ARRÊT No R.G : 03/04001 CB/CM TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NIMES 26 mai 2003 X... C/ Y...
Z...
A... COUR D'APPEL DE NIMES CHAMBRE CIVILE 1ère Chambre B ARRÊT DU 20 JUIN 2006 APPELANT : Monsieur Pascal Pierre Nicolas X... né le 01 Mars 1966 à MARSEILLE (13000) ... FRANKFURT (ALLEMAGNE) représenté par la SCP GUIZARD-SERVAIS, avoués à la Cour assisté de Me ALEXIS, avocat INTIMES : Monsieur Peter Y... né le 16 Février 1964 à LONDRES (GB) ... 30700 UZÈS représenté par la SCP M. B..., avoués à la Cour assisté de Me Claude BEGUE, avocat au barreau de NIMES Maître Jacques Z... né le 26 Avril 1937 à NIMES (30000) ... 30650 ROCHEFORT DU GARD représenté par la SCP M. B..., avoués à la Cour assisté de Me Claude BEGUE, avocat au barreau de NIMES Monsieur Dominique A...
... 30700 UZÈS n'ayant pas constitué avoué, assigné à personne, ORDONNANCE DE CLÈTURE rendue le 17 Février 2006 COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS : Mme Christiane BEROUJON, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 786 du Nouveau Code de Procédure Civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré. COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : M. Didier CHALUMEAU, Président M. Emmanuel DE MONREDON, Conseiller Mme Christiane BEROUJON, Conseillère GREFFIER : Mme Sylvie BERTHIOT, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision. DÉBATS : à l'audience publique du 13 Mars 2006, où l'affaire a été mise en délibéré au 20 Juin 2006. Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel. ARRÊT : Arrêt réputé contradictoire, prononcé et signé par M. Didier CHALUMEAU, Président, publiquement, le 20 Juin 2006, date indiquée à l'issue des débats, par mise à disposition au greffe de la Cour.
[****] Selon acte du 3 juillet 1999 rédigé et conservé par Maître Z..., notaire à ROCHEFORT du GARD (30) Monsieur Y... (vendeur) et Monsieur X... (acquéreur) ont conclu un "compromis" de vente ayant pour objet divers biens immobiliers situés sur la Commune de VERFEUIL (GARD). L'acte a été passé sous les conditions suspensives d'usage parmi lesquelles obtention d'un prêt par Monsieur X...
C... était prévu une réitération de la promesse synallagmatique par acte authentique au plus tard le 15 octobre 1999. Celle-ci n'a pas eu lieu. Par acte du 18 juillet 2000 Madame A..., agent immobilier, Monsieur Y... et Monsieur Z... ont fait assigner Monsieur X... devant le Tribunal de Grande Instance de NIMES aux fins d'obtenir sa condamnation à payer : - à Monsieur Y... la somme de 50.000 F au titre du solde de la "clause pénale", - à Maître Z... la somme de 12.994,14 F et à Madame A... la somme de 84.000 F (montant de leurs honoraires perdus) sur le fondement de l'article 1382 du Code Civil. Par jugement du 26 mai 2003 le Tribunal a fait droit aux prétentions de Monsieur Y... et de Maître Z... et rejeté les prétentions de Madame A... Monsieur X... a relevé appel du jugement par acte du 10 octobre 2003. MOTIFS de l'ARRÊT I/ - Sur l'incident La clôture a été fixée au 17 février 2006 en l'état de : - conclusions X... 6 février 2004 et 16 février 2006, - conclusions GRIFFITHS-CHERENCE 29 juin 2004, - assignation de Madame A... signifiée à personne le 12 août 2004, intimée, non constituée. Le 16 février 2006 Monsieur X... a fait sommation aux intimés constitués (Y... et Z...) de lui communiquer la pièce No 1 figurant au bordereau annexé à leurs conclusions précitées du 29 juin 2004. Le 1er mars 2006 l'appelant a encore fait sommation
à ces intimés de lui communiquer les pièces No 2 à 6 figurant au bordereau annexé à ces mêmes conclusions. Il a été déféré à la sommation après que les intimés aient signifié des "conclusions récapitulatives" le 28 février 2006. Monsieur X... a répondu à ces conclusions par un jeu de "conclusions récapitulatives No 2" signifiées le 7 mars 2006. La signification par les parties de conclusions récapitulatives postérieurement à la clôture a été rendue nécessaire par la communication, sur sommation faite par l'appelant, de pièces visées par les intimés dans leurs conclusions du 29 juin 2004, pièces figurant au bordereau annexé à ces conclusions. Monsieur X... qui a conclu la veille de la clôture puis a exigé la communication de ces pièces après la clôture ne peut demander qu'elles soient écartées des débats et ne le demande d'ailleurs pas. Il est d'autant moins fondé à demander le rejet des conclusions signifiées le 28 février 2006 par les intimés qu'il a conclu en réponse le 7 mars 2006 sans soulever d'incident. Il y a lieu, au vu de ces éléments, de faire droit à la demande de révocation de l'ordonnance de clôture présentée par les intimés et de fixer une nouvelle clôture au jour de l'audience pour l'affaire être jugée