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04/12/2007 | FRANCE | N°05/00693

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 04 décembre 2007, 05/00693


ARRÊT No 638

R. G : 05 / 00693



TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NÎMES
09 février 2005

S. A. R. L. BALICCO NÎMES

C /

SARL DEBORAH

X...


X...


COUR D'APPEL DE NIMES

CHAMBRE CIVILE
1ère Chambre B

ARRÊT DU 04 DECEMBRE 2007

APPELANTE :

S. A. R. L. BALICCO NÎMES
poursuites et diligences de son Gérant en exercice, domicilié en cette qualité au siège social
1025 Chemin de la Levade
06550 LA ROQUETTE SUR SAGNE

représentée par la SCP GUIZARD-SERVAIS, avoué

s à la Cour
assistée de Me Yves ROUSSARIE, avocat au barreau de GRASSE

INTIMES :

SARL DEBORAH
poursuites et diligences de son Gérant en exercice, domicilié en c...

ARRÊT No 638

R. G : 05 / 00693

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NÎMES
09 février 2005

S. A. R. L. BALICCO NÎMES

C /

SARL DEBORAH

X...

X...

COUR D'APPEL DE NIMES

CHAMBRE CIVILE
1ère Chambre B

ARRÊT DU 04 DECEMBRE 2007

APPELANTE :

S. A. R. L. BALICCO NÎMES
poursuites et diligences de son Gérant en exercice, domicilié en cette qualité au siège social
1025 Chemin de la Levade
06550 LA ROQUETTE SUR SAGNE

représentée par la SCP GUIZARD-SERVAIS, avoués à la Cour
assistée de Me Yves ROUSSARIE, avocat au barreau de GRASSE

INTIMES :

SARL DEBORAH
poursuites et diligences de son Gérant en exercice, domicilié en cette qualité au siège social
Marché Gare Ilot 4
3214 route de Montpellier
30900 NIMES

représentée par la SCP FONTAINE-MACALUSO JULLIEN, avoués à la Cour
assistée de Me Eric MARTY-ETCHEVERRY, avocat au barreau de TOULOUSE

Monsieur Christophe X...

...

30900 NIMES

représenté par la SCP FONTAINE-MACALUSO JULLIEN, avoués à la Cour
assisté de Me Eric MARTY-ETCHEVERRY, avocat au barreau de TOULOUSE

Madame Nathalie X... épouse Y...

...

30540 MILHAUD

représentée par la SCP FONTAINE-MACALUSO JULLIEN, avoués à la Cour
assistée de Me Eric MARTY-ETCHEVERRY, avocat au barreau de TOULOUSE

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 28 Septembre 2007

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

M. Jean-Gabriel FILHOUSE, Président, a entendu les plaidoiries, en application de l'article 786 du Nouveau Code de Procédure Civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

M. Jean-Gabriel FILHOUSE, Président
Mme Christiane BEROUJON, Conseillère
Mme Isabelle THERY, Conseillère

GREFFIER :

Mme Sylvie BERTHIOT, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision.

DÉBATS :

à l'audience publique du 22 Octobre 2007, où l'affaire a été mise en délibéré au 04 Décembre 2007.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé et signé par M. Jean-Gabriel FILHOUSE, Président, publiquement, le 04 Décembre 2007, date indiquée à l'issue des débats, par mise à disposition au greffe de la Cour.

****

EXPOSÉ

Vu l'appel interjeté le 14 février 2005 par la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » à l'encontre du jugement prononcé le 9 février 2005 par le Tribunal de Grande Instance de Nîmes.

Vu les dernières conclusions déposées au greffe de la mise en état le 7 juillet 2006 par l'appelante, et le bordereau de pièces qui y est annexé.

Vu les dernières conclusions déposées au greffe de la mise en état le 23 octobre 2006 par la s. a. r. l. « DEBORAH », Christophe X... et Nathalie X... épouse Y..., intimés, et le bordereau de pièces qui y est annexé.

Vu l'ordonnance de clôture de la procédure en date du 28 septembre 2007.

* * *

Suivant différents actes sous seing privé, la société d'économie mixte Société Nîmoise d'Aménagements Communaux, également désignée sous son acronyme SNAC, a concédé à la s. a. r. l. NÎMAFRUIT divers emplacements dépendant du domaine public de la commune et comprenant les « cases » 1 à 8, ainsi qu'une extension de magasin de vente et d'entrepôt, au sein du Marché d'Intérêt National de Nîmes Saint-Césaire.

