COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
N° RG 24/00559 - N° Portalis DBVK-V-B7I-QLCR
O R D O N N A N C E N° 2024 -574
du 09 Août 2024
SUR PROLONGATION DE RETENTION D'UN ETRANGER DANS UN ETABLISSEMENT NE RELEVANT PAS DE L'ADMINISTRATION PENITENTIAIRE
dans l'affaire entre,
D'UNE PART :
Monsieur [V] [G]
né le 08 Août 1989 à [Localité 1] (ALGÉRIE)
de nationalité Algérienne
retenu au centre de rétention de [Localité 5] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire,
Comparant et assisté de Maître Maxence DELCHAMBRE, avocat choisi.
Appelant,
et en présence de Madame [W] [N], interprète assermenté en langue arabe,
D'AUTRE PART :
1°) MONSIEUR LE PREFET DE L'HERAULT
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représenté par Monsieur [D] [O], dûment habilité,
2°) MINISTERE PUBLIC :
Non représenté
Nous, Fanny COTTE, vice-présidente placée près Monsieur le premier président de la cour d'appel de Montpellier déléguée aux fonctions de conseiller à la cour d'appel de Montpellier par ordonnance n°2024-66 du 19 février 2024, plus spécialement pour les attributions dévolues par les articles L 741-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assisté de Henriane MILOT, greffière,
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Vu l'arrêté du 13 octobre 2023 notifié à 11h40 de MONSIEUR LE PREFET DE L'HERAULT portant obligation de quitter le territoire national sans délai pris à l'encontre de Monsieur [V] [G].
Vu la décision de placement en rétention administrative du 02 août 2024 de Monsieur [V] [G], pendant 04 jours dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire.
Vu l'ordonnance du 07 Août 2024 à 15h06 notifiée le même jour à la même heure, du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Montpellier qui a décidé de prolonger la rétention administrative pour une durée maximale de vingt-six jours.
Vu la déclaration d'appel faite le 08 Août 2024, par Maître Maxence DELCHAMBRE, avocat, agissant pour le compte de Monsieur [V] [G], transmise au greffe de la cour d'appel de Montpellier le même jour, à 14h52
Vu les télécopies et courriels adressés le 08 Août 2024 à MONSIEUR LE PREFET DE L'HERAULT, à l'intéressé, à son conseil, et au Ministère Public les informant que l'audience sera tenue le 09 Août 2024 à 10 H 00.
L'avocat et l'appelant, qui ont pu préalablement prendre connaissance de la procédure, se sont entretenus, librement, dans le box dédié de l'accueil de la cour d'appel de Montpellier, les portes de la salle étant fermées pour assurer la confidentialité de l'entretien, en la seule présence de l'interprète , et ce, sur le temps de l'audience fixée, avec l'accord du délégué du premier président de la cour d'appel de Montpellier.
L'audience publique initialement fixée à 10 H 00 a commencé à 10h30.
PRETENTIONS DES PARTIES
Assisté de Madame [W] [N], interprète, Monsieur [V] [G] confirme son identité telle que mentionnée dans l'ordonnance entreprise et déclare sur transcription du greffier à l'audience : 'Je m'appelle [G] [V]. Je suis né le 08 août 1989 à [Localité 1] (ALGÉRIE). Je ne supporte pas le centre. Je n'y suis jamais allé. C'est la première fois que je suis dans un CRA. Je suis venu en France en 2021. Je suis ressorti en 2024. Je n'avais pas de titre de séjour. Je n'ai pas régularisé ma situation car je n'ai pas eu l'occasion. Je travaillais. Je faisais les marchés. J'habitais à [Localité 4] puis [Localité 6] dans la Drôme. J'étais à [Localité 6] en 2023. J'étais de passage à [Localité 2]. Depuis février 2024, je vivais en Allemagne. Si je sors du CRA, je retourne en Allemagne'
L'avocat Me Maxence DELCHAMBRE développe les moyens de l'appel formé contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention qui a prolongé le maintien en rétention de l'étranger.
Monsieur [G] était en transit au moment de son arrestation entre l'Allemagne et l'Espagne.
Demande nullité de la procédure : Fondement de l'irrégularité du contrôle identité de monsieur [G] - le premier juge a rejeté ce moyen. La légalité des contrôles des agents de police n'est pas remise en cause mais la raison pour laquelle monsieur [G] a été contrôlé. Rien dans le PV ne précise que mon client était sur le point, avait l'intention ou était entrain de commettre une infraction. Il fumait mais il n'était pas à l'intérieur de la gare.
Sur l'absence de caractère légal de l'interpellation : je vous laisserai apprécier.
Monsieur le représentant de MONSIEUR LE PREFET DE L'HERAULT demande la confirmation de l'ordonnance déférée. Il indique à l'audience : '
Art 78-2 alinea 9 - toute personne peut être contrôlée - les fonctionnaires étaient fondés à contrôler son droit au séjour. Il n'avait aucun document sur lui.
