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28/11/2006 | FRANCE | N°04/02504

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 28 novembre 2006, 04/02504


ARRÊT NoR.G. : 04/02504 CJ/CN TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE CARPENTRAS 13 avril 2004 X... C/Y... COUR D'APPEL DE NIMESCHAMBRE CIVILE1ère Chambre AARRÊT DU 28 NOVEMBRE 2006APPELANTS :Monsieur Robert X... né le 29 Mai 1932 à GROSBOVS Quartier St Martin 84570 MORMOIRON représenté par la SCP FONTAINE-MACALUSO JULLIEN avoués à la Courassisté de Me Marie-Suzy PASCAL-PONS MERMET, avocat au barreau de CARPENTRAS Monsieur Bruno X... né le 28 Juillet 1959 IXELLES (BELGIQUE) ... 1970 WEZEMBEEK OPPEM représenté par la SCP FONTAINE-MACALUSO JULLIEN, avoués à la Cour assisté de Me Marie-Suz

y PASCAL-PONS MERMET, avocat au barreau d CARPENTRAS INTIME :Mo...

ARRÊT NoR.G. : 04/02504 CJ/CN TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE CARPENTRAS 13 avril 2004 X... C/Y... COUR D'APPEL DE NIMESCHAMBRE CIVILE1ère Chambre AARRÊT DU 28 NOVEMBRE 2006APPELANTS :Monsieur Robert X... né le 29 Mai 1932 à GROSBOVS Quartier St Martin 84570 MORMOIRON représenté par la SCP FONTAINE-MACALUSO JULLIEN avoués à la Courassisté de Me Marie-Suzy PASCAL-PONS MERMET, avocat au barreau de CARPENTRAS Monsieur Bruno X... né le 28 Juillet 1959 IXELLES (BELGIQUE) ... 1970 WEZEMBEEK OPPEM représenté par la SCP FONTAINE-MACALUSO JULLIEN, avoués à la Cour assisté de Me Marie-Suzy PASCAL-PONS MERMET, avocat au barreau d CARPENTRAS INTIME :Monsieur Gabriel Y... né le 20 Août 1922 à MEUDON (92) ... 84570 MORMOIRON représenté par la SC CURAT- JARRICOT, avoués à la Cour assisté de la SCP PENARD OOSTERLYNCK, avocats au barreau de CARPENTRAS ORDONNANCE DE CLÈTUR rendue le 08 Septembre 2006 COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :M. Pierre BOUYSSIC, Président, et Mme Christine JEAN, Conseiller, ont entendu les plaidoiries en application de l'article 786 du Nouveau Code de Procédure Civile, sans opposition des avocats, et en ont rendu compte à la Cour lors de son délibéré.COMPOSITION DE LA COUR DU DÉLIBÉRÉ :M. Pierre BOUYSSIC, Président Madame Christine JEAN, Conseiller M. Jean Claude DJIKNAVORIAN, Conseiller, GREFFIER :Mme Véronique VILLALBA, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision.DÉBATS :à l'audience publique du 26 Septembre 2006, où l'affaire a été mise en délibéré au 28 Novembre 2006,Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;ARRÊT : Arrêt contradictoire, prononcé et signé par M. Pierre BOUYSSIC, Président, publiquement, le 28 Novembre 2006, date indiquée à l'issue des débats, par mise à disposition au greffe de la Cour.

***EXPOSE DES FAITS, DE LA PROCÉDURE ET DES PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Monsieur Robert X... occupe une maison sise à Mormoiron (84) appartenant à son fils Bruno depuis 1995. La villa voisine est la propriété de M. Y... qui l'a édifiée en 1985 et a acquis en 1992 la parcelle de terre contiguù à usage de jardin ;

En 1998 Monsieur Y... a, sur déclaration de travaux conforme, construit un mur de soutènement et agrandi une aire de stationnement. Le 13 janvier 2001 il a obtenu un permis de construire un garage sur cette plate-forme.

Soutenant que cette construction prive la maison par lui occupée de la vue sur le Mont Ventoux et de l'ensoleillement sur la façade Est, Monsieur Robert X... a saisi le juge des référés du Tribunal de Grande Instance de CARPENTRAS aux fins de voir ordonner une expertise. Son fils Bruno est intervenu volontairement à l'instance. Par ordonnance du 24 avril 2002 le juge des référés les a déboutés de leur demande.

Par exploit du 30 septembre 2002, Messieurs Robert et Bruno X... on fait assigner Monsieur Y... devant le Tribunal de Grande

Instance de CARPENTRAS pour obtenir paiement de la somme de 36.580 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant selon eux des troubles anormaux de voisinage causés par le garage construit par Monsieur Y... et la condamnation de ce dernier sous astreinte de 152 euros par jour de retard à refaire le mur fissuré et à reprendre les désordres causés par les infiltrations d'eau. Ils demandaient en outre la somme de 15.250 euros au titre du préjudice moral subi par Monsieur X... et celle de 2.286,74 ç en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Par jugement du 13 avril 2001, le Tribunal de Grande Instance de CARPENTRAS a dit la demande recevable mais en a débouté les consorts X.... Monsieur Y... a été débouté de ses demandes reconventionnelles. Les consorts X... ont été condamnés aux dépens.

