ARRÊT No116
R. G : 05 / 01263
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE CARPENTRAS
08 février 2005
SNC Z... ET CIE
C /
X...
COUR D'APPEL DE NIMES
CHAMBRE CIVILE
1ère Chambre A
ARRÊT DU 19 FEVRIER 2008
APPELANTE :
SNC Z... ET CIE
poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice, domiciliés ès qualités au siège social
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représentée par la SCP M. TARDIEU, avoués à la Cour
assistée de la SCP MEUNIER VIAL, avocats au barreau de NÎMES
INTIMES :
Monsieur Michel X...
né le 10 Octobre 1956 à SORGUES (84)
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représenté par la SCP GUIZARD- SERVAIS, avoués à la Cour
assisté de la SCP FONTAINE, avocats au barreau de NÎMES
Madame Marie- Josée X...
née le 13 Mars 1955 à SUECA (ESPAGNE)
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représentée par la SCP GUIZARD- SERVAIS, avoués à la Cour
assisté de la SCP FONTAINE, avocats au barreau de NÎMES
ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 11 Décembre 2007
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Mme Muriel POLLEZ, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 786 du Code de Procédure Civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
M. Pierre BOUYSSIC, Président
M. Emmanuel DE MONREDON, Conseiller
Mme Muriel POLLEZ, Conseillère
GREFFIER :
Mme Véronique VILLALBA, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision.
DÉBATS :
à l'audience publique du 12 Décembre 2007, où l'affaire a été mise en délibéré au 19 Février 2008.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé et signé par M. Pierre BOUYSSIC, Président, publiquement, le 19 Février 2008, date indiquée à l'issue des débats, par mise à disposition au greffe de la Cour.
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faits, procédure et prétentions :
A la suite de leurs 3 acquisitions effectuées en 1998 et 1999 sur le commune du Beaucet portant sur des parcelles bâties et non bâties, Michel et Marie- Josée X... sont en conflit avec la SNC Jean- Marie Z... et Compagnie tant en ce qui concerne la propriété des immeubles que sur un droit de passage qu'ils revendiquent pour accéder à la voie publique. Michel et Marie- Josée X... ont en conséquence fait assigner la SNC Jean- Marie Z... et Compagnie d'abord devant le juge des référés aux fins de se voir reconnaître un droit de passage sur la propriété de Michel et Marie- Josée X... et entendre ordonner une mesure d'instruction aux fins de déterminer l'assiette de ce passage. L'expert a déposé son rapport le 6 janvier 2003, s'expliquant également sur les éléments de propriété invoqués par les parties sur le bâtiment et sur les terres voisines qui supporteraient le chemin et les empiétements allégués par la SNC Z... en suite des travaux effectués par ses voisins. En ouverture du rapport, Michel et Marie- Josée X... ont fait assigner la SNC Jean- Marie Z... et Compagnie aux fins de fixation des droits des parties sur la construction et le passage revendiqué.
Suivant jugement du 8 février 2005, le Tribunal de Grande Instance de CARPENTRAS a :
- constaté que Michel et Marie- Josée X... étaient propriétaires des entières parcelles sises sur la commune du Beaucet cadastrées section A no 335 et 336 et du rez- de- chaussée de la parcelle no 337 ainsi que de 49 m ² indivis de la cour autrefois cadastrée no 288 p comprise dans l'actuelle parcelle 338, de l'ancienne parcelle 289 pour 78 m ², étant précisé que les surfaces provenant des parcelles 288 p et 289 font parties du chemin d'exploitation et sont à usage commun avec la SNC Jean- Marie Z... et Compagnie,
- ordonné la publication du présent jugement en application des dispositions de l'article 28 du décret du 4 janvier 1955,
- constaté l'état d'enclave des parcelles acquises par Michel et Marie- Josée X... au Beaucet lieudit " Ferme de Paradis ",
- dit qu'ils bénéficiaient d'un accès de la route à leur propriété à partir du chemin d'exploitation englobant les parcelles 288 p et 289, 278 p et 281, tel qu'il existe actuellement d'une largeur de 2, 70 m au levant côté route départementale et 3, 20 m au couchant entre la pierre couchée et le mur de pierres sèches,
- ordonné la remise en état des lieux sur lesquels Michel et Marie- Josée X... ont empiété et effectué des travaux irréguliers, à savoir qu'ils devraient dans un délai de 6 mois à compter de la signification du jugement :
¤ retirer les escaliers situés entre les parcelles 324 et 329,
¤ enlever les gravats et matériaux,
¤ démolir les ouvrages affectant les parties communes de l'immeuble,
- fait masse des dépens partagés par moitié et
- débouté les parties de toutes autres demandes.
La SNC Jean- Marie Z... et Compagnie en a interjeté appel suivant déclaration enregistrée au greffe le 17 mars 2005, sans que les parties élèvent de discussion quant à la recevabilité de l'appel ou qu'il résulte des pièces du dossier de moyen d'irrecevabilité devant être relevé d'office par la cour.
