COUR D'APPEL DE NIMES CHAMBRE CIVILE (lère Chambre B) ARRÊT DU 09 DÉCEMBRE 2003 APPELANTE: MINISTÈRE PUBLIC près la COUR D'APPEL de NIMES représenté par Monsieur X..., Avocat Général INTIME: Monsieur Abdelkader Y... né le 23 Décembre 1936 à MOSTAGANEM (ALGÉRIE) 57 rue de la Paix BP 46 84500 BOLLENE représenté par la SCP PONHES-RICHAUD-VAJOU, avoués à la Cour assisté de Me Guy MACARY, avocat au barreau de CARPENTRAS Statuant en matière de nationalité, COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ: M. Didier CHALUMEAU, Président, M. Emmanuel DE MONREDON, Conseiller, M. Patrice COURSOL, Conseiller, ont entendu les plaidoiries et en ont ensuite délibéré conformément à la loi. GREFFIER Madame Véronique Z..., Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision. MINISTÈRE PUBLIC:
Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée et visée le 15 octobre 2003. DÉBATS: à l'audience publique du 28 Octobre 2003, où l'affaire a été mise en délibéré au 09 Décembre 2003. ARRET: Arrêt contradictoire, prononcé et signé par M. Didier CHALUMEAU, Président, à l'audience publique du 09 Décembre 2003, date indiquée à l'issue des débats. FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES Monsieur Abdelkader Y... a assigné Madame le Garde des Sceaux par exploit du 28 avril 1998 devant le Tribunal de Grande Instance de CARPENTRAS, afin qu'il soit dit qu'il était de plein droit de nationalité française. En raison de l'incompétence du Tribunal de CARPENTRAS, le Tribunal de Grande Instance d'AVIGNON seul compétent dans le VAUCLUSE pour connaître des questions de nationalité, a dit que Monsieur Abdelkader Y... bénéficie de plein droit de la nationalité française et ce par jugement du 20 novembre 2001. Le Ministère public a régulièrement interjeté appel de cette décision par déclaration du 24 décembre 2001. Dans le dernier état de ses conclusions du 16 octobre 2003, le Ministère Public conclut à la réformation du jugement du 20 novembre 2001. Le Ministère Public soutient, en effet,
que la délivrance d'un certificat de nationalité française par le juge d'instance ne permet pas d'affirmer que le bénéficiaire de ce certificat est de nationalité française. Il considère, par ai Heurs, que le renversement de la charge de la preuve prévu par les dispositions de l'article 30 alinéa 2 du Code civil n'a pas à être opéré en l'espèce. Le Ministère Public relève en ce sens que le certificat de nationalité a été délivré à tort en ce qu'il n'a pas pris en considération les conséquences de l'indépendance de l'ALGÉRlE sur l'attribution de la nationalité alors que les Français musulmans originaires d'ALGÉRIE devaient avoir souscrit avant le 21 mars 1967 une déclaration récognitive pour conserver la nationalité française. Il relève, par ailleurs, que l'attestation marocaine ne suffit pas à établir que le père de Monsieur Abdelkader Y... est de nationalité marocaine. Dans le dernier état de ses conclusions récapitulatives n' 2 du 1 er octobre 2003, Monsieur Abdelkader Y... conclut à la confirmation du jugement entrepris. Il soutient qu'il bénéficie de plein droit de la nationalité française car il ne bénéficie d'aucune autre nationalité, la nationalité algérienne lui étant refusée parce que son père est d'origine marocaine. Il relève, par ailleurs, que le Ministère Public ne peut s'opposer au certificat de nationalité qui lui a été délivré qu'en apporta-nt la preuve, qui lui incombe sur le fondement de l'article 30 alinéa 2 du Code civil, de l'extranéité de son père. MOTIFS L'article 1" alinéa 2 de la loi du 20 décembre 1966 impose aux français de statut civil de droit local de souscrire à une, déclaration récognitive de nationalité française avant le 21 mars 1967 pour conserver ladite nationalité Il s'agissait alors de permettre aux français de statut civil de droit local de choisir entre la nationalité française et la nationalité algérienne ; Mais, afin d'éviter des cas d'apatridie le législateur a pris un certain nombre de dispositions ; En effet, il résulte de l'article 1" alinéa
