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16/08/2024 | FRANCE | N°24/00578

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Rétentions, 16 août 2024, 24/00578


COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

N° RG 24/00578 - N° Portalis DBVK-V-B7I-QLI4



O R D O N N A N C E N° 2024 - 593

du 16 Août 2024

SUR TROISIEME PROLONGATION DE RETENTION D'UN ETRANGER DANS UN ETABLISSEMENT NE RELEVANT PAS DE L'ADMINISTRATION PENITENTIAIRE



dans l'affaire entre,



D'UNE PART :



Monsieur X se disant [J] [O] [R]

né le 02 Janvier 1970 à [Localité 2] (ALGERIE)

de nationalité Algérienne



retenu au centre de rétention de [Localité 3] dans les locaux ne relevant pas de l'admin

istration pénitentiaire,



Comparant par visio conférence à la demande de Monsieur le préfet de l'Hérault et assisté de Maître Katia LUCAS DUBLANCH...

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

N° RG 24/00578 - N° Portalis DBVK-V-B7I-QLI4

O R D O N N A N C E N° 2024 - 593

du 16 Août 2024

SUR TROISIEME PROLONGATION DE RETENTION D'UN ETRANGER DANS UN ETABLISSEMENT NE RELEVANT PAS DE L'ADMINISTRATION PENITENTIAIRE

dans l'affaire entre,

D'UNE PART :

Monsieur X se disant [J] [O] [R]

né le 02 Janvier 1970 à [Localité 2] (ALGERIE)

de nationalité Algérienne

retenu au centre de rétention de [Localité 3] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire,

Comparant par visio conférence à la demande de Monsieur le préfet de l'Hérault et assisté de Maître Katia LUCAS DUBLANCHE, avocat commis d'office

Appelant,

et en présence de [T] [Y], interprète assermenté en langue arabe,

D'AUTRE PART :

1°) MONSIEUR LE PREFET DE L'HERAULT

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représenté par Monsieur [I] [X], dûment habilité,

2°) MINISTERE PUBLIC

Non représenté

Nous, Sylvie BOGE conseiller à la cour d'appel de Montpellier, délégué par ordonnance de Monsieur le premier président, plus spécialement pour les attributions dévolues par les articles L 741-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assisté de Alexandra LLINARES, greffière,

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Vu le jugement du Tribunal correctionnel de Montpellier du 6 mai 2015 prononçant une interdiction définitive du territoire français à l'encontre de Monsieur X se disant [J] [O] [R],

Vu la décision de placement en rétention administrative du 14 juin 2024 de Monsieur X se disant [J] [O] [R] pendant 48 heures dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire,

Vu l'ordonnance du 15 juin 2024 notifiée le même jour du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Perpignan qui a décidé de prolonger la rétention administrative pour une durée maximale de vingt-huit jours,

Vu l'ordonnance du 13 juillet 2024 notifiée le même jour du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Perpignan qui a décidé de prolonger la rétention administrative pour une durée maximale de trente jours,

Vu la saisine de MONSIEUR LE PREFET DE L'HERAULT en date du 12 août 2024 pour obtenir une troisième prolongation de la rétention de cet étranger,

Vu l'ordonnance du 13 août 2024 à 15 h 06 notifiée le même jour à la même heure du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Perpignan qui a décidé de prolonger la rétention administrative pour une durée maximale de quinze jours,

Vu la déclaration d'appel faite le 13 Août 2024 par Monsieur X se disant [J] [O] [R], du centre de rétention administrative de [Localité 3], transmise au greffe de la cour d'appel de Montpellier le même jour à 16 h 30,

Vu les courriels adressés le 13 Août 2024 à MONSIEUR LE PREFET DE L'HERAULT, à l'intéressé, à son conseil et au Ministère Public les informant que l'audience sera tenue le 16 Août 2024 à 09 H 00,

L'avocat et l'appelant, qui ont pu préalablement prendre connaissance de la procédure, se sont entretenus, librement, par visio conférence entre les salles d'audience du centre de rétention de [Localité 3] et de la cour d'appel de Montpellier, les portes des salles étant fermées pour assurer la confidentialité de l'entretien, en la seule présence de l'interprète et ce, sur le temps de l'audience fixée, avec l'accord du délégué du premier président de la cour d'appel de Montpellier.

