientèle, pour avoir été fermé avant la cession,
- la caution qui a payé et agit contre le débiteur par subrogation peut se voir opposer les mêmes exceptions que le créancier lui-même,
- reconventionnellement il est fondé à retenir que la Minoterie Philippon en lui faisant signer un premier contrat de fournitures et d'assistance, préalable à l'achat du fonds de commerce, a participé à l'opération commerciale, et a été complice de la vente d'un fonds non rentable à M. X..., lui causant un préjudice,
- la Minoterie Philippon doit donc être condamnée à lui payer 15.000,00 € de dommages et intérêts,
- la constitution et les conclusions de la SA Minoterie Philippon, intimée, sont irrecevables au visa des articles 960 et 961 du code de procédure civile car elle a été assignée par acte d'huissier le 8 janvier 2009, qui a dressé un procès-verbal de recherches infructueuses, ayant disparue de l'adresse de son siège social à Le Pouzin (07250) puis elle a changé de forme sociale, en SARL, dans ses conclusions indiquant une adresse qui n'est pas réelle,
- la SARL Minoterie Philippon doit aussi être condamné au paiement de la somme de 4.000,00 € pour les frais de procédure prévus par l'article 700 du code de procédure civile ;
Vu les dernières conclusions déposées au greffe de la cour le 3 mars 2009 et signifiées à son adversaire le même jour, auxquelles est joint un bordereau récapitulatif des pièces communiquées, dans lesquelles la SARL, (anciennement SA) Minoterie Philippon demande notamment la confirmation de la décision entreprise et la condamnation de M. Ernest X... à lui payer une somme de 3.000,00 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et celle de 2.000,00 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Vu les écritures des parties auxquelles il y a lieu de se référer pour une plus ample relation des faits, de la procédure et des moyens de celles-ci ;
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SUR CE :
SUR LA PROCÉDURE :
Attendu que la recevabilité de l'appel n'est ni contestée ni contestable au vu des pièces produites;
Attendu que l'appelant sollicite que la constitution et les conclusions déposées par la SA, devenue SARL, Minoterie Philippon devant cette cour d'appel soient déclarées irrecevables comme contrevenant aux dispositions des articles 960 et 961 du code de procédure civile, en ce que celle-ci s'est domiciliée à une adresse qui n'est pas réelle ;
Mais attendu qu'il est produit deux extraits K-bis du registre du commerce et des sociétés délivrés le 20 juin 1997 et le 20 février 2009 par le greffe du tribunal de commerce d'Aubenas (07200), dont il ressort que la SA Minoterie Philippon, inscrite initialement sous le numéro B 340 498 005, n de gestion 87 B 75, dont le siège social était à Baix (07210) Chomerac, a été transformée, en conservant le même numéro d'identification, en SARL Minoterie Philippon, dont le nouveau siège social était fixé depuis le 7 septembre 2005 rue des Ramas, à Le Pouzin (07250), également adresse de son établissement principal ;
Qu'il convient donc de prendre acte de ses changements de forme sociale et d'adresse du siège social intervenus en cours de procédure ;
Que la SARL Minoterie Philippon justifie également avoir reçu un avis d'imposition à la taxe professionnelle pour cette même adresse, au titre de l'année 2008 ;
Que c'est bien la même adresse du siège social à Le Pouzin qui a été indiquée dans la constitution d'avoué et les conclusions d'appel déposées devant la cour d'appel de Nîmes par cette société, conformément aux dispositions de l'article 960 alinéa 2, b) du code de procédure civile, s'agissant d'une personne morale ;
Que pour soutenir que l'adresse du siège social ne serait pas réelle, M. X... produit un procès-verbal de recherches infructueuses, dressé sur le fondement de l'article 659 du nouveau code de procédure civile le 8 janvier 2009 par Me Jean-Luc A..., huissier de justice à Privas, chargé de délivré à la SARL Minoterie Philippon, à l'adresse de son siège social à Le Pouzin, une signification de l'acte d'appel ;