Agissant en vertu d'un plan de cession arrêté par jugement du Tribunal de Commerce de Nîmes en date du 29 avril 1998, l'administrateur judiciaire désigné dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire de la s. a. r. l. NÎMAFRUIT, a cédé à la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » le fonds de commerce de vente en gros de fruits et légumes exploité sur les emplacements concédés.

Le marché-gare de Nîmes Saint-Césaire ayant, en vertu d'un décret du 30 décembre 1992, perdu sa qualité de Marché d'Intérêt National, le conseil municipal de Nîmes a, par délibération du 2 février 1993, décidé le déclassement du site pour y réaliser un lotissement communal.

Suivant acte passé le 25 avril 2001 devant maître Georges A..., notaire à Nîmes, la ville de Nîmes a vendu à la s. c. i. « DEBORAH » les lots 56,57,58,91 et 110 de ce lotissement communal, l'acquéreur déclarant faire son affaire personnelle des contrats de location ou de mise à disposition existant au profit des personnes figurant sur la liste annexée à l'acte de vente, dont la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » pour les emplacements et l'extension concédés qui dépendaient du lot 91 (ledit acquéreur renonçant dès lors au bénéfice de la condition suspensive prévue dans l'avant-contrat du 15 décembre 2000 qui stipulait la libération des biens « de toute location et occupation au jour de la vente définitive »).

Par acte d'huissier du 3 octobre 2002, la s. c. i. « DEBORAH » notifiait à la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » un rapport d'expertise en vertu duquel elle prenait acte de « la résiliation de plein droit des baux dans les termes de l'article 1722 du code civil ».

Selon arrêté du 6 juin 2003, le préfet du Gard décidait la fermeture du site au public.

Suivant délibération en assemblée générale extraordinaire du 5 août 2003 la s. c. i. « DEBORAH » décidait sa transformation en société à responsabilité limitée.

À la suite du dépôt de bilan de la s. a. r. l. « DEBORAH », le Tribunal de Commerce de Nîmes, par jugement du 19 décembre 2003, déclarait surseoir à statuer jusqu'à l'issue de la procédure l'opposant à la s. a. r. l. « POUJOL-ROMAN ».

Au vu du rapport d'expertise établi le 26 mai 2004 par Henry B... en exécution d'une ordonnance de référé du 1er août 2003, la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » a fait assigner la s. a. r. l. « DEBORAH », Christophe X... et Nathalie X... épouse Y... en résiliation de bail et en inopposabilité de la délibération de la s. c. i. « DEBORAH » en date du 5 août 2003, devant le Tribunal de Grande Instance de Nîmes qui, par jugement du 9 février 2005, a :
-prononcé la résiliation des baux consentis par la s. a. r. l. « DEBORAH » à la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » sur les locaux commerciaux, en raison de la perte de l'immeuble imputable au bailleur, avec effet au 6 juin 2003 ;
-condamné la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » à payer à la s. a. r. l. « DEBORAH » :
les loyers impayés à la date du 6 juin 2003,
une indemnité d'occupation égale à 90 % du loyer à compter du 6 juin 2003 jusqu'à la libération effective des lieux ;
-déclaré inopposable à la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » la délibération de la s. c. i. « DEBORAH » en date du 5 août 2003 décidant de sa transformation en société à responsabilité limitée ;
-condamné la s. a. r. l. « DEBORAH » à payer à la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » 20. 000 euros de dommages et intérêts en réparation des atteintes portées à ses conditions d'exploitation au jour du jugement ;
-donné acte à la s. a. r. l. « DEBORAH » de son offre de relogement aux conditions des baux antérieurs dans un bâtiment implanté au lot no 5 du marché-gare, appartenant à la s. c. i. ANAÏS dont elle se porte fort ;
-ordonné un complément d'expertise confié à Henry B..., avant dire droit sur la fixation du préjudice de la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » en relation avec son départ des lieux.

