R.G : 08/02640
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE CARPENTRAS10 juin 2008
BANQUE POPULAIRE PROVENÇALE ET CORSES.A. AUXIGABNP PARIBASS.A. SOCIÉTÉ GÉNÉRALE
C/
SAS CONSERVE DE PROVENCE - LE CABANONSELARL BAULAND GLADEL MARTINEZ
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE1re Chambre A
ARRÊT DU 10 MARS 2009
APPELANTES :
BANQUE POPULAIRE PROVENÇALE ET CORSEpoursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice, domiciliés ès qualités au siège social245 Bd Michelet - BP 2513274 MARSEILLE CEDEX 09
représentée par la SCP M. TARDIEU, avoués à la Courassistée de la SCP BOLLET ET ASSOCIES, avocats au barreau de Marseille
représentée par la SCP FONTAINE-MACALUSO JULLIEN, avoués à la Courassistée de Me CHAMBREUIL, avocat au barreau de PARIS
représentée par la SCP FONTAINE-MACALUSO JULLIEN, avoués à la Courassistée de Me CHAMBREUIL, avocat au barreau de PARIS
représentée par la SCP FONTAINE-MACALUSO JULLIEN, avoués à la Courassistée de Me CHAMBREUIL, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉES :
SAS CONSERVE DE PROVENCE LE CABANONpoursuites et diligences de son Président en exercice, domicilié en cette qualité au siège socialRue Chemin du Piolenc - BP 684850 CAMARET S/ AIGUES
représentée par la SCP GUIZARD-SERVAIS, avoués à la Courassistée de Me Annie DAVID, avocat au barreau de LYON
SELARL BAULAND GLADEL MARTINEZprise en sa qualité d'administrateur judiciaire au redressement judiciaire et en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de redressement par continuation de la SAS CONSERVES DE PROVENCE LE CABANON33 Bd Frédéric Mistral - BP 584420 PIOLENC
représentée par la SCP GUIZARD-SERVAIS, avoués à la Courassistée de Me Annie DAVID, avocat au barreau de LYON
Statuant sur appel d'une ordonnance de référé
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
M. Serge BERTHET, Conseiller, a entendu les plaidoiries en application de l'article 786 du Code de Procédure Civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
M. Dominique BRUZY, PrésidentM. Emmanuel DE MONREDON, ConseillerM. Serge BERTHET, Conseiller
GREFFIER :
Mme Sylvie BERTHIOT, Greffier, lors des débats, et Mme Véronique VILLALBA, Greffier, lors du prononcé,
DÉBATS :
à l'audience publique du 14 Janvier 2009, où l'affaire a été mise en délibéré au 10 Mars 2009Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé et signé par M. Dominique BRUZY, Président, publiquement, le 10 Mars 2009, date indiquée à l'issue des débats, par mise à disposition au greffe de la Cour.
Par acte du 16 janvier 2004, la Société Conserves de Provence affectait en gage des stocks de marchandises en garantie des créances du Crédit Agricole Sud Rhône Alpe, du Crédit Agricole Alpes Provence, de la BNP Paribas, de la Lyonnaise de Banque, de la Société Générale et de la Banque Populaire Provençale et Corse pour un montant initial de 10.325.000 €. Cet acte a fait l'objet d'avenants successifs, le dernier du 21 juillet 2006 ramenant le montant global des stocks gagés à la somme de 6 millions d'euros.
Parallèlement, la Société Auxiliaire de Garantie AUXIGA a conclu avec la Société Conserves de Provence trois conventions d'occupation du 15 février 2005, du 9 février 2006 et du 7 juin 2006, aux termes desquelles la Société Conserves de Provence a prêté pour une durée indéterminée, dans ses propres locaux et à titre gratuit à AUXIGA trois magasins destinés à stocker des marchandises gagées, à l'effet d'en assurer la tierce détention pour le compte des différents établissements bancaires.
La Société Conserves de Provence a été placée en redressement judiciaire par jugement du 12 mars 2007 ; et par jugement du 13 juillet 2007, la SELARL BAULAND GLADEL MARTINEZ a reçu mission d'assumer seule l'entière administration et la gestion de la Société Conserves de Provence.
Le Crédit Agricole Sud Rhône Alpes, le Crédit Agricole Alpes Provence et la société Lyonnaise de Banque ont cédé leurs créances à l'actionnaire principal de la société Conserves de Provence et celui-ci a renoncé au bénéfice du gage.
