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16/08/2024 | FRANCE | N°24/00579

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Rétentions, 16 août 2024, 24/00579


COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

N° RG 24/00579 - N° Portalis DBVK-V-B7I-QLKG



O R D O N N A N C E N° 2024 - 594

du 16 Août 2024

SUR LE CONTROLE DE LA REGULARITE D'UNE DECISION DE PLACEMENT EN RETENTION ET SUR LA PROLONGATION D'UNE MESURE DE RETENTION ADMINISTRATIVE

ET

SUR REQUÊTE DE L'ETRANGER EN CONTESTATION DU PLACEMENT EN RETENTION ADMINISTRATIVE



dans l'affaire entre,



D'UNE PART :



Monsieur [T] [F]

né le 10 Septembre 2004 à [Localité 4] (MAROC)

de nationalité Marocaine

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retenu au centre de rétention de [Localité 7] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire,



Comparant par visio conférence à la...

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

N° RG 24/00579 - N° Portalis DBVK-V-B7I-QLKG

O R D O N N A N C E N° 2024 - 594

du 16 Août 2024

SUR LE CONTROLE DE LA REGULARITE D'UNE DECISION DE PLACEMENT EN RETENTION ET SUR LA PROLONGATION D'UNE MESURE DE RETENTION ADMINISTRATIVE

ET

SUR REQUÊTE DE L'ETRANGER EN CONTESTATION DU PLACEMENT EN RETENTION ADMINISTRATIVE

dans l'affaire entre,

D'UNE PART :

Monsieur [T] [F]

né le 10 Septembre 2004 à [Localité 4] (MAROC)

de nationalité Marocaine

retenu au centre de rétention de [Localité 7] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire,

Comparant par visio conférence à la demande de Monsieur le préfet de l'Aude et assisté par Maître Christopher POLONI, avocat commis d'office

Appelant,

D'AUTRE PART :

1°) MONSIEUR LE PREFET DE L'AUDE

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représenté par Monsieur [E] [B], dûment habilité,

2°) MINISTERE PUBLIC

Non représenté

Nous, Sylvie BOGE conseiller à la cour d'appel de Montpellier, délégué par ordonnance de Monsieur le premier président, plus spécialement pour les attributions dévolues par les articles L 741-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assisté de Alexandra LLINARES, greffier,

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Vu les dispositions des articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu l'arrêté du 8 mars 2024 de MONSIEUR LE PREFET DE L'AUDE portant obligation de quitter le territoire national sans délai avec interdiction de retour de 3 ans pris à l'encontre de Monsieur [T] [F] ;

Vu la décision de placement en rétention administrative du 9 août 2024 de Monsieur [T] [F] pendant 4 jours dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ;

Vu la requête de Monsieur [T] [F] en contestation de la régularité de la décision de placement en rétention administrative en date du 12 août 2024 ;

Vu la requête de MONSIEUR LE PREFET DE L'AUDE en date du 12 août 2024 tendant à la prolongation de la rétention de Monsieur [T] [F] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pour une durée vingt-six jours ;

Vu l'ordonnance du 13 Août 2024 à 17 h 44 notifiée le même jour à la même heure, du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Perpignan qui a :

- rejeté la requête en contestation de la régularité de la décision de placement en rétention administrative formée par Monsieur [T] [F],

- ordonné la prolongation de la rétention administrative de Monsieur [T] [F] , pour une durée de vingt-six jours,

Vu la déclaration d'appel faite le 14 Août 2024 par Monsieur [T] [F] du centre de rétention administrative de [Localité 7], transmise au greffe de la cour d'appel de Montpellier le même jour à 11 h 48,

Vu les courriels adressés le 14 Août 2024 à MONSIEUR LE PREFET DE L'AUDE, à l'intéressé, à son conseil et au Ministère Public les informant que l'audience sera tenue le 16 Août 2024 à 09 H 00,

L'avocat et l'appelant, qui ont pu préalablement prendre connaissance de la procédure, se sont entretenus, librement, par visio conférence entre le salles d'audience du centre de rétention de Perpignan et de la cour d'appel de Montpellier, les portes des salles étant fermées pour assurer la confidentialité de l'entretien, en la seule présence de l'interprète et ce, sur le temps de l'audience fixée, avec l'accord du délégué du premier président de la cour d'appel de Montpellier

L'audience publique initialement fixée à 09 h 00 a commencé à 09 h 14.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Monsieur [T] [F] confirme son identité telle que mentionnée dans l'ordonnance entreprise et déclare sur transcription du greffier à l'audience : 'Je m'appelle [T] [F], je suis né le 10 Septembre 2004 à [Localité 4] (MAROC). J'ai un passeport en original, mais je ne l'ai pas sur moi. Il est chez mon employeur. Je ne veux pas retourner au Maroc, je n veux pas perdre mon travail.'

