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14/11/2007 | FRANCE | N°05/04790

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 14 novembre 2007, 05/04790


ARRÊT No1433

R. G. : 05 / 04790

RT / AG
CONSEIL DE PRUD'HOMMES D'AVIGNON
27 septembre 2005
Section : Encadrement

SA VIGNOBLES DU PELOUX

C /


X...


COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 14 NOVEMBRE 2007

APPELANTE :

SA VIGNOBLES DU PELOUX
No Siret : 572622017 00034
Route d'Orange
84350 COURTHEZON

représentée par la SELAFA FIDAL, avocats au barreau d'AVIGNON plaidant par Me MOLDONADO



INTIMÉ :

Monsieur Yves X...

Numéro Sécurité Soci

ale : ...


...

84700 SORGUES

représenté par Me Fabienne GIMONDI, avocat au barreau de MONTPELLIER



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Monsie...

ARRÊT No1433

R. G. : 05 / 04790

RT / AG
CONSEIL DE PRUD'HOMMES D'AVIGNON
27 septembre 2005
Section : Encadrement

SA VIGNOBLES DU PELOUX

C /

X...

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 14 NOVEMBRE 2007

APPELANTE :

SA VIGNOBLES DU PELOUX
No Siret : 572622017 00034
Route d'Orange
84350 COURTHEZON

représentée par la SELAFA FIDAL, avocats au barreau d'AVIGNON plaidant par Me MOLDONADO

INTIMÉ :

Monsieur Yves X...

Numéro Sécurité Sociale : ...

...

84700 SORGUES

représenté par Me Fabienne GIMONDI, avocat au barreau de MONTPELLIER

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Régis TOURNIER, Président,
Monsieur Philippe DE GUARDIA, Conseiller,
Madame Isabelle MARTINEZ, Vice-Présidente placée,

GREFFIER :

Madame Annie GAUCHEY, Greffier, lors des débats et Madame Patricia SIOURILAS, Greffier lors du prononcé,

DÉBATS :

à l'audience publique du 19 Juin 2007, où l'affaire a été mise en délibéré au 3 octobre prorogé au 14 Novembre 2007,

ARRÊT :

rendu en dernier ressort, prononcé et signé par Monsieur Régis TOURNIER, Président, publiquement, le 14 Novembre 2007, date indiquée à l'issue des débats,

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS
DES PARTIES

Monsieur Yves X... était embauché par la société le 2 mai 1980 de maître de chaix exploitant une entreprise ayant pour activité l'embouteillage et la commercialisation de vins en gros.

Il occupait cette fonction jusqu'au 30 avril 1990. Ensuite il était nommé chef de cave, statut cadre. Enfin à compter du mois de juillet 2003 il était nommé responsable de production vrac.

Alléguant une évolution défavorable de la conjoncture économique et d'un budget prévisionnel pessimiste, l'employeur consultait le comité d'entreprise sur la restructuration, et convoquait Monsieur X... à un entretien préalable.

Celui-ci était licencié le 16 février 2004 au motif que :

Notre chiffre d'affaires 'France' et 'EXPORT' a diminué de 7 % depuis le dernier exercice clôturé le 30 septembre 2003, comparé au précédent. De plus, entre juin et décembre 2003, ce même chiffre d'affaires a baissé de 39 %.
Cette baisse... s'accompagne d'une baisse de production (en volume produit et en nombre de cols).
Dans ce contexte, nous enregistrons moins de commandes par client, alors que le nombre de nos clients baisse parallèlement. Concernant la CAVE VINICOLE DE SERRE, le nombre de fournisseurs de vin a diminué de 15 % entre 2002 et 2003.
Enfin, le Caveau n'est pas rentable, puisque le chiffre d'affaires ne couvre pas les frais de fonctionnement et les charges auxquels nous avons à faire face. De même, l'examen de la conjoncture nous révèle que la consommation de vin en France diminue régulièrement, de l'ordre d'au moins 30 % sur les 20 dernières années. Cette baisse devrait se confirmer notamment du fait du renforcement des mesures anti alcool (Loi EVIN) et des nouvelles mesures prises en matière de sécurité routière.
De plus, la concurrence est importante, que ce soit sur le plan régional ou sur le plan national et des prix sont très tendus.
Enfin, la concurrence internationale se développe également, les vins du nouveau monde étant de plus en plus présents sur le marché. Il est donc nécessaire, outre le fait de dynamiser nos ventes et acheter moins cher, d'adapter notre structure à cette baisse d'activité et à la conjoncture économique ambiante.
Nous nous trouvons donc dans l'obligation de supprimer votre poste.

