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28/09/2007 | FRANCE | N°06/03124

France | France, Cour d'appel de Nancy, 28 septembre 2007, 06/03124


ARRÊT No PH

DU 28 SEPTEMBRE 2007

R. G : 06 / 03124

Conseil de Prud'hommes de NANCY
732 / 2005
17 novembre 2006

COUR D'APPEL DE NANCY
CHAMBRE SOCIALE

APPELANTE :

EURL PHARMACIE D'HAROUE prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social
4 rue du Maréchal de Beauvau
54740 HAROUE
Comparante en la personne de Monsieur Stéphane X..., pharmacien
Assisté de Maître Aude BLANDIN substituant Maître Denis RATTAIRE (Avocats au Barreau de NANCY)

INTIMÉE :

Madame Eliane A...r>

...

54740 HAROUE
Comparante en personne
Assistée de Maître Vincent LOQUET (Avocat au Barreau de NANCY)



COMPOSITION DE ...

ARRÊT No PH

DU 28 SEPTEMBRE 2007

R. G : 06 / 03124

Conseil de Prud'hommes de NANCY
732 / 2005
17 novembre 2006

COUR D'APPEL DE NANCY
CHAMBRE SOCIALE

APPELANTE :

EURL PHARMACIE D'HAROUE prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social
4 rue du Maréchal de Beauvau
54740 HAROUE
Comparante en la personne de Monsieur Stéphane X..., pharmacien
Assisté de Maître Aude BLANDIN substituant Maître Denis RATTAIRE (Avocats au Barreau de NANCY)

INTIMÉE :

Madame Eliane A...

...

54740 HAROUE
Comparante en personne
Assistée de Maître Vincent LOQUET (Avocat au Barreau de NANCY)

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré,

Président de Chambre : Madame SCHMEITZKY
Conseillers : Madame MAILLARD
Madame SUDRE

Greffier présent aux débats : Mademoiselle FRESSE

DÉBATS :

En audience publique du 05 juillet 2007 ;

L'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 28 septembre 2007 ;

A l'audience du 28 septembre 2007, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

FAITS ET PROCÉDURE

Madame Eliane A..., née en 1954, a été embauchée par la Pharmacie d'Haroué, qui occupe moins de onze salariés, le 1er novembre 1987 en qualité de préparatrice au coefficient 300.

La relation de travail était soumise à la convention collective nationale de la pharmacie d'officine.

Son salaire s'élevait en dernier lieu à la somme de 1 922,99 €.

Les relations de travail se sont dégradées à partir du moment où la compagne de Monsieur X... qui a repris la pharmacie a été nommée au poste de responsable du personnel.

Madame A... a été mise en arrêt maladie le 13 mai 2005 et n'a jamais repris le travail.

Le 19 juillet 2005, elle a saisi le Conseil de Prud'hommes de Nancy d'une demande en résolution judiciaire de son contrat de travail.

Après deux visites médicales, elle a été déclarée inapte à son poste par le médecin du travail.

Elle a été licenciée pour inaptitude par courrier du 25 novembre 2005.

Elle a alors contesté son licenciement en estimant que son inaptitude n'était que le résultat du comportement de son employeur et a réclamé paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'une indemnité de préavis et des congés payés afférents, subsidiairement de dommages et intérêts pour attitude vexatoire et déloyale de l'employeur.

Par jugement du 17 novembre 2006, le Conseil de Prud'hommes a dit que le licenciement ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse, que Madame A... a fait l'objet d'une mesure vexatoire et a alloué à la salariée les sommes suivantes :

-21 000 € à titre de dommages et intérêts pour attitude vexatoire,
-3 845,98 € à titre d'indemnité de préavis,
-385 € à titre de congés payés afférents au préavis,
-650 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La Pharmacie d'Haroué a interjeté appel par lettre recommandée du 27 novembre 2006. Elle demande à la Cour d'infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau, de débouter Madame A... de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail, de la débouter de ses demandes, de la condamner à restituer les sommes perçues au titre de l'exécution provisoire et à lui payer la somme de 1 000 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La Cour se réfère aux conclusions des parties, visées par le greffier le 5 juillet 2007, dont elles ont maintenu les termes lors de l'audience.