La s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » a relevé appel de ce jugement pour voir, après évocation des points non jugés au vu du rapport complémentaire d'expertise établi le 12 avril 2006 :
-lui donner acte de la libération des lieux à la date du 31 mars 2005 ;
-dire n'y avoir lieu à paiement d'arriérés de loyers, ni d'indemnité d'occupation en raison de la décision unilatérale de la s. a. r. l. « DEBORAH » de ne plus percevoir de loyers à compter du 3 octobre 2002 ;

-déclarer l'offre de relogement, faite le 14 décembre 2004 par la s. a. r. l. « DEBORAH », inadaptée et non conforme aux règlements en vigueur et aux normes des établissements destinés à recevoir du public ;
-condamner solidairement la s. a. r. l. « DEBORAH », Christophe X... et Nathalie X... épouse Y... à la relever et garantir de toutes condamnations pouvant être mises à sa charge dans le cadre de la procédure prud'homale en cours et à lui payer :
1. 500. 000 euros de dommages et intérêts pour la perte de son fonds de commerce,
38. 754,39 euros en remboursement des indemnités de licenciement versées à ses salariés,
1. 500. 000 euros de dommages et intérêts pour perte de chance, abus de position dominante, non-respect des engagements pris, et agissements abusifs et dilatoires du bailleur,
la somme de 15. 290 euros représentant les frais d'expertise exposés,
60. 000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
-confirmer le jugement déféré pour le surplus de ses dispositions.

Les consorts X... forment appel incident pour voir, après évocation des points non jugés, débouter la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » de l'ensemble de ses demandes et condamner celle-ci à lui payer l'ensemble des loyers impayés à ce jour, outre une somme de 10. 000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé il convient de se référer au jugement déféré et aux conclusions visées supra.

DISCUSSION

Sur les rapports contractuels :

Attendu que les locaux litigieux dépendaient du domaine privé de la commune depuis sa décision de déclassement votée le 2 février 1993 par le Conseil Municipal de Nîmes et non depuis la délibération du 18 décembre 2000 (publiée le 22 décembre 2000), comme l'indique à tort la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » ;

Attendu que lors de la vente réitérée du 25 avril 2001 il était stipulé :
« L'acquéreur déclare avoir une parfaite connaissance et faire son affaire personnelle de la situation locative actuelle des biens vendus aux présentes, des contrats de location ou de mise à disposition existant au profit de diverses personnes, dont un récapitulatif est demeuré annexé aux présentes après mention » ;

Attendu que cette clause qui permettait de lever la condition suspensive de l'avant-contrat, était conforme à la délibération du Conseil Municipal du 18 décembre 2000 qui prenait en considération « que la SCI DEBORAH a donné son accord sur les conditions de l'aliénation … et qu'elle s'est engagée à reprendre l'ensemble des contrats des locataires actuels ou à négocier de nouvelles clauses en accord avec les intéressés » ;

Attendu que si quelques baux commerciaux étaient effectivement transmis à l'acquéreur, la liste annexée à l'acte montre que la plupart des occupants se trouvait dans les lieux en vertu de conventions d'occupation précaire et notamment la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » ;

Attendu que l'examen des titres de la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » confirme que son auteur et elle-même n'étaient liés à la venderesse que par des contrats de concession d'emplacements, conventions d'occupation précaire qui ne conféraient pas aux occupants le bénéfice de la propriété commerciale ;

Attendu qu'il ressort néanmoins des écritures des parties qu'elles tiennent pour constant qu'elles sont liées par un bail commercial, lequel se serait donc substitué aux anciennes conventions de concession au jour du transfert de propriété, dans le cadre de l'engagement pris par la s. c. i. « DEBORAH » de négocier avec les occupants du site ;

Sur la résiliation du bail commercial :

Attendu que la s. a. r. l. « DEBORAH » invoque le bénéfice des dispositions de l'article 1722 du code civil selon lesquelles lorsque, pendant la durée du bail, la chose louée est détruite en totalité par cas fortuit, le bail est résilié de plein droit ;

Attendu que la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » concluant, au visa des articles 1719,1720 et 1722 du code civil, à la confirmation, de la décision de résiliation du bail aux torts du bailleur, pour inexécution de son obligation d'entretien et de mise en conformité de la chose louée, il en résulte que la demande doit également être examinée au vu des dispositions de l'article 1741 du code civil qui permet de prononcer la résiliation du bail pour la perte de la chose louée imputable à la faute d'une partie ;

Attendu que, l'arrêté préfectoral du 6 juin 2003, emportant décision de fermeture de l'établissement au public a été pris en considération « des nombreuses (212) et graves non-conformités mentionnées dans le diagnostic établi en matière de sécurité incendie par l'organisme de contrôle agrée « Bureau Véritas » en date du 19 septembre 2002 » ;

Attendu que l'expertise exécutée par Henry B... ne s'est pas limitée aux aspects des normes de sécurité incendie, mais a porté sur l'ensemble des éléments de l'établissement pour le rendre conforme aux différentes normes actuelles ;