sur les conclusions signifiées le 28 février 2006 par Messieurs Y... et Z... et le 7 mars 2006 par Monsieur X... et au vu des pièces énumérées aux bordereaux de ces conclusions, dont les parties ont eu connaissance en temps utile pour les discuter. II/ - Sur le fond Au soutien de son appel Monsieur X... invoque une série de moyens : [* A titre principal il soutient que le compromis de vente n'est pas devenu "caduc" du fait de l'absence de réalisation de la condition suspensive relative à l'obtention de son prêt, mais qu'il a été prorogé d'un commun accord et que seul le refus du vendeur a finalement empêché la réitération de l'acte. *] Subsidiairement dans l'hypothèse où la Cour retiendrait la caducité du compromis, il
soutient qu'il ne peut se voir appliquer la clause de dédit, la défaillance de la condition suspensive n'étant pas de son fait et exige la restitution de son acompte, avec intérêts. * Enfin, et en tout état de cause, il sollicite la condamnation de Maître Z... (qui devient Monsieur Y... dans le dispositif de ses conclusions) à lui payer des dommages-intérêts pour manquement à son devoir de conseil. 1o) - Sur les deux premiers moyens relatifs à la "caducité" du "compromis" de vente du 3 juillet 1999 Le prix stipulé dans l'acte était de 1.400.000 F payable à hauteur de 1 million de francs au jour de l'acte authentique, 200.000 F 18 mois plus tard et le solde 30 mois après la date d'achat. Monsieur X... déclarait financer l'acquisition par recours à un prêt de 1 million de francs. Il s'engageait à déposer une ou plusieurs demandes de crédit au plus tard le 12 juillet 1999, à justifier que son dossier de prêt était complet au plus tard le 31 juillet 1999 et il était stipulé que le prêt devait "être accordé au plus tard le 15 septembre 1999". L'acte contenait une "clause de caducité" ainsi libellée : "A défaut de réalisation d'une seule des conditions suspensives ci-dessus dans les délais également précisés ci-dessus, les présentes seront caduques sans qu'il soit besoin d'aucune mise en demeure ni formalité judiciaire ; l'acquéreur pourra recouvrer son "dépôt de garantie" contre justification du défaut d'exécution d'une seule des dites conditions, sauf si la ou les conditions ne sont pas réalisées du chef de l'acquéreur" ; Un acompte de 20.000 F sur "dédit éventuel" (de 70.000 F) a été remis par Monsieur X... à Maître Z... à la signature du compromis.s. Il était également stipulé à titre de "clause pénale" que si les conditions suspensives (autres que celles relatives à la réitération de la vente par acte authentique au plus tard le 15 octobre 1999) étaient réalisées et que l'acquéreur refusait néanmoins "de payer le prix et les frais et de signer
l'acte, cette somme serait acquise au vendeur à titre de dommages-intérêts". Monsieur X... a déposé une demande de prêt immobilier d'un montant de 1.750.000 F auprès du CRÉDIT LYONNAIS le 3 juillet 1999, la BANQUE a exprimé son accord de principe par courrier du 20 juillet 1999 mais à la date du 23 octobre 1999 elle a confirmé à l'emprunteur qu'elle ne pouvait lui adresser l'offre de prêt en l'état incomplet du dossier et en l'absence d'un document reconnaissant sa qualité de créancier hypothécaire de premier rang. Cette dernière exigence se heurtant à la prétention de Monsieur Y... qui avait consenti à Monsieur X... un crédit vendeur, celui-ci n'a pas donné suite. Les relations vendeur/acquéreur n'ont pas pour autant été rompues dans la mesure où Monsieur X... a pu obtenir du CRÉDIT AGRICOLE, dès le 30 septembre 1999, deux offres de prêt, l'une d'un montant de 1.240.000 F avec privilège du prêteur de deniers et l'autre de 300.000 F sans affectation hypothécaire, le capital prêté permettant de désintéresser intégralement le vendeur dès signature de l'acte, après renonciation au crédit-vendeur par l'acquéreur. Cette volonté commune des parties de proroger les effets du compromis ressort suffisamment du courrier adressé par Maître Z... le 8 novembre 1999 à Monsieur X... pour le presser de signer l'acte de vente et du comportement de ce dernier qui n'a pas réclamé la restitution de son "dépôt de garantie" en invoquant la non réalisation de la condition suspensive relative à l'octroi de son prêt, comme le lui permettait le "compromis". Cette prorogation pourtant ne pouvait dans la commune intention des parties signifier un report sine die. Le courrier de relance adressé par Maître Z... à Monsieur X... le 8 novembre 1999, c'est à dire trois semaines après la date ultime prévue pour la réitération de l'acte, est à cet égard sans ambigu'té. Ce courrier, pourtant, n'a pas conduit Monsieur X... à se montrer plus actif. Du moins les