- constaté que la Société Auxiliaire de Garantie avait toujours un droit d'accès aux magasins mis à sa disposition par la Société Conserves de Provence Le Cabanon par conventions des 5 février 2005 et 6 février 2006 et un droit de s'opposer à l'autorisation précaire de retrait de marchandises gagées par substitution
- ordonné à la Société Conserves de Provence Le Cabanon, en redressement judiciaire, et à la SELARL BAULAND GLADEL MARTINEZ, administrateur judiciaire unique et total, de laisser la Société Auxiliaire de Garantie accéder avec qui elle veut dans les dits magasins pour y opérer telle opération qu'elle croira devoir y effectuer à ses risques et périls et notamment d'engager sa responsabilité en cas de perte de la marchandise s'y trouvant ou de dysfonctionnements graves de la SAS CONSERVES DE PROVENCE LE CABANON,
- dit que toute infraction dûment constatée par huissier à cette injonction serait passible d'une astreinte de 30 000 € à charge des obligées précitées pourvu que le constat soit fait après le prononcé de l'arrêt.
A la suite de cet arrêt, par actes d'huissier du 21 mars 2008, la société anonyme BNP Paribas et la société anonyme AUXIGA ont signifié à la Société Conserves de Provence et à la SELARL BAULAND GLADEL MARTINEZ, en sa qualité d'administrateur judiciaire, la révocation de l'autorisation de substitution des marchandises gagées par des marchandises en montant équivalent en valeur déclarée, précédemment consentie à titre précaire.
Par acte du 10 avril 2008, la Société Conserves de Provence et la SELARL BAULAND GLADEL MARTINEZ ont saisi le tribunal de grande instance de Carpentras, statuant en matière commerciale, d'une demande dirigée contre la Société Auxiliaire de Garantie (AUXIGA), la BNP Paribas, la Société Générale et la Banque Populaire Provençale et Corse, sur le fondement des articles 1134 du Code civil, 207l et suivants anciens du Code civil.
Enfin, autorisées à assigner d'heure à heure, la société Conserves de Provence et la SELARL BAULAND GLADEL MARTINEZ ont saisi le juge des référés, sur le fondement des articles 872 et 873 du Code de procédure civile, d'une demande tendant à la mainlevée des scellés placés par AUXIGA le 6 juin 2008 et de toutes les mesures de blocage de la Société Conserves de Provence ; et par ordonnance du 10 juin 2008, le juge des référés au tribunal de grande instance de CARPENTRAS a :
déclaré recevable la Société Conserves de Provence et la SELARL BAULAND GLADEL MARTINEZ, ès qualités, en leur action;
ordonné la mainlevée partielle des scellés placés le 6 juin 2008 à la demande de la Société Auxiliaire de Garantie (AUXIGA), BNP Paribas, la Société Générale et la Banque Populaire Provençale et Corse sur les stocks courants de la Société Conserves de Provence, cette mesure étant cantonnée à la valeur comptable d'exploitation des stocks de 2.585 .924,26 € ;
dit que ce cantonnement s'exercerait donc pour cette valeur comptable d'exploitation des stocks de 2.585.924,26 € ;
ordonné, pour le surplus, la mainlevée de ladite mesure conservatoire de scellés, ce sous astreinte de l000 € par jour de retard passé un délai de 48 heures à compter de sa décision exécutoire de plein droit;
condamné les défendeurs à payer à la Société Conserves de Provence et la SELARL BAULAND GLADEL MARTINEZ la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés non compris dans les dépens, à répartir entre d'une part la société Auxiliaire de Garantie (AUXIGA), la BNP Paribas, à hauteur de l500€ et d'autre part la Société Générale et la Banque Populaire Provençale et Corse, à hauteur de 500€ ;
rejeté les réclamations de la Société Auxiliaire de Garantie (AUXIGA), la BNP Paribas, la Société Générale, la Banque Populaire Provençale et Corse sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
condamné la Société Auxiliaire de Garantie (AUXIGA), la BNP Paribas, la Société Générale et la Banque Populaire Provençale et Corse aux entiers dépens de la procédure de référé.
La Société AUXIGA, la BNP Paribas, la Société Générale et la Banque Populaire Provençale et Corse ont relevé appel de ce jugement.
Par conclusions du 19 décembre 2008 auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et de ses moyens, la société anonyme coopérative BANQUE POPULAIRE PROVENÇALE et CORSE demande à la cour de :
Vu les articles 378 et suivants du Code de Procédure Civile, Vu l'article 2083 du Code Civil, Vu les pièces versées aux débats,
A titre principal,
Prononcer le sursis à statuer dans l'attente de la décision à intervenir sur l'assiette des gages,
A titre subsidiaire,
En tout état de cause,
Condamner la société CONSERVES DE PROVENCE et Me B... à verser à la BPPC la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
Par conclusions du 8 janvier 2009 auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de leurs prétentions et de leurs moyens, la SA BNP PARIBAS, la SA SOCIÉTÉ GÉNÉRALE et la SA AUXIGA demandent à la cour de :
Vu,- les articles 9 et 31 du code de procédure civile,- les articles 2071 et suivant du code de civil (ancienne codification),- l'assignation au fond délivrée depuis le 10 avril 2008 par les parties demanderesses et les écritures en défense signifiées par les concluantes pour l'audience du 16 mai 2008 devant le Tribunal
Constater par ailleurs à cet égard que les parties intimées n'ont pas entendu saisir le Juge des référés pour contester cette mesure et ses effets, mais ont choisi d'introduire une procédure au fond dans laquelle elles s'abstiennent à ce jour de toute diligence.