Que selon cet officier ministériel, il a constaté que cette personne morale n'y avait aucun établissement et après enquête auprès du voisinage et des services de la commune ainsi qu'interrogation du minitel, il s'est déclaré incapable de retrouver la nouvelle destination du signifié ;
Que dans une lettre complémentaire à cet acte, adressée à l'avoué de l'appelant, le 27 février 2009, Me A..., huissier de justice, a déclaré s'être rendu à nouveau, le jour-même à cette adresse et avoir alors trouvé
une boîte à lettres posée sur les marches d'un escalier accédant à une terrasse, non fixée, portant une étiquette en papier avec le nom et l'adresse de la Minoterie Philippon, paraissant récente et selon lui postérieure au dépôt de son acte du 8 janvier 2009 ;
Qu'il a relevé aussi l'existence d'une sonnette mentionnant le nom de la minoterie Philippon, mais personne n'est venu répondre lorsqu'il a appuyé dessus, les portes et fenêtres étant fermées, alors qu'il était 10 h 15 un vendredi matin ;
Mais attendu que Me Audrey B..., huissier de justice à La Voulte sur Rhône, agissant cette fois à la requête de la SARL Minoterie Philippon, dont le siège social est sis ZI du Ramas à Le Pouzin (07250), selon les mentions figurant dans son procès-verbal de constat dressé le 23 février 2009 à 18 h 50, déclare s'être rendue sur les lieux du siège social, constitué d'un bâtiment récent, mitoyen d'un bâtiment ancien, proposé alors à la location ; que cet officier ministériel déclare avoir constaté la présence d'une boîte à lettre métallique de couleur beige, installée sur la troisième marche de la montée d'escalier, dont elle a pris une photo, sur laquelle boîte figurait une étiquette blanche mentionnant 'Minoterie Philippon - Quartier Ramas 07250 Le Pouzin', ainsi que sur la porte d'entrée de la terrasse, une sonnette sur laquelle sont mentionnés trois noms dont celui de la Minoterie Philippon ;
Que l'intimée justifie également recevoir le courrier qui lui est envoyé à cette adresse, en particulier la lettre recommandée avec accusé de réception émanant de Me A..., huissier de justice, en date du 8 janvier 2009, dans le cadre de son procès-verbal de recherches infructueuses;
Qu'il résulte notamment de ces procès-verbaux d'huissiers de justice, dont aucun n'a été argué de faux, que la société Minoterie Philippon n'avait plus d'activité professionnelle à l'adresse de son siège social et avait omis de remplacer, en janvier 2009, la boîte aux lettres de son bâtiment, ce qu'elle a fait ensuite, avant le 23 février 2009 ;
Que l'exigence de l'article 960 alinéa 2, b) du code de procédure civile porte seulement l'indication du lieu du siège social de la personne morale et non l'exercice effectif d'une activité commerciale permanente dans celui-ci ;
Qu'il n'est pas établi, ni même allégué, que la SARL Minoterie Philippon disposerait d'un autre siège social, de telle sorte que celui mentionné au registre du commerce et des sociétés et attesté par l'huissier de justice serait fictif et non réel ;
Que dès lors il convient de rejeter la fin de non-recevoir d'irrecevabilité de la constitution et des conclusions déposées en appel par la SARL Minoterie Philippon, laquelle a régulièrement indiqué dans cette procédure l'adresse de son seul et véritable siège social, peu important que son activité commerciale ne s'y exerce plus effectivement, de façon temporaire ou définitive, au sens des articles 960 et 961 du code de procédure civile, invoqués par M. Ernest X... ;
SUR LA DEMANDE PRINCIPALE :
Attendu que M. X... ne conteste pas qu'il s'était engagé à rembourser à la BNP une somme de 250.000,00 F (38.112,25 €), empruntée le 24 septembre 1997 pour l'achat d'un fonds de commerce de boulangerie-pâtisserie, ce qu'il n'a pu faire entièrement en l'état de sa liquidation judiciaire ouverte le 15 février 1999 et clôturée le 23 avril 2001 pour insuffisance d'actif, la créance déclarée le 2 mars 1999 par la banque n'ayant pu être payée par le liquidateur, même pour partie, ainsi qu'en atteste le liquidateur judiciaire, Me Nicolas C..., dans un certificat d'irrecouvrabilité délivré le 15 novembre 1999 ;
