ARRÊT No 58
R. G. : 06 / 01982
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NÎMES
07 novembre 2002
SCI LA PERRIERE
C /
X...
SA CRÉDIT LYONNAIS
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
1ère Chambre A
ARRÊT DU 05 FEVRIER 2008
APPELANTE :
SCI LA PERRIERE
représenté par M. C. Y..., agissant ès qualités de mandataire ad'hoc
913 Chemin de la Margeride
30000 NÎMES
représentée par la SCP GUIZARD-SERVAIS, avoués à la Cour
assistée de Me Alain ROLLET, avocat au barreau de NÎMES
INTIMÉS :
Maître Frédéric X...
Mandataire judiciaire, pris en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la SCI LA PERRIERE
...
30000 NÎMES
représenté par la SCP CURAT-JARRICOT, avoués à la Cour
assisté de la SCP MONCEAUX FAVRE DE THIERRENS BARNOUIN THEVENOT, avocats au barreau de NÎMES
SA CRÉDIT LYONNAIS
poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice, domiciliés ès qualités au siège social
18 Rue de la République
69002 LYON 02
représentée par la SCP P. PERICCHI, avoués à la Cour
assistée de la SCP BROQUERE DANTHEZ DE CLERCQ COMTE, avocats au barreau de NÎMES
Statuant sur appel d'une ordonnance du juge commissaire.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
M. Pierre BOUYSSIC, Président,
Mme Christine JEAN, Conseiller,
M. Serge BERTHET, Conseiller,
GREFFIER :
Mme Véronique VILLALBA, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision,
MINISTERE PUBLIC :
Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée.
DÉBATS :
à l'audience publique du 27 Novembre 2007, où l'affaire a été mise en délibéré au 05 Février 2008,
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au Greffe de la Cour d'appel,
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé et signé par M. Pierre BOUYSSIC, Président, publiquement, le 05 Février 2008, date indiquée à l'issue des débats, par mise à disposition au Greffe de la Cour.
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EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE ET DES PRÉTENTIONS DES PARTIES
Par jugement du Tribunal de Grande Instance de NÎMES en date du 10 juillet 1995, une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à l'égard de la SCI LA PERRIERE et Maître B... désigné en qualité de représentant des créanciers. Cette procédure a été convertie en liquidation judiciaire suivant jugement du 27 juin 1996. Maître X... a été nommé liquidateur en remplacement de Maître B... le 21 mars 2000.
Les créances déclarées ont été admises par le juge commissaire le 7 novembre 2002, sur proposition du représentant des créanciers, selon décisions portées créance par créance sur la liste transmise le 30 octobre 2002 par le représentant des créanciers. Parmi ces créances, a été admise celle du CRÉDIT LYONNAIS à hauteur de 27. 083,36 € au titre du solde débiteur du compte courant et de 1. 564. 621,08 € à titre privilégié en vertu du prêt de 3. 800. 000 F consenti par cette banque à la SCI LA PERRIERE le 11 février 1992.
Monsieur Y..., ès qualités de mandataire ad'hoc de la SCI LA PERRIERE a relevé appel de la décision d'admission de la créance du CRÉDIT LYONNAIS en date du 7 novembre 2002 qu'il entend voir déclarer nulle et de nul effet.
Aux termes d'écritures signifiées le 23 novembre 2007, il demande à la Cour de rejeter la créance privilégiée déclarée par le CRÉDIT LYONNAIS à hauteur de 10. 261. 225,31 F et de dire éteinte la créance résultant du jugement du Tribunal de Grande Instance de NÎMES en date du 11 mars 1994 à hauteur de 3. 175. 242,69 F outre intérêts. Il entend voir ordonner l'admission de la seule créance chirographaire déclarée par le CRÉDIT LYONNAIS à hauteur de 27. 083,36 € et sollicite l'allocation d'une somme de 3. 000 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
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Suivant écritures signifiées le 26 novembre 2007, le CRÉDIT LYONNAIS conclut en ces termes :
" Vu les articles L 621-103 c. com. et article 72 du décret 17 / 12 / 1985 ;
Déclarer l'appel irrecevable ;
Vu l'article 73 du décret du 27 décembre 1985 et l'article 25 du décret du 27 décembre 1985 ;
Déclarer l'appel irrecevable formalisé hors délai ;
Infiniment subsidiairement ;
Confirmer la décision du juge commissaire au 7 novembre 2002 ;
Débouter l'appelant de ses demandes, fins et conclusions ;
Encore plus subsidiairement ;
Fixer le montant de la créance chirographaire du solde débiteur du compte courant 177. 655,17 F soit 27. 083,36 €, somme assortie des intérêts légaux sur la dite somme à compter du jugement du 11 mars 1994 ;
Fixer le montant des créances du CRÉDIT LYONNAIS à l'encontre de la liquidation de la SCI LA PERRIERE :
-créance hypothécaire résultant du prêt du 11 février 1992 : 484. 062,62 € (soit 3. 175. 242,62 F),
-intérêts au taux conventionnel, postérieurs au 11 mars 1994 ;
Condamner Monsieur Christian Y... ès qualités de mandataire ad'hoc de la SCI LA PERRIERE aux dépens ".
