R. G. : 07 / 00034
CONSEIL DE PRUD' HOMMES D' AVIGNON
30 novembre 2006
Section : Industrie
SA GROUPE GUILLIN HOLDING
C /
X...
COUR D' APPEL DE NÎMES
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 05 MARS 2008
APPELANTE :
SA GROUPE GUILLIN HOLDING venant aux droits et obligations de la SA GATTINI EMBALLAGES
Zone Industrielle
Avenue du Maréchal de Lattre de Tassigny
25290 ORNANS
représentée par Maître Christian BONNENFANT, avocat au barreau d' AVIGNON
INTIMÉE :
Madame Corinne X...
née le 12 Juin 1966 à
Chez Mme Y...
...
...
représentée par Maître Thierry COSTE, avocat au barreau d' AVIGNON
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Régis TOURNIER, Président,
Monsieur Olivier THOMAS, Conseiller,
Monsieur Christian LERNOULD, Conseiller,
GREFFIER :
Madame Catherine ANGLADE, Adjoint Administratif exerçant les fonctions de Greffier, lors des débats, et Madame Patricia SIOURILAS, Greffier, lors du prononcé,
DÉBATS :
à l' audience publique du 11 Décembre 2007, où l' affaire a été mise en délibéré au 13 février 2008 puis prorogée au 05 Mars 2008,
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort, prononcé et signé par Monsieur Régis TOURNIER, Président, publiquement, le 05 Mars 2008,
FAITS PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
La société Etablissements GATTINT, située à VEDENE, avait pour activité la fabrication et la transformation de papiers cartons matières plastiques pellicules cellulosiques et a développé son activité dans la fabrication d' articles souples pour l' emballage des fruits et légumes.
Depuis 1986 la société PAPETERIE GATTINI avait été créée afin d' exploiter le fonds des Etablissements GATTINI.
Une opération d' apport fusion était réalisée le 21 avril 1993 au bénéfice du groupe GUILLIN et la dénomination sociale devenait GATTINI EMBALLAGES.
Le 22 décembre 1994, le Comité d' entreprise était informé et consulté sur un premier projet de licenciement collectif pour cause économique qui donnait lieu à des suppressions d' emplois en 1995.
Les difficultés se prolongeant le 27 novembre 1997 était présenté au Comité d' Entreprise un second projet de licenciement collectif pour cause économique, et estimant qu' il était dans l' obligation d' envisager une cessation totale et définitive de l' activité, l' employeur présentait le 30 septembre 1998, un plan social.
A la suite de la fermeture totale et définitive intervenait le licenciement collectif de 66 salariés pour motif économique.
Madame X... avait été embauchée par la SA GATTINI le 10 avril 1986 en qualité d' opératrice machine 2, qualification ouvrière, et était membre titulaire de la délégation unique du personnel.
Par décision en date du 17 novembre 1998, l' Inspecteur du Travail avait autorisé son licenciement pour motif économique et Madame X... était licenciée, avec dispense d' exécuter son préavis, par lettre recommandée avec demande d' avis de réception en date du 18 novembre 1998.
Le 29 décembre 2005 elle saisissait le Conseil de Prud' hommes d' AVIGNON afin d' obtenir la condamnation de la société à lui payer la somme de 30. 000 euros en réparation de ses préjudices économiques, professionnel et moral.
Elle exposait que :
- à la suite d' une action individuelle exercée par une autre salariée, Madame B..., qui avait saisi le Conseil de Prud' hommes d' AVIGNON, cette juridiction, par jugement du 21 octobre 1999 l' avait déboutée de ses demandes et par arrêt du 18 mars 2002 la Cour d' appel de ce siège avait confirmé le jugement,
- or cet arrêt avait été cassé par la Cour de Cassation le 12 janvier 2005 et statuant comme juridiction de renvoi, la Cour d' appel de MONTPELLIER avait, par arrêt du 12 septembre 2005, prononcé la nullité du plan social et la nullité du licenciement de Madame B..., aux motifs que le plan social ne contenait pas d' indications sur les propositions d' emplois disponibles dans le groupe et ce, en violation de l' article L. 32l. 4. 1 du Code du Travail,
- cet arrêt ayant annulé le plan social entraînait la nullité des licenciements subséquents, et sa réintégration n' étant pas possible, elle pouvait prétendre à des dommages et intérêts prévus par l' article L. 122. 14. 14 du Code du travail ;
Par jugement du 30 novembre 2006 le Conseil des Prud' hommes d' AVIGNON aux motifs que :
« Le défendeur prétend irrecevable l' action de Madame X... considérant que celle- ci aurait dû, dans un délai de cinq ans, engager une action individuelle tendant à f aire reconnaître la nullité de son licenciement économique sur le fondement de la nullité du plan.
