ARRÊT No633
R.G. : 04/01624
CJ/SD
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE D'AVIGNON
30 décembre 2003
Société ALDI MARCHE
C/
COMITÉ D'ENTREPRISE ALDI MARCHE
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
1ère Chambre A
ARRÊT DU 19 DÉCEMBRE 2006
APPELANTE :
LA SOCIÉTÉ ALDI MARCHE
poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice, domiciliés ès qualités au siège social
Allée des Cabedans - BP 2
84300 CAVAILLON
représentée par la SCP CURAT-JARRICOT, avoués à la Cour
assistée de Me Anne-Marie SENECHAL-LHOMME, avocat au barreau de PARIS
INTIME :
LE COMITE D'ENTREPRISE ALDI MARCHE
poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice, domiciliés ès qualités au siège social
Allée des Cabedans - BP 2
84301 CAVAILLON CEDEX
représentée par la SCP FONTAINE-MACALUSO-JULLIEN, avoués à la Cour
assistée de la SCP BAGLIO-ROIG, avocats au barreau d'AVIGNON
ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 22 Septembre 2006.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
M. Pierre BOUYSSIC, Président,
Mme Christine JEAN, Conseiller,
M. Serge BERTHET, Conseiller,
GREFFIER :
Mme Véronique VILLALBA, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision,
DÉBATS :
à l'audience publique du 17 Octobre 2006, où l'affaire a été mise en délibéré au 19 Décembre 2006.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au Greffe de la Cour d'Appel ;
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé et signé par M. Pierre BOUYSSIC, Président, publiquement, le 19 Décembre 2006, date indiquée à l'issue des débats, par mise à disposition au Greffe de la Cour.
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FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
La SARL ALDI MARCHE CAVAILLON exploite une enseigne de "Super Discount" dans le domaine du commerce alimentaire et gére à partir de son siège situé à CAVAILLON, 563 salariés pour la région Sud répartis dans 78 magasins au 12 juin 2001, outre un entrepôt à CAVAILLON.
Le statut du personnel est régi par deux conventions collectives à savoir celle des "Entrepôts d'alimentation" pour le personnel travaillant au sein des entrepôts ou des bureaux et la convention collective "du commerce à prédominance alimentaire" pour le personnel employé en magasin. Avant la loi dite "loi AUBRY", l'ensemble des salariés travaillait sur la base de 39 heures par semaine avec le cas échéant paiement des heures supplémentaires.
Le 1er octobre 1999, la Société ALDI MARCHE a mis en place, par voie d'accord d'entreprise négocié le 20 juillet 1999, au niveau national, la réduction du temps de travail à 35 heures hebdomadaires avec maintien du salaire pour tous les salariés relevant de la catégorie des employés dans l'ensemble des secteurs d'activité, vente, administration et entrepôts.
Les salariés relevant de la catégorie des agents de maîtrise c'est à dire les chefs de magasin, les assistants chefs de magasin et les chefs de service en entrepôt, ne bénéficiaient pas de cet accord, la Société ALDI décidant, dans l'attente de la nouvelle loi pour le personnel d'encadrement, de leur appliquer l'article 8-4 de l'avenant no80 du 14 avril 2000 prévoyant des modalités de forfait en heures annuelles dans la limite de 42 heures par semaine moyennant une rémunération forfaitaire incluant le paiement de quatre heures supplémentaires par semaine. Cet avenant faisait l'objet d'un arrêté d'extension du Ministère de l'Emploi et de la Solidarité en date du 12 octobre 2000 qui excluait toutefois les dispositions relatives au forfait en heures sur l'année concernant les agents de maîtrise. Un nouvel avenant no83 du 23 décembre 2000 intervenait aux termes duquel les agents de maîtrise devaient bénéficier d'une réduction de leur temps de travail par l'octroi de jours de repos ou par référence aux horaires du service dont ils ont la charge sur une base de 35 heures hebdomadaires.
