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15/09/2006 | FRANCE | N°05/03251

France | France, Cour d'appel de Nancy, 15 septembre 2006, 05/03251


ARRÊT No PHDU 15 SEPTEMBRE 2006 R.G : 05/03251 Conseil de Prud'hommes de NANCY905/200210 décembre 2002COUR D'APPEL DE NANCYCHAMBRE SOCIALEAPPELANTE :Association CE-GEST-I prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social Parc des ExpositionsCentre de Gestion Interprofessionnel54500 VANDOEUVRE LES NANCYReprésentée par Maître Didier LANOTTE (Avocat au Barreau de NANCY) INTIMÉ :Monsieur Avilio X..., Allée Albert Camus54850 MEREVILLEComparant en personneAssisté de Maître Eric HORBER (Avocat au Barreau de NANCY)COMPOSITION DE LA COUR :Lors des débats et

du délibéré,Président de Chambre :

Madame Y... :

Monsie...

ARRÊT No PHDU 15 SEPTEMBRE 2006 R.G : 05/03251 Conseil de Prud'hommes de NANCY905/200210 décembre 2002COUR D'APPEL DE NANCYCHAMBRE SOCIALEAPPELANTE :Association CE-GEST-I prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social Parc des ExpositionsCentre de Gestion Interprofessionnel54500 VANDOEUVRE LES NANCYReprésentée par Maître Didier LANOTTE (Avocat au Barreau de NANCY) INTIMÉ :Monsieur Avilio X..., Allée Albert Camus54850 MEREVILLEComparant en personneAssisté de Maître Eric HORBER (Avocat au Barreau de NANCY)COMPOSITION DE LA COUR :Lors des débats et du délibéré,Président de Chambre :

Madame Y... :

Monsieur Z...

Madame A... présent aux débats :

Mademoiselle B... :

En audience publique du 1er juin 2006 ;

L'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 15 septembre 2006 ;

A l'audience du 15 septembre 2006, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

FAITS ET PROCÉDURE :

Monsieur C... a été engagé à compter du 1er janvier 1984 par l'association CE.GEST.I. (Centre de gestion interprofessionnel) en

qualité de directeur.

La moyenne de ses onze derniers salaires s'est élevée à 5 918,14 ç.

L'intéressé a été convoqué le 14 mars 2001 à un entretien préalable à une mesure de licenciement fixé au 14 mars suivant et mis à pied à titre conservatoire.

Il a été licencié par lettre du 29 mars suivant pour faute grave.

L'association occupait habituellement au moins onze salariés.

Contestant la légitimité de son licenciement, Monsieur C... a saisi le 17 juillet 2002 le Conseil de Prud'hommes de NANCY de demandes aux fins de rappel de salaire, indemnités de rupture, indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et dommages et intérêts pour préjudice moral.

Par jugement du 10 décembre 2002, le Conseil de Prud'hommes a retenu que le licenciement de Monsieur C... était dénué de cause réelle et sérieuse et a condamné l'association CE.GEST.I. à lui payer :

- 2 565,01ç à titre de rappel de salaire pour la mise à pied,

- 256,50 ç à titre de congés payés afférents,

- 17 754,44 ç à titre d'indemnité de préavis,

- 1 775,44 ç à titre de congés payés afférents,

- 18 332,55 ç à titre d'indemnité de licenciement,

- 72 224,51 ç à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif,

- 15 244,51ç à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

- 1 524,49 ç au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

L'association CE.GEST.I. a régulièrement interjeté appel ; elle conclut à l'infirmation du jugement et demande à la Cour de débouter Monsieur C... de l'intégralité de ses demandes, et subsidiairement de retenir que son licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse ; elle sollicite 3 000 ç au titre de l'article 700 du

Nouveau Code de Procédure Civile.

Monsieur C... conclut à la confirmation du jugement réclamant au surplus une indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, la condamnation de l'employeur au remboursement des indemnités de chômage et une indemnité de procédure de 2 000 ç.