¤ ¤ ¤
Vu les dernières écritures déposées au greffe le 30 novembre 2007 par la SNC Jean- Marie Z... et Compagnie qui demande à la Cour, de :
- réformer le jugement dont appel sur les points qui suivent :
- constater qu'elle ne conteste pas l'état d'enclave des parcelles acquises par Michel et Marie- Josée X...,
- statuer ce que de droit sur la demande de désenclavement et fixer l'indemnité correspondante qui sera mise à la charge des époux X... à son profit à la somme de 10. 000 Euros sauf à ordonner une expertise complémentaire sur ce point,
- constater que cette demande de désenclavement est exclusive de toute faculté d'obtenir un accès à leur parcelle et dire en particulier que le terrain entre la route départementale et la " ferme de paradis " n'est pas un chemin d'exploitation à l'usage de plusieurs propriétaires et n'est en tous cas pas à l'usage de Michel et Marie- Josée X...,
- dire que ceux- ci sont sans droit sur les parcelles de terrain entourant les constructions de la ferme, dépourvus de titre, lesdits terrains, au moins pour la partie revendiquée par Michel et Marie- Josée X... étant sa propriété, au besoin par l'effet de la prescription acquisitive,
- constater en conséquence qu'ils sont exclusivement propriétaires du rez- de- chaussée de la parcelle 337, de l'entière parcelle 336 et du rez- de- chaussée et second étage de la parcelle 335, à l'exclusion de toute autre partie de bâtiment ou de terrain, indivisément ou à titre de seul propriétaire,
- constatant les empiétements et travaux irréguliers à leur charge,
- confirmer la décision en ce qu'elle a ordonné la remise en état des lieux, les démolitions des ouvrages empiétant sur sa propriété ou affectant les parties communes de l'immeuble,
- préciser que ces démolitions concerneront en particulier les dalles de béton réalisés par Michel et Marie- Josée X... et qu'il y aura lieu en revanche à la reconstruction des ouvrages démolis en rive de toitures (génoises) les modifications d'ouverture, à restituer en leur état antérieur,
- réformant pour le surplus,
- assortir ces prescriptions d'une astreinte de 200 Euros par jour de retard,
- faire interdiction à Michel et Marie- Josée X... d'exercer tout passage sur ses fonds ailleurs que sur le chemin accédant depuis la route départementale, d'entreposer tous matériaux, gravats et immondices et de stationner sur ces propriétés sous astreinte de 1000 Euros par infraction constatée et par jour de retard à faire cesser cette infraction,
- lui donner acte de ce qu'elle ne s'oppose pas à la confection d'un règlement de copropriété selon le descriptif ci- dessus proposé par Maître A...,
- condamner Michel et Marie- Josée X... à lui payer en réparation du trouble de jouissance et des préjudices matériels et moraux résultant des empiétements, passages, travaux irréguliers, la somme de 5000 Euros à titre de dommages et intérêts,
- subsidiairement et avant dire droit, sur l'attribution des biens et le montant de l'indemnité due au titre du désenclavement, ordonner une nouvelle expertise avec mission, connaissance prise du rapport antérieur, de rechercher les éléments de faits et de droit permettant au tribunal de statuer sur la propriété des biens litigieux comme sur l'indemnité et les réparations ou remise en état dues par Michel et Marie- Josée X...,
- sauf pour la Cour à se transporter sur les lieux avant de statuer ce dont elle est également requise à titre subsidiaire,
- condamner Michel et Marie- Josée X... à lui payer la somme de 4000 Euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile et aux entiers dépens sous le bénéfice des dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.
Vu les dernières conclusions déposées au greffe le 4 janvier 2006 par Michel et Marie- Josée X... qui sollicitent de la Cour qu'elle :
- déboute la SNC Jean- Marie Z... de ses demandes,
- constate qu'ils sont propriétaires des entières parcelles 335 et 336 et du rez- de- chaussée de la parcelle 337 ainsi que de 49 m ² indivis de la cour autrefois cadastrée parcelle 288 p comprise dans l'actuelle parcelle 338, de l'ancienne parcelle 289 pour 78 m ², étant précisé que les surfaces provenant des parcelles 288 p et 289 font partie du chemin d'exploitation et sont à usage commun avec la SNC Jean- Marie Z...,
- ordonne la publication du jugement à intervenir en application des dispositions du décret du 4 janvier 1955 aux frais de la SNC Z...,
- constate l'état d'enclave et juge qu'ils bénéficient d'un accès de la route à leur propriété à partir du chemin d'exploitation englobant les anciennes parcelles 288 p, 289, 278 p et 281, tel qu'il existe actuellement d'une largeur de 2, 70 m au levant, côté route départementale et de 3, 20 m au couchant entre la pierre couchée et le mur de pierres sèches,
- condamne la SNC Jean- Marie Z... à leur payer la somme de 30. 000 Euros à titre de dommages et intérêts eu égard à sa résistance abusive et injustifiée,
- ordonne la constitution d'une copropriété entre les parties pour gérer la parcelle 337 tel que préconisé par l'expert et ordonne la réalisation d'un règlement de copropriété,
- déboute la SNC Jean- Marie Z... de toutes ses demandes,
- la condamne à leur payer la somme de 2000 Euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile et aux entiers dépens sous le bénéfice des dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.
MOTIFS :
Les parties s'opposent sur leur propriété respective des parties de l'immeuble formant ferme en ruine et de certaines terres immédiatement attenantes ainsi que sur le fondement juridique du droit de passage revendiqué par Michel et Marie- Josée X... pour rejoindre la voie publique.
Le différend trouve essentiellement sa cause dans l'état de ruine de l'immeuble concerné et de son inoccupation depuis très nombreuses décennies, la SNC Z... en étant propriétaire, au moins en partie, depuis 1942 d'abord par son auteur personne physique mais sans utiliser les bâtiments, n'exploitant que les terres avoisinantes et Michel et Marie- Josée X... l'ayant acquis partiellement seulement depuis dix ans pour en entreprendre sa rénovation aux fins d'habitation, apparemment sans concertation préalable sur les droits de chacun et s'octroyant, sans titre selon l'appelante, un droit de passage sur ses fonds pour y accéder.
De manière générale, mais sans prétendre à la nullité du rapport établi par l'expert judiciaire, la SNC Jean- Marie Z... critique ses conclusions résultant d'un travail qu'elle juge peu impartial et ayant excédé les limites de la mission qui lui avait été confiée par le juge.