Considérant que l'application de cet avenant et la loi du 19 janvier 2000 ne permettaient pas d'assumer les tâches relevant de la direction des magasins et de l'entrepôt, la Société ALDI proposait de promouvoir les chefs de magasins au statut de cadres avec augmentation des salaires et corrélativement des horaires à 42 heures par semaine. Le Comité d'Entreprise était convoqué le 15 mars 2001 et le 2 avril 2001.
Cette modification substantielle du contrat de travail pouvant être refusée par les salariés concernés, un plan social était présenté pour accompagner le départ des agents de maîtrise qui refuseraient le passage au statut de cadre. Le 22 mai 2001 ce plan était exposé au Comité d'Entreprise qui sollicitait la désignation d'un expert comptable et mandatait le cabinet LEGRAND FIDUCIAIRE.
Par courrier du 15 juin 2001, l'Inspection du Travail concluait à l'insuffisance du plan social présenté et demandait des modifications complémentaires. La Société ALDI proposait à nouveau un plan social, selon elle révisé, pour les salariés refusant le statut de cadre ; le Comité d'Entreprise était convoqué le 29 octobre 2001 à une réunion devant se tenir le 26 novembre 2001. Le Comité d'Entreprise refusait de donner son avis sur les mesures proposées.
Sur délibération du même jour, le Comité d'Entreprise autorisait son secrétaire général à introduire une action en contestation de la procédure de consultation et de la validité de la restructuration et du plan social y afférent qui était engagée par assignation de la Société ALDI devant le Tribunal de Grande Instance d'AVIGNON en date du 12 mars 2002.
Par jugement du 30 décembre 2003, le Tribunal de Grande Instance d'AVIGNON a statué comme suit :
"Déboute le COMITÉ D'ENTREPRISE des magasins ALDI MARCHE de ses demandes visant à constater que la Société à Responsabilité Limitée ALDI MARCHE n'a pas procédé à la consultation du Comité d'Entreprise dans les formes requises par les textes et à prononcer de ce chef la nullité de la restructuration et du plan social y afférent ;
Déboute le COMITÉ D'ENTREPRISE des magasins ALDI MARCHE de ses demandes visant à constater l'absence de toutes considérations économiques à l'origine de la restructuration opérée et la fraude à la loi ;
Dit et juge que les conditions effectives d'emplois des responsables de magasins ne correspondent pas à la définition posée par l'article 8-3 de la convention collective nationale du commerce à prédominance alimentaire relative aux cadres autonomes ;
En conséquence, prononce la nullité de la procédure de restructuration menée par la Société à Responsabilité Limitée ALDI MARCHE et du plan social y afférent ;
Condamne la Société à Responsabilité Limitée ALDI MARCHE aux dépens ainsi qu'à payer au COMITÉ D'ENTREPRISE des magasins ALDI MARCHE la somme de mille deux cents Euros (1.200A) sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile".
La SARL ALDI MARCHE a régulièrement relevé appel de cette décision.
Pour l'exposé du détail des prétentions et moyens des parties devant la Cour, il est expressément fait référence à leurs conclusions récapitulatives signifiées le 15 novembre 2005 pour le Comité d'Entreprise et le 25 novembre 2005 pour la Société ALDI MARCHE.
Celle-ci demande à la Cour de :
- confirmer la décision du Tribunal de Grande Instance d'AVIGNON en date du 30 décembre 2003 en ce qu'elle a retenu, d'une part, que la société avait bien procédé à la consultation du Comité d'Entreprise et, d'autre part, qu'il n'y avait ni absence de toutes considérations économiques à l'origine de la restructuration ni fraude à la loi,
- réformer la décision du Tribunal de Grande Instance d'AVIGNON en date du 30 décembre 2003 en ce qu'elle a prononcé la nullité de la procédure de restructuration et du plan social y afférent, dire et juger qu'il n'y a pas lieu de prononcer une telle nullité,
- réformer également la décision du Tribunal de Grande Instance d'AVIGNON en date du 30 décembre 2003 en ce qu'elle a retenu que les conditions effectives d'emploi des responsables de magasin ne correspondaient pas à la définition posée par l'article 8-3 de la convention collective applicable, dire et juger que le statut des responsables de magasin conçu dans le cadre de la restructuration était bien conforme à la convention collective ou, subsidiairement, dire et juger que ce statut était contraire à la convention collective au regard, uniquement, de la première note de service ou, très subsidiairement, pour la seule période antérieure à la loi du 17 janvier 2003,
- condamner le Comité d'Entreprise à lui verser la somme de 2.000A au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
- condamner le Comité d'Entreprise aux entiers dépens de première instance et d'appel.
