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22/08/2024 | FRANCE | N°24/00598

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Rétentions, 22 août 2024, 24/00598


COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

N° RG 24/00598 - N° Portalis DBVK-V-B7I-QLOL



O R D O N N A N C E N° 2024 - 613

du 22 Août 2024

SUR LE CONTROLE DE LA REGULARITE D'UNE DECISION DE PLACEMENT EN RETENTION ET SUR LA PROLONGATION D'UNE MESURE DE RETENTION ADMINISTRATIVE

ET

SUR REQUÊTE DE L'ETRANGER EN CONTESTATION DU PLACEMENT EN RETENTION ADMINISTRATIVE



dans l'affaire entre,



D'UNE PART :



Monsieur [P] [N]

né le 04 Janvier 1995 à [Localité 3] (ALGERIE)

de nationalité Algérienne
>retenu au centre de rétention de [Localité 4] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire,



Comparant et assisté par Maître Kati...

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

N° RG 24/00598 - N° Portalis DBVK-V-B7I-QLOL

O R D O N N A N C E N° 2024 - 613

du 22 Août 2024

SUR LE CONTROLE DE LA REGULARITE D'UNE DECISION DE PLACEMENT EN RETENTION ET SUR LA PROLONGATION D'UNE MESURE DE RETENTION ADMINISTRATIVE

ET

SUR REQUÊTE DE L'ETRANGER EN CONTESTATION DU PLACEMENT EN RETENTION ADMINISTRATIVE

dans l'affaire entre,

D'UNE PART :

Monsieur [P] [N]

né le 04 Janvier 1995 à [Localité 3] (ALGERIE)

de nationalité Algérienne

retenu au centre de rétention de [Localité 4] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire,

Comparant et assisté par Maître Katia LUCAS DUBLANCHE, avocat commis d'office, présent en visio conférence depuis le centre de rétention de [Localité 4].

Appelant,

et en présence de Madame [X] [O], interprète assermenté en langue arabe,

D'AUTRE PART :

1°) MONSIEUR LE PREFET DE L'ALLIER

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représenté par Monsieur [H] [F], dûment habilité,

2°) MINISTERE PUBLIC

Non représenté

Nous, Karine ANCELY conseiller à la cour d'appel de Montpellier, délégué par ordonnance de Monsieur le premier président, plus spécialement pour les attributions dévolues par les articles L 741-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assisté de Béatrice MARQUES, greffier,

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Vu les dispositions des articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu l'arrêté du 16 août 2024 de MONSIEUR LE PREFET DE L'ALLIER portant obligation de quitter le territoire national sans délai avec interdiction de retour de 3 ans pris à l'encontre de Monsieur [P] [N] ;

Vu la décision de placement en rétention administrative du 16 août 2024 de Monsieur [P] [N] pendant 4 jours dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ;

Vu la requête de Monsieur [P] [N] en contestation de la régularité de la décision de placement en rétention administrative en date du 19 août 2024 ;

Vu la requête de MONSIEUR LE PREFET DE L'ALLIER en date du 20 août 2024 tendant à la prolongation de la rétention de Monsieur [P] [N] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pour une durée vingt-six jours ;

Vu l'ordonnance du 20 Août 2024 à 15 h 26 notifiée le même jour à la même heure, du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Perpignan qui a :

- rejeté la requête en contestation de la régularité de la décision de placement en rétention administrative formée par Monsieur [P] [N],

- ordonné la prolongation de la rétention administrative de Monsieur [P] [N] , pour une durée de vingt-six jours ;

Vu la déclaration d'appel faite le 21 Août 2024 par Monsieur [P] [N] du centre de rétention administrative de [Localité 4], transmise au greffe de la cour d'appel de Montpellier le même jour à 13 h 36,

Vu les courriels adressés le 21 Août 2024 à MONSIEUR LE PREFET DE L'ALLIER, à l'intéressé et à son conseil et au Ministère Public les informant que l'audience sera tenue le 22 Août 2024 à 09 H 30,

L'avocat et l'appelant, qui ont pu préalablement prendre connaissance de la procédure, se sont entretenus, librement, par visio conférence entre les salles du centre de rétention de Perpignan et de la cour d'appel de Montpellier, les portes des salles étant fermées pour assurer la confidentialité de l'entretien, en la seule présence de l'interprète et ce, sur le temps de l'audience fixée, avec l'accord du délégué du premier président de la cour d'appel de Montpellier.

L'audience publique initialement fixée à 09 H 30 a commencé à 10h 13

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Assisté de Madame [X] [O], interprète, Monsieur [P] [N] déclare sur transcription du greffier à l'audience : ' Je m'appelle [P] [N], je suis né le 04 Janvier 1995 à [Localité 3] (ALGERIE) , j'habite [Adresse 5] à [Localité 6] depuis 1an et demi . Je suis marié en Algérie j'ai rejoint mon épouse. Elle est étudiante en France. J'ai un enfant. Je travaille dans le bâtiment j'ai une promesse d'embauche. Je gagne le smic et je travaille le week end. Mon épouse est toujours étudiante et a fait une demande de changement de statut. Oui j'accepte de partir volontairement. J'ai un passeport en cours de validité. L'adresse pour l'assignation à résidence serait chez un collègue ; j'ai pas l'adresse mais je peux l'appeler '

L'avocat, Me Katia LUCAS DUBLANCHE développe les moyens de l'appel formé contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention qui a prolongé le maintien en rétention de l'étranger.

- Sur l'appréciation des garanties de représentation de Monsieur, je sollicite l'assignation à résidence : Il n' y a pas eu de dépôt de plainte sur les faits qui ont eu lieu dans un cadre privé et qui porteraient sur des violences verbales et non physiques. Madame souhaite qu'il rentre au domicile. Ils ont un enfant de 6 mois. Monsieur n'a aucun passé de violences. Monsieur n'est pas en situation régulière. Il s'agit de garder l'unité familiale dans l'attente du retour en Algérie. Je vous demande d'infirmer la décision du premier juge sur l'assignation à résidence.