L'avocat, Me Christopher POLONI développe les moyens de l'appel formé contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention qui a prolongé le maintien en rétention de l'étranger.

Se désiste du moyen sur le délai de 48 heures ; maintient les 3 moyens soulevés dans l'acte d'appel.

- contestation sur l'identité de l'agent notifiant.

- problématique sur le consulat du Maroc indiqué

- notification en bloc de l'OQTF et de la DPRA, numéroté de 1 à 6 ; or, la page 6 aurait été signée antérieurement à la page 5. Au moment de la notification de la DPRA, on commence par la décision, puis les voies de recours et enfin, les droits en rétention. Si la page 5 a été signée avant la page 6, le retenu n'a pu avoir une bonne compréhension de la procédure administrative, ce qui lui fait nécessairement grief.

Monsieur le représentant de MONSIEUR LE PREFET DE L'AUDE demande la confirmation de l'ordonnance déférée.

- sur l'identité de l'agent notifiant : l'agent est identitiable ([V] [I]), qui a également notifié la fin de la garde à vue. La date de juillet indiquée dans la notification est une erreur de plume.

- sur l'ordre de notification des actes : aucun grief puisque le retenu a bien reçu notification de l'ensemble des actes. Pas d'obligation légale concernant l'ordre de notification.

- erreur dans le consulat à contacter : la loi n'exige pas de précision sur les coordonnées du consulat, il n'y a donc pas d'irrégularité. Absence de grief.

- défaut de motivation de l'ordonnance : elle est parfaitement motivée. L'arrêté de placement en rétention ne vise pas la menace à l'ordre public mais une entrée irrégulière sans demande de régularisation, une soustraction à la décision d'éloignement et un risque de fuite. Les pièces fournies attestant de son logement mentionnent une adresse différente de celle déclarée par le retenu lors de ses auditions.

- pas d'assignation à domicile en l'absence de passeport.

Monsieur [T] [F] a eu la parole en dernier et et a déclaré sur transcription du greffier à l'audience : 'j'ai eu l'OQTF au mois de mars alors que j'avais un titre de séjour valable jusqu'au mois de juin. Je suis en CDI, je dois reprendre le travail dans deux semaines.'

Le conseiller indique que l'affaire est mise en délibéré et que la décision sera notifiée par les soins du Directeur du centre de rétention de [Localité 7].

SUR QUOI

Sur la recevabilité de l'appel

Le 14 Août 2024, à 11 h 48, Monsieur [T] [F] a formalisé appel motivé de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Perpignan du 13 Août 2024 notifiée à 17 h 44, soit dans les 24 heures de la notification de l'ordonnance querellée, qu'ainsi l'appel est recevable en application des articles R 743-10 et R743-11 du CESEDA.

Sur l'appel

Sur la nullité de la procédure

Il appartient au juge judiciaire, en sa qualité de gardien de la liberté individuelle, de se prononcer sur les irrégularités, invoquées par l'étranger, affectant les procédures préalables à la notification de la décision de placement en rétention. (2e Civ., 28 juin 1995, pourvoi n° 94-50.002, Bull. 1995, II, n° 221, 2e Civ., 28 juin 1995, pourvoi n° 94-50.006, Bull. 1995, II, n° 212, 2e Civ., 28 juin 1995, pourvoi n° 94-50.005, Bull., 1995, II, n° 211).

Aux termes de l'article L. 743-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles, le juge des libertés et de la détention saisi d'une demande sur ce motif ou qui relève d'office une telle irrégularité ne peut prononcer la mainlevée de la mesure de placement ou du maintien en rétention que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter substantiellement atteinte aux droits de l'étranger dont l'effectivité n'a pu être rétablie par une régularisation intervenue avant la clöture des débats.

1. Sur l'identité de l'agent notifiant l'arrêté de placement en rétention

En l'espèce, la signature de l'agent notifiant l'arrêté de placement en rétention apposée sous le tampon de la police nationale permet d'identifier l'agent notifiant comme étant Monsieur [V] [I], brigadier chef de police en résidence à [Localité 6], dont la même signature est apposée au procès-verbal de fin de garde à vue.

Cette exception de nullité sera donc rejetée.

2. Sur les coordonnées du consulat

L'article L.744-4 du CESEDA dispose :

'L'étranger placé en rétention est informé dans les meilleurs délais qu'il bénéficie, dans le lieu de rétention, du droit de demander l'assistance d'un interprète, d'un conseil et d'un médecin, et qu'il peut communiquer avec son consulat et toute personne de son choix. Ces informations lui sont communiquées dans une langue qu'il comprend.

Les modalités selon lesquelles s'exerce l'assistance de ces intervenants sont précisées, en tant que de besoin, par décret en Conseil d'Etat.'

Ce texte n'impose pas de préciser les coordonnées du consulat dont l'intéressé est suseptible de relever.