Le rapport d'expertise soumis à la Cour comprend en effet une recherche et une étude exhaustive des titres des parties et des matrices cadastrales successives qui ont été établies depuis le début du 19ème siècle pour proposer une détermination des droits des parties sur les différentes parties d'immeuble bâties et non bâties à la lecture des pièces réunies et de la situation sur le terrain.
Néanmoins, Claudie Y... n'a pas excédé les termes de sa mission de par ses conclusions puisqu'elle devait faire toutes observations utiles à la solution du litige et plus particulièrement rassembler tous les éléments propres à définir l'assiette et l'emplacement du passage résultant de l'état d'enclave, vérifier si les travaux entrepris par Michel et Marie- Josée X... constituaient des empiétements sur le fonds de la SNC Jean- Marie Z... et donner son avis sur le régime de propriété du fonds et sur les dispositions propres à y remédier.
Ce mandat impliquait donc pour le technicien la recherche des droits de chaque partie sur divers fonds visés par les questions du juge et elle l'a accompli sans que celles- ci lui aient jamais rappelé les limites prétendument dépassées de cette mission particulièrement complexe mais telle que définie, raison pour laquelle elle s'est trouvée contrainte, sans opposition des parties qui y ont pleinement collaboré, de se livrer à une étude comparative des titres et des indications cadastrales.
C'est également vainement que la SNC Jean- Marie Z... lui fait grief d'avoir interprété juridiquement ces éléments de preuve dont elle a disposé qu'elle a simplement rassemblés, techniquement analysés, comparés et sur lesquels elle n'a émis qu'un avis dans les limites de ses compétences, à charge pour le juge, éclairé par l'important travail préparatoire effectué d'en tirer les conséquences sur les droits respectifs des parties sur les immeubles bâtis, leurs violations consécutivement alléguées et les conditions juridiques du désenclavement des fonds des intimés.
Enfin, La SNC Jean- Marie Z... qui affirme de nombreuses lacunes et incohérences du rapport sans jamais, au demeurant, les articuler précisément pour rétablir expressément et intégralement la chronologie démonstrative des actes et documents annexes, si ce n'est par observations isolées, soutient encore avec inexactitude que le travail de l'expert aurait, sans objectivité, consisté à exiger d'elle qu'elle fasse la preuve de ses droits pour toujours admettre, par défaut, ceux invoqués par les intimés.
En effet, elle omet, notamment, l'étude proposée par l'expert de ses droits sur les étages de la parcelle 337 qui participe de la même démarche analytique des divers éléments produits que celle menée pour l'ensemble des autres biens immeubles objet du litige.
En toute hypothèse, à l'exception du folio 13 de la matrice cadastrale dont il sera vu plus tard qu'elle prétend à tort qu'il n'aurait pas été pris en considération par l'expert, elle ne prétend ni ne démontre que d'autres actes ou éléments complémentaires auraient été techniquement occultés ou négligés, leur portée et leur interprétation n'appartenant in fine qu'à la juridiction saisie.
Il s'ensuit que la discussion instaurée par les parties sur leurs droits peut être utilement et objectivement abordée à la lecture du rapport déposé qui en fourni les données nécessaires.
Sur la propriété du bâti :
La construction litigieuse est composée de la partie bâtie mais essentiellement ruinée de la parcelle 338 (ex 285, 286 et 287), perpendiculaire au reste de l'ouvrage composée des parcelles 337, 336 et 335 situées sur un même alignement et formant un seul corps de bâtiment avec rez- de- chaussée et deux étages également très dégradée.
Il est admis par les parties que les trois niveaux de la parcelle 336 (ex 283) appartiennent à Michel et Marie- Josée X... ainsi que le rez- de- chaussée de la parcelle 337 (ex 284) et le rez- de- chaussée et le second étage de la parcelle 335 (ex 282). Les parties s'accordent, par là, sur la propriété de la SNC Jean- Marie Z... sur les deux niveaux en élévation de la parcelle 337.
La seule propriété en discussion est le premier étage de la parcelle 335 que chaque partie revendique et que le tribunal, entérinant les conclusions de l'expert, a attribué à Michel et Marie- Josée X....
Michel et Marie- Josée X... ont acquis suivant acte du 28 mai 1998 de Jean D... trois parcelles cadastrées 345, 347 et 335 pour la dernière représenter 24 cour d'appel. La désignation est la suivante : un cabanon actuellement en ruines (335) attenant aux parcelles susvisées. Le vendeur l'avait acquis de C... le 6 avril 1995 suivant adjudication, sous la désignation : trois parcelles de terre et une partie de bâtiment d'une superficie de 24 m ² : 1er lot : section A no 335 pour une contenance de 0 a 24 cour d'appel en limite de laquelle est implanté un bâtiment en l'état de ruine mitoyen à celui édifié sur la parcelle 339 ne faisant pas l'objet de la présente adjudication. La désignation antérieure (adjudication B... / E... à C... le 19 mars 1971) mentionnait la parcelle 335 pour la même contenance et un cabanon en mauvais état. La vente du 31 mars 1996 aux époux B...
E... par Norbert F... désignait la parcelle 335 comme un bâtiment en ruines... comprenant une pièce au rez- de- chaussée... pour 24 centiares. Acquis de Jean- Paul G... suivant acte du 16 juillet 1957 il était indiqué : " originairement le plus grand corps duquel dépendait le bâtiment présentement vendu avait été acquis par Antoine G..., son père, le 1er septembre 1889 ". L'attestation d'hérédité de Jean- Paul G... du 2 avril 1952 indiquait " une parcelle de terre avec bâtiment en ruines de la contenance de 8 ares 24 centiares paraissant cadastré section A numéro 335- 326 ". Les vendeurs, selon le titre du 1er septembre 1889, étaient les dames Marie et Louise H... et les acquéreurs Antoine et Joseph Jean Louis G..., père du premier, pour deux parcelles non référencées en nature de prairie et de labour- hermes avec mention que " la présente comprend bien entendu un petit appartement à la grange audit quartier de la Combe de Paradis et à la Grange dite de Paradis ainsi que le petit relard (petit terrain devant une maison) attenant à ladite grange. L'appartement sera à Antoine G... et le petit relard audit G... père ".