Qu'il ne conteste pas non plus que la somme restant due s'élevait à 9.645,62 € que la banque a réclamée à la SA Minoterie Philippon, caution solidaire de ce prêt à hauteur de 30 % soit la somme principale de 75.000,00 F (11.433,68 €), laquelle l'a réglée entièrement du 29 novembre 1999 au 12 septembre 2000, ainsi qu'en atteste la banque, par lettre en date du 18 septembre 2000, en 10 versements de 6.327,11 F (964,56 €) chacun ;
Qu'il ne discute pas non plus du bien-fondé de l'action récursoire engagée à son égard par la société Minoterie Philippon, sur le fondement des dispositions de l'article L.622-32-II, ancien, du code de commerce, devenu l'article L.643-11-II du code de commerce ;
Que par contre il soutient qu'il est fondé à invoquer les dispositions de l'article 2308 alinéa 2 du code civil, ancien article 2031 de ce code, selon lesquelles la caution qui aura payé sans être poursuivie et sans avoir averti le débiteur principal n'aura point de recours contre lui dans le cas où, au moment du paiement, ce débiteur aurait eu des moyens pour faire déclarer la dette éteinte, sauf son action en répétition contre le créancier ;
Mais attendu que, comme le soutient la SARL Minoterie Philippon, celle-ci a bien été poursuivie par le créancier de M. X..., au sens de l'article 2031 alinéa 2 ancien du code civil, devenu l'article 2308 alinéa 2 de ce code, dès lors que d'une part, le contrat de cautionnement solidaire stipulait (page 4) que "la caution.....s'engage irrévocablement à rembourser immédiatement à la banque, à première réquisition de cette dernière, la part pour laquelle elle s'est engagée des sommes qui lui sont dues, sans qu'une mise en demeure préalable soit nécessaire", ceci notamment dans le cas de liquidation judiciaire du débiteur ;
Que d'autre part la BNP a réclamé à la Minoterie Philippon, par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 24 novembre 1999, le respect de son engagement de caution envers M. Ernest X... à hauteur de 30 % du prêt, dans un délai de 10 jours, compte-tenu de la liquidation judiciaire de celui-ci depuis le 15 février 1999 et de la délivrance d'un certificat d'irrecouvrabilité de la créance déclarée par la banque, délivré le 15 novembre 1999 par Me C..., liquidateur judiciaire de M. X... ;
Qu'en l'espèce la société Minoterie Philippon a ainsi été poursuivie au sens de l'article 2031 alinéa 2, ancien devenu l'article 2308 alinéa 2 du code civil, par cette mise en demeure du 24 novembre 1999, ainsi que l'a rappelé la chambre commerciale de la Cour de Cassation dans son arrêt du 14 février 1995 (n de pourvoi : 92-19103) ;
Qu'il est par ailleurs de principe que les conditions posées par l'article 2031 alinéa 2 du code civil, devenu l'article 2308 alinéa 2 de ce code, sont cumulatives et qu'il s'ensuit que la caution qui a payé le créancier après avoir été poursuivie par celui-ci ne perd pas son recours subrogatoire envers le débiteur principal cautionné, même si elle n'a pas averti celui-ci avant de payer ;
Qu'il convient donc de rejeter la demande de M. X... tendant à voir dire que la Minoterie Philippon n'a plus de recours contre lui au titre de son paiement de son créancier, exécuté en sa qualité de caution solidaire ;
Que la cour relève par ailleurs que M. Ernest X... conteste les conditions de passation du contrat de prêt, invoquant une éventuelle responsabilité de la banque dans l'octroi du crédit qu'il avait sollicité pour manquement à son devoir d'information, de conseil ou de mise en garde envers son client emprunteur, mais qu'il est constant qu'il n'a pas contesté la créance déclarée par la BNP à sa liquidation judiciaire, comme il pouvait le faire en qualité de débiteur ; que le liquidateur judiciaire n'a engagé une action en responsabilité civile à l'égard de la BNP pour obtenir sa condamnation au paiement de dommages et intérêts, sur ce fondement juridique désormais allégué par le débiteur ;
