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06/11/2007 | FRANCE | N°07/00624

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 06 novembre 2007, 07/00624


ARRÊT No 609

R. G : 07 / 00624



TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE D'ALES
11 janvier 2007


X...


Y...


C /


Z...


C...


COUR D'APPEL DE NIMES

CHAMBRE CIVILE
1ère Chambre A

ARRÊT DU 06 NOVEMBRE 2007

APPELANTS :

Monsieur Georges X...

né le 15 Octobre 1936 à MONTPELLIER (34000)

...

30360 VEZENOBRES

représenté par la SCP CURAT-JARRICOT, avoués à la Cour
assisté de la SCP VEZON MASSAL RAOULT, avocats au barreau D'ALES

Madame R

enée Y... épouse X...

née le 20 Janvier 1937 à BÉZIERS (34500)

...

30360 VEZENOBRES

représentée par la SCP CURAT-JARRICOT, avoués à la Cour
assistée de la SCP VEZON MASSAL RAOULT, avoc...

ARRÊT No 609

R. G : 07 / 00624

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE D'ALES
11 janvier 2007

X...

Y...

C /

Z...

C...

COUR D'APPEL DE NIMES

CHAMBRE CIVILE
1ère Chambre A

ARRÊT DU 06 NOVEMBRE 2007

APPELANTS :

Monsieur Georges X...

né le 15 Octobre 1936 à MONTPELLIER (34000)

...

30360 VEZENOBRES

représenté par la SCP CURAT-JARRICOT, avoués à la Cour
assisté de la SCP VEZON MASSAL RAOULT, avocats au barreau D'ALES

Madame Renée Y... épouse X...

née le 20 Janvier 1937 à BÉZIERS (34500)

...

30360 VEZENOBRES

représentée par la SCP CURAT-JARRICOT, avoués à la Cour
assistée de la SCP VEZON MASSAL RAOULT, avocats au barreau D'ALES

INTIMEES :

Madame Mauricette Z... épouse A...

née le 16 Décembre 1964 à ALES (30100)

...

30340 ST PRIVAT DES VIEUX

représentée par la SCP FONTAINE-MACALUSO JULLIEN, avoués à la Cour
assistée de Me Patrick BOUYGUES, avocat au barreau de MONTPELLIER

Madame Paulette C... veuve D...

née le 09 Avril 1925 à CHAVAGNAC (24120)

...

30340 ST PRIVAT DES VIEUX

représentée par la SCP FONTAINE-MACALUSO JULLIEN, avoués à la Cour
assistée de Me Patrick BOUYGUES, avocat au barreau de MONTPELLIER

Statuant sur appel d'un jugement rendu par le Juge de l'Exécution

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Muriel POLLEZ, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 786 du Nouveau Code de Procédure Civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

M. Pierre BOUYSSIC, Président
Mme Christine JEAN, Conseiller
Mme Muriel POLLEZ, Conseillère

GREFFIER :

Mme Véronique VILLALBA, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision.

DÉBATS :

à l'audience publique du 12 Septembre 2007, où l'affaire a été mise en délibéré au 06 Novembre 2007.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé et signé par M. Pierre BOUYSSIC, Président, publiquement, le 06 Novembre 2007, date indiquée à l'issue des débats, par mise à disposition au greffe de la Cour.

****

faits, procédure et prétentions :

En vertu d'un jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance d'Alès le 21 septembre 1983, Georges X... a été condamné à procéder dans les 24 heures de la signification de la décision à remettre le chemin d'exploitation implanté sur sa propriété en son état primitif et ce, à peine d'une astreinte de 200 francs par jour de retard pendant une durée de 3 mois, passé lequel il serait à nouveau fait droit.

Ce jugement a été confirmé par arrêt de la Cour d'Appel de Nîmes le 11 janvier 1984 relativement à la condamnation au rétablissement précitée.

Aux termes d'un nouvel arrêt du 12 juin 1986 il était jugé qu'il n'y avait pas lieu à liquidation de l'astreinte ni à fixation d'une nouvelle puisqu'il n'était pas établi que X... avait laissé sans exécution une quelconque des dispositions du jugement du 21 septembre 1983 et de l'arrêt du 11 janvier 1984.