Monsieur le représentant, de LA PREFECTURE DE L'ALLIER, soutient oralement le mémoire transmis le 22 août 2024 tendant à voir confirmer l'ordonnance déférée.

Assisté de Madame [X] [O], interprète, Monsieur [P] [N] a eu la parole en dernier et et a déclaré sur transcription du greffier à l'audience : ' J'ai besoin d'une deuxième chance. Ce qu' a dit ma femme c'est juste pour me faire peur . '

Le conseiller indique que l'affaire est mise en délibéré et que la décision sera notifiée par les soins du Directeur du centre de rétention de [Localité 4] avec l'assistance d'un interprète en langue arabe à la demande de l'étranger retenu.

SUR QUOI

Sur la recevabilité de l'appel :

Le 21 Août 2024, à 13 h 36, Monsieur [P] [N] a formalisé appel motivé de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Perpignan du 20 Août 2024 notifiée à 15 h 26, soit dans les 24 heures de la notification de l'ordonnance querellée, qu'ainsi l'appel est recevable en application des articles R 743-10 et R743-11 du CESEDA.

Sur l'appel :

Sur l'absence de notification du droit d'accès aux associations d'aide aux retenus

Au visa de l'article R 744-10 du CESEDA, M. [N] soutient qu'aucun document ne lui a été remis indiquant les coordonnées des associations d'aide aux retenus. Il estime que cette absence de notification lui a nécessairement causé un grief.

Mais, il n'est démontré aucun grief dans la mesure où l'association ayant compétence dans le département a présenté aux intérêts de ce dernier une requête en annulation démontrant qu'il a pu bénéficier de son service.

En conséquence, ce moyen sera rejeté.

Sur l'erreur d'appréciation quant à la vie privée et familiale sur le territoire et les garanties de représentation

Au visa de l'article 8 de la CEDH et 3-1 de la CIDE, et L 741-1 du CESEDA, M. [N] estime qu'il existe une erreur d'appréciation dans la décision de placement soulignant vivre maritalement en France avec son épouse qui dispose d'un titre de séjour, ajoutant avoir un enfant de six mois avec son épouse. Il estime remplir les conditions de l'assignation à résidence.

Mais, lors de la décision du placement en rétention, les autorités ont motivé la décision au vu de l'entrée irrégulière sur le territoire national sans démarche pour procéder à une régularisation, un refus d'éloignement et d'une difficulté liée à la communication d'une adresse stable et personnelle autre que celle communiquée par M. [N], celle-ci étant l'adresse de son épouse qui a fait état de violences répétées au sein du couple.

En conséquence, ce moyen sera rejeté.

SUR LE FOND

En application des dispositions de l'article L612-2 du ceseda: 'Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants :

1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ;

2° L'étranger s'est vu refuser la délivrance ou le renouvellement de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour au motif que sa demande était manifestement infondée ou frauduleuse ;

3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet.'

Et selon l'article L 612-3 du ceseda: 'Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants :

1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;

2° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;

3° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ;

4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ;

5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ;

6° L'étranger, entré irrégulièrement sur le territoire de l'un des États avec lesquels s'applique l'acquis de Schengen, fait l'objet d'une décision d'éloignement exécutoire prise par l'un des États ou s'est maintenu sur le territoire d'un de ces États sans justifier d'un droit de séjour ;

7° L'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d'identité ou de voyage ou a fait usage d'un tel titre ou document ;

8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5.'

L'article L 743-13 du CESEDA':' «'Le juge des libertés et de la détention peut ordonner l'assignation à résidence de l'étranger lorsque celui-ci dispose de garanties de représentation effectives.

L'assignation à résidence ne peut être ordonnée par le juge qu'après remise à un service de police ou à une unité de gendarmerie de l'original du passeport et de tout document justificatif de son identité, en échange d'un récépissé valant justification de l'identité et sur lequel est portée la mention de la décision d'éloignement en instance d'exécution.

Lorsque l'étranger s'est préalablement soustrait à l'exécution d'une décision mentionnée à l'article L. 700-1, à l'exception de son 4°, l'assignation à résidence fait l'objet d'une motivation spéciale.'»

En l'espèce, l'intéressé ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de soustraction à la mesure qui est considéré comme établi au visa des articles L 612-2, et L 612-3, 1°, 2° et 8° du ceseda.

Monsieur [P] [N] est en situation irrégulière en France. Il fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire qui lui a été notifié le 16 août 2024. Si, M. [N] dispose d'un passeport en cours de validité, il ne présente pas de garanties de représentation effectives. En effet, la seule adresse dont il dispose de manière effective et stable est celle du domicile conjugal qu'il partage avec son épouse et son enfant. Or, cette dernière a fait état devant les services de police de violences physiques répétées, en présence de l'enfant pour les derniers fait évoqués.

L'assignation à résidence ne peut en conséquence en l'état être ordonnée.

Il y a lieu en conséquence de confirmer l'ordonnance déférée.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement,

Vu l'article 66 de la constitution du 4 octobre 1958,

Vu les articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

Déclarons l'appel recevable,

Rejetons les moyens de nullité et la demande d'assignation à résidence,

Confirmons la décision déférée,

Disons que la présente ordonnance sera notifiée conformément à l'article R 743-19 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile,

Fait à Montpellier, au palais de justice, le 22 Août 2024 à 15h59

Le greffier, Le magistrat délégué,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Rétentions
Numéro d'arrêt : 24/00598
Date de la décision : 22/08/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 29/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-08-22;24.00598 ?
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