MOTIVATION

Lorsqu'un salarié demande la résiliation de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur et que ce dernier le licencie ultérieurement pour d'autres faits survenus au cours de la poursuite du contrat, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation du contrat de travail était justifiée ; c'est seulement dans le cas contraire qu'il doit se prononcer sur le licenciement notifié par l'employeur.

-Sur la demande en résiliation judiciaire du contrat

Madame A... a saisi le Conseil de Prud'hommes d'une demande en résiliation de son contrat de travail en dénonçant le comportement de son employeur qui est d'ailleurs selon elle à l'origine de son inaptitude à reprendre son poste de travail.

Le licenciement a mis fin au contrat de travail pour des motifs distincts avant qu'il ne soit statué sur la demande de la salariée.

La survenance de cet événement ne dispense pas la Cour d'examiner le bien fondé et la gravité des manquements reprochés par la salariée à son employeur avant son licenciement, dont elle avait régulièrement saisi le Conseil de Prud'hommes, et qui pourraient justifier la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur et ce d'autant plus que la salariée soutient toujours que son inaptitude trouve son origine dans le comportement de son employeur et dans l'exécution déloyale du contrat de travail.

Madame A... soutient principalement avoir fait l'objet de reproches injustifiés sur l'exécution de son travail, de menaces et de pressions à partir du 23 mars 2005.

Il résulte du dossier que l'inventaire de la pharmacie a été fait le 20 mars 2005 en dehors des heures d'ouverture de la pharmacie, que suite à ces opérations l'employeur a, le 23 mars 2005 à 12 heures, imposé une réunion au cours de laquelle des reproches ont été formulés et des menaces de changement d'horaires et de changement de jours de repos ont été proférées par l'employeur.

Le 26 avril 2005, Madame A... a sollicité une journée de congé le 18 mai 2005 pour assister à la soutenance de thèse de Mademoiselle
E...
, fille de l'ancienne propriétaire de la pharmacie, ce qui lui a été refusé. Le même jour, Monsieur X... lui a demandé ainsi qu'à une autre salariée, Madame F..., de lui faire une attestation dans le cadre du litige prud'homal l'opposant à Madame G..., ce que les salariées ont refusé. Monsieur X... a alors proposé à Madame A... de lui donner sa journée du 18 mai 2005 à condition que cela soit « donnant-donnant », soit à condition qu'elle lui rédige son attestation.

Les pièces produites démontrent que le 10 mai 2005 Madame A... a rédigé une attestation dans laquelle elle a indiqué avoir entendu Madame G...informer l'équipe de son départ volontaire et a attesté que cette dernière était souvent absente, et qu'elle avait de bonnes relations avec Monsieur X....

Dès le lendemain, elle a écrit au Président du Conseil de Prud'hommes pour lui faire part des circonstances dans lesquelles elle a été amenée à rédiger, contre son gré, l'attestation datée du 10 mai 2005 en précisant que Monsieur X... et sa compagne Mademoiselle
H...
, qui occupait les fonctions de responsable du personnel, l'ont fait monter à l'étage, qu'ils ont pendant une heure et demie contrainte, en exerçant des menaces verbales, à établir une attestation dans laquelle elle déclarait faussement avoir entendu Madame G...dire qu'elle partait volontairement alors que ce n'était pas le cas.

Elle indique dans ce courrier avoir été menacée de licenciement, de la suppression de ses congés d'été et de la modification de ses horaires de travail.

Ces faits ont été relatés de la même manière par courrier recommandé adressé à la Pharmacie d'Haroué le 16 juin 2005 en réponse au courrier envoyé par l'employeur lui reprochant d'avoir, le 18 mai 2005, assisté en compagnie de Madame F...à la thèse de Mademoiselle E... alors qu'il s'avère que Madame A... se trouvait à cette date en arrêt maladie avec sorties autorisées.

L'attestation de Monsieur Michaël A..., fils de la salariée, relate longuement à quel point au cours du mois de juillet 2005 les relations de Madame A... et de son employeur s'étaient dégradées et témoigne de l'attitude injurieuse et désagréable de Monsieur X... et de Mademoiselle H...lorsqu'il s'est présenté pour lui remettre, pour le compte de sa mère fragilisée psychologiquement, les clés de l'établissement.