Le titre de la SNC Jean- Marie Z... résulte de l'acquisition des époux I... (légataires de ces biens) par André Z... en 1942. Il décrit " une parcelle de terre.... un bâtiment en ruines dit " ferme de paradis " inhabité depuis de très nombreuses années et dont seulement une pièce au premier étage et au levant appartient aux vendeurs et se trouve comprise dans la présente vente et l'emplacement de quatre pièces écroulées avec relard le tout sis au couchant de la ferme de paradis et compris aussi dans la vente ", le tout cadastré 324, 325, 338, 339 et 340. Les auteurs des époux I... étaient les époux J... qui avaient acheté le 6 septembre 1920 à Antoine G... un grenier situé au second étage dépendant de la campagne de Paradis ainsi que la parcelle relard attenante, de son épouse Françoise G... le 12 octobre 1920
" un petit bâtiment composé d'une ruine et d'un grenier à foin " et de N... Agricol le 30 octobre 1921 un fonds de terre avec bassin et deux appartements dépendants de la grange qui s'y trouve bâtie indivise avec plusieurs, le tout cadastré 280 p, 285, 286 et 292. Le bien N... provenait indirectement du partage de la succession d'Adrien K... les 2 et 28 novembre 1900 pour " un fonds de terre dans lequel est édifié un bâtiment d'exploitation inhabitable ". Celui d'Antoine G... vient du lot qui lui a été attribué du partage des biens de Joseph Jean G... (4 octobre 1902) sous la désignation " petit appartement du second étage de la campagne de Paradis avec la petite parcelle relard renfermant un mûrier " mais sans mention d'origine de propriété qui a été retrouvée par l'expert dans la matrice cadastrale au nom de Joseph Jean G... qui mentionne les parcelles 284 et 288 qui, pour la première, correspond à la parcelle actuelle 337 et acheté à François L... en 1852 dont on constate sur la matrice cadastrale de 1813 à 1861 que L... François est porté propriétaire du grenier du second étage de la parcelle 284 (actuellement 337).
Pour le surplus des origines et à défaut d'autres actes, l'expert a précisément examinés les extraits des matrices cadastrales afin de rechercher les numéros de parcelles attribuées pour les impositions de leurs propriétaires retraçant ainsi les changements de mains intervenus depuis 1832. La SNC Jean- Marie Z... souligne à juste titre qu'elle a été contrainte d'émettre des hypothèses en l'absence de tous les titres nécessaires et lorsque les actes ou les éléments annexes étaient insuffisants dans les désignations, voire contradictoires. Cependant, pour sa part, elle n'en développe jamais de plus circonstanciées précisément étayées par les pièces dont tous les intervenants ont disposé.
En effet, elle rappelle la teneur de son titre qui mentionne " dont seulement une pièce au premier étage et au levant appartient aux vendeurs " pour conclure qu'il s'agit nécessairement de celle située côté Est de l'entière baisse au premier étage, contre la parcelle 281 et souligne à bon droit que l'appellation de grenier retrouvée dans l'acte de 1920 ne signifie pas nécessairement que la pièce ait été située au dernier étage dans une ferme avec plusieurs dépendances comme le terme " cabanon " mentionné sur les titres des époux X... qui ne peut être qu'une partie de la bâtisse cadastrée 335, 336 et 337. Il y aurait donc, selon elle, de la part de l'expert confusion avec la pièce située sur la parcelle 337.
L'origine N... conduit à situer les " deux pièces dépendant de la ferme " ou " deux petits appartements " sur les parcelle 285 et 286. La désignation " petit bâtiment comprenant remise et grenier à foin " ou " petit bâtiment composé d'une ruine et d'un grenier à foin " venant de Françoise G..., qui les avait reçus en partage en 1890 de Joseph Paul G..., sa mère Brigitte M... et de Jean Etienne G..., conduit à constater au vu des extraits des matrices cadastrales qu'elle ne peut correspondre qu'à la parcelle 287 p, le tout corroboré par les confronts mentionnés.
Antoine G..., auteur de Louis J..., a bien cédé " un grenier " mais dont tous les actes antérieurs le situent au deuxième étage et la matrice cadastrale sur la parcelle 284 (337). Cette désignation est incompatible avec une pièce au premier étage de la parcelle 335 (282). Il avait, certes, acquis le 1er septembre 1889 un immeuble des soeurs H... désigné comme " un petit appartement à la grange audit quartier de la Combe de Paradis et à la Grange dite Paradis ainsi que le petit relard attenant à ladite grange, l'appartement sera à Antoine et le petit relard audit G... père (Joseph Jean Louis) ". Toutefois, le fait qu'Antoine G... l'ait possédé ne signifie pas qu'il a été objet de la vente à J... qui, dans ce cas, n'a acquis que le seul grenier ou pièce du dernier étage de lui.
Contrairement à ce que prétend la SNC Z..., l'analyse de l'expert ne s'est pas faite en omettant l'extrait de la matrice cadastrale, folio 13, car Claudie Y... l'a bien considérée sous le numéro erroné de 12 démontrant que le numéro 282 ne pouvait être qu'une erreur d'inscription au lieu de la parcelle 284 par comparaison avec les autres entrées et sorties portés sur les folios consultés.