Qu'il est tout aussi constant qu'il n'a jamais fait défense à la société Minoterie Philippon de payer les sommes dues à la BNP en qualité de caution solidaire ni même informé celle-ci de ce que, selon lui, la créance de la banque déclarée à sa liquidation judiciaire serait contestable en droit;
Attendu que M. X... soutient également que l'action de la caution, résultant de l'article L.622-32-II, ancien, du code de commerce est fondée sur la subrogation de celle-ci dans les droits du créancier et que le débiteur principal est donc fondé à lui opposer toutes les exceptions qu'il pouvait opposer au créancier lui-même ;
Qu'il prétend qu'il peut donc opposer à la caution subrogée dans les droits de la banque créancière, les manquements de celle-ci à ses obligations de conseil, d'information ou de mise en garde à l'égard d'un emprunteur profane, dans une opération de prêt destinée à acquérir un fonds de commerce non rentable et fermé depuis plusieurs mois ;
Mais attendu que s'il résulte des dispositions de l'article 2029, ancien, du code civil, devenu l'article 2306 de ce code, que la caution qui a payé la dette est subrogée à tous les droits qu'avait le créancier contre le débiteur, ce dernier ne peut cependant opposer à la caution subrogée des exceptions qui sont purement personnelles au débiteur et non inhérentes à la dette ;
Qu'il était en effet interdit à la caution solidaire d'opposer elle-même au débiteur principal de telles exceptions personnelles au débiteur, conformément aux dispositions de l'article 2036, ancien, du code civil, devenu l'article 2313 de ce code, et qu'elle ne peut donc se les voir opposer par le débiteur lui-même, dans le cadre de son action récursoire légale ;
Attendu qu'il convient donc, par ces motifs substitués, de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné M. Ernest X... à payer à la SARL Minoterie Philippon la somme de 9.645,62 €, avec intérêts de retard au taux légal depuis la signification du jugement rendu le 8 juillet 2008, comme sollicité par l'intimée ;
SUR LA DEMANDE RECONVENTIONNELLE :
Attendu que tant en première instance qu'en appel M. Ernest X... a présenté une demande reconventionnelle pour obtenir la condamnation de la SARL Minoterie Philippon à lui payer une somme de 15.000,00 € à titre de dommages et intérêts ;
Qu'il fonde sa demande sur le fait que la SA Minoterie Philippon, avant la vente du fonds de commerce, avait signé avec lui un contrat de fournitures et d'assistance qu'il lui reproche de ne pas avoir respecté en :
- se rendant complice de la vente d'un fonds de commerce non rentable compte-tenu des chiffres donnés (dans l'acte de vente et dans l'étude de la CECOGETTI qualifiée de 'bidon' et faite à son insu) et au surplus fermé depuis plusieurs mois donc ayant perdu sa clientèle, qu'elle lui avait proposé d'acquérir alors qu'il ignorait cette fermeture qui se déduit des chiffres donnés dans l'acte de vente,
- manquant à son obligation contractuelle d'assistance (article 8) qui aurait dû le conduire à intervenir auprès de la BNP pour trouver une solution pour limiter le préjudice,
- en poursuivant l'exécution provisoire ordonnée du jugement déféré, procédant à la saisie-vente de ses meubles ;
Attendu que ce dernier grief doit être écarté puisqu'il ne saurait être reproché à la SARL Minoterie Philippon dont le contrat de fournitures et d'assistance a pris fin depuis le prononcé de la liquidation judiciaire de M. Ernest X..., le 15 février 1999, d'avoir manqué à ses obligations contractuelles d'assistance en exécutant provisoirement, conformément à la décision judiciaire déférée, le jugement du tribunal de commerce d'Aubenas du 9 septembre 2008 ; que la cour relève au surplus que M. Ernest X... n'a pas saisi le Premier président de cette cour d'une demande de suspension de l'exécution provisoire attachée à ce jugement, qu'il n'a pas exécuté volontairement non plus ;
