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02/07/2024 | FRANCE | N°22/05171

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Chambre commerciale, 02 juillet 2024, 22/05171


ARRÊT n°































Grosse + copie

délivrées le

à































COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



Chambre commerciale



ARRET DU 02 JUILLET 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 22/05171 - N° Portalis DBVK-V-B7G-PSLH





Décision déférée à la Cour :

J

ugement du 13 SEPTEMBRE 2022

TRIBUNAL DE COMMERCE DE NARBONNE

N° RG 2021 001402





APPELANT :



Monsieur [I] [E]

de nationalité Française

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 1]

Représenté par Me Elsa LANAU de la SCP ASA AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de NARBONNE







INTIMES :



Monsieur [G] [S] exerçant sous l'e...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

Chambre commerciale

ARRET DU 02 JUILLET 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 22/05171 - N° Portalis DBVK-V-B7G-PSLH

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 13 SEPTEMBRE 2022

TRIBUNAL DE COMMERCE DE NARBONNE

N° RG 2021 001402

APPELANT :

Monsieur [I] [E]

de nationalité Française

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 1]

Représenté par Me Elsa LANAU de la SCP ASA AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de NARBONNE

INTIMES :

Monsieur [G] [S] exerçant sous l'enseigne E.C.O Habitat

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 1]

Assigné à personne le 13.12.2022

S.A.R.L. SSP MEDITERRANEE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités audit siège

[Adresse 7]

[Adresse 7]

[Localité 1]

Représentée par Me Estelle CONQUET de la SELARL CLEMENT MALBEC CONQUET, avocat au barreau de NARBONNE

S.A.S. MANGANARI (AQUASCULPTURES) prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège

[Adresse 4]

[Localité 5]

Assignée à personne habilitée le 12.12.2022

Ordonnance de clôture du 30 Avril 2024

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 914-5 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 MAI 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par le même article, devant la cour composée de :

Mme Danielle DEMONT, présidente de chambre

Mme Anne-Claire BOURDON, conseillère

M. Thibault GRAFFIN, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Audrey VALERO

ARRET :

- Réputé contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Mme Danielle DEMONT, présidente de chambre, et par Mme Audrey VALERO, greffière.

FAITS, PROCEDURE - PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES:

La SARL S.S.P. Méditerranée, immatriculée le'3 mai 2004, exerce une activité de gardiennage, transport de fonds, et sécurité à [Localité 1].

Le 26 octobre 2017, la société S.S.P. Méditerranée, en qualité de maître d'ouvrage, a conclu un contrat de maîtrise d''uvre avec M. [G] [S], entrepreneur individuel exerçant son activité sous l'enseigne E.C.O. Habitat, aux fins, notamment, de conduire, les travaux d'aménagement d'un local de bureau, situé au [Adresse 2] à [Localité 1].

Par devis accepté du 16 mai 2018, la société S.S.P. Méditerranée a confié à M. [I] [E], pépiniériste, la création d'un mur végétalisé pour la somme de 8 367,60 euros, la facture correspondante a été émise sous le 4 juillet 2018.'

Par bon de commande n°2018055899 du 23 mai 2018, la société S.S.P. Méditerranée a commandé auprès de la SAS Manganari, exerçant sous l'enseigne AquaSculptures, un mur d'eau Iguacu d'un montant de 959 euros TTC, la facture correspondante a été émise le 24 mai 2018.

Par lettre du 20 septembre 2018, la société S.S.P. Méditerranée a demandé à la société Manganari'de réparer ou de remplacer la pompe défectueuse de la fontaine installée le 4 septembre 2018.

Le 25 septembre 2018, un procès-verbal de réception des travaux, assorti de réserves concernant les travaux de M. [E], trois plantes, ayant dépéri, devant être remplacées, a été établi sans être signé par le maître d'ouvrage et les entreprises.

Par lettres recommandées du 12 avril 2019, la société S.S.P. Méditerranée a mis en demeure d'une part, M. [E] et d'autre part, la société AquaSculptures, d'intervenir au plus vite.