En outre, la non- attribution à l'appelante du premier étage de la parcelle 335 résulte encore de ce que cette pièce ainsi désignée ne peut être que celle située sur la parcelle 337 à l'examen des désignations de la parcelle 285 (partie de 338 bâtie) située en mitoyenneté avec la parcelle 337 (ex 284) qui compte tenu de la formulation des actes vise la pièce située au levant de la parcelle 285 (et non de la parcelle 282 du corps de ferme) et dont un accès par un escalier a été retrouvé sur cette parcelle.
Enfin, le raisonnement de l'expert n'a pas pour effet d'attribuer la propriété du second étage de la parcelle 335 par deux titres différends aux époux X..., les origines recherchées et décrites L... Grégoire et R... visant la parcelles 336.
Par conséquent, alors que la SNC Z... et Compagnie n'a jamais dans ses titres la mention de la parcelle 335, le titre des époux X... la comprend et les désignations des différends actes conjugués et éclairés par la majorité des extraits des matrices cadastrales conduisent à l'attribuer à ces derniers, le terme " une pièce " parfois employé ne suffisant pas à exclure l'intégralité de l'élévation sur la parcelle 335 en état de ruine partielle.
C'est donc, à bon droit, que les époux X... se sont vu reconnaître l'entière propriété de la parcelle 335 (ex 282) sans qu'il y ait lieu de recourir à une nouvelle mesure d'instruction ni à un transport sur les lieux, l'expert Y... ayant rassemblé l'ensemble des pièces propres à définir les droits des parties.
Sur la propriété des parcelles non bâties et la nature de chemin d'exploitation implanté sur les parcelles 338 et 339 et menant à la voie publique :
En vertu des titres directs des parties, les époux X... sont propriétaires d'une partie de la bâtisse située sur les parcelles 335, 336 et 337 et de deux parcelles non attenantes (345 et 347) n'intéressant pas le litige. La SNC Z... l'est des parcelles 338, partiellement bâtie sur les anciennes parcelles 285, 286 et 287 et concernée et des parcelles 324, 325, 339 et 340.
La disposition des fonds est telle que les époux X... n'ont pas d'accès à la voie publique sans passer sur les terres attribuées à l'appelante par son acte, à savoir les parcelles 338 et 339.
L'ancien cadastre de 1813 révèle que la parcelle 338 était composée des parcelles 289 et 288, laquelle correspondait à une partie, avec la première, de la cour devant les deux corps de la bâtisse formant angle et une bande de terrain longitudinale la continuant à l'Est jusqu'à un ravin qui se situe à l'emplacement de la voie publique actuelle.
Le tribunal a suivi la proposition de l'expert consistant à attribuer aux époux X... la parcelle 289 pour 78 m ² et 49 m ² indivis de la parcelle 288 p comprises dans la parcelle 338 et à considérer qu'avec le reste de la parcelle 288 désormais incluse dans la parcelle 339 elles constituent un chemin d'exploitation.
Claudie Y... conclut en effet dans son rapport que Michel et Marie- Josée X... sont les propriétaires " par défaut " de l'ancienne parcelle 289 pour 78 m ² ayant appartenu à Grégoire L... en 1832, figurant au folio 490 (1864- 1911) d'Antoine G..., par entrée en 1891 de deux parcelles 289 p de 39 centiares, l'une du folio 89 et l'autre du folio 95 (G... Jean- Louis) réunie au folio 107 de la matrice 1911- 1932 au numéro 289 de 78 centiares. Cette propriété leur revient par Jean- Paul G... qui a hérité des biens de ses parents et les a vendus à F..., Louis J... n'ayant acheté d'Antoine G... que la propriété reçue de son père Joseph Jean- Louis G... que l'on retrouve sur le folio 106 de la matrice de 1862- 1011, la SNC ne pouvant donc revendiquer l'ancienne parcelle 289.
Contrairement à ce qu'elle soutient, la SNC Z... n'a pas reçu expressément la parcelle 289 comprise dans l'actuelle parcelle 338 sous la désignation " un petit bâtiment composé d'une remise et d'un grenier à foin avec la contenance y attenante de 38 ares " du fait de la vente consentie par Antoine G... à Louis J... le 12 octobre 1920, qui ne comporte pas de référence cadastrale car ce bien était désigné comme un propre de Françoise G... sont épouse et non le sien (en l'état de l'acte incomplet produit).
Ainsi la proposition critiquée ne se fait pas contre les mentions du titre sus visé mais parce qu'aucune vente d'Antoine G... d'un autre immeuble que ceux recueillis dans la succession de son père, qui n'incluaient pas la parcelle 289, n'a été retrouvée en faveur d'Autran quant à cette parcelle. Or, celle- ci a bien été portée au compte de la matrice cadastrale d'Antoine G... depuis 1891, d'abord divisée en deux, puis réunie et celui d'Autran n'en fait pas mention avant la réfection du cadastre en 1933, bien que postérieure à la vente de 1920.
En revanche, les titres constitutifs des droits des époux X... sur la parcelle 335 mentionnent " originairement le plus grand corps duquel dépendait le bâtiment présentement vendu " (acquisition Antoine G... pour le compte de la société d'acquêts ayant existé avec son épouse Marie Françoise G...) et " une parcelle de terre avec bâtiment en ruine " (hérédité de leur fils Jean- Paul G... auteur de F...). Dès lors, le titre peut également concerner la parcelle 289.
Ainsi on ne retrouve cette parcelle 289 mentionnée ni dans les titres de la SNC Z... ni dans ceux des époux X.... Elle a été incluse par le cadastre dans la parcelle 338 de la première qui la contient depuis 1942 alors qu'Antoine G... en a été propriétaire mais sans la preuve certaine de sa transmission à l'une ou l'autre des parties.