Attendu que l'expert, indique que les locaux occupés par la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » sont situés pour partie dans un bâtiment principal, structure métallique en très mauvais état construite en 1963 selon les techniques classiques en vigueur à l'époque, et pour partie dans un bâtiment en très bon état, construit en 1988 selon des techniques récentes ; que seul le bâtiment principal ne correspond plus aux normes actuelles de sécurité, d'hygiène et de stabilité ;

Attendu que procédant ensuite à l'examen des différents éléments de la construction, l'expert relève :
-qu'en ce qui concerne les fondations et les ouvrages d'ossatures ce bâtiment calculé selon les règles CM 56 de l'époque, ne correspond plus aux normes CM 66 actuelles, tandis que les normes de surcharges climatiques NV 65 ont été modifiées à plusieurs reprises depuis 1963, de sorte qu'il est nécessaire :
de renforcer la charpente,
de réaliser une protection en pied de mur, avec renforcement des liaisons poteaux – fondations et éventuellement des fondations elles-mêmes ;
-que les dallages, dont la surface est usée, doivent être intégralement refaits pour les rendre conformes aux normes d'hygiènes actuelles ;
-que la couverture doit être totalement refaite pour remédier aux défauts d'étanchéité qui trouvent pour partie leur cause dans un défaut d'entretien, mais également dans la faible pente de cette toiture qui ne correspond plus aux normes actuelles ;
-que les façades présentent des fissures et microfissures ne compromettant pas la solidité des murs et pouvant être traitées par la simple adjonction d'une toile de verre associée à l'application d'un revêtement plastique ;
-que les murs ne sont plus conformes aux règlements d'hygiène et doivent être revêtus d'un enduit et d'une peinture lessivable ;
-que les menuiseries métalliques présentent un vieillissement normal, mais l'absence de double vitrage et de garde corps ne les rendent pas conformes aux normes d'isolation thermique et de sécurité ;
-que les portails métalliques à enroulement doivent être remplacés par des portails isothermiques, pour préserver la chaîne du froid, et une porte battante isothermique vers l'extérieur comme issue de secours pour chaque carreau ;
-que les charges stockées dans les mezzanines sont trop importantes et nécessitent un renforcement des planchers ;
-que la totalité de l'installation électrique est vétuste et ne correspond plus, ni aux normes de sécurité, ni aux normes du code du travail ;
-que les WC publics et privés, en nombre insuffisant, ne sont pas aux normes pour handicapés, tandis que les eaux usées se rejettent avec les eaux pluviales dans un réseau unitaire en amiante ciment ;
-que malgré la décision de désaffectation du site en 1993, il continue de recevoir du public, de sorte que la mise aux normes du bâtiment en matière d'incendie suppose :
le désenfumage par pyrodômes de l'allée centrale,
l'installation de sprinklage, avec réserve d'eau de 450 m ³ et pompe,
la création de 17 issues de secours,
la création d'un Réseau d'Incendie Armé,
un système de sécurité incendie de type B, avec alarme sonore et liaison téléphonique directe à la caserne des pompiers,
-que les panneaux en fibrociment d'amiante dans les impostes doivent être déposés et remplacés par des panneaux sandwichs isothermiques ;
-que les règles sanitaires actuelles imposent la mise en conformité des groupes de production du froid et la reprise des équipements d'isolation ;

Attendu que l'expert chiffre ensuite les différents postes de dépenses que nécessiterait la réfection de l'immeuble, pour un montant total de 5. 628. 414,00 euros HT (soit 6. 731. 583,10 euros TTC) ;

Attendu qu'il résulte de cette évaluation du coût de la réfection de l'immeuble principal qui excède la valeur vénale de l'ensemble des biens vendus telle qu'elle avait été estimée par le service des domaines, que la perte de la chose louée doit effectivement être considérée totale ;

Attendu que le premier juge retient exactement que la date de résiliation du bail doit être fixée à celle de l'arrêté préfectoral du 6 juin 2003 qui, en imposant la fermeture de l'établissement au public, rendait impossible la jouissance de la chose louée ;

Attendu que la s. a. r. l. « DEBORAH » fait valoir que la plupart des travaux de réfection à mettre en œ uvre sont la conséquence de la vétusté du bâtiment et de l'évolution des normes de construction, d'hygiène et de sécurité antérieurement à l'acquisition des locaux litigieux par la s. c. i. « DEBORAH » ;

