Grosse + copie
délivrées le
à
3e chambre sociale
ARRÊT DU 31 Juillet 2024
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/00187 - N° Portalis DBVK-V-B7D-N66I
ARRÊT n°
Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 OCTOBRE 2018 TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE DE MONTPELLIER
N° RG21700801
APPELANTE :
Madame [M] [V]
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentant : Me BURTIN avoca pour Me Mélanie MARREC de la SELARL LEXEM CONSEIL, avocat au barreau de MONTPELLIER
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2018/017630 du 09/01/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)
INTIMEES :
CPAM DE L'HERAULT
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Mme [T] muni d'un pouvoir général
SASU [8]
[Adresse 5]
[Localité 3]
Représentant : Me LHUISSIER avocat pour Me Morgane COURTOIS D'ARCOLLIERES de la SCP MICHEL LEDOUX ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS
HOTEL [6]
[Adresse 10]
[Localité 2]
non comparante
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 16 MAI 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller faisant fonction de Président
Mme Anne MONNINI-MICHEL, Conseillère
M. Patrick HIDALGO, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : M. Philippe CLUZEL
ARRÊT :
- contradictoire;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, délibéré prorogé au 31/07/2024 les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Monsieur Pascal MATHIS, Président, et par M. Philippe CLUZEL, Greffier.
*
* *
EXPOSÉ DU LITIGE
Mme [V] était engagée par la société par actions simplifiées [8] en qualité d'agent de service à compter du 27 janvier 2011 et suivant contrat à durée indéterminée.
Le 27 août 2015, Mme [V] était victime d'un accident sur son lieu de travail alors qu'elle travaillait au sein de l'hôtel de l'entreprise [7] , la caisse primaire d'assurance maladie notifiait reconnaître le caractère professionnel de l'accident du travail le 09 septembre 2015 à Mme [V] ainsi qu'à l'employeur.
Mme [V] était consolidée le 03 septembre 2016 sans séquelles indemnisables.
Elle saisissait le 17 décembre 2015 la CPAM d'une demande en reconnaissance de faute inexcusable de la société [8] et de l'hôtel [6].
La société [8] adressait un courriel à la CPAM le 19 octobre 2016 et l'informant que l'employeur n'entendait pas participer à une tentative de conciliation.
La société [9] notifiait à la CPAM par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 18 octobre 2016 qu'elle contestait formellement l'existence d'une faute inexcusable de l'employeur à l'origine de l'accident du travail de Mme [V] qui serait survenu le 27 août 2015, imputable à la société [9], Mme [V] n'étant pas salariée de la société.
Le 10 mai 2017, Mme [V] saisissait le Tribunal des affaires de sécurité sociale (TASS) de l'Hérault.
Par jugement du 22 octobre 2018, le TASS a débouté Mme [V] de ses demandes fins et conclusions et dit que le jugement doit être déclaré commun à la société [9] et cie [7].
Le 11 janvier 2019 le conseil de Mme [V] interjetait appel suivant déclaration d'appel électronique enregistrée au greffe de la cour et faisant suite à la notification du jugement intervenue le 06 novembre 2018.
L'affaire a été appelée à l'audience du 16 mai 2024, par ses conclusions soutenues à l'audience par son conseil, Mme [V] demande à la cour de dire et juger recevable l'appel interjeté sur le fond, d'infirmer le jugement entrepris, de dire et juger que l'accident du 27 août 2015 dont elle a été victime est due à la faute inexcusable de la société [8]
en conséquence,
d'ordonner une expertise médicale et de surseoir à statuer sur l'indemnisation des préjudices dans l'attente du rapport d'expertise,
de condamner la société [8] à lui verser la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de laisser les entiers dépens à la charge de la société [8].
Par ses conclusions soutenues à l'audience la société [8] sollicite à titre liminaire que soit déclaré irrecevable l'appel formé le 11 janvier 2019 par Mme [V] et nn conséquence, de confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de l'hérault le 22 octobre 2018
à titre principal :
de débouter Mme [V] de son recours en reconnaissance de faute inexcusable à son encontre, de confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de l'hérault le 22 octobre 2018,
à titre subsidiaire :
1/ sur la majoration de la rente au taux maximum
de débouter Mme [V] de sa demande en majoration de la rente au taux maximum ;
2/ sur la mise en 'uvre d'une expertise médicale judiciaire, de limiter la mission de l'expert à l'évaluation des préjudices temporaires énumérés par l'article l. 452-3 du code de la sécurité sociale et, le cas échéant, aux préjudices temporaires non couverts en tout ou partie ou de manière restrictive par le livre iv du code de la sécurité sociale, à l'exclusion, en tout état de cause, du préjudice de perte de possibilité de promotion professionnelle ;
en tout état de cause :
1/ sur les frais irrépétibles, de débouter ou le cas échéant réduire la somme sollicitée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
2/ sur les dépens, de débouter Mme [V] de sa demande au titre des dépens ou le cas échéant de réserver les dépens jusqu'à liquidation des préjudices.
La CPAM sollicite que lui soit donné acte qu'elle s'en rapporte à justice sur la demande de faute inexcusable de l'employeur et en cas de reconnaissance de la faute inexcusable de ce dernier, de le condamner à lui rembourser toutes les sommes dont elle aura à faire l'avance au titre des frais d'expertise éventuels et des préjudices subis.
Bien que régulièrement convoquée la société [9] ne comparaît pas.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de l'appel :
La société [8] soulève in limine litis la fin de non-recevoir tirée de irrecevabilité de l'appel interjeté après expiration du délai d'un mois par l'appelante.