Notification des droits : personne contrôlée dans l'enceinte de la gare puis les conduire au poste - ce délai de 35 minutes est raisonnable
Assisté de Madame [W] [N], interprète, Monsieur [V] [G] a eu la parole en dernier et a déclaré sur transcription du greffier à l'audience : 'Je souhaite sortir. '
Le conseiller indique que l'affaire est mise en délibéré et que la décision sera notifiée par les soins du Directeur du centre de rétention de [Localité 5] avec l'assistance d'un interprète en langue arabe à la demande de l'étranger retenu.
SUR QUOI
Sur la recevabilité de l'appel :
Le 08 Août 2024, à 14 heures 52, Maître Maxence DELCHAMBRE, avocat, agissant pour le compte de Monsieur [V] [G] a formalisé appel motivé de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Montpellier du 07 Août 2024 notifiée à 15h06, soit dans les 24 heures de la notification de l'ordonnance querellée, qu'ainsi l'appel est recevable en application des articles R 743-10 et R 743-11 du CESEDA.
Sur l'appel :
Sur l'irrégularité du contrôle d'identité
Aux termes de l'article 78-2 alinéa 9 du code de procédure pénale, 'dans une zone comprise entre la frontière terrestre de la France avec les Etats parties à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 et une ligne tracée à 20 kilomètres en deçà, ainsi que dans les zones accessibles au public des ports, aéroports et gares ferroviaires ou routières ouverts au trafic international et désignés par arrêté et aux abords de ces gares, pour la prévention et la recherche des infractions liées à la criminalité transfrontalière, l'identité de toute personne peut également être contrôlée, selon les modalités prévues au premier alinéa, en vue de vérifier le respect des obligations de détention, de port et de présentation des titres et documents prévues par la loi. Lorsque ce contrôle a lieu à bord d'un train effectuant une liaison internationale, il peut être opéré sur la portion du trajet entre la frontière et le premier arrêt qui se situe au-delà des vingt kilomètres de la frontière. Toutefois, sur celles des lignes ferroviaires effectuant une liaison internationale et présentant des caractéristiques particulières de desserte, le contrôle peut également être opéré entre cet arrêt et un arrêt situé dans la limite des cinquante kilomètres suivants. Ces lignes et ces arrêts sont désignés par arrêté ministériel. Lorsqu'il existe une section autoroutière démarrant dans la zone mentionnée à la première phrase du présent alinéa et que le premier péage autoroutier se situe au-delà de la ligne des 20 kilomètres, le contrôle peut en outre avoir lieu jusqu'à ce premier péage sur les aires de stationnement ainsi que sur le lieu de ce péage et les aires de stationnement attenantes. Les péages concernés par cette disposition sont désignés par arrêté. Le fait que le contrôle d'identité révèle une infraction autre que celle de non-respect des obligations susvisées ne constitue pas une cause de nullité des procédures incidentes. Pour l'application du présent alinéa, le contrôle des obligations de détention, de port et de présentation des titres et documents prévus par la loi ne peut être pratiqué que pour une durée n'excédant pas douze heures consécutives dans un même lieu et ne peut consister en un contrôle systématique des personnes présentes ou circulant dans les zones ou lieux mentionnés au même alinéa'.
En l'espèce, Monsieur [G] fait valoir que le contrôle d'identité est irrégulier en ce qu'aucun élément objectif déduit de circonstances extérieures à la personne même de l'inétressé, de nature à faire apparaître sa qualité d'étranger n'était mentionné en procédure et qu'il ne commettait pas d'infraction.
Il résulte cependant de la lecture du procès-verbal que l'agent de police judiciaire a procédé au contrôle d'identité de manière aléatoire dans la gare ferroviaire de [Localité 2]conformément à l'article précité qui n'exige pas de faire la démonstration d'élément justifiant le contrôle.
Il convient en conséquence de rejeter le moyen.
Sur le délai entre le contrôle et le placement en retenue judiciaire
L'appelant fait valoir une absence de cadre légal entre le moment du contrôle intervenu le 2 août 2024 à 15 heures et le placement effectif en retenue judiciaire à 15 heures 35 le même jour.
Dans la mesure où les policiers ont procédé au contrôle de trois personnes à compter de 15 heures, ont vérifié leur identité et les documents présentés, ont dû contacter l'officier de police judiciaire pour décider des suites du contrôle et ont ensuite transporté l'intéressé au commissariat, le délai de 35 minutes apparaît raisonnable.
Le moyen sera donc rejeté et l'ordonnance sera confirmée en conséquence.
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement,
Vu l'article 66 de la constitution du 4 octobre 1958,
Vu les articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,
Déclarons l'appel recevable,
Rejetons les exceptions de nullité et moyens soulevés
Confirmons la décision déférée,
Disons que la présente ordonnance sera notifiée conformément à l'article R743-19 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile,
Fait à Montpellier, au palais de justice, le 09 Août 2024 à 13h10.
Le greffier, Le magistrat délégué,