Suivant nouvelle décision du 26 mai 2005, le juge des référés du Tribunal de Grande Instance d'Alès a renvoyé les parties à mieux se pourvoir relativement à la demande en rétablissement de l'accès à ce chemin et la Cour d'Appel de Nîmes dans un arrêt du 30 mai 2006 devait confirmer cette décision.

Réclamant toujours l'usage du chemin qui avait été accordé en 1983 à leurs auteurs, Mauricette Z... épouse A... et Paulette C... veuve D... ont fait assigner Georges et Renée X... à cette fin devant le juge de l'exécution.

Suivant jugement du 11 janvier 2007, le juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance d'Alès a :
-déclaré recevable la demande de condamnation sous astreinte présentée par Mauricette Z... épouse A... et Paulette C... veuve D...,
-dit que les consorts X... devraient laisser le libre accès du chemin d'exploitation et devraient procéder à sa remise en état en se référant si besoin au rapport d'expertise judiciaire établi par Monsieur
E...
,
-dit que Georges et Renée X... devraient remettre à Maître Ghislain F..., huissier de justice associé à Alès, désigné à cette fin, un jeu de clés permettant l'ouverture du portail installé à la croisée du chemin d'exploitation et du CD 173,
-dit que Georges et Renée X... devraient procéder à l'enlèvement de la clôture installée en limite de leur propriété et qui obstrue le chemin d'exploitation à son débouché sur le fonds enclavé de Madame Z... et plus généralement toutes installations empêchant ou gênant le passage sur ledit chemin,
-dit que Georges et Renée X... devraient s'exécuter dans le délai d'un mois à compter de la signification du jugement,
-dit que passé ce délai, une astreinte provisoire de 150 Euros par jour de retard courrait pendant un délai de 4 mois passé lequel Mauricette Z... épouse A... et Paulette C... veuve D... devraient saisir à nouveau le juge de l'exécution,

-débouté les parties de toutes autres demandes,
-condamné les consorts X... au paiement de la somme de 800 Euros à titre d'indemnité de procédure et aux entiers dépens comprenant le coût des procès verbaux dressés les 7 et 22 mars 2005.

Georges et Renée X... en ont interjeté appel suivant déclaration enregistrée au greffe le 6 février 2007, sans que les parties élèvent de discussion quant à la recevabilité de l'appel ou qu'il résulte des pièces du dossier de moyen d'irrecevabilité devant être relevé d'office par la Cour.

¤ ¤ ¤

Dans leurs dernières écritures déposées au greffe le 14 juin 2007 Georges et Renée X... demandent à la Cour, de :
-déclarer recevable et bien fondé leur appel,
-vu l'irrecevabilité des demandes et moyens nouveaux formulés par les intimés après réouverture des débats en première instance,
-infirmant le jugement, dire le juge de l'exécution incompétent ratione materiae alors que les demandes introductives d'instance de Mauricette Z... épouse A... et Paulette C... veuve D... ne remplissaient pas les conditions cumulatives posées par l'article 213-6 du Code de l'Organisation Judiciaire nouveau (art. L. 311-12-1 du Code de l'Organisation Judiciaire ancien) et 8 du décret du 31 juillet 1992 et qu'elles ne pouvaient être rectifiées sur jugement de réouverture des débats,

subsidiairement au fond,
-vu le pouvoir souverain du juge de l'exécution d'apprécier des conséquences liées à la survenance de faits postérieurs au jugement dont il est réclamé l'exécution et si les circonstances font apparaître la nécessité d'une astreinte,
-considérant que les demandes de Mauricette Z... épouse A... et Paulette C... veuve D... sont radicalement incompatibles avec les contestations soulevées et jugées sérieuses par la Cour d'Appel de Nîmes dans son arrêt du 30 mai 2006, contestations tirées de la renonciation manifeste par les auteurs respectifs des intimées de leur droit d'usage et l'impossibilité subséquente pour ces dernières d'en solliciter le rétablissement à leur profit,
-considérant que l'autorité de la chose jugée qui s'attache aux deux décisions de 1983 et 1984 est inopposable aux appelants, tenant les événements postérieurs qui sont venus modifier la situation antérieurement reconnue en justice au bénéfice des auteurs des intimées, à savoir leur renonciation à tout usage effectif du chemin, jamais viabilisé ni entretenu mais devenu l'endroit d'écoulement des eaux de ruissellement de pluie de tout le quartier (et classé d'ailleurs administrativement " ruisseau ") avec en outre inondabilité chronique,
-considérant qu'ils n'ont, eux-mêmes, aucune maîtrise d'une assiette aujourd'hui administrativement classée comme " ruisseau " dont l'entretien, de plus fort, dépend désormais des pouvoirs publics,
-constatant enfin, mais subsidiairement, qu'aucune précision quant à l'établissement de l'assiette exacte de ce passage n'existe ni dans le jugement du Tribunal de Grande Instance d'Alès du 21 septembre 1983