En réponse, par lettre du 15 avril 2019, M. [E] a indiqué que les éventuels problèmes rencontrés étaient garantis par la proposition de maintenance annuelle, qui a été refusée et que compte tenu du paiement de la facture, qui a opéré un transfert de propriété, ceux-ci lui incombent.

Par ordonnance de référé du 29 octobre 2019, le président du tribunal de commerce de Narbonne a fait droit à la demande de la société S.S.P. Méditerranée en ordonnant une mesure d'expertise judiciaire avec pour mission, notamment, de constater les désordres affectant le mur végétal et le mur d'eau et de déterminer les responsabilités.

L'expert judiciaire a terminé ses opérations d'expertise le 30 octobre 2020.

Par actes d'huissier du 14 juin 2021, la société S.S.P. Méditerranée a assigné la société Manganari, M. [E] et M. [G] [S] aux fins de voir prononcer la résolution des contrats conclus avec restitution et paiement de dommages et intérêts.

Par jugement réputé contradictoire du 13 septembre 2022, le tribunal de commerce de Narbonne a :

- dit que le rapport d'expertise de M. [L] est parfaitement régulier et débouté M. [I] [E] de sa demande de voir déclarer nul ledit rapport;

- constaté qu'il existe une inexécution sérieuse dans le cadre du contrat liant la société S.S.P. Méditerranée et la société Manganari (AquaSculpture);

- prononcé la résolution du contrat faisant l'objet de la commande n°2018055899, en date du 23 mai 2018, d'un mur d'eau Iguacu aux torts exclusifs de la société Manganari ;

- condamné la société Manganari à payer à la société S.S.P. Méditerranée la somme de 959 euros avec intérêts au taux légal à compter du 12 avril 2019, date de la mise en demeure ;

- débouté la société S.S.P. Méditerranée de sa demande à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive de la société Manganari ;

- dit que la société Manganari récupèrera à ses frais, dans les locaux de la société S.S.P. Méditerranée, la fontaine Iguacu, après paiement des sommes dues ;

- constaté qu'il existe une inexécution sérieuse dans le cadre du contrat liant la société S.S.P. Méditerranée et [I] [E] ;

- prononcé la résolution du contrat numéro DV 2018 026 en date du 16 mai 2018 pour un montant TTC de 8 367,60 euros aux torts partagés de M. [I] [E] à hauteur de 70% et de M. [G] [S] à hauteur de 30% ;

- condamné M. [I] [E] à payer à la société S.S.P. Méditerranée la somme de 5 857,32 euros avec intérêts au taux légal à compter du 12 avril 2019, date de la mise en demeure ;

- condamné M. [G] [S] à payer à la société S.S.P. Méditerranée la somme de 2 510,28 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 12 avril 2019, date de la mise en demeure ;

- dit que M. [I] [E] procèdera à ses frais au retrait du mur végétal et du système d'irrigation, après paiement des sommes dues ;

- débouté la société S.S.P. Méditerranée de sa demande de paiement au titre de la remise en état du mur de réception de l'ouvrage ;

- débouté la société S.S.P. Méditerranée de ses demandes à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

- débouté les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires ;

- condamné la société Manganari, M. [I] [E] et M. [G] [S] à payer chacun à la société S.S.P. Méditerranée la somme de 300 euros, au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné à parts égales la société Manganari, M. [I] [E] et M. [G] [S] aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire et de constat d'huissier du 2 mai 2019.

Par déclaration du 11 octobre 2022, M. [E] a relevé appel de ce jugement.

Par conclusions du 8 septembre 2023, il demande à la cour, au visa des articles 175 et suivants, 232, 233, 278, 796 et 700 du code de procédure civile, et des articles 1344 et 1344-1 du code civil, de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la S.S.P. Méditerranée de ses demandes liées au coût des travaux de remise en état du mur mais le réformer pour le reste et ainsi ;

- déclarer nul le rapport d'expertise déposé par M. [L] le 30 octobre 2020 ;

- débouter la société S.S.P. Méditerranée de l'ensemble de ses demandes, tant de résolution que de condamnation au titre d'une résistance abusive ;

- juger que la société S.S.P. Méditerranée est seule responsable de la dégradation de l'état du mur végétal installé par M. [E] ;

- débouter la société S.S.P. Méditerranée de sa demande formulée à titre subsidiaire de condamnation à la somme de 6 207,32 euros à titre de dommages-intérêts ;

- condamner la société S.S.P. Méditerranée ou tout autre succombant à la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens en ce compris les frais d'huissier et ceux d'expertise.