Mais attendu qu'il ressort des débats que l'activité du site avait été maintenue par la ville, alors que depuis 1993 elle avait décidé sa désaffectation, sans qu'il apparaisse qu'elle aurait veillé à l'entretien des locaux depuis cette date ;

Et attendu que la s. c. i. « DEBORAH », en se portant acquéreuse des biens loués, s'est engagée à « faire son affaire personnelle de la situation locative … des biens vendus », de sorte qu'elle ne peut invoquer le fait que le défaut d'entretien était antérieur à sa prise de possession des lieux pour se dégager de la responsabilité de la perte de la chose consécutive à la négligence de son propriétaire ;

Attendu qu'il s'ensuit que le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il a écarté l'application de l'article 1722 du code civil et prononcé la résiliation du bail pour faute de la bailleresse ;

Sur les réclamations pécuniaires réciproques :

1. les chefs de demande examinés en première instance :
Attendu que dans la mesure où la date de résiliation du bail a été correctement fixée au 6 juin 2003, le premier juge en a exactement déduit que la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » devait les loyers jusqu'à cette date, quand bien même, considérant que le bail était résilié dès le 3 octobre 2002, la s. a. r. l. « DEBORAH » a estimé devoir cesser de percevoir ces loyers depuis lors ;

Et attendu que dans la mesure où la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » s'est maintenue dans les lieux au-delà de cette date au mépris de l'arrêté préfectoral, c'est à bon droit qu'une indemnité d'occupation a été mise à sa charge jusqu'à la libération effective des lieux ;

Attendu que de la même manière, dès lors qu'il ressort des échanges de courriers que la s. a. r. l. « DEBORAH » s'est abstenue de remplir ses obligations de bailleur au prétexte qu'elle considérait que la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » occupait sans droit les lieux litigieux à partir du mois d'octobre 2002, cette dernière pouvait prétendre à la réparation du préjudice spécifique consécutif à ce manquement, lequel a été correctement arbitré à la somme de 20. 000 euros ;

2. les points non jugés en première instance :

Attendu que l'appel n'ayant pas été cantonné et toutes les parties ayant conclu au vu du résultat du complément d'expertise, il convient, dans un souci de bonne justice, d'évoquer les points non jugés pour donner à l'affaire une solution définitive ;

a. la demande de dommages et intérêts pour « non-respect des engagements souscrits » et comportements abusifs

Attendu qu'il ressort des pièces produites que, dans le cadre des négociations préalables à la vente, la s. c. i. « DEBORAH » avait fait valoir qu'elle projetait de constituer sur le site un ensemble d'entrepôts à la place du bâtiment actuel, après réalisation d'un premier investissement destiné à reloger les occupants selon des modalités à définir ;

Attendu qu'il ne saurait se déduire de l'échec des pourparlers engagés avec la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » pour parvenir à son relogement, que le bailleur aurait agi de mauvaise foi dans la conduite de ces négociations ;

Attendu qu'au contraire il apparaît que la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » qui avait fait elle-même des offres partielles d'acquisition à la commune, n'a pas cherché à favoriser son relogement provisoire qui aurait nécessité la renégociation des relations locatives, comme l'avait envisagé l'acte de vente entre la commune et la s. c. i. « DEBORAH », la demanderesse préférant se maintenir dans les lieux mis à sa disposition par la SNAC ;

Attendu que dès lors, la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » qui ne démontre pas la réalité de la faute quasi-délictuelle invoquée, n'est pas fondée dans sa demande de dommages et intérêts sur le fondement des dispositions de l'article 1382 du code civil ;

b. les conséquences de la résiliation du bail

Attendu que la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » prétend avoir perdu son fonds de commerce à la suite de la résiliation du bail ;

Mais attendu que la s. a. r. l. « DEBORAH » justifie par actes d'huissier de justice (constats et interpellations par sommations) que la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes », bien qu'elle ait transféré son siège social à La Roquette sur Siagne (06) avec déclaration de cessation d'activité au 10 février 2005, a continué d'exploiter (à tout le moins sous le couvert du groupe auquel elle appartient), sa clientèle sur Nîmes en utilisant ses mêmes véhicules ; Et attendu que dans la mesure où la clientèle de la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » était le principal élément de son fonds de commerce, la demanderesse ne peut soutenir qu'elle a perdu celui-ci, quand bien même la privation des emplacements mis à sa disposition sur le site du marché-gare de Nîmes constitue incontestablement une source de préjudice pour l'exploitation de cette clientèle ;