La Cour se réfère aux conclusions des parties, visées par le greffier le 1er juin 2006, dont elles ont repris les termes à l'audience. MOTIVATION- Sur le licenciement

Monsieur C... invoque l'épuisement du pouvoir disciplinaire de l'employeur qui l'aurait sanctionné à deux reprises pour les mêmes faits en raison du caractère disciplinaire et non conservatoire de sa mise à pied du fait de sa durée limitée dans le temps. Il ressort cependant des termes de la lettre de convocation à entretien préalable que Monsieur C... est mis à pied à titre conservatoire jusqu'à décision définitive qui déroulera de l'entretien du 21 mars 2001. Il ne s'agit pas, comme le soutient à tort le salarié, d'une mesure prise pour une durée limitée en ce sens que son terme n'est pas fixé à une date déterminée dans le temps mais soumis à la décision sur le fond du licenciement prise à l'issue de la tenue de l'entretien préalable.

Le moyen tiré de l'épuisement du pouvoir disciplinaire de l'employeur ne peut en conséquence prospérer.

La lettre de licenciement énonce à l'encontre de Monsieur C... cinq griefs : harcèlement moral, harcèlement sexuel, concurrence déloyale, non-respect des obligations fiscales et comptables et désorganisation de l'entreprise qu'il convient d'examiner successivement.

S'agissant du grief de harcèlement moral, la lettre de licenciement de même que les diverses attestations fournies aux débats visent des faits non déterminés dans le temps retraçant un climat de tensions et de pressions attribué à l'attitude de Monsieur C... et dénoncé par

les salariés au sein de l'association ; ce reproche indéterminé dans le temps ne peut être retenu.

Il en est de même des reproches de harcèlement sexuel dont auraient été victimes Mesdames I... et J... au cours du mois de juillet 2000, certes dénoncés par attestations des 7 et 13 mars 2001, mais ayant abouti à un classement sans suite puis à une ordonnance de non-lieu du juge d'instruction chargé de l'affaire. Par ailleurs, les faits de harcèlement sexuel subis par Madame D... et dénoncés par Mesdames K... et L... ont été contredits par l'intéressée. Pour toutes ces raisons, ce grief ne peut davantage être retenu à l'encontre de Monsieur C....

L'association CE.GEST.I. fait en troisième lieu reproche à Monsieur C... d'avoir traité pour son compte personnel des dossiers non gérés par l'association et d'avoir ainsi manqué à son obligation de loyauté.

Monsieur C... reconnaît avoir suivi personnellement les dossiers afférents à la société Jeanne d'Arc immobilier et la société Menigoz dont il était associé sans cependant déroger à ses obligations par rapport à son employeur, à défaut de clause d'exclusivité.

Il ressort des éléments du dossier que Monsieur C... a été amené à participer à des opérations d'expertise dans le cadre d'un dossier contentieux concernant la société Jeanne d'Arc en sa qualité déclarée de comptable de l'entreprise ; il s'est vu adresser un courrier daté du 2 mars 2001 par Maître Dupont, notaire, en sa qualité attribuée d'expert comptable de la société Jeanne d'Arc, peu important le fait que le notaire ait par la suite indiqué que la qualité d'expert comptable avait été attribuée par erreur à Monsieur C... au lieu de sa qualité de directeur de l'association CE.GEST.I., ce qui n'ôte rien au manquement de l'intéressé qui en tout état de cause n'intervenait pas sur le dossier de la société Jeanne d'Arc en sa

qualité de salarié de l'association CE.GEST.I., mais en son nom personnel.

Le fait que Monsieur C... ait profité de son statut de directeur de l'association CE.GEST.I. et de l'infrastructure de cet établissement pour traiter des dossiers qui échappaient à la compétence de l'association, du fait de l'importance des chiffres d'affaires des sociétés concernées, caractérise un manquement à son obligation de loyauté vis-à-vis de son employeur, nonobstant l'absence de toute clause d'exclusivité, et est de nature à créer des confusions dans l'esprit de la clientèle de l'association sur le rôle exact tenu par Monsieur C... au sein de cet organisme.

Le grief de concurrence déloyale, au sens de comportement déloyal, de Monsieur C... à l'égard de l'association CE.GEST.I. est en conséquence constitué.