Que d'autre part c'est à tort que M. X... reproche au jugement déféré d'avoir retenu, à bon droit, que la SARL Minoterie Philippon n'était pas partie, au sens de l'article 1134 et de l'article 1165 du code civil, à l'acte de vente du fonds de commerce sis à Bourg de Péage (26), 7, rue de l'église, passé uniquement entre M. et Mme René et Mireille D..., vendeurs, et M. Ernest X..., par-devant Me Jean-Louis E..., notaire associé à Viviers sur Rhône (07), le 26 septembre 1997 ;
Qu'elle ne peut donc être tenue pour responsable contractuellement des irrégularités éventuelles affectant le contenu de cet acte authentique, que M. Ernest X... n'a par ailleurs jamais argué de faux, de même qu'il n'a jamais agi en nullité ou résolution de cette vente à l'égard des vendeurs ou en responsabilité professionnelle du notaire, pas plus qu'à l'égard du banquier prêteur ;
Qu'il est par contre en droit de reprocher à la SARL Minoterie Philippon d'avoir le cas échéant manqué à ses engagements contractuels au titre du contrat d'approvisionnement exclusif, de partenariat commercial et d'assistance conclu le 26 septembre 1997 avec lui, dès lors qu'il peut arguer et justifier d'un ou plusieurs manquements de celle-ci, lui ayant causé un préjudice ;
Que selon cette convention, le fournisseur, en contrepartie de l'exclusivité contractuelle de fournitures par M. X... pendant 7 ans, s'engageait à lui prêter des fonds (30.000,00 F) pour acquérir le fonds de commerce appartenant alors aux époux D... et à lui apporter sa garantie pour obtenir un prêt bancaire de 254.000,00 F ; qu'il n'est cependant pas contesté qu'elle a respecté ses engagements à cet égard ;
Que l'article 8 de cette convention, invoqué par M. X... au soutien de sa demande de dommages et intérêts, était ainsi rédigé :"Dans l'éventualité où le boulanger commencerait à connaître quelques difficultés financières ou bien dans le cas où la banque ferait appel à l'engagement de caution du fournisseur, le boulanger s'oblige à une concertation avec le président de son syndicat et le fournisseur et à appeler à cette concertation un représentant de la banque dans le but d'examiner sa situation et d'élaborer un plan de financement.";
Qu'en l'espèce il est constant que la banque prêteuse n'a fait appel à la caution de la Minoterie Philippon que tardivement, après la liquidation judiciaire de M. Ernest X..., rendant inutile la concertation envisagée dans cette clause et que, s'agissant des difficultés antérieurement rencontrées par M. X..., celui-ci ne justifie, ni même n'allègue, avoir mis en demeure, voire simplement sollicité, la Minoterie Philippon et le président de son syndicat pour se concerter avec la banque, avant l'ouverture de sa procédure de liquidation judiciaire, le 15 février 1999 ;
Qu'il n'est donc pas rapporté la preuve d'un manquement de la Minoterie Philippon à ses engagements contractuels de ce chef ;
Qu'il est par ailleurs reproché une faute, non qualifiée juridiquement avec précision, de "complicité"d'une vente du fonds de commerce, dans laquelle M. Ernest X... aurait été trompé sur la valeur ou la rentabilité de ce bien, en ce que le chiffre d'affaires de l'année 1996-1997 ne lui avait pas été communiqué en temps utile, la fermeture de la boulangerie lui aurait été dissimulée et que l'étude prévisionnelle réalisée par la CECOGETI (centre de comptabilité Gestion des Travailleurs Indépendants) sur les 12 mois de l'année 1997 était dépourvue de sérieux ;
Mais attendu que M. Ernest X... n'a jamais agi en nullité pour dol ou résolution de la vente du fonds de commerce acquis par acte authentique en date du 26 septembre 1997, ni n'a contesté la validité du prêt consenti le 24 septembre 1997 par la BNP pour l'acquisition de ce fonds, pas plus qu'il n'a recherché judiciairement la responsabilité éventuelle du dispensateur de crédit ou de la CECOGETTI à la suite de cet achat ;
