ARRÊT No468
R. G. : 06 / 03864
JLO / DO
TRIBUNAL D'INSTANCE D'ALES
06 juillet 2006
X...
C /
L'Association LA GARENNE ROUSSONNAISE
COMMUNE DE ROUSSON
COUR D'APPEL DE NIMES
CHAMBRE CIVILE
Chambre 2 A
ARRÊT DU 30 OCTOBRE 2007
APPELANT :
Monsieur Bernard X...
né le 29 Novembre 1953 à ALES (30100)
...
30340 ROUSSON
représenté par la SCP POMIES-RICHAUD-VAJOU, avoués à la Cour
assisté de Me Philippe GONI, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉES :
L'Association de chasse LA GARENNE ROUSSONNAISE prise en la personne de son Présidentl en exercice, domicilié en cette qualité au siège social
Quartier de Réclavet
30340 ROUSSON
représentée par la SCP P. PERICCHI, avoués à la Cour
assistée de Me Jean-Paul CHABANNES, avocat au barreau de NIMES, Me Charles LAGIER, avocat au barreau de LYON
La COMMUNE DE ROUSSON représentée par son Maire en exercice, domicilié en cette qualité
Hôtel de Ville
30340 ROUSSON
représentée par la SCP CURAT-JARRICOT, avoués à la Cour
assistée de Me Fabienne BLANCHON, avocat au barreau d'ALES
ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 03 Septembre 2007
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Jean-Loup OTTAVY, Président,
Monsieur Bernard NAMURA, Conseiller,
Mme Sylvie BONNIN, Conseiller,
GREFFIER :
Madame Mireille DERNAT, Premier Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS :
à l'audience publique du 04 Septembre 2007, où l'affaire a été mise en délibéré au 30 Octobre 2007,
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Jean-Loup OTTAVY, Président, le 30 Octobre 2007, date indiquée à l'issue des débats, par mise à disposition au greffe de la Cour
Bernard X... a régulièrement relevé appel du jugement du Tribunal d'Instance d'ALES du 6 juillet 2006 qui l'a déboutée de sa demande en indemnisation des dégâts causés par des sangliers provenant de la parcelle communale de ROUSSON sur laquelle l'Association de Chasse La Garenne Roussonnaise était détentrice du droit de chasse, durant la période 2002-2003, au motif qu'il n'établissait pas la faute de cette association ni de la commune dans la prolifération des sangliers, et qu'il ne démontrait pas que les animaux provenaient du bois communal d'Ayrolles, enclavé dans les terres qu'il exploitait.
Par conclusions déposées le 27 août 2007, Bernard X... soutient qu'il rapporte la preuve de l'origine des sangliers au moyen de constats d'huissiers, et qu'il résulte du rapport de l'expert judiciaire D... que ces animaux provenaient de la parcelle AZ 52, le Bois d'Ayrolles, en forçant les clôtures.
Il souligne que ces faits se produisent fréquemment et à nouveau au cours de la saison culturale 2004-2005, et il demande de confirmer le jugement qui, sur sa nouvelle assignation du 13 octobre 2005, a ordonné une expertise, confiée au même expert.
Par conclusions déposées le 25 juillet 2007, la Commune de ROUSSON soulève la forclusion de l'action pour des dégâts causés à compter du 1er octobre 2002, soit plus de six mois après leur survenance.
Elle soutient que la seule faute qui lui est reprochée est l'absence de pose d'une clôture régulièrement entretenue alors que l'entretien des clôtures incombe au preneur aux termes du bail, que la faute ainsi invoquée serait une faute contractuelle, rendant irrecevable l'action délictuelle.
Subsidiairement, n'étant pas titulaire du droit de chasse, elle se considère étrangère aux dégâts commis par les chasseurs.
Elle conteste la prolifération alléguée, l'origine des dégradations, et la responsabilité du cisaillement des clôtures.
Elle soutient que Bernard X... a mal entretenu les clôtures, au mépris de son engagement contractuel, et qu'il est mal fondé à lui en réclamer le coût, d'autant qu'il a, de la sorte, contribué à son préjudice.
A titre reconventionnel, elle demande de condamner l'appelant à remettre les clôtures en l'état, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, et à lui payer 2. 000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Par conclusions déposées le 10 juillet 2007, l'Association de Chasse La Garenne Roussonnaise fait valoir que l'expertise D... de juin 2004 (afférente aux dégâts de 2002-2003) ne précise pas l'origine des sangliers, le lien de causalité entre les dégâts et l'exercice de la chasse tant par ses membres que par l'agriculteur lui-même.
S'agissant de l'assignation du 13 octobre 2005 (pour les dégâts 2004-2005), elle conteste toute faute de sa part.
Elle s'étonne de l'expertise ordonnée, alors que la demande a été rejetée et demande de rejeter cette prétention.
Elle réclame 3. 000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
SUR CE
Bernard X... exploite sur la Commune de ROUSSON un élevage d'ovins et une culture de cucurbitacées, sur 85 ha.
La parcelle communale Bois d'Ayrolles, de 12,5 ha, est enclavée dans les terres exploitées par Bernard X....
Il se plaint depuis plusieurs années des dommages que causent les sangliers à ses cultures, et à ses clôtures, ainsi que les opérations de chasse.
Les 31 mars et 2 avril 2003 il a assigné la Commune de ROUSSON, propriétaire de la parcelle Bois d'Ayrolles, et la l'Association de Chasse La Garenne Roussonnaise, titulaire du droit de chasse sur cette parcelle, d'où proviennent, selon lui, les sangliers.
Une expertise a été ordonnée pour rechercher la cause des dégâts et chiffrer les dégâts depuis octobre 2002.