Il est reproché au salarié le non-respect par lui de règles fiscales et comptables résultant notamment de l'absence de déclaration de la taxe d'apprentissage et de la taxe professionnelle. Monsieur C... ne donne aucune explication sur ce point.

Dans son attestation, Monsieur E..., ancien adjoint de direction de Monsieur C... du 29 mai 1989 au 2 octobre 1999, date de sa démission, indique que Monsieur C... prenait la liberté et le choix personnel de ne pas établir les déclarations de taxe d'apprentissage depuis de nombreuses années ; il ajoute que l'intéressé jugeait la taxe professionnelle comme un impôt anormal, taxation de l'outil de travail et du personnel et qu'il avait pris comme principe de ne pas déclarer les biens pris en location (matériel informatique par exemple) ou en crédit bail, ce qui se traduit par un gain de taxe professionnelle à payer. Monsieur E... souligne que toutes les déclarations, dont la taxe d'apprentissage et la taxe professionnelle du centre, étaient établies de la main de Monsieur C... à

l'exception de quelques déclarations d'impôt société du centre.

Est versé aux débats le courrier adressé le 14 février 2001 par la Direction des services fiscaux de Meurthe-et-Moselle au directeur de l'association CE.GEST.I. lui demandant des explications sur l'absence de déclaration de taxe d'apprentissage par l'association CE.GEST.I. ainsi que sur l'absence de déclaration de taxe professionnelle de l'établissement secondaire exploité à BAR-LE-DUC.

Il en résulte que les manquements reprochés à Monsieur C... sur le non-respect des règles fiscales est constitué.

L'association CE.GEST.I. impute au salarié la désorganisation de l'entreprise, ayant en raison de son attitude poussé une grande partie du personnel de l'association à faire grève, ce qui a placé le centre de gestion en situation de crise.

Monsieur C... soutient au contraire que ce sont les salariés et le nouveau Président de l'association CE.GEST.I., en la personne de Monsieur F..., qui sont à l'origine des perturbations du centre de gestion, la venue sur place d'un huissier et d'un avocat ayant été le fait de Monsieur F... alors qu'il avait le soutien de Monsieur G..., ancien Président, ainsi que cela résulte de sa note de service datée du 1er mars 2001.

Il ressort cependant de l'ensemble des éléments du dossier que le mouvement de grève initié le 12 mars 2001 par une partie du personnel de l'association CE.GEST.I. fait suite à une pétition datée du 9 février précédent dénonçant auprès de Monsieur G... le comportement jugé irrespectueux et dénigrant de Monsieur C... à leur égard à l'origine de diverses démissions de collaborateurs et d'un traitement perçu comme inégal en matière de charge de travail et d'accès à la formation. Sont produites au dossier de nombreuses attestations de salariés et d'anciens salariés relatant de façon circonstanciée le comportement hautain et directif de Monsieur C... dans l'exercice de

ses fonctions, de même que de multiples attestations d'anciens clients du centre dénonçant l'attitude désagréable de Monsieur C... à leur égard, tous éléments corroborés par une précédente mise en garde adressée le 27 octobre 1999 à Monsieur C... par Monsieur Lalance, Président à l'époque de l'association CE.GEST.I.

Il apparaît en conséquence que la grève des salariés de l'association CE.GEST.I. à l'origine de la crise et de la désorganisation de cet organisme, ayant entraîné la démission de Monsieur G... et la nécessité de le remplacer dans l'urgence, est à imputer au comportement de Monsieur C... dans l'exercice de ses fonctions.

Ce grief est également caractérisé.

Le courrier dit "lettre ouverte" signé par Mesdames Collignon, Minetto et Herbin, salariées du centre de gestion de BAR-LE-DUC, vantant le climat de confiance instauré avec Monsieur C... n'est pas de nature à contredire l'existence des griefs ci-dessus examinés et constitués. Il en est de même des attestations de satisfaction rédigées en faveur de Monsieur C... par de nombreux clients de l'association CE.GEST.I. qui ne contredisent pas davantage la réalité des griefs de déloyauté, de non-respect des règles fiscales et de désorganisation de l'association retenus à l'encontre de l'intéressé. Il en résulte que le licenciement de Monsieur C... repose sur une faute grave résultant d'un ensemble de faits imputables au salarié d'une importance telle qu'elle rendait impossible son maintien dans l'association pendant la durée du préavis.

