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01/04/2008 | FRANCE | N°06/01227

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 01 avril 2008, 06/01227


R. G : 06 / 01227

TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE DE NIMES
13 février 2006




X...


C /

Z...

DRASS (34)
MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE DU GARD

COUR D' APPEL DE NÎMES

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 01 AVRIL 2008



APPELANT :

Monsieur Mohamed X...


...


...


...


représenté par la SCP GARCIA- GABORIT, avocats au barreau de NIMES, plaidant par Maître GARCIA, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉES :

Madame Françoise Z... épouse A..

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...


...


représentée par la SCP FORTUNET ET ASSOCIES, avocats au barreau D' AVIGNON, plaidant par Maître FORTUNET, avocat au barreau D' AVIGNON



MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE DU GA...

R. G : 06 / 01227

TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE DE NIMES
13 février 2006

X...

C /

Z...

DRASS (34)
MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE DU GARD

COUR D' APPEL DE NÎMES

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 01 AVRIL 2008

APPELANT :

Monsieur Mohamed X...

...

...

...

représenté par la SCP GARCIA- GABORIT, avocats au barreau de NIMES, plaidant par Maître GARCIA, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉES :

Madame Françoise Z... épouse A...

...

...

représentée par la SCP FORTUNET ET ASSOCIES, avocats au barreau D' AVIGNON, plaidant par Maître FORTUNET, avocat au barreau D' AVIGNON

MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE DU GARD
Rue Edouard Lalo
30924 NIMES CEDEX 9

représentée par la SCP MONCEAUX FAVRE DE THIERRENS BARNOUIN THEVENOT, avocats au barreau de NIMES, plaidant par Maître CLABEAUT LE TARGAT, avocat au barreau de NIMES

APPELÉE EN CAUSE :

DRASS
615 Boulevard d' Antigone
34064 MONTPELLIER CEDEX

non comparante, ni représentée

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS :

Monsieur Olivier THOMAS, Conseiller, a entendu les plaidoiries en application de l' article 945- 1 du code de Procédure Civile, sans opposition des parties.
Il en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Monsieur Régis TOURNIER, Président
Monsieur Olivier THOMAS, Conseiller
Madame Brigitte OLIVE, Conseiller

GREFFIER :

Madame Anne GIARD, Adjoint Administratif exerçant les fonctions de Greffier, lors des débats, et Madame Patricia SIOURILAS, Greffier, lors du prononcé,

DEBATS :

à l' audience publique du 01 Février 2008, où l' affaire a été mise en délibéré au 01 Avril 2008,

ARRET :
Arrêt réputé contradictoire, rendu en dernier ressort, prononcé et signé par Monsieur Régis TOURNIER, Président, publiquement, le 01 Avril 2008, date indiquée à l' issue des débats,

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Monsieur Mohamed X..., ouvrier agricole au service de Madame Françoise Z... a été victime d' un accident de travail, le 5 novembre 1995, alors qu' il labourait un champ avec un tracteur tiré à l' aide d' un câble par un autre tracteur, conduit par un ouvrier Monsieur Absalem E....

Au cours d' une manoeuvre, en fin de sillon, le tracteur que Monsieur X... conduisait s' est renversé sur lui occasionnant de graves blessures.

Il en est résulté une incapacité totale de travail et la victime s' est vue reconnaître une incapacité permanente partielle de 55 %.

Le tribunal correctionnel, par jugement du 15 janvier 1999 et la Cour d' appel, par arrêt du 15 janvier 1999 ont déclaré Madame Z... coupable de blessures involontaires.

Le 8 décembre 1998, Monsieur X... a saisi la Mutualité sociale agricole du Gard d' une reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur.

Un procès verbal de non conciliation a été établi, le 13 mars 2000, et aurait été transmis aux parties le 2 mai 2000.

Monsieur X... a saisi, le 18 avril 2005, le Tribunal des Affaires de sécurité sociale du Gard.

Par jugement en date du 13 février 2006, le tribunal a dit que le recours en reconnaissance de faute inexcusable formé par Monsieur X... était irrecevable car hors délai, le procès verbal de non conciliation, établi le 13 mars 2000, ayant été notifié au plus tard le 2 mai 2000 et la saisine du tribunal étant intervenue le 18 avril 2005, soit dans un délai dépassant 2 ans.

Monsieur X... a relevé appel de ce jugement.

Il fait valoir qu' il n' est pas démontré qu' il ait reçu effectivement la notification du procès verbal de non conciliation à la date du 2 mai 2000.

Il ajoute que la lettre qui lui aurait été adressée et qui aurait accompagné le procès verbal n' a pas été envoyée en recommandé.

Il considère que l' absence d' accusé de réception ne permet aucunement de retenir que le destinataire de cet envoi ait pu le recevoir.

Il précise par ailleurs que l' enquête a établi l' absence de mise en place d' un arceau de sécurité au début du travail alors qu' un tel système est rendu obligatoire par la loi.