ni dans son arrêt confirmatif du 11 avril 1984, cette imprécision interdisant dès lors, toute exécution forcée, rappelant à cet égard que le juge de l'exécution n'a pas le pouvoir de modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites, que ce chemin, n'ayant jamais été de 4 mètres de large ne pourra donc jamais servir aux parcelles des intimés comme n'étant pas conforme aux prescriptions de l'urbanisme local, cette seule circonstance privant de tout intérêt les prétentions adverses,
-débouter les intimés de toutes leurs demandes, les dire irrecevables et en tous cas injustes et mal fondées,

reconventionnellement et en toute hypothèse,
-condamner Mauricette Z... épouse A... et Paulette C... veuve D... au paiement solidaire de la somme de 3000 Euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
-les condamner à leur payer la somme de 2000 Euros en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de Procédure Civile et
-les condamner in solidum aux entiers dépens sous le bénéfice des dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Ils font plaider que :
-une partie ne saurait faire état de nouvelles prétentions en suite d'une décision de réouverture des débats qui ne l'autorise qu'à répondre aux éclaircissements de faits et de droit demandés par le juge et qu'ainsi Mauricette Z... épouse A... et Paulette C... veuve D... ne pouvaient solliciter le prononcé d'une astreinte, demande non formulée initialement, pour rendre le juge de l'exécution compétent,
-ce juge n'a pas apprécié souverainement, comme il en avait l'obligation, les conséquences liées à la survenance de faits postérieurs au jugement dont il était réclamé l'exécution ni apprécié si les circonstances faisaient apparaître la nécessité d'une astreinte, omettant que les intimées avaient échoué dans leur précédente tentative d'obtenir le rétablissement du chemin devant le juge des référés et la Cour et dans celle d'obtenir la liquidation de l'astreinte rejetée en 1986,
-après la décision intervenue, les auteurs des intimées se sont désintéressés de ce chemin alors que la situation d'un chemin d'exploitation qui n'est pas figée doit s'apprécier au moment où le juge statue,
-en définitive les auteurs de Mauricette Z... épouse A... et Paulette C... veuve D... ont renoncé à l'usage de ce chemin puisqu'aucune tentative d'exécution n'est intervenue après 1986, aucun acte de rétablissement de ce chemin n'a été réalisé en suite d'un entretien ou d'une viabilisation qui leur incombait,
-en revanche les débiteurs de ce passage ont été contraints d'aménager ce chemin pour créer un canal d'écoulement des eaux de pluies de tout le quartier qu'ils ont progressivement dû recueillir en suite de l'urbanisation de la zone,
-dans ces conditions, l'autorité de la chose jugée ne peut plus être invoquée,
-cette situation est, au demeurant, conforme aux indications du cadastre qui ne mentionne pas ce chemin comme tel et débouchant sur la voie publique,

-les intimées occultent également le protocole d'accord intervenu le 29 novembre 2004 entre eux-mêmes et Monsieur A..., agissant en représentation de son épouse, qui a expressément renoncé à l'usage de ce chemin contre la constitution d'une servitude de passage à un emplacement exactement opposé de l'ancien chemin,
-l'administration considère désormais ce chemin comme un ruisseau qu'elle se prétend seule habilitée à entretenir,
-ces éléments démontrent à suffisance que la situation ayant prévalu à la décision de 1983 a changé,
-en tout état de cause, le titre exécutoire invoqué est imprécis quant à l'assiette de ce chemin (implantation et largeur) empêchant sa fixation et il ne pourra d'ailleurs avoir la largeur (4 mètres) prescrite pour la desserte des fonds des intimés, sauf à faire constater l'état d'enclave et
-l'ensemble de ces éléments sus développés font que la décision du juge de l'exécution ne peut être qu'infirmée.