A la suite du dépôt du rapport du 15 avril 2004, Bernard X... a déposé une nouvelle assignation le 13 octobre 2005 pour obtenir 114. 590 euros de dommages-intérêts pour les dégâts chiffrés par l'expert judiciaire et une nouvelle expertise pour chiffrer les dégâts subis à la récolte 2005.
La décision déférée a rejeté la demande de dommages-intérêts mais a ordonné l'expertise sollicitée pour évaluer les nouveaux dégâts en précisant par erreur " depuis le 1er octobre 2002 ".
La réalité de l'ancienneté des dégâts est établie par les différentes procédures administratives d'indemnisation introduites par Bernard X... qui estime cependant que les sommes allouées sont insuffisantes, n'intégrant pas son préjudice commercial.
Au vu de la date des assignations initiales, c'est à juste titre que le juge des référés avait ordonné une expertise portant sur les dégâts à compter du mois d'octobre 2002.
En effet à partir de cette date, l'action n'est pas prescrite.
Il résulte du courrier de la Direction Départementale de l'Agriculture et de Forêt du Gard du 8 septembre 2003 signé du chef de service JF H..., sur rapport du lieutenant de louveterie, à la Fédération départementale de chasse, que visiblement le cheptel de sanglier est en surabondance et la pression de chasse ne s'exerce pas en conséquence sur la Commune de ROUSSON et dans le " secteur qui se trouve à proximité des cultures de Bernard X... ".
Le rapport du garde-chasse G... annexé au rapport d'expertise confirme qu'à compter du 15 août 2003 des sangliers passaient dans les champs de Bernard X..., et que tous les jours une horde de sangliers retournaient les semis.
Ainsi la prolifération des sangliers et l'insuffisance de moyens mis en oeuvre par le titulaire du droit de chasse eu égard à la population excessive de sangliers sont établies, d'autant que les membres de cette association étaient hostiles aux battues qu'ils n'organisaient pas eux-mêmes.
L'expert D..., lors de son premier accédit le 12 décembre 2003, a constaté qu'en plusieurs endroits de la clôture du Bois d'Ayrolles, le grillage avait été soulevé ou rompu livrant passage aux animaux qui laissent des empreintes nombreuses dans le sol glaiseux.
De même le 6 janvier 2004 il a pu constater : " visiblement du gibier tente de passer au-travers de la clôture pour étendre ses ressources alimentaires comme pour répondre à ses instincts migratoires ", concernant le même bois.
La provenance de sangliers depuis la parcelle AZ 52 est encore confirmée par le constat d'huissier D. I... du 29 septembre 2005.
C'est à tort que le premier juge a considéré que Bernard X... ne démontrait pas le bien fondé de son action alors qu'il est établi que les sangliers provenaient d'un bois communal dont la Commune de ROUSSON avait accordé le droit de chasse à l'Association de Chasse La Garenne Roussonnaise, laquelle n'effectuaient pas davantage que la commune les opérations de régulation suffisantes du nombre des sangliers, et dont certains membres n'hésitaient pas à mettre en échec les battues organisées par l'agriculteur, ou administratives, ni à ôter, peu avant l'ouverture de la chasse, les clôtures qui auraient protégé les plantations.
Aucune faute significative de Bernard X... n'est prouvée, concernant notamment le refus de clôture autour du bois communal et l'entretien des clôtures existantes.
S'agissant du préjudice subi, il a été chiffré à 23. 319 euros par l'expert D..., qui a opéré contradictoirement et dont le rapport n'est pas précisément discuté sur ce point, en ce qui concerne la destruction des cultures et des prairies.
Les frais de gardiennage des moutons ne peuvent être pris en compte, d'autant que la surveillance des moutons était rendue nécessaire par les opérations de chasse qui affolaient les brebis et les faisaient avorter, notamment par l'action des chiens.
Il en est de même des frais de clôture, d'autant que les dégâts des sangliers remontent à plusieurs années (10 ou 15 ans) et qu'il n'est pas possible de déterminer ceux commis à compter d'octobre 2002. De surcroît le grillage a fréquemment fait l'objet de sections à l'aide d'outils, lesquelles ne peuvent être imputées au gibier.
L'achat de foin complémentaire doit être également écarté.
S'agissant de la nouvelle demande d'indemnisation du 13 octobre 2005, elle ne peut porter que sur les dégâts subis depuis le 13 avril 2005. La mission de l'expert doit être rectifiée en ce sens.
Rien ne s'oppose à la désignation d'un expert, sur cette demande, et le jugement est confirmé sur ce point.
L'appel incident de la Commune de ROUSSON est rejeté puisqu'elle ne rapporte pas la preuve du défaut d'entretien de la clôture, alors qu'il résulte des constats d'huissiers que les réparations sont faites, ce que confirme l'attestation de l'ouvrier agricole Stève F..., chargé de les effectuer.
Les dépens du présent arrêt sont réservés pour être liquidés comme les dépens du jugement qui statuera au vu du nouveau rapport d'expertise.
Il n'y a pas lieu à application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,
Infirme le jugement déféré sur les dégâts 2002-2003.
Statuant à nouveau,
Condamne la Commune de ROUSSON et l'Association de Chasse La Garenne Roussonnaise au paiement de 23. 319 euros à titre de réparation des dégâts aux cultures et récoltes à Bernard X....
Confirme le jugement pour le surplus, sauf à préciser que la mission de l'expert concerne les dégâts subis depuis le 13 avril 2005.
Y ajoutant,
Déboute les parties de leurs autres demandes.
Réserve les dépens du présent arrêt qui seront liquidés comme ceux du jugement à intervenir après dépôt du nouveau rapport d'expertise.
Arrêt signé par Monsieur OTTAVY, Président et par Madame DERNAT, Premier Greffier.