Constater en tout état de cause le caractère indivisible du gage affecté au remboursement des créances de chacune et de toutes les Banques par l'acte initial d'affectation du 16 janvier 2004 et ses avenants successifs.
Dire et juger en conséquence que le droit de rétention résultant du gage avec dépossession que BNP PARIBAS, la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE et la BANQUE POPULAIRE PROVENÇALE ET CORSE ont régulièrement acquis leur confèrent le droit de refuser la restitution de la marchandise gagée et légitimement retenue jusqu'à complet paiement de leurs créances.
Condamner les mêmes aux dépens qui seront recouvrés par la SCP FONTAINE, MACALUSO-JULLIEN, Avoué à la Cour, conformément aux dispositions de l'article 699 du CODE DE PROCÉDURE CIVILE.
Par conclusions du 13 janvier 2009 auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de leurs prétentions et de leurs moyens, la société par actions simplifiée CONSERVES DE PROVENCE LE CABANON et la SELARL BAULAND GLADEL MARTINEZ demandent à la cour de :
Vu l'Ordonnance du 10 juin 2008,
A TITRE PRINCIPAL,
Vu les dispositions de l'article 378 du Code de Procédure Civile,
Surseoir à statuer dans l'attente de l'intervention d'une décision définitive dans l'instance au fond actuellement en cours,
A TITRE SUBSIDIAIRE,
Vu les articles 872 et 873 du Code de Procédure Civile,
Confirmer l'ordonnance du 10 juin 2008 en toutes ses dispositions.
Y ajoutant,
Condamner les mêmes en tous les dépens de l'instance, dont distraction au profit de la SCP GUIZARD SERVAIS, Avoués à la Cour sur son affirmation de droit.
SUR QUOI, LA COUR :
Attendu que l'article 2073 ancien du Code civil dispose que « le gage confère au créancier le droit de se faire payer sur la chose qui en est l'objet, par privilège et préférence aux autres créanciers » ; que l'article 2083 alinéa 1er ancien devenu l'article 2349 alinéa 1er du Code civil dispose que « le gage est indivisible nonobstant la divisibilité de la dette envers les héritiers du débiteur ou ceux du créancier ».
Attendu que s'agissant d'un gage avec dépossession, l'accès ne peut en être interdit aux créanciers gagistes ; qu'au regard du principe d'indivisibilité du gage, l'apposition des scellés sur le lieu de stockage des marchandises gagées ne constitue pas un trouble manifestement illicite permettant au juge des référés, sur le fondement de l'article 873 du Code civil, de limiter le droit d'accès du créancier au gage et donc d'ordonner une mainlevée partielle des scellés apposés par le tiers détenteur pour le compte des créanciers gagistes, tant qu'il n'a pas été statué sur l'assiette du gage par le juge du fond, actuellement saisi et auquel seul il appartient d'apprécier les conséquences de la renonciation de l'un des créanciers gagistes sur l'assiette du gage des autres bénéficiaires de cette sûreté.
Attendu que l'ordonnance entreprise doit être infirmée ; qu'il y a lieu de débouter les intimées de leur demande de mainlevée des scellés ; que la demande concernant « toutes mesures de blocage » sans désignation d'aucune mesure de telle nature est indéterminée et n'appelle pas de réponse.
Attendu que la société par actions simplifiée CONSERVES DE PROVENCE LE CABANON et la SELARL BAULAND GLADEL MARTINEZ qui succombent doivent supporter les dépens ; qu'il n'apparaît pas inéquitable de laisser aux appelantes la charge de leur frais non compris dans les dépens.
Par ces motifs, la Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière civile, en dernier ressort,
En la forme, reçoit la Société AUXIGA, la SA BNP Paribas, la SA Société Générale et la société anonyme coopérative Banque Populaire Provençale et Corse en leur appel et le dit bien fondé.
Infirme l'ordonnance déférée et, statuant à nouveau :
Déboute la SAS CONSERVES DE PROVENCE LE CABANON et la SELARL BAULAND GLADEL MARTINEZ de leur demande de mainlevée des scellés apposés le 6 juin 2008 à la requête de la société AUXIGA.
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Condamne la société par actions simplifiée CONSERVES DE PROVENCE LE CABANON et la SELARL BAULAND GLADEL MARTINEZ aux dépens et alloue à la SCP Michel TARDIEU et à la SCP FONTAINE-MACALUSO-JULLIEN le bénéfice des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Arrêt qui a été signé par Monsieur BRUZY, président, et par Madame VILLALBA, greffier.