*
Le Comité d'Entreprise forme appel incident et conclut en ces termes :
"Constater que la Société ALDI n'a pas procédé à une information loyale et sincère du Comité d'Entreprise ;
Constater le défaut d'approbation des procès-verbaux de réunions de consultation du Comité d'Entreprise ;
Constater le défaut d'avis du Comité d'Entreprise sur le projet de restructuration ;
En conséquence ;
Constater que la Société ALDI n'a pas procédé à la consultation du Comité d'Entreprise dans les formes requises par les textes et prononcer la nullité de la restructuration et du plan social y afférent ;
Constater l'absence de toutes considérations économiques à l'origine de la restructuration opérée et constater la fraude à la loi ;
Constater que les conditions effectives d'emplois des responsables de magasins ne correspondent pas à la définition posée par l'article 8-3 de la convention collective du commerce à prédominance alimentaire relative aux cadres autonomes ;
En conséquence ;
Confirmer la nullité de la procédure de restructuration menée par la Société ALDI et du plan social y afférent ;
Condamner la Société ALDI au paiement d'une somme de 3.000A en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
La condamner aux entiers dépens".
La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 22 septembre 2006.
MOTIFS :
Sur la consultation du Comité d'Entreprise
Attendu que le Comité d'Entreprise estime que la Direction n'a pas procédé aux consultations prévues par les articles L 432-1 et L321-4-1 du Code du Travail dans les formes requises par les textes ; qu'il soutient pour l'essentiel que la Société ALDI a pris sa décision définitive de suppression du poste de chef de magasin avant la consultation imposée par la loi qui doit intervenir préalablement à la décision ;
Attendu que le Tribunal a à bon droit rappelé que l'employeur est tenu à une information loyale et sincère de nature à permettre au Comité d'Entreprise de discuter le projet ; que le chef d'entreprise doit transmettre au Comité d'Entreprise une information précise et écrite pour lui permettre de formuler un avis motivé ;
Attendu en l'espèce que le Tribunal a à juste titre relevé la tenue des réunions du 15 mars et 2 avril 2001 aux fins d'information et de consultation du Comité d'Entreprise sur le projet de modification de l'organisation du personnel d'encadrement travaillant en magasin pour les nouveaux embauchés (première réunion) et sur le projet de modification du temps de travail des agents de maîtrise présents dans l'entreprise ; qu'en dépit de la formulation succincte de la réponse de la Direction dans la rédaction du procès-verbal selon laquelle le poste de chef de magasin disparaît et qu'il n'y a pas de négociation réaliser, ce même procès-verbal comme celui établi pour la deuxième réunion démontrent que des débats ont été instaurés entre la Direction et les membres du Comité d'Entreprise dont l'avis a été demandé, qui ont sollicité un délai d'examen et présenté un projet de réduction du temps de travail en application d'un accord signé du plan national auquel la Direction a répondu ; que la première réunion était limitée aux futures embauches ; que dans ce cadre il était rappelé que le poste de chef de magasin prévu pour travailler 40 heures par semaine ne pouvait être maintenu en conséquence des dispositions de la loi dite AUBRY II du 19 janvier 2000 imposant l'application de la durée hebdomadaire de 35 heures aux agents de maîtrise en l'absence de possibilité légale de forfait pour cette catégorie de salariés, l'extension de l'avenant du 14 avril 2000 ayant été exclue par l'arrêté du 12 octobre 2000 ; que les conséquences de ces dispositions ont été succinctement rappelés par le procès-verbal dans les termes susvisés qui ont été exactement analysés par le Tribunal comme non probants d'une décision arrêtée avant la consultation du Comité d'Entreprise, les débats et échanges ultérieurement organisés démontrant la réalité de la consultation préalable du Comité d'Entreprise ;