diligences qu'il a entreprises n'avaient elles nullement pour objectif de hâter la réalisation de la vente. Il déclare n'avoir reçu les offres de prêt du CRÉDIT AGRICOLE que le 29 octobre 1999, soit un mois après leur expédition par la Banque et les avoir retournées pour acceptation le 11 novembre 1999. C'est à dire après expiration du délai de dix jours imposé par les dispositions du Code de la Consommation destinées à protéger les emprunteurs en matière de crédit immobilier (loi No 79-596 du 13 juillet 1979), mais n'en justifie par aucun élément probant se contentant de verser aux débats, outre divers extraits de presse sur les mouvements sociaux ayant affecté le fonctionnement de la Poste à l'automne 1999, un bordereau d'acceptation des offres de prêt du CRÉDIT AGRICOLE qu'il a daté du 11 novembre 1999 avant de le signer. Ces documents sont de peu de poids face au courrier adressé le 23 février 2000 par le CRÉDIT AGRICOLE, non à Maître Z... mais à Maître D..., notaire à UZÈS fraîchement mandaté par Monsieur X.... La banque avise le nouveau notaire de Monsieur X... qu'elle a reçu "ce jour, l'acceptation de l'offre de crédit". Le "compromis" stipule que pour l'application de la condition suspensive relative aux prêts, ceux-ci "seront considérés comme obtenus dès l'émission par l'établissement prêteur de l'offre prévue par la loi No 79 596 du 13 juillet 1979". La condition suspensive était donc accomplie en l'espèce dès le 30 septembre 1999 et le courrier de Maître Z... en date du 8 novembre 1999 constituait une invitation explicite à réitérer l'acte. Ce sont les atermoiements de Monsieur X... qui ont poussé Monsieur Y... à chercher un autre acquéreur, comme l'établissent non seulement le courrier adressé le 3 février 2000 par Maître Z... à Maître D... et le courrier adressé le 8 mars 2000 par Monsieur Y... à Monsieur X..., mais aussi le courrier précité adressé le 23 février 2000 par le CRÉDIT AGRICOLE à Maître D.... Le
comportement de l'acquéreur s'assimile à un refus de signer l'acte dans le délai conventionnel ou dans un délai raisonnable et c'est en faisant une exacte application du contrat que le Tribunal a jugé que le "dédit"(indemnité d'immobilisation) devait demeurer acquis au vendeur par application de la clause contractuelle de dédit. 2o ) - Sur la responsabilité du notaire
Maître Z... a accompli ses diligences en pure perte. Il y a lieu de confirmer le jugement qui a condamné Monsieur X... à lui régler une somme de 12.994 F correspondant à la moitié des honoraires auxquels il aurait pu prétendre si son mandant avait déféré à l'invitation qui lui était faite dès le 8 novembre 1999 de réitérer l'acte de vente dans les plus brefs délais. La demande de dommages-intérêts formée à l'encontre de Maître Z... par Monsieur X... l'est à titre reconventionnel. Elle est donc recevable. Elle n'est pas pour autant fondée. Le notaire n'a commis aucune faute en insérant dans le "compromis" litigieux une clause de paiement différé, mais a au contraire agi dans les intérêts et selon la volonté de l'acquéreur. Si le crédit-vendeur a pu compliquer les relations avec les banques, les difficultés ainsi créées n'avaient rien d'insurmontable, la décision de Monsieur X... (qui disposait grâce aux prêts d'une somme supérieure au prix de vente) de renoncer à ce crédit ayant d'ailleurs permis par la suite de les résoudre en un trait de temps. Enfin il ne peut être reproché à Maître Z... de n'avoir pas transmis à Maître D... les pièces nécessaires à la réitération de l'acte de vente, alors qu'il a reçu la demande de son confrère D... près de deux mois après avoir relancé Monsieur X... pour cette réitération et qu'il a seulement subordonné son concours au paiement préalable de ses honoraires (cf. courrier Z... /
SEVCIK du 3 février 2000). C... y a lieu, au vu de l'ensemble de ces éléments, de confirmer le jugement. PAR CES MOTIFS, LA COUR, après en avoir délibéré conformément à la loi, Statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, en matière civile et en dernier ressort, Sur l'incident, Révoque l'ordonnance de clôture et fixe une nouvelle clôture à la date de l'audience, Sur le fond, Confirme en ses entières dispositions le jugement entrepris, Y ajoutant du fait de l'appel, Condamne Monsieur X... à payer à Monsieur Y... et à Maître Z... ensemble une indemnité de 1.500 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, Rejette toutes demandes plus amples ou contraires des parties, Condamne l'appelant aux entiers dépens et pour ceux d'appel, autorise la SCP B..., avoués, à les recouvrer conformément à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile, Arrêt signé par M. CHALUMEAU, Président et par Mme BERTHIOT, greffier présent lors du prononcé. LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,