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28/11/2007 | FRANCE | N°05/04300

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 28 novembre 2007, 05/04300


ARRÊT No1577

CHAMBRE SOCIALE

R. G. : 05 / 04300

YRD / PS

Conseil des Prud'hommes
de FREJUS en date du
24 novembre 2000



COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
01 avril 2003



S / RENVOI CASSATION


X...


C /

SA GAY FRERES DORGAY



COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 28 NOVEMBRE 2007



APPELANT :

Monsieur Gabriel X...


...


...

83380 LES ISSAMBRES

représenté par Me Fabrice ANDRAC, avocat au barreau d

e MARSEILLE



INTIMÉE :

SA GAY FRERES DORGAY
prise en la personne de son représentant légal en exercice
Zone Industrielle du Mont Blanc
74105 ANNEMASSE CEDEX

représentée par la SELARL REIRA TRYSTR...

ARRÊT No1577

CHAMBRE SOCIALE

R. G. : 05 / 04300

YRD / PS

Conseil des Prud'hommes
de FREJUS en date du
24 novembre 2000

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
01 avril 2003

S / RENVOI CASSATION

X...

C /

SA GAY FRERES DORGAY

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 28 NOVEMBRE 2007

APPELANT :

Monsieur Gabriel X...

...

...

83380 LES ISSAMBRES

représenté par Me Fabrice ANDRAC, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMÉE :

SA GAY FRERES DORGAY
prise en la personne de son représentant légal en exercice
Zone Industrielle du Mont Blanc
74105 ANNEMASSE CEDEX

représentée par la SELARL REIRA TRYSTRAM AZMA, avocats au barreau de THONON LES BAINS

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Régis TOURNIER, Président,
Monsieur Olivier THOMAS, Conseiller,
Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Annie GAUCHEY, Greffier, lors des débats, et Madame Patricia SIOURILAS, Greffier, lors du prononcé,

DÉBATS :

à l'audience publique du 04 Juillet 2007, où l'affaire a été mise en délibéré au 17 octobre 2007, et prorogé au 28 Novembre 2007,

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort, prononcé et signé par Monsieur Régis TOURNIER, Président, publiquement, le 28 Novembre 2007, sur renvoi de la Cour de Cassation,

FAITS PROCÉDURE PRÉTENTIONS DES PARTIES

Monsieur Gabriel X... était embauché le 16 janvier 1995 en qualité de cadre commercial par la société Gay frères Dorgay, et licencié le 1er février 2000, pour faute grave par lettre remise en main propre, motivée par le fait qu'il n'aurait pas accepté un déménagement.

Le 7 février 2000, il signait un protocole d'accord transactionnel en vertu duquel il lui était versé une somme à titre d'indemnité forfaitaire de 160. 000 francs.

Monsieur Gabriel X... saisissait alors le Conseil des prud'hommes de Fréjus d'une demande en nullité de la transaction et en paiement de diverses indemnités afférentes à son licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par jugement du 24 novembre 2000, le conseil des prud'hommes de Fréjus le déboutait de ses demandes.

Sur appel de Monsieur Gabriel X..., la Cour d'appel d'Aix en Provence, par arrêt du 1er avril 2003, confirmait le jugement et déclarait qu'il n'y avait pas lieu à application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Sur pourvoi formé par Monsieur Gabriel X..., par arrêt du 21 septembre 2005, la Cour de Cassation cassait et annulait en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 1er avril 2003, au visa des articles L. 122-14, L122-14-1 et L. 122-14-7 du Code du travail et 2044 du code civil, et renvoyait la cause et les parties devant la Cour d'appel de ce siège aux motifs que :

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 122-14, L / 122-14-1 et L. 122-14-7 du code du travail et 2044 du code civil ;

Attendu qu'il résulte de ces textes qu'une transaction, ayant pour objet de mettre fin, par des concessions réciproques, à toute contestation née ou à naître résultant de la rupture du contrat de travail, ne peut être valablement conclue qu'après notification du licenciement par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ;