Contestant la légitimité de cette rupture Monsieur Yves X... saisissait alors le Conseil des Prud'hommes d'Avignon qui par jugement du 27 septembre 2005 :

-décidait que le licenciement économique était fondé mais avec une absence de reclassement,

-condamnait la société à lui payer les sommes de 16. 684,85 euros en complément de l'indemnité de licenciement et 30. 000 euros de dommages intérêts,

-condamnait la société à lui remettre les documents suivants bulletin de salaire, attestation destinée à l'ASSEDIC rectifiée, et certificat de travail rectifié.

-rejetait les autres demandes.

La société VIGNOBLES du PELOUX a régulièrement relevé appel de cette décision et soutient essentiellement que :

-les résultats ont démontré à la fin de l'exercice 2003 une baisse de 7 % de son chiffre d'affaires en France et à l'export, si bien que le résultat de l'entreprise, même positif, a été divisé par trois par rapport à l'année précédente,

-la baisse d'activité s'est tout à coup accélérée en l'espace de six mois, puisque entre les mois de juin et décembre 2003 l'activité a chuté de plus de 39 %, et en 2004 la situation était comme prévue négative, le nombre de cols passant de 12 Millions en 2002 à 8 Millions en 2004, étant observé qu'il ne s'agissait pas d'un mouvement conjoncturel mais d'une diminution prévisible du chiffre d'affaires compte tenu de l'environnent international,

-cette restructuration a nécessité l'embauche en 2004 d'un directeur marketing, poste crée, que Monsieur X... ne pouvait pas occuper en raison d'un manque de compétence et d'expérience pour un tel poste, et de toute façon ce nouveau poste a été finalement lui aussi supprimé,

-cette situation nécessitait bien une réorganisation par une réduction de la masse salariale, et la suppression du poste de Monsieur X... pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise était parfaitement justifiée,

-la lettre de licenciement est suffisamment motivée contrairement à ce qu'affirme Monsieur X...

-au moment du licenciement aucun poste n'était disponible sur l'ensemble des sites et les recherches ont été effectuées, en sorte qu'elle a bien respecté son obligation de reclassement

Elle sollicite donc l'infirmation du jugement déféré ajoutant que :

-la demande de treizième mois n'est pas fondée car il faut une présence au 31 décembre et la prorotisation ne bénéficie qu'aux départs en retraite ou en préretraite,

-Monsieur X... a travaillé pendant 11 ans, de mai à mars 1990 un poste de maître de chais avec un statut non cadre et il ne peut demander le calcul de l'indemnité de licenciement d'un cadre depuis l'origine, de ce chef le jugement n'est pas fondé, l'ancienneté acquise devant être pour partie en qualité de non cadre et pour partie en qualité de cadre conformément à l'article 30 de l'annexe cadre, avec cette précision que le salaire est de 3. 035,11 et non de 3. 350,27 comme il est prétendu,

-Monsieur X..., sans en tirer de conséquence sur le plan financier, réclame la rectification des documents contractuels établis, estimant que depuis juillet 2003, en qualité de Responsable Production Vrac, il aurait dû se voir allouer une classification Niveau IX, Echelon B au lieu du Niveau VIII, Echelon A attribué,

-Or, si la convention collective indique comme exemple relevant du Niveau IX Position B le poste de Responsable de Production, elle assortit ce poste à la coordination de plusieurs ateliers de fabrication, de manière expresse, et réserve cette classification aux cadres des entreprises occupant au moins 6 cadres et ingénieurs, ce qui n'est pas le cas de la société VIGNOBLES DU PELOUX, celle-ci ne possédant qu'un seul outil de fabrication et non plusieurs et n'ayant pas le nombre de cadres requis dans la filière industrielle conventionnellement visée.