Attendu qu'il est encore soutenu qu'une "note économique" n'a été remise aux représentants du personnel que postérieurement à la réunion du 2 avril 2001, soit le 14 juin 2001 ; qu'il y a cependant lieu de relever qu'une réunion a encore eu lieu le 26 juillet 2001 à la demande expresse du Comité d'Entreprise qui a refusé de donner un avis sur les mesures envisagées de la Direction, motifs pris de l'irrégularité de la procédure de consultation et d'information ; que pourtant le délai séparant la transmission de la note et la nouvelle réunion du mois de juillet permettait de discuter les propositions ou au besoin de demander un délai supplémentaire à cette fin ;
Attendu que concernant le projet de plan social, il a été joint à la convocation du Comité d'Entreprise pour la réunion du 22 mai 2001 à l'issue de laquelle le Cabinet LEGRAND FIDUCIAIRE a été mandaté par le Comité d'Entreprise ; qu'une seconde réunion a été tenue le 22 juin 2001 au cours de laquelle l'expert comptable désigné a présenté son rapport ; que comme rappelé par le Tribunal, trois autres réunions ont été organisées le 10 juillet 2001, le 24 juillet 2001 en présence de l'expert comptable et le 26 novembre 2001 après réception des observations de l'Inspecteur du Travail ; qu'au total 8 réunions en huit mois ont été tenues avec le Comité d'Entreprise dans le cadre de la modification de l'organisation du personnel d'encadrement et concomitamment dans celui du plan social ;
Attendu que la Cour adopte les motifs complets, précis et pertinents du Tribunal concernant le respect de l'obligation de consultation et la réalité comme la loyauté des informations données par la Direction au Comité d'Entreprise, les réponses motivées apportées aux interrogations essentielles, la présentation du projet avec documents explicatifs le 15 mars 2001 et la reprise de ces documents dans la note du 14 juin 2001 ; que le Tribunal a encore pertinemment relevé que l'expert comptable désigné par le Comité avait lui-même rappelé en préambule de son rapport qu'il avait reçu de la Direction l'ensemble des éléments d'ordre économique, financier et social nécessaires à l'appréciation du projet ; que le défaut d'approbation par les membres du Comité d'Entreprise des procès-verbaux de réunion établis par leur Secrétaire Général comme leur refus de donner un avis ne caractérisent pas l'inobservation par la Direction des obligations légales d'information et de consultation dont le respect est démontré par les pièces produites aux débats ; que la demande de nullité de la restructuration et du plan social pour défaut d'information et de consultation a à bon droit été rejetée ;
- Sur les motifs à l'origine du plan social
Attendu que le Comité d'Entreprise soutient que la Société ALDI a entendu contourner les dispositions impératives de la convention collective en créant artificiellement une nouvelle catégorie de cadres, les responsables de magasins, et que cette fraude écarte toutes considérations économiques à l'origine du projet de réorganisation ;
Attendu que le projet de la Société ALDI ne comportait aucune suppression d'emploi ; que le contrôle du motif économique s'opère le cas échéant dans le cadre de la contestation d'un licenciement prononcé de ce chef, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ; que le contrôle du juge en cas de mise en oeuvre d'un plan social ne s'étend ni à la vérification ni à l'appréciation des motifs des licenciements envisagés ;
Attendu que la fraude à la loi n'est aucunement caractérisée ; que le projet de modification du statut des chefs de magasin et des contrats de travail a été ouvertement présenté par la société et discuté avec le Comité d'Entreprise ; que les mesures envisagées concernant la promotion au statut de cadre de ce personnel accompagnées d'augmentation de rémunération et d'horaires ont été clairement présentées comme correspondant à une nécessité économique au regard de la compétitivité de l'entreprise dans l'hypothèse d'une obligation de partager entre plusieurs salariés la responsabilité de chaque magasin en conséquence de la réduction du temps de travail à 35 heures ; qu'elles s'inscrivaient dans la recherche d'un statut régi par d'autres dispositions conventionnelles, conforme à la loi AUBRY II sur le temps de travail pour prendre en compte les responsabilités et contingences d'un responsable de magasin en proposant le statut que la Direction estimait adapté ; qu'il n'y a donc pas eu manoeuvres ni volonté de fraude à la loi ;