En l'état de leurs dernières conclusions déposées au greffe le 11 septembre 2007, Mauricette Z... épouse A... et Paulette C... veuve D... sollicitent de la Cour qu'elle :
-juge que Georges et Renée X... portent atteinte à leur droit ainsi qu'à celui de leurs ayant-droit d'exercer leur droit d'usage du chemin d'exploitation constaté par le jugement du 21 septembre 1983 confirmé par l'arrêt de la Cour d'Appel de Nîmes du 11 avril 2004,
-en conséquence, ordonne à Georges et Renée X... de laisser le libre accès audit chemin et d'avoir à procéder à la remise en état de sorte de leur permettre de pouvoir user du droit qui leur a été conféré par le jugement au besoin en se référant au rapport d'expertise établi par Monsieur E... dont les constatations ont servi de base à la décision pour déterminer les conditions,
-confirme donc la décision entreprise et
-condamne Georges et Renée X... à leur payer la somme de 3000 Euros en remboursement des frais non taxables exposés et aux entiers dépens.

Elles répondent que :
-l'accès aux deux parcelles dont elles sont chacune propriétaire ne peut se faire qu'en passant par le chemin d'exploitation qui longe la propriété de Georges et Renée X..., conformément aux décisions intervenues en 1983 et 1984 en suite du rapport d'expertise
E...
et des dispositions de l'article L. 162-1 du Code Rural,
-ni elles-mêmes ni leurs auteurs n'ont renoncé expressément ou implicitement à jouir de ce chemin d'exploitation, le non-usage ne tenant qu'aux obstacles créés par les appelants,
-l'autorité de la chose jugée s'impose à ces derniers qui ont clôturé et rendu impraticable ce chemin sans droit,
-le prétendu engagement de Monsieur A... ne peut avoir obligé ni son épouse au visa de l'article 1540 du Code Civil, seule propriétaire, ni sa voisine et alors qu'il ne visait comme fonds dominant que la parcelle 56, qu'il devait être réitéré par acte authentique et sous condition de la concession d'une servitude de passage en remplacement de ce chemin d'exploitation encore reconnu en 2004,

-le juge de l'exécution était bien compétent pour connaître du litige au visa de l'article L 213-6 du Code de l'Organisation Judiciaire qui doit se prononcer sur la difficulté d'exécution d'un titre exécutoire en application de l'article 33 de la loi du 9 juillet 1991 puisqu'elles ne peuvent plus user de ce chemin compte tenu des travaux réalisés par Georges et Renée X...,
-si elles n'ont pas usé de ce chemin c'est de ce fait,
-en toute hypothèse, le bénéfice d'un chemin d'exploitation ne se perd pas par le non-usage, voire constitué par le lit d'un ruisseau ce qu'avait déjà noté la Cour d'Appel en 1984,
-un chemin d'exploitation ne peut être supprimé que du consentement de tous les propriétaires en vertu de l'article L 162-3 du Code Rural de sorte qu'il n'y a pas eu renonciation ni expresse ni implicite de leur part mais qu'en revanche cette suppression n'est que du fait des appelants qui ne sont pas fondés à agir ainsi au prétexte qu'ils sont tenus de supporter l'écoulement naturel des eaux sur leur fonds, difficulté qu'au demeurant les travaux de viabilisation de la parcelle Z... résoudront et
-ainsi leur réclamation ne souffre aucune contestation utile.

motifs :

Sur l'incompétence du juge de l'exécution par référence à la demande initiale des intimées :

C'est par des motifs pertinents que le juge de l'exécution de première instance a déclaré recevable la demande de Mauricette Z... épouse A... et Paulette C... veuve D... et s'est déclaré compétent pour en connaître, s'agissant d'une demande de condamnation sous astreinte présentée en application des dispositions de l'article L. 213-6 du Code de l'Organisation Judiciaire et de l'article 33 de la loi du 9 juillet 1991.

En effet, dans sa précédente décision du 9 novembre 2008 le juge de l'exécution avait ordonné la réouverture des débats pour que les parties s'expliquent sur la compétence ratione materiae de la juridiction saisie en l'absence de demande présentée en dehors de toute exécution forcée dont les conditions étaient en revanche réunies si une demande de prononcé d'astreinte était formulée.