Elle sollicite enfin la restitution de la somme de 17 147,17 euros remise au titre de l'exécution provisoire (indemnité de licenciement pour 16 684,85 euros et intérêts pour 462,32 euros) et la somme de 1. 000 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

L'intimé Monsieur Yves X... demande :

-la somme de 120. 609,72 euros titre de dommages intérêts avec intérêts au taux légal compter de la requête,

-la prime de 13 ème mois de 2. 777,61 euros avec intérêts au taux légal à compter de la requête,

-un rappel de l'indemnité de licenciement, le maître de chaix étant classé cadre toute comme celui de chef de cave, avec une moyenne des salaires calculé sur les 12 derniers mois de salaires, avec intérêts au taux légal,

-la rectification des documents contractuels,

-la somme de 5. 000 euros au titre de dommages intérêts pour non respect de l'article R 515-37 du Code du travail

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la motivation de la lettre de licenciement

Attendu que celle-ci énonce :

une diminution du chiffre d'affaires de 7 % depuis le dernier exercice clôturé le 30 septembre 2003,

une baisse de 39 % du chiffre d'affaires entre juin et décembre 2003,

une baisse de production (en volume produit et en nombre de cols),

une diminution du nombre des clients et de fournisseurs de vin,

une absence de rentabilité du caveau puisque le chiffre d'affaires ne couvre pas les frais de fonctionnement et les charges,

l'obligation de supprimer le poste ;

Attendu que pour répondre aux exigences des articles L 122-14-2 et L 321-1 du Code du Travail la lettre de licenciement pour motif économique doit énoncer à la fois d'une part les raisons économiques du licenciement, à savoir les difficultés économiques, les mutations technologiques, ou réorganisation nécessaire à la sauvegarde de l'entreprise, d'autre part l'incidence concrète de ces raisons sur l'emploi ou le contrat de travail à savoir la suppression du poste, la transformation d'emploi, ou la modification du contrat de travail ;

Attendu que les motifs économiques invoqués dans la lettre de licenciement doivent être précis et matériellement vérifiables en sorte qu'ils puissent être discutés devant le juge ; qu'en l'espèce les énonciations de lettre de licenciement satisfont à ces conditions et exposent la suppression du poste ;

Sur le bien fondé du licenciement

Attendu que pour avoir une cause économique le licenciement pour motif économique doit être consécutif à des difficultés économiques

Attendu qu'en l'espèce les éléments produits aux débats et les explications fournies établissent les diminutions de chiffre d'affaires alléguées dans des proportions importantes rendant nécessaires des mesures et des choix pour y remédier ;

Attendu, ensuite, que dans le cadre de son obligation de reclassement de tout salarié dont le licenciement économique est envisagé, il appartient à l'employeur de rechercher s'il existe des possibilités de reclassement, au sein du groupe et parmi les entreprises dont l'activité, l'organisation ou le lieu d'exploitation leur permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, et de proposer au salarié dont le licenciement est envisagé des emplois disponibles de même catégorie ou, à défaut, de catégorie inférieure, en assurant au besoin l'adaptation des salariés à une évolution de leur emploi

Attendu qu'en l'espèce Monsieur X... assurait la fonction de responsable de production vrac à la cave dont les taches consistaient à :

prendre contact avec les courtiers, en assistant le directeur,

participer la sélection des vins,

faire confirmer les achats,

gérer le personnel de la cave : gestion du temps de travail, gestion des délais de fabrication et de livraison,

gérer les stocks,

préparer les vins (collage, filtration et traitement),

optimiser le rapport qualité / prix (s'informer en termes de développement),

assurer le suivi du process de qualité, de la matière première et du produit fini,

suivre la maîtrise de qualité, du cahier des charges, de l'hygiène et de la sécurité ;

Attendu que compte tenu de cette expérience l'employeur n'a pas manifesté une démarche individuelle et active à cette occasion ; qu'en effet

la lettre de licenciement de Monsieur X... énonce qu'aucun reclassement n'apparaît envisageable, compte tenu de notre situation et de l'absence de poste disponible,
la société a considéré, avant même la réunion du Comité d'entreprise, qu'il n'y avait aucune possibilité de reclassement envisageable,
la société gérait quatre établissements Carpentras (Caveau de Serres), deux Courthezon (le siége social et un établissement), et un quatrième dans le Gard (Mas de Beaulieu) et comprenait 48 salariés ;

Attendu qu'à juste titre le jugement en a exactement déduit que l'employeur avait ainsi manqué à son obligation de reclassement, préalable au licenciement, et que le licenciement était en conséquence dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Attendu qu'en l'état de l'ancienneté de l'appelant, de son salaire moyen au moment de la rupture, de sa situation familiale et de l'évolution prévisible de sa situation professionnelle comme étant né le 23 juin 1960 il convient de lui allouer la somme de 70. 000 euros en réparation de son préjudice ; que le jugement doit être réformé uniquement sur le montant de la somma allouée ;