Attendu que M. X..., engagé le 16 janvier 1995 en qualité de cadre commercial par la société Gay Frères Dorgay et licencié pour faute grave par lettre remise en main propre le 1er février 2000, a signé le 7 février 2000 un protocole d'accord transactionnel en vertu duquel il lui était versé une certaine somme au titre d'indemnité forfaitaire ; qu'il a saisi le conseil de prud'hommes d'une demande en nullité de la transaction et en paiement de diverses indemnités afférentes à son licenciement qu'il considère comme dénué de cause réelle et sérieuse ;

Attendu que pour déclarer valable la transaction et rejeter les demandes du salarié, l'arrêt attaqué énonce que la formalité de la lettre recommandée avec demande d'avis de réception n'est qu'un moyen de prévenir toute contestation sur la date de notification du licenciement, et qu'en l'espèce le salarié, libéré depuis six jours de son lien de subordination par la lettre de licenciement remise en main propre, avait eu le temps de s'informer de ses droits avant de signer la transaction, de sorte que son consentement n'était pas vicié ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résulte de ces constatations que la transaction a été conclue en l'absence de notification préalable du licenciement par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, ce dont il résulte qu'elle était nulle, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et attendu, qu'en application de l'article 627, alinéa 2, du nouveau code de procédure civile, la cour de cassation est en mesure, en cassant partiellement sans renvoi, de mettre fin au litige en ce qu'il porte sur la validité de la transaction ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 1er avril 2003 (...)

(...) Prononce la nullité de la transaction.

Renvoie l'affaire devant la cour d'appel de Nîmes uniquement pour qu'il soit statué sur les conséquences de la nullité de la transaction.

Actuellement, Monsieur Gabriel X... expose que :

-il exerçait la fonction de cadre commercial pour la Sté GAY FRERES DORGAY mais son emploi est celui d'un représentant de commerce en bijouterie puisqu'il soumet à la vente les produits que fabrique la société et prend donc des commandes,

-dans le cadre de l'exécution de son contrat de travail il a fait l'objet d'une agression à main armée pour lui subtiliser sa collection de bijoux et a subi lui-même et sa compagne diverses blessures au cours de cette agression,

-l'employeur lui alors demandé de changer de domicile indiquant que cette exigence était réclamée par son assureur et il répondait que la société devait prendre à sa charge les frais,

-l'employeur refusait cette prise en charge et procédait au licenciement aux motifs que le non changement de domicile du salarié à ses frais rendait impossible la poursuite du contrat de travail,

-le motif de licenciement est dénué de toute cause réelle et sérieuse par référence à l'article L 120-2 du Code du travail étant précisé que son successeur habite lui aussi dans le département des Alpes Maritimes alors que ce département aurait été exclu par l'assureur de l'employeur,

-il a été licencié à 56 ans et a été dans l'impossibilité de retrouver un travail équivalent par la suite, il indique avoir subi un préjudice important du fait à la fois, de la perte de la rémunération mensuelle de 4 840 euros et par le manque de cotisation auprès des organismes de retraite.

Il sollicite donc :

-85 000 euros au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse (soit 17 mois de salaire).

-ordonner la compensation de cette somme avec celle obtenue dans le cadre de la transaction nulle conclue entre les parties, soit la somme de 21. 342 euros.

-ordonner le paiement des intérêts sur les sommes à titre indemnitaire, à compter de la saisine de la juridiction de Fréjus.