Après avoir agi en désenclavement de leur parcelle d'abord devant le juge des référés aux fins d'instauration d'une mesure d'instruction puis devant le juge du fond, les époux X... se sont appuyés sur les conclusions de l'expert pour se prétendre propriétaires de la parcelle 289 contre la société Z..., qui s'en comportant comme possesseur et comme telle présumée propriétaire de cette parcelle, n'a pas à rapporter la preuve de son droit de propriété par titre ou par témoins, la charge de celle- ci incombant aux demandeurs à l'action qui ici ne réussissent pas à la rapporter.
Dans ces conditions Michel et Marie- Josée X... seront déboutés de leur demande tendant à se voir reconnaître la propriété sur cette parcelle 289 partie de 338 portée à leur acte.
L'expert a également émis l'avis que les époux X... étaient propriétaires de 49 m ² indivis de la cour au sud de la baisse autrefois cadastrée 288 p faisant également partie matériellement de la parcelle 338 acquise en 1942 par elle d'J... comme le démontre les différents cadastres.
La propriété est à rechercher pour les époux X... dans la vente de Pierre O... (page 9 et 10 du rapport) qui a cédé la parcelle 337 (ex 284) et plus exactement selon les titres antérieurs, le rez- de- chaussée du bâtiment que son épouse tenait du partage de son grand- père, Joseph Lucien G... et une partie de cour d'une contenance de 49 centiares.
Pour la SNC Z..., elle est à rechercher dans la vente des époux Françoise et Antoine G... et le partage des biens de Joseph Jean- Louis G... dont le fils Antoine a reçu le grenier ou petit appartement du deuxième étage (337) qui va avec une partie de cour pour 48 centiares. L'expert a vérifié que la matrice cadastrale de 1862 à 1911 a porté au compte de cet auteur la parcelle 284 et la parcelle 288 (cour indivise) puis au compte de son autre fils Joseph Lucien G... les parcelles 284 p et 288 p.
Il s'ensuit que les titres antérieurs corroborés par les extraits de la matrice cadastrale sont concordants pour que les époux X... soient propriétaires de 49 m ² indivis de la cour devant la bâtisse anciennement cadastrée 288 p, le reste de l'actuelle parcelle 338 appartenant à la SNC Z... dont la bande de terrain rejoignant la voie publique anciennement également cadastrée 288 et qui se trouve aujourd'hui incluse dans la parcelle 339 mentionnée dans le titre de l'appelante.
La SNC Jean- Marie Z... oppose aux époux X... la prescription de l'article 2265 du Code Civil pour ces parcelles entourant le bâtiment et revendiquées par les époux X....
Or, elle se contente d'affirmer que depuis qu'elle est propriétaire de la parcelle 338 elle en a toujours usé conformément à son activité agricole pour l'entrepôt des récoltes et le stationnement des véhicules à l'occasion des travaux des champs. Elle n'en rapporte cependant la preuve par aucune pièce produite.
Elle ne démontre ainsi aucun acte de possession publique, paisible, continue et non interrompue, non équivoque et à titre de propriétaire alors que l'utilisation qu'elle prétend avoir faite de cette parcelle est parfaitement compatible, tenant la vétusté des bâtiments, avec son simple usage comme chemin d'exploitation ou de cour indivise et alors que cette utilisation, simplement alléguée, n'a pu constituer une contradiction non équivoque à la propriété des époux X... ou de leurs auteurs propriétaires d'une petite parcelle permettant la desserte d'une ferme quasiment en état de ruine.
Par conséquent l'appelante se prévaut vainement de la prescription acquisitive afin de combattre le titre détenu par les époux X... sur la parcelle 288 p,
L'expert saisi de la difficulté née de l'état d'enclave des parcelles bâties et non bâties appartenant aux époux X... a émis l'avis que l'accès à la voie publique située à l'Est existait du fait de l'existence d'un chemin d'exploitation situé sur les parcelles 288, 289, 281 et 278 partie.
Cet accès est spécifié dans l'acte d'achat des époux X... mais ne se retrouve dans aucun autre titre antérieur et ancien des parties qui sont taisants sur l'existence d'un chemin tel que défini et desservant les fonds mitoyens et la ferme.
Le plan cadastral de 1813 montre une parcelle 288 à la fois cour et bande de terrain aboutissant à l'Est à un ravin qui correspond aujourd'hui à l'emplacement de la route et à l'Ouest devant le bâtiment formant aire le desservant au droit des parcelles 282 à 287 ou 335 à 338, parties bâties.
Comme le fait observer à juste titre l'expert, la disposition de cette parcelle 288 complétée par la parcelle 289 révélait clairement par sa forme et sa disposition son usage de chemin et d'aire de retournement devant la ferme.
Désormais, ces parcelles se retrouvent dans la parcelle 338 (cour devant la ferme pour 288 et 289) et ensuite matérialisée en pointillés sur la partie Nord de la parcelle 339 appartenant à l'appelante.
L'expert a vérifié que la partie de la cour devant la ferme correspondant à la partie de la parcelle 288 qui était portée sur la matrice cadastrale de 1832 en nature de cour pour 97 centiares a été ensuite mentionnée en nature de cour indivise puis divisée en 288 p comme examiné plus haut, apparaissant toujours en nature de cour indivise. Elle est donc clairement identifiée par rapport à la même parcelle qui est en nature de chemin dont la contenance résiduelle est compatible avec celle totale réduite de la cour indivise.
Il a également établi par l'examen des matrices cadastrales que les propriétaires de la bâtisse (parcelles 282 à 287) étaient initialement Louis H..., Michel P..., Grégoire L..., François L... et Etienne G..., que les propriétaires inscrits pour la parcelle 288 pour 97 centiares étaient L... François, Louis H... et Etienne G..., que celui de la parcelle 289 avait été Grégoire L... et celui de la parcelle inscrite sous le numéro 278, dont une langue s'insère entre les parcelles 281 et 288 et touche la parcelle 282, était Michel P....