Ces derniers ont régulièrement relevé appel de cette décision.

Pour l'exposé du détail des prétentions et moyens des parties devant la Cour, il est expressément fait référence à leurs conclusions récapitulatives signifiées le 4 février 2005 pour Monsieur Y... et le 31 août 2005 pour Messieurs Robert et Bruno X....

Les appelants demandent à la Cour d'infirmer la décision entreprise au visa des articles 544 et 1382 du Code Civil et de condamner Monsieur Y... à leur payer les sommes de :- 36.580 ç à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du Code Civil- 15.250 ç au titre du préjudice moral subi par M. X... Robert- 2. 286,74 ç sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile- à refaire le mur fissuré ainsi que la réalisation de travaux de réfection des désordres suite aux infiltrations d'eau sous astreinte de 152 ç par jour de retard à compter de la décision à intervenir.

Ils soutiennent en substance que :- le trouble causé par la hauteur

de la construction qui obture la vue de plusieurs pièces et limite l'ensoleillement est anormal,- Monsieur Z..., expert en construction, a constaté que le garage litigieux n'était pas attenant à l'habitation du lot no 3 concerné, qu'il était implanté en dehors de la zone constructible de ce lot et en mitoyenneté avec la parcelle de Monsieur X..., et que ce garage accolé à la façade de la maison de ce dernier avec une avancée gênante, prive cette maison du plein ensoleillement levant et de la vue sur le Mont Ventoux,- le constat d'huissier et la photographie confirment la réalité de la situation et du préjudice,- le règlement du lotissement ne permet pas de construction mitoyenne sur le lot no 3 de Monsieur Y... qui pouvait édifier son garage sur une autre partie de son terrain,- le conseil de M. Y... a indiqué par courrier de 2001 que celui-ci était prêt à diminuer la hauteur du pignon et du mur de 10 cm, à reculer le mur Sud du garage par rapport à la limite, et même à réduire la hauteur de l'aire de stationnement et à déplacer l'emplacement du garage vers le Nord sous condition d'un participation de M. X... à hauteur de 50 % des frais,- Monsieur Y... a donc reconnu l'existence de nuisances particulièrement importantes résultant, pour son voisin de la construction projetée,- le garage aurait pu être réalisé en évitant toute gêne,- la construction crée un préjudice certain et important,- l'ensoleillement d'une partie de la maison est considérablement diminué par le balayage de l'ombre du pignon de la construction litigieuse,- il en résulte une perte de l'intégralité de la qualité de leur bien.- le lotissement a un caractère résidentiel,- ils ont désormais devant le bureau un mur de 6 mètres de haut,- Monsieur Y... a volontairement décidé de construire le garage créant un préjudice certain pour eux,- cette construction ne semble pas avoir été réalisée dans les règles de l'art, ce qui entraîne des

fissurations et un danger certain,- leur maison subit une perte de valeur estimée par agence immobilière à 20 %,- M. Robert X... est sculpteur et avait choisi ce site pour la vue sur la campagne provençale et le Mont Ventoux.

Monsieur Y... conclut à la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a débouté les consorts X... de leurs demandes. Formant appel incident du chef du rejet de ses demandes reconventionnelles, il sollicite l'allocation et une sommes de 3.000 euros à titre de dommages-intérêts outre 2.000 euros en application en l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Il fait valoir pour l'essentiel que :- il n'y a pas de droit acquis à l'ensoleillement,- les constructions sont dans un zone pavillonnaire où l'édification d'un garage était prévisible,- à la place du garage il y avait des arbres et une haie de bambous qui gênaient la vue vers le Nord, Nord Est,- il a respecté les règles d'urbanisme et obtenu une autorisation régulière de construire, - il n'a pas agi avec intention de nuire,- la réalité des infiltrations n'est pas démontrée,- la procédure est abusive, les consorts X... ayant déjà été alertés en référé sur l'argumentation qui a abouti au débouté de leurs demandes.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 8 septembre 2006.MOTIFS

Attendu que si aux termes de l'article 544 du Code Civil, le droit de propriété, de valeur constitutionnelle, est le droit de jouir et de disposer de sa chose de la manière la plus absolue, sauf usage prohibé par la loi ou les règlements, l'exercice de ce droit est

limité par le principe selon lequel nul ne doit causer à la propriété d'autrui aucun dommage dépassant les inconvénients normaux du voisinage ; que la responsabilité issue de ce principe n'est pas subordonnée à la preuve d'une faute ;

Attendu qu'il y a lieu de rechercher si l'exercice du droit de propriété a généré des nuisances et si celles-ci, même en l'absence d'infraction aux règlements, n'excèdent pas les inconvénients normaux du voisinage en fonction de toutes les circonstances de temps, de lieu et de fait ;