C'est donc à tort que les premiers juges ont retenu que le licenciement de Monsieur C... était dénué de cause réelle et sérieuse et ont fait droit à ses demandes de rappel de salaire et d'indemnités de rupture.

Au vu de ce qui précède, l'intéressé devra être débouté de sa

réclamation de rappel de salaire au titre de la période de mise à pied justifiée ainsi que de ses demandes d'indemnités de rupture et de dommages et intérêts pour licenciement abusif.

Le jugement sera donc infirmé de ces chefs.- Sur l'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement

En vertu de l'article L.122-14 du Code du Travail, lors de la tenue de l'entretien préalable, le salarié peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise et, lorsqu'il n'y a pas d'institutions représentatives du personnel dans l'entreprise, par un conseiller de son choix inscrit sur une liste dressée par le représentant de l'Etat dans le département.

Il n'est pas contesté qu'il n'existait pas au sein de l'association CE.GEST.I. d'institutions représentatives du personnel.

Or, la lettre de convocation à l'entretien préalable adressée le 14 mars 2001 par l'employeur à Monsieur C... se borne à indiquer qu'il a le choix de se faire représenter par une personne de son choix appartenant obligatoirement au personnel de l'entreprise, sans porter la mention obligatoire relative à la possibilité d'une assistance extérieure.

Cette carence emporte non-respect des règles relatives à la procédure de licenciement, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen invoqué par Monsieur C... sur le fait que son licenciement aurait été décidé avant la tenue de l'entretien préalable.

Le préjudice subi de ce chef par ce dernier sera réparé par l'allocation d'une somme que la Cour est en mesure de fixer à 5 918,14 ç. - Sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral

Monsieur C... sollicite la somme de 15 244,90 ç à raison des circonstances vexatoires de son licenciement.

Il ressort cependant des éléments du dossier que les circonstances,

certes singulières du licenciement de Monsieur C..., sont à resituer dans le contexte particulier de tension survenue au sein de l'association CE.GEST.I. par suite du mouvement de grève initié par les salariés à l'origine de divers courants de soutien auxquels a participé Monsieur C... en se faisant accompagner de son propre comité de soutien. La présence d'un huissier et d'un avocat, lors de la réunion houleuse tenue le 14 mars 2001, confirme le climat extrême de crise existant au sein de l'association CE.GEST.I., sans que ces éléments justifient l'octroi de dommages et intérêts au profit de Monsieur C..., au vu de ce qui vient d'être relaté.

Le jugement sera donc infirmé sur ce point.- Sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile

Il n'y a pas lieu à application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile dans les circonstances de la cause, et ce tant en première instance qu'à hauteur d'appel. - Sur les dépens

Les dépens d'instance et d'appel seront supportés par Monsieur C..., partie succombant au procès.PAR CES MOTIFS La COUR, Statuant en audience publique et par arrêt contradictoire,

INFIRME le jugement déféré et statuant à nouveau,

DIT que le licenciement de Monsieur Avilio C... repose sur une faute grave ;

LE DÉBOUTE de l'ensemble de ses demandes de rappel de salaire, d'indemnités de rupture, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de dommages et intérêts pour préjudice moral ;

Ajoutant,

CONDAMNE l'association CE.GEST.I. à payer à Monsieur C... la somme de 5 918,14 ç (CINQ MILLE NEUF CENT DIX HUIT EUROS ET QUATORZE CENTS) à titre d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement ;

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

CONDAMNE Monsieur C... aux dépens de première instance et d'appel.

Ainsi prononcé à l'audience publique ou par mise à disposition au greffe du quinze septembre deux mil six par Madame SCHMEITZKY, Président, assistée de Mademoiselle H..., Greffier Placé présent lors du prononcé.

Et Madame le Président a signé le présent arrêt ainsi que le Greffier.LE GREFFIER

LE PRÉSIDENTMinute en sept pages


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Numéro d'arrêt : 05/03251
Date de la décision : 15/09/2006
Sens de l'arrêt : Autre

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2006-09-15;05.03251 ?
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