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Par écritures récapitulatives signifiées le 20 novembre 2007, Maître X... ès qualités de liquidateur demande à la Cour de statuer ce que de droit sur la recevabilité de l'appel. Sur le fond, il conclut au débouté de la demande de l'appelante en annulation de l'ordonnance d'admission du 7 novembre 2002. Il conclut à la fixation de la créance du CRÉDIT LYONNAIS à 484. 062,62 € à titre hypothécaire correspondant au montant judiciairement admis par décision du 11 mars 1994 et à 25. 564,47 € à raison du solde débiteur du compte courant de la société.
Il entend voir condamner l'appelante aux entiers dépens.
MOTIFS :
Sur la recevabilité de l'appel
Attendu que le CRÉDIT LYONNAIS fait valoir en premier lieu que le débiteur se voit interdit d'utiliser l'appel lorsqu'il n'a formulé aucune contestation entre les mains du représentant des créanciers ce qui est le cas de Monsieur Y... qui a été invité à présenter ses observations, qu'en second lieu, il soutient que la notification au débiteur de la décision d'admission n'est pas prévue par la loi, que le délai d'appel court à compter de la date du dépôt au Greffe de la décision soit le jour du prononcé et tout au plus à compter de la publication au BODAC soit le 19 décembre 2002, de sorte que l'appel relevé le 23 mai 2006 est tardif ;
Attendu que la SCI LA PERRIERE soutient qu'elle n'a pas été convoquée ni entendue dans la cadre de la procédure de vérification, qu'elle n'a pu émettre quelque contestation que ce soit et qu'en l'absence de notification le délai d'appel n'a pu courir ;
Attendu que l'appel a été formé le 22 mai 2006 soit quatre ans après la décision querellée par Monsieur Y... ès qualités de mandataire ad'hoc de la Société LA PERRIERE " désigné à cette fonction par ordonnance présidentielle du Tribunal de Grande Instance de NÎMES en date du 14 septembre 2000 " ;
Attendu qu'en application de l'article L 621-103 du Code de Commerce dans sa rédaction applicable en la cause " dans le délai fixé par le Tribunal, le représentant des créanciers établit, après avoir sollicité les observations du débiteur, la liste des créances déclarées avec ses propositions d'admission, de rejet ou de renvoi devant la juridiction compétente. Il transmet cette liste au juge commissaire " ; qu'aux termes de l'article 73 du décret du 27 décembre 1985 modifié par le décret du 21 octobre 1994, les décisions d'admission sans contestation sont notifiées par lettre simple " aux créanciers ou à leur mandataire " ; que les décisions d'admission ne sont donc pas notifiées au débiteur ;
Attendu que l'article 72 du décret du 27 décembre 1985 applicable en la cause dispose que la vérification des créances est faite par le représentant des créanciers en présence du débiteur ou lui appelé... ;
Attendu que contrairement aux affirmations de l'appelante, si la vérification des créances doit intervenir au contradictoire de la société débitrice, ni l'audition ni la convocation du débiteur par le juge commissaire n'est obligatoire lorsqu'il propose l'admission d'une créance non contestée ;
Attendu qu'en l'espèce, Maître X... a adressé par lettre recommandée avec accusé de réception reçue le 20 septembre 2002, à Monsieur Y... la liste des créances concernant la SCI LA PERRIERE qu'il envisageait de proposer au juge commissaire ; que le courrier accompagnant cet envoi était rédigé en ces termes :
" NÎMES, le 19 septembre 2002
RÉFÉRENCE A RAPPELER
IMPÉRATIVEMENT
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51373 LA PERRIERE
FT / SP
PASSIF
Monsieur,
Je me permets de vous adresser ci-joint l'état des créances que j'envisage de proposer à l'arrêté du juge commissaire.
Je vous saurais gré de bien vouloir en prendre connaissance et en cas d'accord, me le retourner avec la mention " BON POUR ACCORD " et votre signature sur la page de garde et sur la dernière page.
En cas de désaccord, il conviendra de m'adresser vos motifs écrits ainsi que les pièces justificatives me permettant de présenter votre contestation au créancier.
Dans l'attente de vous lire,
En tout état de cause, sans réponse de votre part dans les huit jours de la présente, je déposerai cet état à la signature de Monsieur le juge commissaire sans autre formalité.
Je vous prie d'agréer l'expression de mes salutations distinguées.
Pour Maître Frédéric X...