Saisissant l'opportunité de cette question posée les intimées ont complété leur prétention initiale en rétablissement du libre passage afin qu'elle soit assortie d'une astreinte.

Au visa de l'article 444 du nouveau Code de Procédure Civile le juge a, à bon droit, soumis au débat contradictoire des parties cette difficulté. Les débats étant rouverts, Mauricette Z... épouse A... et Paulette C... veuve D... étaient toujours recevables, s'agissant de la première instance, à modifier leurs demandes dont elles ont la libre disposition pour se conformer aux prescriptions légales et proroger ainsi la compétence de la juridiction saisie tout en restant dans les strictes limites de la réponse que le juge avait souhaité voir apporter à son interrogation.

En conséquence la fin de non-recevoir invoquée est en voie de rejet et le juge de l'exécution était effectivement compétent pour se prononcer sur la demande d'exécution forcée présentée.

Sur le fond :

Comme le soulignent à juste titre les appelants, si le juge de l'exécution n'a pas le pouvoir de modifier la décision du juge du fond, il doit en revanche apprécier les conséquences liées à la survenance de faits postérieurs au jugement dont il est réclamé l'exécution dès lors qu'elles peuvent en effet influer sur le bien fondé de la demande et il apprécie également si les circonstances font apparaître la nécessité d'une astreinte.

La décision invoquée au soutien de leur demande par Mauricette Z... épouse A... et Paulette C... veuve D... avait déjà assorti la condamnation prononcée d'une astreinte mais dont la demande de liquidation a été rejetée en 1986 au motif que la preuve n'avait été rapportée du défaut d'exécution imputé aux époux X.... Les dames Z...
C... ont été encore déboutées par le juge des référés en 2004 en présence d'une contestation sérieuse quant à leur droit actuel à réclamer le bénéfice du jugement initial. Vaines procédures en suite desquelles les intimées ont saisi le juge de l'exécution, puisque disposant déjà d'un titre exécutoire, pour qu'en fait, constatant implicitement le maintien de ce droit acquis antérieurement, il leur en accorde la protection consécutivement à la contradiction récente ou récemment ressentie opposée par les époux X... à l'usage du chemin d'exploitation que le tribunal leur avait accordé 20 ans auparavant.

Il s'ensuit que la discussion soumise au juge de l'exécution et aujourd'hui à la Cour, dans les limites de sa saisine, consiste à apprécier si les intimées sont toujours fondées à réclamer l'exécution du précédent jugement qui avait consacré en faveur de leurs auteurs, les consorts H...
I...pour Mauricette Z... épouse A... et Mohamed D... pour Paulette C... veuve D..., l'existence d'un chemin d'exploitation le long de la limite du fonds des appelants et, pour ce faire, le droit de demander à ce que l'accès leur soit à nouveau reconnu et conféré, contre la volonté persistante des époux X..., ou si ce droit a désormais disparu du fait d'éléments nouveaux qui ont modifié la situation antérieurement reconnue en justice.

Le jugement du 21 septembre 1983 avait donné acte aux demandeurs de ce qu'ils se réservaient de procéder aux travaux d'aménagement du chemin tels que préconisés par l'expert, éventualité prévue par l'article 93 du Code Rural. Il est constant que ni leurs auteurs ni les intimées n'ont avant la présente instance aménagé ce chemin pour en user alors que les appelants indiquent avoir été contraints de le transformer en canal d'écoulement des eaux de ruissellement que reçoit leur fonds, circonstance dont ils tirent argument pour affirmer que les propriétaires riverains du chemin d'exploitation que sont les auteurs des dames Z...
C... ont ainsi, par leur désintérêt, clairement manifesté leur intention d'abandonner l'usage de sorte qu'elles ne sont plus fondées à réclamer le rétablissement de l'accès à la voie litigieuse.

Or si en effet les bénéficiaires du jugement n'ont pas entrepris de travaux dès le prononcé du jugement, il sera relevé que celui-ci avait été frappé d'appel et que la décision n'a été confirmée que le 11 avril 1984, qu'en 1986, alléguant qu'il était fait obstacle au passage, les auteurs des intimés ont été déboutés de leur demande de liquidation d'astreinte et que 18 ans plus tard lorsqu'ils ont à nouveau réclamé ce passage il leur a été encore refusé par le juge des référés. Il ne peut toutefois être déduit d'un silence procédural gardé pendant une telle période après un précédent échec judiciaire et que des situations personnelles peuvent expliquer équivaut à une renonciation explicite, non équivoque et commune à tous les usagers à un droit antérieurement acquis.