Qu'il est dès lors malvenu à soutenir, par simples affirmations, que cette opération commerciale à laquelle il était partie, était irrégulière ou dolosive à son égard dès l'origine et à reprocher à la Minoterie Philippon, qui lui avait seulement apporté un crédit complémentaire de 30.000,00 F et une caution du prêt de 75.000,00 F sur 250.000,00 F empruntés, d'avoir par ces concours, provoqué son préjudice ultérieur, issu de la liquidation judiciaire intervenue le 15 février 1999 ; qu'il ne rapporte pas la preuve de cette thèse développée abondamment dans ses conclusions;
Que c'est de façon mensongère qu'il prétend avoir ignoré la fermeture momentanée du fonds de commerce de boulangerie-pâtisserie de Bourg-de-Péage dont il s'est porté acquéreur le 26 septembre 1997, après signature d'un compromis de vente qu'il ne verse pas aux débats mais daté du 3 juin 1997, ce qui lui avait laissé un temps suffisant pour s'assurer de l'ouverture ou de la fermeture de ce fonds de commerce avant de signer l'acte de vente définitif, près de 4 mois plus tard ;
Que bien qu'inexpérimenté en gestion, tâche que sa compagne d'alors Mme Patricia F..., qui était également partie et caution personnelle à l'acte de prêt signé avec la BNP, était apparemment censée assurer au vu de leurs 'curriculum vitae' respectifs versés aux débats, M. Ernest X... était un ouvrier boulanger expérimenté ayant travaillé pour plusieurs employeurs dans ce secteur d'activité, âgé de 40 ans, qui pouvait au moins constater lui-même le fonctionnement effectif d'une boulangerie-pâtisserie ou sa fermeture, élément de fait qui ne requiert pas une compétence particulière dans le monde des affaires ;
Qu'en outre, comme il le déclare aussi dans ses conclusions, la fermeture antérieure du fonds apparaissait mentionnée dans l'acte de vente qu'il a signé ensuite, devant notaire, sans réserves immédiates ni ultérieures de sa part à cet égard ;
Que la cour relève sur ce point que l'acte indiquait notamment :
- que le chiffre d'affaires déclaré pour l'exercice en cours, du 1er juillet 1996 au 30 avril 1997 précisait porter seulement sur 8 mois d'activité, ce qui impliquait en effet qu'une fermeture du fonds avait eu lieu pendant une période totale de 2 mois sur les 10 mois, pour des raisons médicales tenant à un problème cardiaque survenu au précédent boulanger selon l'intimée, ce qui n'est pas autrement contesté,
- que les vendeurs et acquéreurs y déclaraient avoir visé les livres de comptabilités tenus par le vendeur, relatifs aux trois dernières années d'exploitation précédant la cession, ce qui ne manquait pas de laisser apparaître les périodes de fermeture du fonds de commerce, en l'absence de toute recette inscrite en comptabilité à ces dates,
- que M. X... a pris possession du fonds de commerce le jour de l'acte de vente, après avoir dressé contradictoirement avec le vendeur un inventaire détaillé du matériel cédé, annexé à l'acte de vente, s'engageant en outre à prendre celui-ci en l'état où il se trouvait ce jour-là, qu'il a donc pu voir par lui-même ;
Qu'enfin il y a lieu de constater que M. X... ne produit aucun élément de la comptabilité de ce fonds de commerce, relatif à l'exercice 1996-1997 pendant lequel il invoque une fermeture du fonds de commerce sans autres précisions, ni aucune attestation de voisins ou clients de cette boulangerie relatives la fermeture, pas plus au demeurant qu'il n'indique les dates et durées de la fermeture alléguée, dont il soutient, sans en apporter la preuve, qu'elle aurait entraîné la disparition de la clientèle vendue ;
Qu'il ne produit pas non plus sa propre comptabilité, pour la période postérieure au 26 septembre 1997, de nature à permettre de comparer le chiffre d'affaires réalisé avec ceux précédemment effectués par les vendeurs, indiqués dans l'acte de vente; que sans ces éléments comptables le caractère 'bidon' qu'il allègue à l'égard de l'étude prévisionnelle, certes sommaire, du CECOGETI, établie le 17 juin 1997, et prévoyant un chiffre d'affaires de 400.000,00 F au 31 décembre 1997 avec un bénéfice en fin de 95.300,00 F, tenant compte de la charge financière représentée par les emprunts d'acquisition du fonds, ne peut être retenu comme établi par la cour ;