Au soutien de son appel, il fait essentiellement valoir que :

- le rapport d'expertise est nul, car l'expert a agi hors de son domaine de compétence (architecture, enduits, toiture), celui-ci étant incompétent dans le domaine de l'horticulture,

- il a fait des recherches sur internet pour se documenter, il a effectué des mesures avec un smartphone, et a refusé tout appel à un sapiteur, il a fait montre d'hostilité à son égard et a modifié sans raison et sans prévenir le partage de responsabilité initialement proposé,

- il n'y a pas de défaut de conception, il n'a choisi ni l'emplacement du mur, ni de la fontaine, aucune mort prématurée des plantes n'est rapportée, le changement de trois plantes en juillet 2018 n'étant pas probant,

- l'intimée a fait le choix de ne pas prendre de contrat de maintenance, le procès-verbal de constat a été établi près d'une année après l'installation'; il s'agit d'un défaut d'entretien,

- aucun défaut d'exécution du système d'arrosage n'est rapporté, le schéma d'irrigation du fabricant est un simple exemple et n'avait pas à être respecté,

- les vannes manuelles avaient été bien positionnées, elles ont été manipulées postérieurement à leur installation, le clapet anti-retour avait été installé, il a été enlevé après le premier accédit,

- il n'y a pas de manquement au devoir de conseil, la société intimée ayant refusé de souscrire un contrat d'entretien,

- en l'absence de manquements contractuels, y compris l'absence de communication de l'attestation d'assurance, il ne peut y avoir de dommages-intérêts,

- il n'y a pas de mise en demeure susceptible de faire courir les intérêts légaux,

- il n'y a pas de résistance abusive, il a offert un contrat de maintenance, il est intervenu en septembre 2018,

- l'expert ne peut prétendre à une rémunération, il ne doit pas supporter les dépens.

Par conclusions du 9 mars 2023, formant appel incident, signifiées le 15 mars 2023 à la société Manganari par remise à personne et à M. [S] par remise à personne également, la société S.S.P. Méditerranée demande à la cour, au visa des articles 175 et suivants, 232, 233 et 278 du code de procédure civile, et des articles 1101, 1227 et suivants, 1344 et 1344-1 du code civil, de :

- confirmer le jugement entrepris, mais le réformer en ce qu'il a rejeté ses demandes relatives à la remise en état du mur et tenant à la résistance abusive des requis ;

- condamner M. [E] à payer 70% du coût de la remise en état du mur soit la somme de 350 euros ;

- condamner M. [S] à payer 30% du coût de la remise en état du mur soit la somme de 150 euros ;

- à titre subsidiaire et si la cour devait réformer le jugement en ce qu'il a prononcé la résolution des contrats de la société Manganari et de M. [E], juger que les requis ont commis des fautes contractuelles et juger que les responsabilités contractuelles des requis sont engagées ;

- en conséquence,

- condamner la société Manganari à lui payer la somme de 959 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par sa faute contractuelle, ayant vendu un mur d'eau qui ne fonctionne pas ;

- condamner M. [E] à lui payer la somme de 6 207,32 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par les fautes contractuelles de [I] [E] : défaut généralisé de conception et d'exécution, manquement au devoir de conseil, défaut d'assurance ;

- condamner M. [G] [S] à lui payer la somme de 2660,28 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par ses fautes contractuelles (défaut de conception, défaut d'assurance) ;

- et, dans tous les cas :

- condamner la société Manganari à lui payer la somme de 500 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice d'image subi du fait de sa résistance abusive ;

- condamner M. [S] à lui payer la somme de 1 000 euros de dommages- intérêts en réparation du préjudice d'image subi du fait de sa résistance abusive ;

- condamner M. [E] à lui payer la somme de 3 000 euros de dommages intérêts en réparation du préjudice d'image subi du fait de sa résistance abusive, ainsi que la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens ;

- les débouter de toutes leurs demandes contraires.

Elle expose en substance que :

- malgré ses dires pendant l'expertise, l'appelant n'a pas évoqué la partialité ou hostilité de l'expert,

- l'expert a répondu à la contestation de sa compétence sans que l'appelant, particulièrement virulent, ne sollicite sa récusation, ses critiques sont tardives,

- l'absence de compétence en matière de végétaux ne le privait pas de toute compétence, les causes des désordres (mauvaise implantation au regard de la lumière) étant évidentes,

- l'appelant ne développe aucun argument technique susceptible de remettre en cause la démarche de l'expert quant à la source de la documentation et les mesures de luminosité,

- le défaut d'exécution du réseau d'irrigation, seconde cause des désordres, ne relevait pas d'une compétence en matière de végétaux,

- l'expert n'a pas fait preuve de partialité, mais a seulement constaté la mauvaise foi de l'appelant et son rapport reprend le partage de responsabilité envisagé dans une note précédente,

- l'expert a retenu un vice intrinsèque du mur d'eau fourni par la société Manganari (dysfonctionnement de la fontaine et de la pompe), un défaut de conception du mur végétal avec un choix d'emplacement et des plantations hétérogènes et un éclairage hétérogène et un défaut d'exécution du réseau d'irrigation, empêchant le bon fonctionnement de la pompe doseuse,

- le dépérissement des plantes a été constaté dès le mois de juillet suivant, puis en septembre 2018, en octobre et janvier 2019, l'appelant a refusé'd'intervenir,

- l'entreprise [E] a manqué à son devoir de conseil dans l'implantation, le choix des plantes et la luminosité ainsi qu'en ne fournissant aucune notice technique sur l'entretien, préférant proposer un contrat d'entretien onéreux qu'elle n'a pas exécuté,

- la résolution des deux contrats est justifiée, mais la restitution du mur avec le système d'irrigation va endommager celui-ci, la remise en état doit être retenue (500 euros HT),

- à défaut de résolution, les manquements contractuels justifient une indemnisation,

- elle subit un préjudice d'image (mur végétal avec des plantes mortes dans son hall d'entrée) du fait de la résistance abusive.

Il est renvoyé, pour l'exposé exhaustif des moyens des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

La société Manganari, destinataire de la déclaration d'appel et des conclusions par acte d'huissier en date du 12 décembre 2022, remis à personne habilitée, n'a pas constitué avocat.

M. [G] [S], destinataire de la déclaration d'appel et des conclusions par acte d'huissier en date du 13 décembre 2022, remis à personne, n'a pas constitué avocat.

L'ordonnance de clôture est datée du 30 avril 2024.

MOTIFS DE LA DECISION :

1- sur la nullité du rapport d'expertise judiciaire

Selon l'article 233 du code de procédure civile, le technicien investi de ses pouvoirs par le juge en raison de sa qualification, doit remplir personnellement la mission qui lui est confiée.

L'article 237 du même code prévoit que le technicien commis doit accomplir sa mission avec conscience, objectivité et impartialité.

Les irrégularités affectant le déroulement des opérations d'expertise sont sanctionnées selon les dispositions de l'article 175 du code de procédure civile, qui renvoient aux règles régissant la nullité des actes de procédure, et notamment aux irrégularités de forme de l'article 114 de ce code, dont l'inobservation ne peut être sanctionnée par la nullité qu'à charge de prouver un grief.

Contrairement à ce que soutient l'appelant, la mission de l'expert, inscrit en matière de technique du bâtiment (architecture, enduits, gestion de projet, revêtements intérieurs et toiture), entrait dans ses chefs de compétence s'agissant de constater les désordres de constructions, à savoir un mur d'eau (ou fontaine) et un mur végétal, pour lequel le dépérissement des plantes n'était que la conséquence des éventuels dysfonctionnements à rechercher et analyser. Seule l'absence de tels dysfonctionnements en présence du dépérissement constaté aurait, le cas échéant, justifié un recours à un sapiteur spécialisé en matière d'horticulture.

Au demeurant, ce dépérissement n'était pas contesté en soi, mais seulement dans sa temporalité.