Il affirme que la faute de l' employeur est la cause nécessaire de l' accident et que celui- ci n' a pas respecté son obligation de sécurité résultat.

Il demande à la Cour de reconnaître la faute inexcusable de l' employeur, d' ordonner la majoration au maximum de la rente accident et de lui allouer les sommes de 20. 000 € au titre du prix des souffrances physiques et morales et 10. 000 € au titre du préjudice d' agrément.

A titre subsidiaire, il sollicite une mesure d' instruction pour évaluer ses préjudices ainsi qu' une provision de 5. 000 €.

Madame Z... a conclu à la confirmation de la décision déférée et à la condamnation de l' appelant au paiement de la somme de 1. 200 € au titre de l' article 700 du code de procédure civile.

Elle souligne que si le délai de prescription est interrompu par la procédure de conciliation, il reprend son cours dés que la victime de l' accident de travail a la connaissance effective de l' échec de la conciliation sans que cette connaissance soit subordonnée à une notification.

Elle soutient que Monsieur X... a immédiatement eu connaissance de l' échec de la tentative de conciliation à laquelle il était représenté par son conseil et qu' il a en outre signé le procès- verbal.

Elle précise que dès le mois de mars 2000 Monsieur X... avait nécessairement reçu notification et donc communication du procès- verbal de non conciliation.

Elle considère que l' action en reconnaissance de faute inexcusable est prescrite.

La caisse de mutualité sociale agricole du Gard demande à la cour de statuer ce que de droit sur les mérites de l' appel de Monsieur X... et dans l' hypothèse où elle jugerait son recours recevable et bien fondé, de dire qu' elle récupérera sur l' employeur par majoration des cotisations accident de travail le montant de la majoration de la rente ainsi que le montant des sommes allouées au titre des préjudices extra patrimoniaux.

Le SRITEPSA de Montpellier bien que régulièrement convoqué pour l' audience par lettre recommandée avec accusé de réception, n' était pas présent à l' audience et n' était pas représenté.

MOTIFS

Sur la recevabilité de l' action en reconnaissance de faute inexcusable

Il résulte d' un arrêt de la Cour de cassation en date du 13 mai 1993 (pourvoi no90- 19548) que la saisine de la caisse primaire d' assurance maladie par la victime d' un accident de travail interrompt la prescription biennale de l' article L 431- 2 du code de la sécurité sociale, également applicable en matière de sécurité sociale du régime agricole (article 1148 du code rural), le cours de celle- ci étant suspendu tant que l' organisme social n' a pas fait connaître aux intéressés le résultat de la tentative de conciliation.

A compter de la notification de ce résultat un nouveau délai de prescription de 2 ans commence à courir en sorte que l' action engagée pendant cette période en déclaration de faute inexcusable de l' employeur n' est pas prescrite.

Il n' est pas contesté que joint à un courrier en date du 16 mars 2000, la Mutualité sociale agricole a adressé à Monsieur X... pour signature le procès verbal de non conciliation.

Le courrier portait la précision suivante : " nous vous adresserons à nouveau ce document dès que le président de la commission y aura déposé sa signature. "

Monsieur X... conteste avoir reçu ultérieurement notification du procès verbal et notamment le 2 mai 2000.

La Mutualité sociale agricole et Madame Z... soutiennent que le procès verbal a été notifié à Monsieur X... le 2 mai 2000 de sorte que sa demande en déclaration de faute inexcusable de l' employeur introduite le 25 avril 2005 est atteinte par la prescription biennale de l' article L 431- 2 du code de la sécurité sociale.

Il appartient à la partie qui oppose la prescription d' établir que le délai de prescription a commencé à courir à compter d' une date certaine.

Or, dans la mesure ou ledit procès verbal a été, selon l' affirmation non contestée de la Mutualité sociale agricole, adressé à Monsieur X... par lettre simple cet organisme n' apporte pas la preuve de la remise effective du document à son assuré de sorte que le délai de prescription ne peut avoir commencé à courir.

Il s' ensuit que l' action en reconnaissance de faute inexcusable n' est pas prescrite et est donc recevable.

Sur la faute inexcusable de l' employeur

Il résulte de la combinaison des articles L. 451- 1, L. 452- 2, L. 452- 3 et L. 452- 4 du code de la sécurité sociale que la victime ne peut agir en reconnaissance d' une faute inexcusable que contre l' employeur, quel que soit l' auteur de la faute, et que le versement des indemnités est à la charge exclusive de la caisse primaire d' assurance maladie, laquelle n' a de recours que contre la personne qui a la qualité d' employeur ;

Par ailleurs, en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l' employeur est tenu envers celui- ci d' une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les accidents du travail et les maladies professionnelles.

Le manquement à cette obligation a le caractère d' une faute inexcusable au sens de l' article L. 452- 1 du code de la sécurité sociale lorsque l' employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu' il n' a pas pris les mesures nécessaires pour l' en préserver.

Il est indifférent que la faute inexcusable commise par l' employeur ait été la cause déterminante de l' accident survenu au salarié.