Contrairement à ce que soutiennent les appelants l'absence de viabilisation et d'entretien d'un chemin d'exploitation n'implique pas la perte de cet accès pour ses propriétaires ou ses usagers car il est de principe que le droit d'utiliser un chemin d'exploitation ne se perd pas par le non-usage puisqu'il ne peut être supprimé que du consentement de tous les propriétaires et car sa seule disparition matérielle ne peut suffire à priver les propriétaires en ayant été riverains ou bénéficiaires des droits qui leur sont conférés par la loi.

En toute hypothèse, lors du jugement de 1983 ce chemin présentait effectivement une utilité pour les auteurs des intimés puisqu'il était destiné à en permettre l'exploitation en autorisant l'accès à la voie publique et actuellement la configuration des lieux n'a pas changé et les intimées n'ont pas obtenu d'autres accès qui rendraient caduc l'usage du chemin qu'ils ont simplement choisi de ne pas aménager rapidement dans l'attente d'une confirmation de la destination des lieux projetée. Pareillement, Mauricette Z... épouse A... et Paulette C... veuve D... ou leurs auteurs n'ont effectué sur leur terrain aucun aménagement qui manifesterait leur intention de renoncer à l'usage du chemin bien qu'en restant propriétaires ni exprimé leur volonté de s'affranchir de toute contribution en renonçant à leurs droits, soit d'usage, soit de propriété.

Le fait que ce chemin n'est pas matérialisé sur le plan du cadastre est sans influence sur son existence passée ou actuelle.

C'est également de façon inexacte que Georges et Renée X... affirment que les intimées ou leur auteur s'en étaient totalement désintéressés pendant 22 ans puisqu'en dehors des procédures engagées, une recherche d'accord semblait avoir trouvé sa solution selon les appelants aux termes de l'acte de renonciation expresse signé le 29 novembre 2004, élément démontrant à suffisance que le contentieux subsistait nonobstant le silence gardé sur la difficulté mais ne prouvant toujours pas une renonciation expresse à ce droit de la part des dames Z...
C....

Selon l'acte précité, Monsieur A... époux de Mauricette Z... avait convenu avec les époux X... qu'il renonçait à tout droit sur l'existence du chemin d'exploitation contre la constitution d'une servitude de passage sur un emplacement différent de l'assiette du chemin litigieux.

Néanmoins, cet engagement contracté par Monsieur A..., qui aurait, en agissant ainsi, pris en main la gestion des biens de son épouse, dont il est séparé de biens, ne peut l'avoir engagée en suite d'un représentation régulière au visa de l'article 1540 du Code Civil pour des actes de disposition qui lui sont interdits et en renonçant à un droit réel ne bénéficiant qu'à elle, en sa qualité de seule propriétaire du fonds desservi par le chemin d'exploitation en question.

Cet acte n'a emporté aucune renonciation de Mauricette Z... à ses droits et, a fortiori, de Paulette C... aux siens alors qu'elle n'est unie par aucun lien de droit au mari de sa voisine.

Enfin, les époux X... n'ont jamais affirmé qu'il avaient constitué la servitude de passage prévue à l'acte et qui était expressément prévue comme la contre-partie nécessaire de l'abandon du droit d'usage du chemin d'exploitation.

Il en résulte qu'il n'y a pas eu de renonciation de la part des intimées à se prévaloir des droits conférés par le jugement du 21 septembre 1983 et dont les parties discutaient encore plus de 20 ans après.

Matériellement, ce chemin aurait, en toute hypothèse, disparu du fait de la modification des lieux imposée par la mise oeuvre nécessaire d'un système d'écoulement des eaux de ruissellement situé sur son assiette pour prévenir des risques d'inondation le fonds des appelants, voire ceux d'autres voisins de cette zone en cours d'urbanisation, aménagement avalisé par les autorités administratives compétentes qui s'en seraient en outre réservé la charge de l'entretien.

Georges et Renée X... en veulent pour preuve, fait acquis aux débats, que ce chemin d'exploitation s'est toujours situé dans le lit d'un ruisseau habituellement à sec.