Il est ainsi caractérisé que chaque propriétaire anciennement connu de la ferme avait apporté sa part de terrain aux accès et à l'aire de retournement, leur fonds supportant et bénéficiant de la cour pour exploiter leurs fonds respectifs.
Quant à la bande de l'ancienne parcelle 288 elle a été absorbée par la parcelle 339 appartenant à la société Z... et Compagnie après la refonte du cadastre.
Cependant les données rassemblées par Claudie Y... en pages 27 à 29 de son rapport mettent en évidence que cette partie de la parcelle qui était manifestement de par sa configuration à usage de chemin et desservait les différents fonds composant la ferme n'aurait pas dû être incluse dans la parcelle 339 comme tend à le prouver l'acte de vente d'une des parties de l'ancienne parcelle 290 devenue 339) par S... à J... en 1921 qui précisait " au Nord entre le chemin et l'acquéreur ", mention semblant exclure que le chemin appartienne à l'auteur de la SNC Z....
Enfin, la situation et la nature de ce chemin de desserte se trouve confirmée par l'emprise de celui- ci apparente sur le terrain matérialisée entre le mur de pierres sèches et deux pierres plantées.
Ainsi, ces éléments caractérisent que l'ancienne parcelle 288 dans son intégralité ainsi que la parcelle 289 participaient d'un système destiné à desservir, en provenance de la route, les fonds de chacun des propriétaires de la ferme et des terres mitoyennes, chacun consentant sur ces terres un passage au droit de soi.
L'article L 162- 1 du Code Rural prévoit que les chemins et sentiers d'exploitation sont ceux qui servent exclusivement à la communication entre divers fonds ou à leur exploitation. Ils sont, en l'absence de titre, présumés appartenir aux propriétaires riverains, chacun en droit de soi, mais l'usage en est commun à tous les intéressés.
Dès lors, il résulte des motifs qui précèdent que l'existence d'un chemin d'exploitation est démontrée tant sur la cour de la ferme que sur la bande de terre rejoignant la route à l'Est dont les époux X..., à la fois riverains de celui- ci mais également propriétaires d'un fonds dont la desserte ne peut pas être assurée par un autre moyen, sont fondés à réclamer à la SNC Z... et Compagnie le droit d'en user sans avoir à lui verser une indemnité proportionnée au dommage que ce passage peut lui occasionner et qui ne serait due qu'en l'absence de chemin d'exploitation et aux fins de désenclavement de leurs fonds en application des dispositions de l'article 682 du Code Civil ou, enfin, si
les époux X... entendaient réclamer l'usage d'une assiette plus large que celle résultant de la largeur apparente de l'accès de 2, 70 mètres à l'Est et de 3, 20 mètres à l'Ouest, conformément au plan établi par l'expert.
Le jugement sera donc confirmé également en cette disposition sans qu'il y ait lieu d'ordonner une nouvelle expertise sur l'établissement des droits des parties ou la fixation d'une indemnité de désenclavement.
Sur les demandes résultant des droits établis des parties :
Tenant les droits détenus par les époux X... sur le chemin d'exploitation et sur 49 m ² indivis de la cour autrefois cadastrée 288 p, la demande de la société Jean- Marie Z... et Compagnie tendant à voir réduire leur droit de passage au seul chemin d'accès et à leur faire interdiction générale d'user normalement et conformément à leur titre de la cour et de l'aire de retournement ne saurait prospérer. Elle en sera déboutée.
En revanche, il sera fait interdiction aux intimés d'encombrer par des gravats, matériaux ou déchets et de stationner sur l'assiette consacrée au chemin et à la cour mais uniquement en ce que cet usage ferait obstacle au plein exercice par l'appelante de ces mêmes droits.
En l'état, le prononcé d'une astreinte pour veiller au respect de la décision ne s'impose pas.
Au vu des constatations de l'expert, le tribunal a tiré régulièrement les conséquences de droit des empiétements relevés à l'encontre des époux X... en ce qu'il les a condamnés à retirer les escaliers aménagés entre les parcelles no 324 et 339 et à enlever les gravats et matériaux déposés sur la parcelle 325 appartenant exclusivement à l'appelante.
Il sera toutefois infirmé en ce qu'il a rejeté la demande de prononcé d'une astreinte pour veiller au respect de la décision laquelle sera assurée par la fixation d'une astreinte journalière de 50 Euros par jour de non- faire à exécuter ces deux dispositions du jugement confirmées.
Le tribunal a également ordonné la démolition des ouvrages réalisés par les intimés sur les parties communes de l'immeuble qui est de plein droit soumis au statut de la copropriété du fait de son appartenance à des propriétaires différents. L'appelante réclame encore qu'une même injonction avec remise en état de la situation antérieure soit prononcée quant aux travaux qui auraient été régulièrement réalisés sur ses propres parties privatives.
Le respect des règles édictées en matière de copropriété et de celles résultant des dispositions des articles 544 et 545 du Code Civil fait, par principe, interdiction aux intimés d'intervenir sur les parties communes de l'immeuble au lieu et place du syndicat des copropriétaires et de porter atteinte aux parties privatives de la société Z....
Cependant, au jour où la Cour statue, une expertise, encore en cours, a été ordonnée précisément pour définir la nature et l'emplacement des travaux litigieux et donner les éléments propres à déterminer ceux à entreprendre pour une remise en état des lieux, si besoin est en procédant à des démolitions et qui incomberont aux époux X.... Il s'ensuit qu'il ne peut être fait droit, dès à présent, à la demande de démolition générale présentée qui se trouve subordonnée, après dépôt du rapport d'expertise et en l'absence d'accord des parties, à une nouvelle demande formulée au regard des éléments qui auront été rassemblés.
La SNC Z... et Compagnie sera déboutée de sa demande ainsi présentée et le jugement infirmé sur ce point.