En l'espèce, la notification des droits informe l'intéressé de son droit de communiquer avec le consulat du Maroc à [Localité 8] alors qu'il soutient dépendre de celui de [Localité 5].

La mention de son droit de communiquer avec son consulat, quel que soit le lieu indiqué, remplit les exigences de l'article susvisé.

Cette exception de nullité sera donc rejetée.

3. Sur l'irrégularité concernant la notification de l'arrêté de placement, des droits d'accès aux associations et des droits du retenu

L'indication de l'arrêté de placement en rétention le '9 juillet 2024" puis des droits en rétention le '9 août 2024" relève d'une erreur matérielle qui n'a causé aucune atteinte aux droits du retenu.

En outre, l'intéressé ne démontre pas que la notification de la page 6 avant la page 5 ait porté atteinte à ses droits en ne lui permettant pas une bonne compréhension de la procédure comme il le prétend.

Cette exception de nullité sera donc rejetée.

Sur la contestation de l'arrêté de placement en rétention

Il résulte de l'article L.741-6 du CESEDA que la décision de placement en rétention est écrite et motivée.

Cette motivation se doit de retracer les motifs positifs de fait et de droit qui ont guidé l'administration pour prendre sa décision, ce qui signifie que l'autorité administrative n'a pas à énoncer, puis à expliquer pourquoi elle a écarté les éléments favorables à une autre solution que la privation de liberté.

Pour autant, l'arrêté doit expliciter la raison ou les raisons pour lesquelles la personne a été placée en rétention au regard d'éléments factuels pertinents liés à la situation individuelle et personnelle de l'intéressé, et ce au jour où l'autorité administrative prend sa décision, sans avoir à relater avec exhaustivité l'intégralité des allégations de la personne concernée.

1. Sur la menace pour l'ordre public

L'arrêté de placement en rétention n'est pas motivé par une menace à l'ordre public.

Il convient de rejeter le moyen contestant ce motif.

2. Sur le défaut d'exament individuel et sérieux de la situation personnelle de l'intéressé et l'erreur d'appréciation sur ses garanties de représentation

L'arrêté de placement en rétention se fonde sur les déclarations de l'intéressé lors de son audition en garde à vue le 9 août 2024 et les pièces remises avant la décision préfectorale.

L'autorité préfectorale a tenu compte de la situation personnelle et particulière de l'intéressé en rappelant qu'il a fait l'objet d'une obligation de quitrer le territoire français et de retrait de titre de séjour le 8 mars 2024 notifiée par courrier recommandé, pli avisé et non réclamé, le 13 mars 2024, puis à sa personne le 24 juillet 2024, qui fait l'objet d'un recours devant le tribunal administratif, est célibataire, sans charge de famille, ne présente pas un état de vulnérabilité, ne peut justifier d'un domicile et est sans document d'identité.

L'autorité préfectorale s'est fondée sur des moyens suffisants pour établir la nécessité d'un placement en rétention administrative au vu des éléments dont elle disposait lors de l'édiction de l'arrêté de placement en rétention, étant relevé par ailleurs que l'attestation d'hébergement datée du 23 juillet 2024 remise à l'audience mentionne une nouvelle adresse qui ne correspond pas à l'adresse au [Adresse 2] à [Localité 6] à laquelle l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français a été notifiée et déclarée par le retenu lors de son audition le 9 août 2024.

Il convient de rejeter ce moyen.

Sur la demande d'assignation à résidence

L'article L 743-13 du CESEDA' dispose :' «'Le juge des libertés et de la détention peut ordonner l'assignation à résidence de l'étranger lorsque celui-ci dispose de garanties de représentation effectives.

L'assignation à résidence ne peut être ordonnée par le juge qu'après remise à un service de police ou à une unité de gendarmerie de l'original du passeport et de tout document justificatif de son identité, en échange d'un récépissé valant justification de l'identité et sur lequel est portée la mention de la décision d'éloignement en instance d'exécution.

Lorsque l'étranger s'est préalablement soustrait à l'exécution d'une décision mentionnée à l'article L. 700-1, à l'exception de son 4°, l'assignation à résidence fait l'objet d'une motivation spéciale.'»

L'assignation à résidence ne peut en conséquence en l'état être ordonnée en l'absence de remise préalable d'un passeport valide en original.

En l'absence de toute illégalité susceptible d'affecter les conditions (découlant du droit de l'Union) de légalité de la rétention et à défaut d'autres moyens présentés en appel, il y a lieu de confirmer l'ordonnance déférée.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement,

Déclarons l'appel recevable,

Confirmons la décision déférée,

Disons que la présente ordonnance sera notifiée conformément à l'article R 743-19 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile,

Fait à Montpellier, au palais de justice, le 16 Août 2024 à 11 h 07.

Le greffier, Le magistrat délégué,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Rétentions
Numéro d'arrêt : 24/00579
Date de la décision : 16/08/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 24/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-08-16;24.00579 ?
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