Enfin, la lettre adressée par Madame A... à son employeur le 21 juillet 2005 témoigne du désarroi éprouvé par la salariée à la suite de l'événement qui s'est produit le 10 mai 2005 et des échanges qui ont suivi et des difficultés éprouvées par Madame A..., qui avait une ancienneté de dix sept ans, qui était âgée de 51 ans et qui ne souhaitait nullement quitter son emploi.

Par ailleurs, les éléments du dossier ne permettent nullement d'établir que Madame A... a, tel que le soutient son employeur, multiplié les fautes et les actes de rébellion, qu'elle refusait l'autorité de son employeur et de Mademoiselle
H...
nommée responsable du personnel et qu'elle cherchait à nuire à la bonne marche de l'entreprise. Monsieur X... admet d'ailleurs qu'il n'a jamais pris à son encontre la moindre sanction.

Le rapport dressé par le pharmacien inspecteur le 21 juin 2005 ne permet nullement de démontrer que c'est Madame A... qui est à l'origine des erreurs relevées, à savoir traçabilité des préparations et des matières premières non assurée et la présence des gélules de Ritaline sans référence de lot et de péremption. Les erreurs dans la délivrance des médicaments et la fouille du bureau de Monsieur
X...
dont il est fait état ne sont prouvées par aucune pièce.

Il est établi que les agissements successifs de l'employeur, et notamment les pressions et menaces répétées exercées pour obtenir de la part de la salariée une attestation concernant des faits auxquels elle n'avait pas assistée, ont eu pour effet de dégrader ses conditions de travail, d'altérer sa santé et de compromettre son avenir professionnel.

Ces faits sont suffisamment graves pour justifier la résiliation du contrat de travail qui produira les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement déféré qui n'a pas statué sur la demande de résiliation du contrat de travail sera donc infirmé sur ce point.

La résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur produisant les effets d'un licenciement, Madame A... qui s'est trouvée en arrêt maladie suite au comportement de son employeur est fondée à obtenir paiement d'une indemnité de préavis qui a justement été fixée à la somme de 3 845,98 € et des congés payés afférents à cette indemnité.

Le jugement sera confirmé sur ce point pour d'autres motifs.

Madame A... est, en application des dispositions de l'article L 122-14-5 du Code du Travail, fondée à réclamer paiement de dommages et intérêts pour licenciement abusif.

Ces derniers seront, au vu de son âge, de son ancienneté, du montant de son salaire, des conditions de la rupture et de la date à laquelle Madame A... a retrouvé du travail (le 19 décembre 2005), fixés à la somme de 21 000 €.

Il n'y a pas lieu d'allouer à Madame A... de plus amples dommages et intérêts pour attitude vexatoire de son employeur, les conséquences du comportement de ce dernier étant déjà indemnisées par les dommages et intérêts pour licenciement abusif qui ont été alloués.

Le jugement déféré sera donc infirmé sur ce point.

-Sur les dépens et l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile

La Pharmacie d'Haroué qui succombe supportera les entiers dépens et ses frais irrépétibles et paiera à Madame A... la somme de 700 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile en sus du montant déjà alloué à ce titre au cours de la première instance.

PAR CES MOTIFS

La COUR,

Statuant en audience publique et par arrêt contradictoire,

INFIRME partiellement le jugement déféré.

PRONONCE la résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur.

DIT que la résiliation du contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

CONDAMNE l'EURL Pharmacie d'Haroué à payer à Madame Eliane A... la somme de 21 000 € (VINGT ET UN MILLE EUROS) à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif.

DÉBOUTE Madame Eliane A... de sa demande en dommages et intérêts pour licenciement vexatoire.

CONFIRME le jugement pour le surplus.

CONDAMNE l'EURL Pharmacie d'Haroué à payer à Madame Eliane A... la somme de 700 € (SEPT CENTS EUROS) en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

CONDAMNE l'EURL Pharmacie d'Haroué aux entiers dépens.

Ainsi prononcé à l'audience publique ou par mise à disposition au greffe du vingt huit septembre deux mil sept par Madame SCHMEITZKY, Président, assistée de Mademoiselle FRESSE, Greffier Placé présent lors du prononcé.

Et Madame le Président a signé le présent arrêt ainsi que le Greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Numéro d'arrêt : 06/03124
Date de la décision : 28/09/2007
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Nancy


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2007-09-28;06.03124 ?
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