S. C... "
Attendu que Monsieur Y... a été désigné administrateur ad'hoc de la SCI LA PERRIERE par ordonnance de M. le Président du Tribunal de Grande Instance de NÎMES en date du 14 septembre 2000 " avec pour mission de la représenter dans le cadre des procédures découlant de la liquidation judiciaire ouverte par le Tribunal de Grande Instance de NÎMES suivant jugement du 27 juin 1996 " ; que la mission de représentation ainsi définie incluait la vérification du passif dans la cadre de la liquidation judiciaire ; que M. Y... est donc mal fondé à invoquer l'absence sur les courriers de Maître X... de mention expresse de sa qualité d'administrateur ad'hoc pour affirmer que la société n'a pas été en mesure de faire valoir ses observations ; que M. Y... a relevé appel au visa de cette désignation comme mandataire ad'hoc ; que Maître X... a expressément demandé à Monsieur Y... qui était alors habilité à représenter la SCI LA PERRIERE de présenter, en cas de désaccord sur les créances, sa contestation, les motifs et les pièces justificatives ; que la liste jointe à ce courrier précisait le montant de chaque créance, sa nature et son origine ;
que toute demande d'explication ou observation pouvait être adressée au représentant des créanciers ; que concernant le CRÉDIT LYONNAIS, il était porté mention d'une créance chirographaire de 27. 083,36 € au titre du compte courant et d'une créance hypothécaire de 1. 564. 621,08 € au titre du prêt de 3. 800. 000 F ; que Monsieur Y... était donc parfaitement informé des créances proposées à l'admission, des modalités de contestation et habilité à les former pour la SCI LA PERRIERE ; qu'il s'est abstenu de toute contestation et de toute demande de rejet, se limitant à interroger Maître X... sur la qualité en laquelle les courriers lui étaient adressés alors qu'il avait obtenu sa désignation comme mandataire ad'hoc de la SCI LA PERRIERE depuis deux ans et que la liste des créances portait mention de la liquidation judiciaire de la SCI LA PERRIERE dans le cadre de laquelle elle était établie ; que Monsieur Y... essaie de surprendre la religion de la Cour en se prévalant de l'arrêt de la Cour de Cassation du 7 décembre 2004 ayant retenu qu'agissant à titre personnel comme ancien gérant ou comme associé majoritaire de la SCI, il n'avait aucune qualité pour exercer un recours ; qu'en effet cet arrêt a été prononcé à la suite d'un pourvoi contre une décision rendue sur un appel exercé en 1999 contre un jugement rejetant l'opposition formée à l'encontre d'une ordonnance du 9 novembre 1998, c'est à dire à une date antérieure à la désignation de Monsieur Y... comme mandataire ad'hoc de la SCI ; qu'au contraire, à la date où Maître X... a sollicité ses observations dans le cadre de la vérification du passif de la SCI, Monsieur Y... était judiciairement désigné pour représenter la SCI ;
Attendu que le juge commissaire n'a statué sur aucune contestation, n'en étant pas saisi ; que le débiteur a été effectivement associé à la vérification des créances et mis en mesure de présenter ses contestations au représentant des créanciers relatives notamment à la créance du CRÉDIT LYONNAIS ; que n'ayant soumis aucune contestation à Maître X... concernant cette créance ni aucune demande de rejet, le juge commissaire n'a pu statuer sur elles ; qu'en conséquence le débiteur représenté par son mandataire ad'hoc qui avait été invité à présenter ses observations contre les créances proposées à l'admission conformément aux textes susvisés, n'est pas recevable à former un appel, fût-ce un appel nullité, contre la décision du juge commissaire ayant prononcé l'admission de la créance non contestée au vu de la proposition du représentant des créanciers ; que le recours visé à l'article L 621-105 du Code de Commerce est réservé aux décisions rendues sur contestation ;
Attendu que l'incidence d'une décision de justice ayant précédemment fixé la créance du CRÉDIT LYONNAIS qui serait le cas échéant susceptible de fonder un recours en révision contre la décision du juge commissaire est sans portée sur la recevabilité de l'appel ;
Attendu que l'appel de la SCI LA PERRIERE sera donc déclaré irrecevable ;
Attendu que les dépens seront supportés par l'appelante qui succombe ;
Attendu qu'il sera donné acte au CRÉDIT LYONNAIS de ce qu'il demande la fixation de sa créance conformément au jugement définitif du 11 septembre 1994, ce que propose également l'administreur judiciaire sauf les intérêts dont il ne fait pas mention ;
PAR CES MOTIFS,
LA COUR, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,
Vu les articles L 621-102 et suivants du Code de Commerce et les articles 70 et suivants du décret du 27 décembre 1985 applicables en la cause ;
Dit l'appel formé par la SCI LA PERRIERE représentée par Monsieur Y... ès qualités de mandataire ad'hoc irrecevable ;
Donne acte au CRÉDIT LYONNAIS de ce qu'il demande la fixation de sa créance au montant résultant du jugement du 11 septembre 1994 soit 484. 062,62 € outre intérêts conventionnels ;
Condamne l'appelante aux dépens qui seront distraits au profit de Maître PERICCHI et de la SCP CURAT-JARRICOT, avoués, sur leurs affirmations de droit.
Arrêt signé par M. BOUYSSIC, Président et par Mme VILLALBA, Greffier.