Il n'en reste pas moins que les aménagements en question, c'est à dire la création d'un petit canal aux lieu et place du chemin, est du seul fait des appelants sans accord des intimées ou de leur auteur, qu'a considérer qu'en effet ces derniers ont été contraints à la réalisation d'un tel chenal propre à diminuer les risques naturels liés à la situation de leur propriété, ils en ont cependant fait seuls le choix de le situer à l'emplacement exact du chemin d'exploitation qu'ils ont toujours contesté et sans démontrer par les pièces produites que cette implantation est la seule possible et qu'elle leur est imposée par les autorités compétentes, sans pouvoir envisager d'autres aménagements qui n'auraient pas pour incidence de supprimer le chemin.

Il s'ensuit que la disparition matérielle de celui-ci n'est que du fait des époux X... qui n'établissent pas la cause étrangère qui les exonérerait de leur obligation de maintenir l'existence de ce chemin d'exploitation dont Mauricette Z... épouse A... et Paulette C... veuve D... sont donc toujours fondées à réclamer l'usage encore possible, ne serait ce qu'en suite de l'installation de buses sous l'assiette du chemin.

Enfin, selon les appelants le titre invoqué par Mauricette Z... épouse A... et Paulette C... veuve D... ne pourrait être ramené à exécution puisqu'insuffisamment précis quant à l'implantation et à la largeur de l'assiette de ce chemin qui restent indéterminées et impropres, dans tous les cas, à permettre le désenclavement de leurs fonds par un passage imposé de 4 mètres de large pour des terrains constructibles.

Cette affirmation est cependant combattue par les mentions du rapport d'expertise qui a prévalu au jugement ayant reconnu l'existence du chemin d'exploitation puisque Monsieur
E...
a précisément décrit, avec indication de points de référence, le tracé et la largeur de ce chemin qui varie sur son parcours entre 2,50 m et 3,80 m de sorte que son assiette peut être utilement reconstituée pour son rétablissement au profit des intimées.

Toutefois, conformément aux assertions des époux X..., le technicien a retenu que la desserte de parcelles constructibles imposera un élargissement de ce chemin éventuellement par voie de désenclavement ou de constitution de servitude, solution qui pour imposer éventuellement une nouvelle action en justice, ne constitue pas, là encore et à ce stade, un obstacle à l'exécution du jugement réclamée.

En conséquence le jugement dont appel est en voie de confirmation en toutes ses dispositions édictées afin de permettre à Mauricette Z... épouse A... et Paulette C... veuve D... de pouvoir user de cette voie, sauf à l'infirmer exclusivement quant au délai accordé aux époux X... pour supprimer les obstacles et rétablir l'assiette qui sera porté à 4 mois à compter du présent arrêt signifié.

La solution apportée au règlement du litige démontre que l'action engagée par Mauricette Z... épouse A... et Paulette C... veuve D... n'a pas dégénéré en abus de droit de sorte que la demande de dommages et intérêts présentée par les appelants pour procédure abusive est en voie de rejet.

Georges et Renée X... succombent en leur recours comme en première instance. Ils seront donc condamnés à supporter la charge des dépens ainsi qu'à payer à Mauricette Z... épouse A... et Paulette C... veuve D... la somme de 1000 Euros en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de Procédure Civile et sans pouvoir prétendre eux-mêmes au bénéfice de ce texte.

par ces motifs

La Cour,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme le jugement dont appel en toutes ses dispositions sauf quant au délai octroyé à Georges et Renée X... pour rétablir le chemin ;

Statuant à nouveau sur ce point,

Dit que Georges et Renée X... devront procéder aux travaux utiles et au rétablissement du chemin dans un délai de 4 mois à compter de la signification du présent arrêt ;

Y ajoutant,

Condamne Georges et Renée X... à payer à Mauricette Z... épouse A... et Paulette C... veuve D..., ensemble, la somme de 1000 Euros en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de Procédure Civile ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Condamne Georges et Renée X... aux entiers dépens.
Arrêt signé par M. BOUYSSIC, Président et par Mme VILLALBA, Greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Numéro d'arrêt : 07/00624
Date de la décision : 06/11/2007
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance d'Alès


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2007-11-06;07.00624 ?
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