-14 520 euros au titre du préavis (3 x 4 840 euros), et les congés payés y afférents, soit 1 452 euros,
-4 840 euros à titre d'indemnités conventionnelles de licenciement.
-10. 068. 96 euros de préjudice distinct car il avait été dans l'obligation de changer de véhicule peu de temps avant le licenciement, ce qui constitue une dépense inutile,
-410. 85 euros pour la location coffre fort pour entreposer les bijoux, collection appartenant à son employeur,
-10 000 euros au titre du préjudice moral.
-ordonner la capitalisation des intérêts.
-5 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

-dire qu'à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par la présente décision et qu'en cas d'exécution par voie extra judiciaire, les sommes retenues par l'huissier instrumentaire en application des dispositions de l'article 10 du décret du 08 mars 2001, portant modification du décret du 12 décembre 1996 devront être supportées par la société défenderesse en sus de l'indemnité mise à sa charge sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Actuellement, la société, intimée, prétend que :

-le salarié a bien refusé le déménagement comme le démontre la lettre du 19 avril 1999 et par son refus réitéré de déménager, le salarié a fait échec au maintien de la garantie d'assurance des bijoux, n'ignorant pas qu'il mettait en cela, la société dans une situation qui ne permettait plus la poursuite du contrat de travail, même pendant le temps limité du préavis,

-la demande formalisée par la société répondait à une situation particulière dont elle ne portait en aucune façon la responsabilité s'agissant d'une agression au domicile du salarié, en sorte que ses agresseurs connaissaient son domicile,

-enfin, l'absence de clause de mobilité dans le contrat de travail est sans effet puisque son déplacement répondait aux exigences des dispositions de l'article 120-2 du code du travail,

-si la cour devait estimer que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, il ne saurait en aucun cas faire droit aux demandes du salarié dans leur quantum, en effet les dommages intérêts devront être ramenés à un montant équivalent à 6 mois de salaire,

-également le salarié ne saurait être dédommagé du préjudice moral lié à l'agression car la société ne saurait en aucun cas être responsable de ce préjudice puisque cela ne découle pas directement de sa faute ou de son fait,

-pour le véhicule, l'examen de la carte grise permet de se rendre compte que le véhicule acquis par le salarié est de marque BMW il s'agit en réalité d'un choix personnel.

-pour la location du coffre fort, la société a réglé les sommes dues à ce titre,

-enfin, sur la demande de compensation : M. X... n'a pas procédé au remboursement de la somme de 24. 391. 84 euros et ce, malgré la mise en demeure qui lui a été adressée par courrier le 18 novembre 2005 ; cette somme devant être déduite, augmentée des intérêts au taux légal ayant pris effet au 18 novembre 2005.

Elle sollicite donc le rejet des demandes, la faute grave étant justifiée, et à titre subsidiaire, si la condamnation de la société était prononcée, la réduction des sommes à de plus justes proportions.

MOTIFS

Sur le licenciement

Monsieur X..., en raison de ses fonctions de cadre commercial, s'était vu confier une collection de bijoux, propriété de son employeur, qu'il était amené à conserver à son domicile. La société GAY FRERES DORGAY était assurée auprès de la Compagnie LLOYD'S de Londres, le montant de la franchise s'élevait à 20 % de chaque sinistre. Monsieur X... était victime d'une première agression survenue à son domicile en 1996, puis d'une seconde en mars 1997 qui justifiait alors son déménagement. Il était victime d'une nouvelle agression le 3 mars 1999 et il lui était alors demandé de changer à nouveau de domicile dès lors que son domicile avait été repéré et qu'une nouvelle agression était envisageable.

L'assureur de l'employeur refusait pour l'avenir de garantir tout sinistre survenant dans les départements 69, 26, 13, 83, 06 sauf si Monsieur X... n'était plus domicilié dans l'un de ces départements. L'employeur renouvelait alors sa proposition ce que le salarié refusait, il était licencié pour ce motif.

Eu égard aux fonctions exercées par Monsieur X..., au nombre d'agressions perpétrées à son domicile et en raison de la décision de l'assureur, le déménagement exigé par l'employeur était parfaitement justifié. En effet, la poursuite du contrat de travail aux conditions antérieures s'avérait impossible, Monsieur X... ne pouvait continuer son activité et détenir une importante collection de bijoux sans être couvert par une assurance efficace et, même en l'absence de clause de mobilité, son déménagement était dicté par des impératifs indépendants de la volonté de son employeur et une telle décision ne se heurtait pas aux dispositions de l'article L120-2 du code du travail.