Sur le treizième mois

Attendu que selon l'article 42 ter de la Convention collective nationale des vins, cidres et spiritueux applicable prévoit le versement d'une gratification annuelle pour les salariés ayant plus d'un an d'ancienneté, dès lors qu'ils sont inscrits aux effectifs de la société au moment du paiement, c'est-à-dire au 31 décembre de chaque année ;

Attendu que le paiement prorata temporis, lié à un départ en cours d'année, n'est prévu expressément que pour les départs en retraite ou préretraite ;

Attendu qu'en fin de l'année 2004, Monsieur Yves X... n'était plus salarié au mois de décembre, au moment du versement du treizième mois au sein de la société ;

Attendu que ne satisfaisant pas à la condition de présence il ne peut prétendre à un prorata de cette gratification annuelle dite treizième mois ;

Sur l'indemnité conventionnelle de licenciement

Attendu que Monsieur Yves X... expose que depuis l'origine il avait été embauché comme maître de chaix et que cet emploi est classé dans la catégorie des cadres niveau VIII échelon A en sorte que les modalités de calcul de l'indemnité de licenciement obéissent à celles des cadres pour une durée ayant commencé en 1980 et non depuis 1990 comme l'a calculé l'employeur ;

Attendu qu'il résulte des mentions du certificat de travail délivré que l'appelant a exercé la fonction de chef de cave de 1980 à 2003 ; que le contrat de travail initial fait état d'une affiliation au régime social des cadres ;

Attendu que si le niveau VIII échelon A de la filière industrielle n'est possible pour les chefs de caves et les maîtres de chai que dans les entreprises à structure développée (comptant 50 salariés ou plus et occupant au moins 6 cadres et ingénieurs), l'intimé peut, toutefois, invoquer à son profit ce classement plus favorable consentit volontairement par l'employeur depuis l'origine ;

Attendu que l'intimé peut donc prétendre à percevoir cette indemnité ; que par ailleurs le jugement énonce des modalités de calcul en retenant la moyenne des 12 derniers mois de salaires à la somme de 3. 350,27 euros ; que si l'employeur critique cette somme il n'apporte aucun élément précis et détaillé venant corroborer une erreur ;

Attendu que, dès lors, la restitution sollicitée doit être rejetée, la somme allouée à ce titre étant justifiée ;

Sur les autres demandes

Attendu que Monsieur X..., sans en tirer de conséquence financière, réclame la rectification des documents contractuels établis, estimant que depuis le mois de juillet 2003, en qualité de responsable production vrac, devait se voir attribuer une classification niveau IX, échelon B au lieu du niveau VIII, échelon A ;

Attendu, cependant, que la convention collective réserve cette classification aux cadres des entreprises occupant au moins 6 cadres et ingénieurs, ce qui n'est pas le cas de l'espèce ;

Attendu que la rectification de documents contractuels délivrés ne s'impose pas à ce titre ; qu'en outre la société a fait parvenir le 10 février 2006 à l'intimé le bulletin de salaire mentionnant l'indemnité complémentaire de licenciement et l'attestation destinée à l'ASSEDIC conformément aux prescriptions du jugement ; que dès lors ne sont pas fondés des dommages intérêts fondés sur l'article R 515-37 du Code du travail ;

Attendu qu'il parait équitable que chacune des parties supporte ses frais exposés non compris dans les dépens ;

Vu l'article 696 du nouveau Code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Réforme le jugement déféré,

Statuant à nouveau du seul chef du montant de l'indemnité sans cause réelle ni sérieuse,

Condamne a société SA VIGNOBLES du PELOUX à payer à Monsieur Yves X... la somme de 70. 000 euros de dommages intérêts,

Donne acte à la société de la remise des documents rectifiés à savoir un bulletin de salaire et une attestation destinée à l'ASSEDIC conformément au jugement,

Confirme pour le surplus,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Condamne la société appelante aux dépens de première instance et d'appel

Arrêt signé par Monsieur TOURNIER, Président et par Madame SIOURILAS, Greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Numéro d'arrêt : 05/04790
Date de la décision : 14/11/2007
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes d'Avignon


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2007-11-14;05.04790 ?
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