« Mais attendu que ce jour, la nullité de licenciement économique n ‘ est l' objet d' aucune demande devant le Conseil de Prud' hommes d' Avignon.
« Attendu que les demandes formulées sont simplement la conséquence de la nullité d' un plan social prononcée par la Cour d' Appel de Montpellier suite à un arrêt de la Cour de Cassation.
« Attendu de plus que la Cour de Cassation en audience publique du 13 février 1997 a jugé que la nullité d' un plan social s ‘ étend à tous les actes subséquents et qu' en particulier les licenciements prononcés par l' employeur, qui constituent la suite et la conséquence de la procédure de licenciement collect4f en application de l' article L. 321. 4. 1 sont eux- mêmes nuls.
« En conséquence, le Conseil dit recevable la demande de Madame X.... »
estimait que le licenciement de Madame X... était nul subséquemment à la nullité du plan social et condamnait la société à lui payer les sommes de 22. 000 euros à titre de dommages et intérêts et 700 euros au titre de l' article 700 du Code de procédure civile.
La société GROUPE GUILLIN HOLDONG a régulièrement interjeté appel de ce jugement et en sollicite son infirmation.
Elle soutient que :
- la demande doit être déclarée prescrite conformément à la jurisprudence de la Cour de Cassation selon laquelle l' action individuelle d' un salarié tendant à faire reconnaître la nullité de son licenciement économique sur le fondement de la nullité du plan social, doit être exercée dans le délai de la prescription quinquennale,
- il s' agit d' une nullité relative au sens de l' article 1304 du Code Civil et en raison des délais écoulés entre la date du plan social, du licenciement pour motif économique et de la saisine du Conseil de prud' hommes par la salariée, à savoir, plus de 7 ans, la prescription est acquise et l' action est prescrite,
- le Conseil de Prud' hommes a cru pouvoir retenir qu' en l' espèce la nullité du licenciement économique ne faisait l' objet d' aucune demande et que les « demandes n' étaient que la conséquence de la nullité d' un plan social prononcée par la Cour d' appel de MONTPELLIER », ce qui constitue manifestement une erreur de droit.
Elle demande enfin la somme de 1. 000 euros d' indemnité au titre de l' article 700 du Code de procédure civile.
L' intimée demande le rejet de l' appel, l' augmentation des dommages intérêts, et l' octroi d' une somme de 2. 000 euros au titre de l' article 700 du Code de procédure civile.
MOTIFS
Attendu qu' il résulte de l' article L. 321- 4- 1, alinéa 2, que l' absence d' un plan social ou la nullité de celui- ci s' étend à tous les actes subséquents et en particulier aux licenciements prononcés par l' employeur, qui constituent la suite et la conséquence de la procédure de licenciement collectif suivie par application dudit article ; que le salarié licencié pour motif économique a un droit propre à faire valoir que son licenciement était nul au regard des dispositions précitées ;
Attendu que, toutefois, l' action individuelle tendant à faire reconnaître la nullité de son licenciement sur le fondement de la nullité du plan social doit être, s' agissant d' une nullité relative, exercée dans le délai de la prescription quinquennale, en application de l' article 1304 du Code civil, le point de départ du délai étant fixé à la date du licenciement ;
Attendu que l' intimée se prévaut d' une part de la nullité du plan qui a déjà été prononcé par la Cour d' appel de Montpellier au motif que cette décision produirait un effet erga omnes, d' autre part de la possibilité d' opposer cette nullité contre celui qui prétend tirer un droit d' un acte nul ;
Attendu cependant que l' intimée ne figurait pas à l' instance distincte devant la Cour d' appel en sorte que les dispositions de l' arrêt du 12 septembre 2005, statuant sur le seul recours engagé par un autre salarié relativement à son propre licenciement, ne sont pas opposables à l' employeur ;
Attendu qu' également la possibilité d' opposer la nullité d' un acte, sans limitation de temps, n' est conférée, par voie d' exception, qu' à celui qui se défend contre une prétention formulée à son encontre ; que cette possibilité ne saurait être invoquée par celui qui agit par voie d' action ;
Attendu que l' action exercée est donc prescrite ; que le jugement déféré doit être infirmé ;
Attendu qu' il parait équitable que chacune des parties supporte ses frais exposés non compris dans les dépens ;
Vu l' article 696 du nouveau Code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Infirme le jugement déféré,
Statuant à nouveau,
Déclare l' action exercée irrecevable,
Dit n' y avoir lieu à application de l' article 700 du Code de procédure civile.
Condamne l' intimée aux dépens. de première instance et d' appel.
Arrêt qui a été signé par Monsieur TOURNIER Président et par Madame SIOURILAS Greffier, présente lors du prononcé.