- Sur la notion de cadre autonome
Attendu que la nouvelle fonction de responsable de magasin définie par la Direction de la Société ALDI MARCHE correspond au statut de cadre régi par l'article 8 paragraphe 3 de l'avenant du 14 avril 2000 à la convention collective nationale du commerce à prédominance alimentaire rédigé en ces termes :
"Un forfait en heure sur l'année pourra être mis en oeuvre avec les salariés ayant la qualité de cadre, affectés à des fonctions techniques, administratives ou commerciales, qui ne sont pas occupés selon l'horaire collectif applicable au sein du service, de l'équipe dont ils relèvent et qui pour l'accomplissement de l'horaire de travail auquel ils sont soumis disposent en application de leur contrat de travail d'une certaine autonomie définie par la liberté qui leur est reconnue dans l'organisation de leur emploi du temps par rapport aux horaires de fonctionnement des équipes ou services ou des équipements auxquels ils sont affectés, de telle sorte que leur horaire de travail effectif ne puisse être déterminé qu'a posteriori."
Attendu que le Tribunal a parfaitement analysé ces dispositions en mettant en exergue le critère essentiel de l'autonomie pour apprécier si les cadres concernés relèvent de cet article, ainsi que la teneur de la note de service de la direction de la société ALDI en date du 28 novembre 2001 applicable aux seuls responsables de magasin et déterminant leurs horaires sans aucune autonomie par rapport aux horaires des équipes avec lesquelles ils travaillent ;
Attendu qu'en effet, cette note dispose que :
-" l'horaire du responsable du magasin est fixé comme suit :
- lundi-vendredi 8H30 - 12H15 / 14H - 19H15
- samedi 8H30 - 19H30"
- cet horaire intègre une pause de 20 minutes le matin et de 25 minutes l'après-midi ainsi qu'une pause de une heure et quinze minutes le samedi à l'heure du déjeuner - les pauses sont à prendre par le responsable magasin sans sa propre responsabilité,
- cet horaire s'applique sur 5 jours travaillés par semaine,
- le responsable de magasin inscrira sur le suivi des horaires sa durée quotidienne de travail,
- les salariés concernés peuvent d'autre part, afin d'optimiser la gestion de leur magasin, être amenés à adapter ces horaires dans les cas suivants :
. arrivé du camion ALDI, livraisons directes ou de surgelés, en dehors de ces horaires,
. inventaire,
. déplacement en dehors des heures de travail en cas d'alarme,
. autres cas exceptionnels
- dans tous les cas, le salarié portera sur son "suivi des horaires", le dépassement réalisé, récupérera le temps réalisé et indiquera sur la même liste les périodes de récupération prévues - la récupération se fera dans le cadre de la bonne organisation du travail du magasin ;
Attendu que la Société ALDI procède par voie d'affirmations et d'interprétation personnelles pour soutenir qu'existait pour ces responsables de magasin une possibilité de gestion personnelle du temps de travail alors que les termes de cette note sont dénués d'ambiguïté, que les seules possibilités d'adaptation aux horaires qui y sont fixés et correspondant aux heures d'ouverture du magasin, sont réservées aux cas de livraisons en dehors des horaires, d'inventaire, de déplacement en cas d'alarme et à "d'autres cas exceptionnels", les heures accomplies pour les besoins de la gestion du magasin en dehors des heures d'ouverture faisant l'objet d'une récupération ;
Attendu que les revendications présentées au plan national et d'ailleurs postérieurement à l'application du nouveau statut d'une classification supérieure ne justifient pas les contraintes horaires imposées par la Direction incompatibles avec une véritable liberté dans l'organisation de leur emploi du temps pour les responsables de magasin qui ne disposaient sur ce plan d'aucune autonomie et ne pouvaient donc se voir appliquer un forfait en heures sur l'année ;