L'initiative de requérir l'établissement d'un état descriptif de division et d'un règlement de copropriété appartient à chacune des parties pour satisfaire aux prescriptions du statut de la copropriété.
Il n'y a donc pas lieu d'ordonner la " constitution d'une copropriété " qui existe de plein droit ou la réalisation d'un règlement de copropriété, comme le sollicitent les époux X... mais de leur donner acte de ce que les parties s'accordent sur ce point, sauf à ce que ces documents soient conformes, non pas au descriptif proposé par Maître Q..., comme le réclame l'appelante, mais à celui résultant de l'arrêt rendu.
Comme l'a fait observer le tribunal, la détermination des droits des parties sur l'immeuble ne résultait pas d'évidence de leurs titres et a imposé l'instauration d'une expertise judiciaire complexe. Les époux X... ne sont donc pas fondés à prétendre que la résistance de l'appelante a été abusive.
Les préjudices matériels et moraux invoqués par la SNC Z... ne sont pareillement pas établis du fait des agissements et des travaux des intimés qui ont été entrepris, certes, en l'absence de concertation mais sans que l'appelante puisse démontrer une atteinte à la pérennité de l'immeuble ou à la jouissance qu'elle faisait des lieux manifestement laissés à l'état d'abandon.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté les parties de leur demande tendant à l'octroi de dommages et intérêts.
Il résulte des motifs qui précèdent que les demandes formulées par les parties à titre subsidiaire sont sans objet.
La décision sera également confirmée en ce qu'elle a fait masse des dépens et débouté les parties de leur demande présentée en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
En cause d'appel, la SNC Z... succombe principalement. Elle sera donc condamnée à supporter les dépens de cette instance mais sans qu'il y ait lieu encore de faire application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
par ces motifs
La Cour,
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a :
- dit que les époux X... étaient propriétaires des entières parcelles sises sur la commune du BEAUCET cadastrées section A no 335, 336 et du rez- de- chaussée de la parcelle no 337 ainsi que de 49 m ² indivis de la cour autrefois cadastrée 288 p comprise dans l'actuelle parcelle 338, étant précisé que la surface provenant de la parcelles 288 p fait partie du chemin d'exploitation et est à usage commun avec la SNC Jean- Marie Z... et Compagnie ;
- constaté l'état d'enclave des parcelles acquises par les époux X... au BEAUCET, lieudit " Ferme de Paradis " ;
- dit que les époux X... bénéficient d'un accès de la route à leur propriété à partir du chemin d'exploitation englobant les anciennes parcelles 288 p, 289, 278 p et 281 tel qu'il existe actuellement d'une largeur de 2, 70 mètres côté route départementale et 3, 20 mètres à l'Ouest entre la pierre couchée et le mur de pierres sèches,
- ordonné la remise en état des lieux sur lesquels les époux X... ont empiété et effectué des travaux irréguliers, à savoir qu'ils devront dans un délai de 6 mois à compter de la signification du jugement :
¤ retirer les escaliers situés entre les parcelles no 324 et 339,
¤ enlever les gravats et matériaux,
- débouté les époux X... de leur demande tendant à voir enjoindre aux parties de constituer une copropriété et un règlement de copropriété,
- débouté les parties de leur demande de dommages et intérêts,
- débouté la SNC Z... et Compagnie de sa demande générale d'interdiction, sous astreinte, de tout passage ailleurs que sur le chemin d'accès, encombrement et stationnement sur son fonds,
L'infirme pour le surplus,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Juge que la SNC Jean- Marie Z... et Compagnie est propriétaire de la parcelle anciennement cadastrée commune du BEAUCET section A no 289 actuellement incluse dans la parcelle no 338 pour une contenance de 78 m ², étant précisé que la parcelle 289 fait partie de l'assiette du chemin d'exploitation et est à usage commun ;
Dit que l'assiette du chemin d'exploitation comprend l'entière parcelle anciennement cadastrée 288 ;
Ordonne la publication du présent arrêt en application des dispositions de l'article 28 du décret no 55- 22 du 04 / 01 / 1955 ;
Juge que les époux X... sont tenus à la remise en état des lieux affectés par les travaux qu'ils ont réalisés ainsi qu'à la démolition des ouvrages affectant les parties communes de l'immeuble et les parties privatives appartenant à la SNC Z... et Compagnie ;
Dit que cette remise en état et démolitions nécessaires ne pourront cependant intervenir qu'après dépôt du rapport de l'expertise ordonnée le 27 mars 2007 et, en l'absence d'accord des parties, après nouvelle demande formulée au regard des éléments qui y auront été rassemblés.
Fait interdiction aux époux X... d'encombrer par des gravats, matériaux ou déchets et de stationner sur l'assiette consacrée au chemin et à la cour, mais uniquement en ce que cet usage ferait obstacle au plein exercice par l'appelante de ces mêmes droits.
Dit n'y avoir lieu à prononcé d'une astreinte de ce chef ;
Condamne les époux X..., à défaut de suppression des escaliers aménagés entre les parcelles 324 et 339 et des gravats et matériaux encombrant les parcelles appartenant à la SNC Z... et Compagnie dans un délai d'un mois à compter de la signification du présent arrêt, au paiement d'une astreinte provisoire de 50 Euros par jour de non- faire passé ledit délai et courant pendant un délai de trois mois passé lequel il sera à nouveau statué ;
Donne acte aux parties de ce qu'elles s'accordent sur la confection d'un règlement de copropriété mais qui devra être conforme au descriptif de la division de l'immeuble résultant du présent arrêt ;
Déboute les parties de toutes autres demandes ;
Condamne la SNC Jean- Marie Z... aux dépens de l'instance d'appel sous le bénéfice des dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile en faveur de la SCP GUIZARD SERVAIS.
Arrêt signé par M. BOUYSSIC, Président et par Mme VILLALBA, Greffier.