Contrairement à ce que soutient le salarié, son employeur ne s'est pas opposé à prendre à sa charge les frais induits par ce déménagement mais s'est opposé à assurer les frais de location ou d'achat généré par le déménagement. Le fait que son successeur ait été domicilié dans l'un des départements visés par l'assureur ne présente aucune pertinence ; c'est en raison des sinistres dont Monsieur X... a été personnellement victime que l'assureur n'a plus souhaité le garantir sans pour autant refuser de garantir tout autre représentant habitant ce même secteur.

Le refus opposé par le salarié compromettait la poursuite de la relation de travail et la mesure de licenciement prise en conséquence repose sur un motif réel et sérieux ; pour autant aucune faute grave ne peut être reprochée à Monsieur X..., sa position n'empêchait pas l'exécution du contrat pendant la durée du préavis. Il est en droit de prétendre au paiement des sommes de :
-14 520, 00 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
-1. 452, 00 euros au titre de l'indemnité de congés payés y afférente
-4. 840, 00 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement

Sur les autres demandes

Monsieur X... expose qu'il a acquis un véhicule peu avant son licenciement dont l'utilité était étroitement liée à la nature de son emploi et sollicite à ce titre une somme représentant douze mensualités de son crédit.

Or, s'agissant d'un achat personnel portant sur un véhicule BMW 530 dont il a conservé la propriété, rien ne permet de soutenir qu'il était exclusivement attaché à l'exercice de ses fonctions.

Les frais de location de coffre fort ont été réglés par l'employeur, ce que reconnait le salarié.

L'employeur qui s'est prévalu d'une faute grave en l'espèce alors que le refus de déménager ne présentait aucun caractère abusif et alors que le salarié avait été victime de plusieurs agressions en raison de son activité, a nécessairement causé un préjudice moral à ce dernier qui sera réparé par l'octroi de la somme de 4. 000, 00 euros à titre de dommages et intérêts.

Il convient d'ordonner la compensation entre les sommes allouées au salarié et celle dont ce dernier est redevable en raison de la nullité de la transaction.

L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et d'allouer à Monsieur X... la somme de 2. 000, 00 euros à ce titre.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Vu l'arrêt de cassation du 21 septembre 2005

Dit le licenciement de Monsieur X... justifié par l'existence d'une cause réelle et sérieuse,

Condamne la société GAY FRERES DORGAY à payer à Monsieur X... les sommes suivantes :

-14 520, 00 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
-1. 452, 00 euros au titre de l'indemnité de congés payés y afférente
-4. 840, 00 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement

Dit que ces sommes produiront intérêts à compter de la date de convocation devant le bureau de conciliation, soit le 3 mai 2000,

Ordonne la capitalisation des intérêts à compter du 4 juillet 2007 et dit que la première capitalisation pourra intervenir pour les intérêts courus entre le 4 juillet 2007 et le 4 juillet 2008, et par la suite tous les ans, pour les intérêts échus pour une année entière,

Dit que les sommes allouées au salarié viendront en compensation avec celles dues par celui-ci par l'effet de l'annulation de la transaction, augmentée des intérêts au taux légal ayant pris effet au 18 novembre 2005,

Condamne la société GAY FRERES DORGAY à payer à Monsieur X... la somme de 2. 000, 00 euros par application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Déboute pour le surplus des demandes et notamment celle portant sur l'application des dispositions de l'article 10 du décret du 8 mars 2001,

Condamne la société GAY FRERES DORGAY aux entiers dépens,

Arrêt signé par Monsieur TOURNIER, Président et par Madame SIOURILAS, Greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Numéro d'arrêt : 05/04300
Date de la décision : 28/11/2007
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2007-11-28;05.04300 ?
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