Attendu que par une nouvelle note de service du 8 août 2002, il est prévu que le responsable du magasin organisera sous sa propre responsabilité son emploi du temps afin d'assurer le bon fonctionnement du magasin ; que la Société ALDI se prévaut de cette note pour conclure à une confirmation de la décision déférée seulement pour la période antérieure et subsidiairement seulement pour celle antérieure à la loi du 17 janvier 2003 ayant entraîné une modification de la définition des cadres intermédiaires ;
Attendu cependant que l'appréciation de la conformité de la décision de restructuration avec modification des contrats de travail, aux dispositions conventionnelles autorisant le régime dérogatoire du forfait en heures sur l'année réservé aux salariés ayant la qualité de cadre disposant d'une liberté dans l'organisation de leur emploi du temps par rapport aux équipes ou services auxquels ils sont affectés, est fonction des conditions effectives d'emploi à la date de la décision de restructuration auquel était jointe la note de service fixant les horaires des responsables de magasin ; que la définition de ce poste avec l'élargissement des horaires calculés en forfait annuel constitue le fondement de cette réorganisation décidée par la Société ALDI et du plan social qui en est l'accessoire puisque lié aux modifications des contrats de travail subséquentes susceptibles de déboucher sur des licenciements en cas de refus des salariés ; que la non conformité de ces mesures à la durée légale du travail et à l'article 8-3 de la convention collective régissant les conditions d'application du forfait en heures sur l'année interdisait leur mise en oeuvre pourtant opérée en 2001 et début 2002 avec quelques licenciements ;
Attendu par ailleurs qu'il résulte des pièces produites et explications écrites exposées aux représentants du personnel par la Direction de la Société ALDI, que celle-ci a toujours exigé en réalité que les responsables de magasin soient présents pendant les heures d'ouverture, sans dissociation de l'horaire du responsable de celui de l'ouverture du magasin, ce point étant décrit comme "essentiel" ; que ce sont les dispositions de la convention collective intégrant l'article 8-3 de l'avenant no80 qui, conformément à l'article L 212-15-3 du Code du Travail dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la loi du 17 janvier 2003, ladite rédaction étant applicable aux faits de la cause, définissaient les catégories de salariés cadres pouvant être soumis à un forfait en heures sur l'année sous condition d'impossibilité objective de prédétermination de la durée de leur temps de travail du fait de la nature des responsabilités exercées et du degré d'autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps ;
Attendu que la loi du 17 janvier 2003 ne peut être appliquée à une réorganisation décidée et mise en oeuvre antérieurement, en 2001 et début 2002, observation étant d'ailleurs faite que les dispositions de la convention collective intégrant l'article 8-3 susvisé et soumettant l'application du forfait annuel à des conditions effectives de liberté d'organisation de l'emploi du temps et d'impossibilité de prédéterminer l'horaire de travail sont restées en vigueur et sont plus favorables aux salariés puisque restreignant les conditions du forfait annuel en heures dérogatoire aux dispositions générales sur la durée du travail;
Attendu que le jugement entrepris sera donc confirmé dans toutes ses dispositions ;
Attendu que l'équité justifie d'allouer au Comité d'Entreprise une somme supplémentaire de 1.600A par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Attendu que la Société ALDI MARCHE succombe et supportera les dépens ;
PAR CES MOTIFS,
LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,
Dit l'appel principal de la Société ALDI MARCHE et l'appel incident du Comité d'Entreprise recevables en la forme ;
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant ;
Rejette les demandes de la Société ALDI ;
Condamne la Société ALDI MARCHE à payer au Comité d'Entreprise des magasins ALDI MARCHE la somme supplémentaire de 1.600A en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
La condamne aux dépens qui seront distraits au profit de la SCP FONTAINE-MACALUSO-JULLIEN, avoués, sur ses affirmations de droit ;
Arrêt signé par Monsieur BOUYSSIC, Président, et par Madame VILLALBA, Greffier.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,