Il suffit qu' elle en soit la cause nécessaire pour que la responsabilité de l' employeur soit engagée, alors même que d' autres fautes auraient concouru au dommage.

Il incombe à la victime d' un accident du travail qui exerce une action aux fins de condamnation de l' employeur pour faute inexcusable de rapporter la preuve que celui- ci, qui devait avoir conscience du danger auquel la victime était exposée, n' a pas pris les mesures nécessaires pour l' en préserver.

La faute de la victime n' a pas pour effet d' exonérer l' employeur de la responsabilité qu' il encourt en raison de sa faute inexcusable.

Seule une faute inexcusable de la victime, au sens de l' article L. 453- 1 du code de la sécurité sociale peut permettre de réduire la majoration de sa rente.

Présente un tel caractère la faute volontaire de la victime d' une exceptionnelle gravité exposant sans raison valable son auteur à un danger dont il aurait dû avoir conscience.

Le 5 novembre 1995, à 11h15 sur la commune de PUJAUT au lieudit " la Grave " s' est produit un accident de travail provoquant un traumatisme thoracique sur la personne de Monsieur X....

Cet accident s' est produit dans les circonstances suivantes : " le tracteur conduit par Monsieur X... ouvrier agricole auprès de l' entreprise Z... à Pujaut se renverse au cours d' un labour et écrase son conducteur le blessant gravement ".

L' enquête pénale diligentée, qui a abouti à la condamnation définitive de Madame Françoise Z... pour blessures involontaires, a établi formellement l' absence de mise en place de l' arceau de sécurité au début du travail et a relevé que, si cet arceau avait été utilisé, un espace suffisant aurait pu, lors du renversement de l' engin, protéger Monsieur X....

La juridiction pénale a relevé que ce système de protection est rendu obligatoire par un décret du 24 décembre 1980 relatif aux conditions de sécurité des tracteurs agricoles à deux roues.

Elle a retenu qu' il appartenait à Madame Z... en sa qualité d' employeur de s' assurer que le salarié avait mis en place l' arceau.

Ainsi, l' employeur, tenu à une obligation de sécurité de résultat, ne pouvait qu' avoir conscience du danger encouru par son salarié en ne vérifiant pas la présence de l' arceau sur le tracteur.

Il n' a donc pas pris les mesures nécessaires pour préserver son salarié d' un danger.

L' accident trouve sa cause dans la violation de ses obligations par l' employeur et il importe peu que le salarié ait pu concourir au dommage en commettant une maladresse dans la conduite du tracteur..

Il convient dans ces conditions d' infirmer le jugement déféré.

Sur la demande d' indemnisation

En l' état de la reconnaissance de la faute inexcusable de l' employeur il convient de majorer au maximum la rente invalidité attribuée à Monsieur X....

S' agissant de la demande d' indemnisation des préjudices il convient d' ordonner une expertise, étant précisé qu' il n' est pas demandé l' indemnisation au titre du préjudice esthétique et de la perte de promotion professionnelle..

Il y a lieu d' allouer à la victime une provision à valoir sur l' indemnisation de ses préjudices d' un montant de 3. 500 €.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

Déclare recevable l' action en reconnaissance de faute inexcusable engagée par Monsieur Mohamed X...,

Dit que l' accident de travail dont a été victime Monsieur Mohamed X..., le 5 novembre 1995, est dû à la faute inexcusable de l' employeur, Madame Françoise Z... épouse A...,

Fixe la majoration de la rente au taux maximum,

Renvoie la victime devant l' organisme compétent pour la liquidation de ses droits à ce titre.

Avant dire droit, sur l' évaluation des préjudices à caractère personnel,

Ordonne une expertise médicale et désigne pour y procéder le docteur Bernard F..., avec mission d' évaluer le préjudice causé par les souffrances physiques et morales endurées par Monsieur X... et son préjudice d' agrément,

Dit que l' expert devra déposer son rapport dans le délai de trois mois suivant sa saisine,

Fixe à 500 € le montant de la provision à valoir sur sa rémunération qui devra être avancée par la Caisse de Mutualité Sociale Agricole du Gard.

Désigne le Président de la Chambre Sociale ou son délégataire, en qualité de magistrat chargé du contrôle de l' expertise,

Fixe à la somme de 3. 500 € la provision dûe à Monsieur X....
Dit que la Mutualité Sociale Agricole du Gard devra faire l' avance de cette somme et qu' elle en récupérera le montant auprès de l' employeur.

Renvoie la cause et les parties à l' audience du jeudi 09 octobre 2008 à 14 heures 00, étant précisé que la notification du présent arrêt tiendra lieu de convocation à cette audience,

Réserve la demande fondée sur l' article 700 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Monsieur TOURNIER, Président et par Madame SIOURILAS, Greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Numéro d'arrêt : 06/01227
Date de la décision : 01/04/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal des affaires de sécurité sociale de Nîmes


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-04-01;06.01227 ?
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