Attendu qu'en l'espèce, Monsieur Y... a obtenu un permis de construire un garage sur une aire de stationnement précédemment réalisée avec mur de soutènement, selon déclaration des travaux ; que si la maison des consorts X... est située dans un lotissement résidentiel où des constructions nouvelles dont celle d'un garage étaient prévisibles, aucune des maison n'était mitoyenne d'une autre ;

Attendu qu'il résulte des photocopies et constats produits aux débats que :- la maison de M. X... bénéficiait avant la construction du garage d'une vue dégagée remarquable sur le Mont Ventoux malgré la présence de quelques arbres dont la plupart se situaient comme les bambous au dessous des fenêtres et de la terrasse, et ne gênaient pas la vue,- le garage d'une surface hors d'oeuvre nette de 111 m2 a été construit sur une aire de stationnement agrandie et mur de soutènement édifiés en 1998, - cette construction forme une saillie à l'arrière de la maison de Monsieur X... sur une hauteur atteignant celle de sa propre villa,- au levant, une ombre est ainsi créée sur partie de la façade et une fenêtre de la maison de Monsieur X..., et la vue sur le Mont Ventoux se trouve, sur le côté de la terrasse ainsi que des fenêtres du bureau, obstruée par le garage,- le rehaussement du mur précédemment réalisé était de 2,25 m auxquels

s'ajoute la hauteur du garage de 3,40 m à la faîtière ;

Attendu que ces pièces établissent encore que le garage litigieux pouvait être édifié sur une autre partie de la propriété de Monsieur Y... vers le Nord ou en tout cas sur une hauteur moindre avec un toit terrasse ou décaissement préalable de l'aire de stationnement dont d'édification en 1998 a fait l'objet d'une simple déclaration de travaux car alors non destinée à servir la fondation à une construction ; que Monsieur Y... a choisi de reculer au maximum le garage réalisé par la suite pour disposer ainsi d'une grande place devant les portails de sorte que tous les murs arrières de la construction sont sur le côté de la propriété voisine ; que de plus la construction est implantée en limite séparative ;

Attendu que le lotissement dont font partie les biens n'est composé que de quelques maisons (cinq selon l'appelant non contredit sur ce point) et ne se situe pas dans une ville ni dans une zone très urbanisée mais dans un village ; que la perte d'ensoleillement de certaines pièces de la maison de M. X... comme la privation de la vue dégagée sur le Mont Ventoux pour tout le côté de la terrasse et une partie de l'étage résultant de la construction du garage à la limite de séparation des deux propriétés, d'une hauteur de 6 mètres incluant le mur rehaussé, et en totale avancée sur le côté de la maison de M. X... désormais occupé par un mur aveugle, constituent des troubles anormaux du voisinage ouvrant droit à réparation, étant observé qu'avant la construction litigieuse aucune des maisons ne portait une ombre sur l'autre ni n'en obstruait la vue ;

Attendu que la dépréciation même modérée mais certaine de la construction et le préjudice liés à la perte d'agrément, seront indemnisées par l'allocation d'une somme de 6.000 euros à Messieurs X... ;Que le préjudice moral autre que celui lié à la perte d'agrément n'est pas caractérisé ;

Attendu que les infiltrations résultant de la construction du garage ne sont pas avérées ; que comme pertinemment relevé par le Tribunal, le rapport de Monsieur Z... évoque de simples risques " à craindre "; que le caractère infiltrant ou dangereux des fissures n'est pas démontré ;

Attendu que les demandes formées de ce chef par Messieurs X... ont à juste titre été rejetées ;

Attendu que les appelants obtiennent gain de cause pour partie de leurs prétentions ; qu'il n'y a pas abus de droit ; que le rejet de la demande reconventionnelle en dommages-intérêts sera confirmé ;

Attendu que l'équité justifie d'allouer aux appelants la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Attendu que les dépens seront supportés par l'intimé qui succombe ;

PAR CES MOTIFS,

LA COUR , statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,

Dit l'appel régulier et recevable en la forme,

Réforme partiellement le jugement déféré,

Condamne Monsieur Y... à payer à Messieurs Robert et Bruno X... la somme de 6.000 euros en réparation des troubles anormaux du voisinage générés par la construction d'un garage,

Rejette le surplus de la demande en dommages-intérêts,

Dit le préjudice moral de Monsieur X... non caractérisé,

Confirme le débouté des demandes de Monsieur X... en réparation de désordres et en réfection du mur, ainsi que le rejet du demandes reconventionnelles formées par Monsieur Y...,

Condamne Monsieur Y... à payer à Messieurs X... la somme de

1.000 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Le condamne aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers étant distraits au profit de la SCP FONTAINE, MACALUSO-JULLIEN, avoués sur leurs affirmation de droit.

Arrêt signé par Monsieur. BOUYSSIC, Président et par Mme VILLALBA, Greffier.

LE GREFFIER,

LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Numéro d'arrêt : 04/02504
Date de la décision : 28/11/2006
Sens de l'arrêt : Autre

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2006-11-28;04.02504 ?
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