Et attendu qu'il résulte de la lecture des lettres de licenciement adressées aux membres de son personnel, que la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » a tiré prétexte de la fermeture du site pour s'abstenir de rechercher des solutions de reclassement de ce personnel au sein des autres établissements du groupe auquel elle appartient ;

Attendu que néanmoins, si elle ne saurait se prévaloir de sa propre faute pour engager la responsabilité de son cocontractant, la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » aurait été en tout état de cause été confrontée à des difficultés pour le redéploiement de son personnel ;

Attendu que compte tenu des éléments soumis à l'appréciation de la Cour le préjudice résultant de l'éviction de la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » sera donc compensé, toutes causes de préjudice confondues, par l'allocation d'une indemnité de 230. 000 euros ;

Sur l'action paulienne et les demandes formées contre Christophe X... et Nathalie X... épouse Y... :

Attendu que la délibération de l'assemblée générale extraordinaire du 5 août 2003 par laquelle les associés de la s. c. i. « DEBORAH » ont décidé la transformation de la société civile en société à responsabilité limitée, a été prise à la suite de l'ordonnance de référé qui faisait droit à la demande d'expertise présentée par la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » qui, par son assignation, avait manifesté sa volonté de contester la résiliation de plein droit sans dédommagement invoquée par la s. c. i. « DEBORAH » ;

Attendu qu'il se déduit de cette concomitance des faits, ainsi que des informations contenues dans les pièces produites aux débats :
-que le fait générateur de la créance indemnitaire de la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » existait au jour de l'assemblée générale extraordinaire litigieuse, de sorte que le principe de créance de la demanderesse était certain (quand bien même il n'était pas exigible), non seulement à l'égard de la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes », mais encore à l'égard de ses associés en cas de vaines poursuites contre la personne morale ;
-que la transformation de la société, en l'absence de toute justification particulière, était manifestement destinée à permettre aux associés d'éviter de répondre de la dette de la personne morale à proportion de leur part dans le capital social ;
-que cette volonté commune de la personne morale et de ses associés de faire échec aux prétentions de la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » et de quelques autres occupants ou locataires, est confirmée par les moyens développés par la s. a. r. l. « DEBORAH » à l'appui de sa demande d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire (cf. jugement du Tribunal de Commerce de Nîmes en date du 19 décembre 2003) ;

Attendu qu'ainsi la fraude paulienne étant établie à l'égard des droits de la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes », le jugement doit également être confirmé en ce qu'il a déclaré la décision de transformation de la société inopposable à la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » ;

Attendu que pour autant la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » n'est pas fondée à solliciter la condamnation solidaire de Christophe X... et de Nathalie X... épouse Y... avec la s. a. r. l. « DEBORAH » ;

Attendu qu'en effet, les associés ne peuvent être recherchés pour le paiement de la dette de cette société, qu'en vertu des dispositions de l'article 1858 du code civil, tandis que la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » ne caractérise à leur égard aucun fait de nature à engager leur responsabilité en application de l'article 1382 invoqué par la demanderesse ;

Sur les frais de l'instance :

Attendu que la s. a. r. l. « DEBORAH » qui succombe devra supporter les dépens de l'instance qui comprendront les frais d'expertise et payer à la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » une somme équitablement arbitrée à 2. 500 euros, en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Reçoit les appels en la forme.

Au fond,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions.

Et évoquant les points non jugés,

Condamne la s. a. r. l. « DEBORAH » à payer en outre à la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes », une indemnité d'éviction de 230. 000 euros, toutes causes de préjudice confondues ;

Déboute la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » du surplus de ses demandes dirigées tant contre la s. a. r. l. « DEBORAH » que contre Christophe X... et Nathalie X... épouse Y... ;

Dit que la s. a. r. l. « DEBORAH » supportera les dépens de première instance et d'appel qui comprendront les frais de l'expertise ordonnée en référé, et payera à la s. a. r. l. « BALLICO Nîmes » une somme de 2. 500 euros, par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Dit que la SCP d'avoués GUIZARD / SERVAIS pourra recouvrer directement contre la partie ci-dessus condamnée, ceux des dépens dont elle aura fait l'avance sans en recevoir provision, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

La minute du présent arrêt a été signée par Monsieur FILHOUSE, président, et par Madame BERTHIOT, greffier présent lors de son prononcé.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Numéro d'arrêt : 05/00693
Date de la décision : 04/12/2007
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Nîmes


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2007-12-04;05.00693 ?
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