3 de la loi du 20 décembre 1966, l'article 32-3 du Code civil étant inapplicable en l'espèce car l'article 1" de la loi du 20 décembre 1966, spécialement réservé aux conséquences sur la nationalité de l'indépendance de l'Algérie, n'a pas été abrogé par la loi du 9 janvier 1973, que "les personnes de statut civil de droit local originaires d'Algérie conservent de plein droit la nationalité française si une autre nationalité ne leur a pas été conférée postérieurement au 3juillet 1962" ; Monsieur Abdelkader A... étant né en Algérie de mère algérienne, il fait bien partie de la catégorie des "personnes de droit civil local originaires d'Algérie" ; Reste donc à savoir, pour que Monsieur Abdelkader Y... bénéficie de la nationalité française de plein droit, et qu'on ne puisse donc lui reprocher de ne pas avoir souscrit à une déclaration récognitive de nationalité française avant le 21 mars 1967, si "aucune autre nationalité ne lui a été conférée postérieurement au 3 juillet 1962" ; L'ordonnance n' 70-86 du 15 décembre 1970 portant Code de la nationalité algérienne, produite aux débats, dispose en substance (articles 6 et 7 de l'ordonnance) qu'est de nationalité algérienne par filiation, l'enfant né d'un père algérien et l'enfant né d'une mère algérienne et d'un apatride ou d'un père inconnu, alors que la nationalité algérienne par la naissance en Algérie est conférée à l'enfant né en Algérie de parents inconnus et l'enfant né en Algérie d'une mère algérienne et d'un père étranger, lui-même né en Algérie ; Monsieur Abdelkader Y... produit un document marocain attestant de ce que Haddou Y..., son père (qualité non contestée et attestée par l'acte de naissance de l'intimé produit aux débats) est né au MAROC; Peu important sur ce point la date de naissance exacte de Monsieur Haddou Y..., puisque sa seule naissance au MAROC, permet de conclure que Monsieur Abdelkader Y... ne rentre pas dans les conditions d'attribution de la nationalité algérienne que ce soit par
filiation ou par naissance ; Encore faut-il qu'il ne se soit pas vu attribuer une autre nationalité postérieurement au 3 juillet 1962, notamment la nationalité marocaine Le Ministère Public ayant la charge de la preuve sur le fondement des dispositions de l'article 30 alinéa 2 du Code civil, un certificat de nationalité française ayant été délivré à Monsieur Abdelkader Y... conformément aux dispositions des articles 31 et suivants du Code civil, il lui appartenait de démontrer que Monsieur Abdelkader Y... s'était vu conférer une nationalité postérieurement à la date susvisée pour lui refuser le bénéfice des dispositions de l'article 1er alinéa 3 de la loi du 20 décembre 1966. Le Ministère Public n'ayant pas démontré que Monsieur Abdelkader Y... bénéficiait d'une autre nationalité, marocaine notamment, ce dernier remplit donc les conditions d'admission à la nationalité française de plein droit posées par l'article 1" alinéa 3 de la loi du 20 décembre 1966 ; Monsieur Abdelkader Y... bénéficie donc de plein droit de la nationalité française ; Le jugement doit, en conséquence, être confirmé ; PAR CES MOTIFS La Cour, après avoir délibéré conformément à la loi, Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort, Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ; Condamne le Trésor Publie aux dépens d'appel, dont distraction sera faite au profit de la SCP POMIES RICHAUD VAJOU, Avoué à la Cour. Arrêt signé par M. CHALUMEAU, Président et par Madame Z..., Greffier présent lors du prononcé. LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT