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11/07/2024 | FRANCE | N°24/00480

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Rétentions, 11 juillet 2024, 24/00480


COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

N° RG 24/00480 - N° Portalis DBVK-V-B7I-QJWT



O R D O N N A N C E N° 2024 - 491

du 11 Juillet 2024

SUR LE CONTROLE DE LA REGULARITE D'UNE DECISION DE PLACEMENT EN RETENTION ET SUR LA PROLONGATION D'UNE MESURE DE RETENTION ADMINISTRATIVE

ET

SUR REQUÊTE DE L'ETRANGER EN CONTESTATION DU PLACEMENT EN RETENTION ADMINISTRATIVE



dans l'affaire entre,



D'UNE PART :



Monsieur X se disant [B] [U]

né le 22 Mai 1996 à [Localité 3] (TUNISIE)

de nationalité Tunisien

ne



retenu au centre de rétention de [Localité 4] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire,



Comparant par visio con...

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

N° RG 24/00480 - N° Portalis DBVK-V-B7I-QJWT

O R D O N N A N C E N° 2024 - 491

du 11 Juillet 2024

SUR LE CONTROLE DE LA REGULARITE D'UNE DECISION DE PLACEMENT EN RETENTION ET SUR LA PROLONGATION D'UNE MESURE DE RETENTION ADMINISTRATIVE

ET

SUR REQUÊTE DE L'ETRANGER EN CONTESTATION DU PLACEMENT EN RETENTION ADMINISTRATIVE

dans l'affaire entre,

D'UNE PART :

Monsieur X se disant [B] [U]

né le 22 Mai 1996 à [Localité 3] (TUNISIE)

de nationalité Tunisienne

retenu au centre de rétention de [Localité 4] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire,

Comparant par visio conférence à la demande de Monsieur le préfet du Var et assisté par Maître Stéphanie LEAL - BERNARD, avocat commis d'office

Appelant,

D'AUTRE PART :

1°) MONSIEUR LE PREFET DU VAR

[Adresse 2]

[Localité 1]

Non représenté

2°) MINISTERE PUBLIC

Non représenté

Nous, Fanny COTTE, vice-présidente placée près Monsieur le premier président de la cour d'appel de Montpellier déléguée aux fonctions de conseiller à la cour d'appel de Montpellier par ordonnance n°2024-66 du 19 février 2024, et plus spécialement pour les attributions dévolues par les articles L 741-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assisté de Alexandra LLINARES, greffier,

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Vu les dispositions des articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu l'arrêté du 23 décembre 2022 de MONSIEUR LE PREFET DU VAR portant obligation de quitter le territoire national sans délai avec interdiction de retour d'un an pris à l'encontre de Monsieur X se disant [B] [U] ;

Vu la décision de placement en rétention administrative du 6 juillet 2024 de Monsieur X se disant [B] [U] pendant 48 heures dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ;

Vu la requête de Monsieur X se disant [B] [U] en contestation de la régularité de la décision de placement en rétention administrative en date du 8 juillet 2024 ;

Vu la requête de MONSIEUR LE PREFET DU VAR en date du 7 juillet 2024 tendant à la prolongation de la rétention de Monsieur X se disant [B] [U] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pour une durée vingt-huit jours ;

Vu l'ordonnance du 08 Juillet 2024 à 17 h 25 notifiée le même jour à la même heure, du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Perpignan qui a :

- rejeté la requête en contestation de la régularité de la décision de placement en rétention administrative formée par Monsieur X se disant [B] [U],

- ordonné la prolongation de la rétention administrative de Monsieur X se disant [B] [U] , pour une durée de vingt-huit jours ;

Vu la déclaration d'appel faite le 09 Juillet 2024 par Monsieur X se disant [B] [U] du centre de rétention administrative de [Localité 4], transmise au greffe de la cour d'appel de Montpellier le même jour à 14 h 45,

Vu les courriels adressés le 10 Juillet 2024 à MONSIEUR LE PREFET DU VAR, à l'intéressé et à son conseil et au Ministère Public les informant que l'audience sera tenue le 11 Juillet 2024 à 10 H 00,

L'avocat et l'appelant, qui ont pu préalablement prendre connaissance de la procédure, se sont entretenus, librement, dans la salle d'audienc du centre de rétention de [Localité 4], les portes de la salle étant fermées pour assurer la confidentialité de l'entretien et ce, sur le temps de l'audience fixée, avec l'accord du délégué du premier président de la cour d'appel de Montpellier

L'audience publique initialement fixée à 10 H 00 a commencé à 10 h 06.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Monsieur X se disant [B] [U] déclare sur transcription du greffier à l'audience : 'Je m'appelle [B] [U], je suis né le 22 Mai 1996 à [Localité 3] (TUNISIE). J'avais une vie, je travaillais, j'avais un appartement et maintenant, je me retrouve au CRA. Si vous me laissez sortir, je partirai et je ferai des démarches pour être régularisé et revenir. C'était pas prévu, je savais que j'avais une OQTF mais j'ai trouvé du travail, je paye mes impôts. Ma famille est dans une situation catastrophique. Pour me régulariser, j'ai déclaré mes impôts, j'ai pris une assurance pour mon appartement, il faut 12 mois de démarches pour demander un titre de séjour.

Je suis en France depuis3 ans. Je suis marié, ma femme est enceinte. Nous vivons à [Localité 5]. Mon père vit en France. Je voudrais sortir pour pouvoir régler ma situation.'

L'avocat, Me Stéphanie LEAL - BERNARD développe les moyens de l'appel formé contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention qui a prolongé le maintien en rétention de l'étranger.

- Monsieur n'a pas de casier judiciaire, il n'est pas une menace pour l'ordre public et travaille dans un métier à tension. Il envisageait une procédure de régularisation auprès de la préfecture avant cette dispute conjugale à la suite de laquelle il a été placé en garde à vue. Son épouse est présente aujourd'hui, elle est enceinte et souhaite revenir sur ses propos dans son audition. Monsieur est domicilié sur [Localité 5], il a un bail à son nom et paye ses impôts sur le territoire. Il ne constitue pas une menace pour l'ordre public, il se plie à la loi française et souhaite être régularisé.

- erreur d'appréciation de la préfecture : Monsieur n'est frappé que d'une seule OQTF, il ne s'est donc pas soustrait à une mesure d'éloignement, contrairement à ce qui est indiqué.

- renonce aux moyens de nullité concernant la visio et la non rétro activité de la loi concernant l'OQTF.

Monsieur le représentant de MONSIEUR LE PREFET DU VAR ne comparait pas mais a fait parvenir un mémoire tendant à voir confirmer l'ordonnance déférée.

Monsieur X se disant [B] [U] a eu la parole en dernier et et a déclaré sur transcription du greffier à l'audience : 'je voudrais être libéré, ma femme est dans une situation catastrophique et je dois aller travailler.'

Le conseiller indique que l'affaire est mise en délibéré et que la décision sera notifiée par les soins du Directeur du centre de rétention de [Localité 4].

SUR QUOI

Sur la recevabilité de l'appel

Le 09 Juillet 2024, à 14 h 45, Monsieur X se disant [B] [U] a formalisé appel motivé de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Perpignan du 08 Juillet 2024 notifiée à 17 h 25, soit dans les 24 heures de la notification de l'ordonnance querellée, qu'ainsi l'appel est recevable en application des articles R 743-10 et R743-11 du CESEDA.

Sur l'appel

Sur le défaut d'examen réel et sérieux de la situation de Monsieur [U]

Aux termes des articles L741-1 et L731-1du CESEDA, l'autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quarante-huit heures, l'étranger qui

1° fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, prise moins de trois ans auparavant, pour laquelle le délai de départ volontaire est expiré ou n'a pas été accordé ;

2° doit être éloigné en exécution d'une interdiction de retour sur le territoire français prise en application des articles L. 612-6, L. 612-7 et L. 612-8 ;

3° doit être éloigné pour la mise en 'uvre d'une décision prise par un autre État, en application de l'article L. 615-1 ;

4° doit être remis aux autorités d'un autre Etat en application de l'article L. 621-1 ;

5° doit être éloigné en exécution d'une interdiction de circulation sur le territoire français prise en application de l'article L. 622-1 ;

6° fait l'objet d'une décision d'expulsion ;

7° doit être éloigné en exécution d'une peine d'interdiction judiciaire du territoire prononcée en application du deuxième alinéa de l'article 131-30 du code pénal ;

8° doit être éloigné en exécution d'une interdiction administrative du territoire français.

Et qui ne présente pas de garantie de représentation propre à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision.

Le risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement est apprécié selon les mêmes critères prévus à l'article L612-3 ou au regard de la menace pour l'ordre public que l'étranger représente

Selon l'article L 743-13 du CESEDA':' «'Le juge des libertés et de la détention peut ordonner l'assignation à résidence de l'étranger lorsque celui-ci dispose de garanties de représentation effectives.

L'assignation à résidence ne peut être ordonnée par le juge qu'après remise à un service de police ou à une unité de gendarmerie de l'original du passeport et de tout document justificatif de son identité, en échange d'un récépissé valant justification de l'identité et sur lequel est portée la mention de la décision d'éloignement en instance d'exécution.

Lorsque l'étranger s'est préalablement soustrait à l'exécution d'une décision mentionnée à l'article L. 700-1, à l'exception de son 4°, l'assignation à résidence fait l'objet d'une motivation spéciale.'»

En l'espèce, Monsieur [B] [U] fait reproche à l'arrêté préfectoral portant placement en rétention administrative du 6 juillet 2024 pris par Monsieur le Préfet du Var de ne pas avoir procédé à un examen réel et sérieux de sa situation personnelle, sachant qu'il travaille et dispose de bulletins de salaire, que son père et sa soeur sont en France et qu'il est locataire d'un logement où il projette de s'installer avec sa compagne, actuellement enceinte.

A titre liminaire, il convient de rappeler que l'autorité préfectorale n'a pas l'obligation d'énoncer tous les éléments de personnalité dont elle dispose et peut se cantonner à énumérer les motifs positifs de fait et de droit qui justifient la mesure qu'elle prend.

En outre, les éléments critiqués par l'appelant visent à contester la mesure d'éloignement dont l'appréciation et le contrôle relèvent de la compétence des juridictions administratives. Le juge judiciaire est tenu de vérifier que l'autorité administrative a respecté l'article L741-6 du CESEDA qui lui impose de rendre une décision écrite et motivée en matière de rétention administrative.

Monsieur le Préfet du Var a motivé l'arrêté de placement en rétention administrative en relevant :

- qu'il ne pouvait présenter de document d'identité ou de voyage en cours de validité,

- qu'il déclarait résider à [Localité 5] sans préciser l'adresse exacte et apporter un justificatif pour le confirmer,

- qu'il a été interpellé le 6 juillet 2024 et placé en garde-à-vue pour violences sur conjoint,

- qu'il n'envisage pas de retour en Tunisie,

- qu'il a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire à laquelle il n'a pas déféré,

- que les éléments qu'il a communiqués à l'appui de ses déclarations portant sur son souhait de rester en France et d'y travailler ne justifient pas la non mise à exécution de la mesure de rétention.

Il résulte de ces éléments que l'autorité préfectorale a justement motivé l'arrêté de placement en rétention administrative en tenant compte des éléments qu'elle avait à disposition et en l'absence de justificatif du contrat de bail et des bulletins de paie à l'édiction de l'arrêté de placement en rétention. Il ne peut lui être fait grief d'avoir manqué à son obligation de motivation au vu des informations dont elle disposait et du contexte entourant le placement en garde-à-vue de l'intéressé.

Monsieur [U], bien qu'il démontre travailler (il ne justifie cependant pas d'un contrat de travail), est en situation irrégulière, dépourvu de titre d'identité ou de voyage valide, n'a pas remis son passeport et fait l'objet d'une mesure d'éloignement.

Dès lors, l'arrêté de placement en rétention administrative n'est pas irrégulier.

Il convient donc de rejeter le moyen et de confirmer l'ordonnance entreprise.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement,

Vu l'article 66 de la constitution du 4 octobre 1958,

Vu les articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

Déclarons l'appel recevable,

Rejetons les moyens soulevés,

Confirmons la décision déférée,

Disons que la présente ordonnance sera notifiée conformément à l'article R 743-19 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile,

Fait à Montpellier, au palais de justice, le 11 Juillet 2024 à 11 heures 40.

Le greffier, Le magistrat délégué,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Rétentions
Numéro d'arrêt : 24/00480
Date de la décision : 11/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-11;24.00480 ?
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