L'audience publique initialement fixée à 09 H 00 a commencé à 09 h 40.

PRETENTIONS DES PARTIES

Assisté de [T] [Y], interprète, Monsieur X se disant [J] [O] [R] déclare sur transcription du greffier à l'audience : 'je m'appelle [J] [O] [R], je suis né le 02 Janvier 1970 à [Localité 2] (ALGERIE).'

L'avocat, Me Katia LUCAS DUBLANCHE développe les moyens de l'appel formé contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention qui a prolongé le maintien en rétention de l'étranger.

- contestation de la menace à l'ordre public. Monsieur a purgé sa peine d'emprisonnement ; le fait de revenir sur les faits passés est en totale contradiction avec l'art 742-5 du Ceseda et constitue une double peine.

- En tout état de fait, au vu des relations diplomatiques avec l'Algérie, la prolongation est bien inutile.

Le magistrat indique qu'il s'agit là d'un moyen nouveau sur lequel il ne statuera pas.

L'avocat, Me Katia LUCAS DUBLANCHE indique : la motivation concernant l'ordre public constitue une double peine.

Demande la remise en liberté du retenu afin qu'il quitte le territoire français par ses propres moyens.

Monsieur le représentant de MONSIEUR LE PREFET DE L'HERAULT demande la confirmation de l'ordonnance déférée.

- condamnations pour des faits graves et en récidive. Soustraction au placement sous assignation à résidence.

Assisté de [T] [Y], interprète, Monsieur X se disant [J] [O] [R] a eu la parole en dernier et a déclaré sur transcription du greffier à l'audience : 'je suis d'accord avec vous, avant j'étais drogué et dans la drogue, je faisais n'importe quoi et je le regrette. Maintenant, j'ai fait ma peine, j'ai tourné la page et je ne recommencerai pas. Je suis diabétique et dépendant à l'insuline, la drogue a bousillé ma santé. Ici au CRA, ça ne va pas, je devrais être à l'hôpital, mon diabète attaque mes yeux, tout mon corps.'

Le conseiller indique que l'affaire est mise en délibéré et que la décision sera notifiée par les soins du Directeur du centre de rétention de [Localité 3] avec l'assistance d'un interprète en langue arabe à la demande de l'étranger retenu.

SUR QUOI

Sur la recevabilité de l'appel

Le 13 Août 2024, à 16 h 30, Monsieur X se disant [J] [O] [R] a formalisé appel motivé de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Perpignan du 13 Août 2024 notifiée à 15 h 06, soit dans les 24 heures de la notification de l'ordonnance querellée, qu'ainsi l'appel est recevable en application des articles R 743-10 et R743-11 du CESEDA.

Sur le fond

En application des dispositions de l'article L'article L. 742-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose :

A titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut être saisi pour prolonger une troisième fois la rétention d'une personne étrangère lorsqu'une des situations suivantes apparaît dans les quinze derniers jours :

1° L'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la décision d'éloignement ;

2° L'étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d'éloignement :

a) une demande de protection contre l'éloignement au titre du 9° de l'article L. 611-3 ou du 5° de l'article L. 631-3 ;

b) ou une demande d'asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;

3° La décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé et qu'il est établi par l'autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.

Le juge peut également être saisi en cas d'urgence absolue ou de menace pour l'ordre public.

L'étranger est maintenu en rétention jusqu'à ce que le juge ait statué.

Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l'expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d'une durée maximale de quinze jours.