Il ressort de l'article R. 142-28 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable au litige que les parties peuvent interjeter appel dans un délai d'un mois à compter de la notification.
L'article 38, du décret du n°91-1266 du 19 décembre 1991 dans sa version applicable au litige dispose que lorsqu'une action en justice ou un recours doit être intenté avant l'expiration d'un délai devant les juridictions de première instance ou d'appel, l'action ou le recours est réputé avoir été intenté dans le délai si la demande d'aide juridictionnelle s'y rapportant est adressée au bureau d'aide juridictionnelle avant l'expiration dudit délai et si la demande en justice ou le recours est introduit dans un nouveau délai de même durée à compter :
a) De la notification de la décision d'admission provisoire ;
b) De la notification de la décision constatant la caducité de la demande ;
c) De la date à laquelle le demandeur à l'aide juridictionnelle ne peut plus contester la décision d'admission ou de rejet de sa demande en application du premier alinéa de l'article 56 et de l'article 160 ou, en cas de recours de ce demandeur, de la date à laquelle la décision relative à ce recours lui a été notifiée ;
d) Ou, en cas d'admission, de la date, si elle est plus tardive, à laquelle un auxiliaire de justice a été désigné.
Lorsque la demande d'aide juridictionnelle est déposée au cours des délais impartis pour conclure ou former appel incident, mentionnés aux articles 905-2, 909 et 910 du code de procédure civile, ces délais courent dans les conditions prévues aux b, c et d.
Par dérogation aux premier et sixième alinéas du présent article, les délais mentionnés ci-dessus ne sont pas interrompus lorsque, à la suite du rejet de sa demande d'aide juridictionnelle, le demandeur présente une nouvelle demande ayant le même objet que la précédente.
En l'espèce l'appelante a déposé une demande d'aide juridictionnelle le 26 novembre 2018 ensuite de la notification intervenue le 06 novembre 2018, soit donc dans le délai légal d'un mois à compter de ladite notification.
La décision du bureau d'aide juridictionnelle en date du 09 janvier 2019 a été complétée le 22 janvier 2019 de sorte que l'appel formalisé le 11 janvier 2019 est recevable.
La fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de l'appel interjeté sera dès lors rejetée.
Sur la faute inexcusable de l'employeur
Mme [V] expose que la grille du climatiseur d'une chambre placée en hauteur lui est tombée sur le corps .
Elle considère que le plan de prévention n'a pas été sérieusement établi dès lors qu'il ne fait pas apparaître de risques concernant le travail en hauteur par l'utilisation d'échelles ou d'escabeaux et alors que l'employeur aurait pu éviter la chute de cette grille mal fixée.
La société [8] considère qu'il n'y a pas de faute inexcusable de sa part dès lors que Mme [V] ne devait pas travailler en hauteur et qu'elle n'avait pas de plus pour mission de nettoyer les grilles de climatisation.
La CPAM s'en remet à la décision de la cour sur la faute inexcusable de l'employeur.
Aux termes de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale, lorsque l'accident est dû à la faute inexcusable de l'employeur ou de ceux qu'il s'est substitués dans la direction, la victime ou ses ayants droit ont droit à une indemnisation complémentaire.
Le manquement à l'obligation légale de sécurité et de protection de la santé à laquelle l'employeur est tenu envers le travailleur a le caractère d'une faute inexcusable lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était soumis le travailleur et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.
La conscience du danger s'apprécie au moment où pendant la période de l'exposition au risque.
La charge de la preuve de la faute inexcusable incombe au salarié qui l'invoque .
En l'espèce la salariée reproche au plan de prévention établi de ne prévoir aucune évaluation portant sur le travail en hauteur ce dont elle en déduit qu'il n'a pas été sérieusement établi alors que le risque concernant le travail en hauteur existe ce d'autant qu'elle communique une attestation établie par Mme [U] mentionnant que certaines grilles n'étaient pas bien fixées.
Pour autant, force est de constater, à l'examen de la fiche de poste de la salariée, particulièrement précise, détaillée et imagée, qui est produite par l'intimée, qu'aucun travail en hauteur n'était prévu dans le cadre de ses tâches à accomplir de sorte que le plan de prévention ne porte aucune mention sur les travaux en hauteur s'agissant d'un risque non identifié parce que sans objet.
Si la fiche de poste, intitulée « circuit de nettoyage de la chambre » examine très précisément l'ensemble des tâches à exécuter par la salariée, il apparaît d'une part comme énoncé supra, qu'aucun travail en hauteur n'est prévu et d'autre part qu'il n'est pas plus mentionné que la salariée devait assurer le nettoyage de la grille des climatiseurs situés dans les chambres, sa seule tâche à cet égard étant de :
- vérifier le bon fonctionnement de la climatisation et du chauffage
- vérifier la présence d'un mode d'emploi pour la climatisation réversible
- régler le chauffage sur 18/20 en hiver et 24/25 en été.
Il en ressort que Mme [V], est allée au-delà des tâches qui lui incombaient en procédant à un nettoyage qui ne relevait pas de son poste et qu'elle ne peut dès lors faire grief à l'employeur de ne pas avoir eu conscience d'un risque qu'il ne pouvait envisager.
Par conséquent, Mme [V] est défaillante dans son obligation de rapporter la preuve que son employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel elle était exposée et de l'absence de mise en 'uvre des mesures de protection nécessaires pour la protéger.
Il convient dès lors de confirmer la décision du TASS de ce chef.
Sur les autres demandes :
Mme [V] qui succombe en appel sera condamnée aux dépens.
L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice des intimés.
PAR CES MOTIFS
Rejette la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Mme [V] aux dépens.
LE GREFFIER LE PRESIDENT