Qu'il y a lieu au contraire de constater que ces prévisions correspondaient aux montants indiqués dans l'acte de vente pour les exercices annuels précédents, sans anomalie apparente :
- 1993/1994 : 430.476,00 F de CA et 162.253,00 F de bénéfice,
- 1994/1995 : 422.055,00 F de CA et 147.121,00 F de bénéfice,
- 1995/1996 : 399.565,00 F de CA et 148.000,00 F de bénéfice,
- 1996/1997 (10 mois) : 334.317,00 F de CA et bénéfice inconnu mais garanti par le vendeur comme proportionnel à celui de la dernière période ;
Que la SARL Minoterie Philippon conclut, sans que cela soit particulièrement contesté, que depuis sa prise de possession du fonds de commerce, M. Ernest X... lui a commandé, pour l'année 1998, 280,50 quintaux de farine, ce qui suppose donc une activité réelle au profit d'une clientèle évaluée par elle, sur cette base, à un chiffre d'affaires annuel reconstitué de 467.706,00 F, ce qui n'est contredit par aucun élément produit par M. X... ;
Qu'il convient donc de rejeter sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts à l'encontre de la SARL Minoterie Philippon, mal fondée et injustifiée ;
SUR LES DOMMAGES ET INTÉRÊTS :
Attendu que M. Ernest X... succombe à la demande principale de la SARL Minoterie Philippon, comme dans sa demande reconventionnelle, tant en première instance qu'en appel ; que cependant il ne résulte pas des éléments de la procédure que cette résistance à payer les sommes réclamées ou sa volonté d'obtenir la condamnation de son adversaire à lui payer des dommages et intérêts injustifiés dégénère en faute, constituant un abus de droit et justifiant sa condamnation supplémentaire à lui payer des dommages et intérêts de ce seul chef ;
Qu'il convient donc, réformant le jugement déféré sur ce point, de débouter la SARL Minoterie Philippon de ses demandes de dommages et intérêts pour résistance abusive, tant en première instance qu'en appel ;
SUR LES FRAIS DE PROCÉDURE ET LES DÉPENS :
Attendu qu'il y a lieu d'allouer à la SARL Minoterie Philippon la somme supplémentaire de 1.500,00 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, que devra lui payer M. Ernest X..., condamné aux entiers dépens de première instance et d'appel, en sus de celle de 500,00 € déjà mise à sa charge au titre des frais irrépétibles de la procédure exposés en première instance, par le jugement déféré, confirmé également de ces chefs ;
Attendu qu'il n'est pas inéquitable en l'espèce de laisser à la charge de M. Ernest X... les frais de procédure qui ne sont pas compris dans les dépens ;
* * * * * * * * * *
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
Statuant, publiquement et par arrêt contradictoire,
Vu les articles 6, 9, 32-1, 960 et 961 du code de procédure civile,
Vu les articles 1134, 1146, 1165, 1315, 2306, 2308 alinéa 2 et 2313 du code civil,
Vu l'article L.622-32-II du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005,
Reçoit les appels en la forme,
Infirme le jugement du tribunal de commerce d'Aubenas prononcé le 9 septembre 2008, mais seulement en ce qu'il a :
- condamné M. Ernest X... à payer à la SA (devenue SARL) Minoterie Philippon la somme de 1.500,00 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive au paiement ;
Et statuant à nouveau sur le chef infirmé :
- Déboute la SARL Minoterie Philippon de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive de M. Ernest X... ;
Confirme, par substitution de motifs, le jugement entrepris pour le surplus ;
Condamne M. Ernest X... aux dépens d'appel et à payer à la SARL Minoterie Philippon la somme supplémentaire de 1.500,00 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Rejette toutes autres demandes des parties ;
Autorise la S.C.P. GUIZARD-SERVAIS, titulaire d'un office d'avoué, à recouvrer directement les dépens conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
Ainsi prononcé et jugé à NÎMES le 6 avril 2009.
Arrêt signé par Monsieur B. BERTRAND, Conseiller, le Président de Chambre empêché, et par Madame D. RIVOALLAN, Greffier divisionnaire.