La menace pour l'ordre public fait l'objet d'une appréciation in concreto, au regard d'un faisceau d'indices permettant d'établir la réalité des faits, la gravité, la récurrence ou la réitération et l'actualité de la menace selon le comportement de l'intéressé et, le cas échéant, sa volonté d'insertion ou de réhabilitation.

Dans le cadre adopté par le législateur, la notion de menace à l'ordre public a pour objectif manifeste de prévenir, pour l'avenir, les agissements dangereux commis par des personnes en situation irrégulières sur le territoire national.

L'appréciation de cette menace doit prendre en considération les risques objectifs que l'étranger en situation irrégulière fait peser sur l'ordre public (jurisprudence du Conseil d'Etat Réf. N°389959, 7 mai 2015, ministre de l'intérieur, B).

La commission d'une infraction pénale n'est pas de nature, à elle seule, à établir que le comportement de l'intéressé présenterait une menace pour l'ordre public et cette menace doit être réelle à la date considérée, étant précisé que ce n'est pas l'acte troublant l'ordre public qui est recherché, mais bien la réalité de la menace actuelle.

En l'espèce, la demande de troisième prolongation est motivée sur la menace à l'ordre public que le retenu conteste en faisant valoir que les faits pour lesquels il a été condamné sont anciens et isolés. Il soutient avoir le droit de rester en France dès lors qu'il a 'payé sa dette à la société'. Il précise également avoir besoin de traitements pour son diabète insulino-dépendant.

Contrairement à ce que prétend le retenu, les condamnations pénales prononcées à de multiples reprises à son encontre établissent qu'il ne s'agit ni de faits isolés, ni anciens.

L'intéressé a été condamné par le tribunal correctionnel de Montpellier le 6 mai 2015 à la peine de huit ans d'emprisonnement pour des faits de trafic de stupéfiants (héroïne et cocaïne), usage de faux documents adminstratifs et conduite de véhicule sans permis.

Le tribunal correctionnel relève qu'il s'agit de faits de trafic de stupéfiants commis en état de récidive légale compte tenu des condamnations pour des faits identiques en 2004 à deux ans d'emprisonnement et en 2007 à 4 ans d'emprisonnement avec interdiction du territoire français pendant cinq ans, que ce trafic était d'ampleur eu égard aux auditions dune dizaine de clients établissant une quantité de trois kilogrammes d'héroïne et le non respect par le condamné de l'interdiction du territoire français.

Le retenu a été ensuite condamné de nouveau, le 19 novembre 2021, par ce même tribunal statuant en comparution immédiate après avoir décerné un mandat de dépôt, à la peine de 4 ans d'emprisonnement pour des faits de trafic de stupéfiants en récidive et a été détenu en exécution de cette peine du 21 octobre 2021 au 23 mai 2024.

La réitération de délits graves en matière de trafic de stupéfiants en dépit de trois précédentes condamnations à de lourdes peines d'emprisonnement caractérise une menace réelle, actuelle et grave à l'ordre public.

Ce seul moyen suffit à justifier la prolongation de la rétention au visa de l'article susvisé.

Enfin, l'intéressé ne produit aucun justificatif démontrant l'incompatibilité de son état de santé avec le maintien en rétention, étant observé que l'ordonnance rendue le 16 juillet 2024 a déjà statué sur cette question en relevant que son diabète était traité par injection quotidienne et un régime alimentaire adapté.

Il y a lieu en conséquence de confirmer l'ordonnance déférée.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement,

Déclarons l'appel recevable,

Confirmons la décision déférée,

Disons que la présente ordonnance sera notifiée conformément à l'article R 743-19 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile,

Fait à Montpellier, au palais de justice, le 16 Août 2024 à 11 h 12.

Le greffier, Le magistrat délégué,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Rétentions
Numéro d'arrêt : 24/00578
Date de la décision : 16/08/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 25/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-08-16;24.00578 ?
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