Les recherches documentaires sur l'internet de l'expert judiciaire sont fondées en ce que M. [E], lui-même professionnel, ne remet pas en cause, en s'appuyant sur d'autres données techniques, ces documents, qui ont été soumis à la discussion des parties. De même, les mesures effectuées par l'expert judiciaire à l'aide d'un smartphone en lieu et place d'un outil spécifique, tel qu'un luxmètre, seront retenues en l'absence de tout élément technique contraire apporté par M. [E].

Enfin, M. [E] ne démontre pas que l'expert aurait fait preuve de partialité, en ce que sa réponse au dire en date du 22 octobre 2020 (le sixième), dans laquelle il considère que «'ce dernier dire montre [l]a mauvaise foi'» de l'appelant, résulte de l'analyse de l'argumentation de ce dernier et non d'un préjugé ou d'un parti pris, antérieur aux opérations d'expertise, tandis que le partage de responsabilité, retenu dans le rapport final, figurait dans les mêmes proportions, dans le pré-rapport (note de synthèse du 13 février 2020).

En conséquence, le rapport d'expertise judiciaire n'encoure aucune nullité. Cette demande sera rejetée.

2- sur la responsabilité contractuelle

2.1. Les chefs de dispositif du jugement relatif à la responsabilité de la société Manganari et à la résolution du contrat la liant à la société S.S.P. Méditerranée, et ses conséquences, n'étant pas critiqués, la cour n'en est pas saisie.

2.2. Le rapport d'expertise judiciaire retient l'existence d'un désordre affectant le mur végétal, qui présente de nombreuses plantes ayant dépéri. Il considère que celui-ci relève d'un défaut de conception quant à son emplacement, au choix inadapté de plantes hétérogènes et à un éclairage hétérogène, ainsi qu'à un défaut d'exécution dans le réseau d'irrigation (non-conformités aux prescriptions du fabricant), imputable à hauteur de 70% pour le défaut généralisé de conception et d'exécution à M. [E] et à hauteur de 30% pour le défaut de conception à M. [S], maître d''uvre.

Les chefs de dispositif du jugement relatif à la responsabilité de M. [S] quant à une mauvaise conception du mur végétal, en ce qu'il a défini une position inadaptée lors du tracé de l'aménagement du local, les parties Est et Ouest ne recevant pas la même lumière (présence d'une baie vitrée à l'Ouest) et aucun éclairage artificiel n'ayant été installé, n'étant pas critiqués, la cour n'en est pas saisie.

M. [E], en sa qualité de professionnel, devait, pour sa part, s'il estimait le choix de l'emplacement du mur inadapté, refuser d'exécuter sa prestation, ce qu'il n'a pas fait.

Après avoir installé le mur végétal entre le 26 et 29 juin 2018, M. [E] a dû dès le 23 juillet 2018 remplacer des plantes, ce qui démontre, en l'absence de tout autre élément, que celles-ci ont commencé à dépérir immédiatement, dans le cadre d'un dysfonctionnement affectant ledit mur et que le dépérissement ne résultait pas d'un défaut d'entretien. Le procès-verbal de constat, en date du 2 mai 2019, qui décrit un mur inégalement végétalisé avec deux espèces de plantes, seulement, ayant prospéré et vingt emplacements vides, confirme le caractère prématuré du dépérissement.

Il est établi que les variétés de plantes installées présentaient des besoins en luminosité et hygrométrie différents, qui n'ont pas été pris en compte dans leur implantation sur le mur.

Les opérations d'expertise montrent également sans ambiguïté que le système d'arrosage est défaillant du fait d'une mauvaise installation (absence sur le réseau primaire du filtre et clapet anti-retour et sur le réseau secondaire d'un purgeur d'air contrairement aux préconisations du fabricant), aucune fertilisation n'ayant été injectée dans le réseau, tandis que M. [E] ne démontre nullement une quelconque manipulation, par un tiers, des vannes by-pass ou du clapet anti-retour après son intervention en juin 2018 et entre les deux accédits, qui serait la cause du dysfonctionnement constaté.

Il ne peut, davantage, arguer du refus initial de son cocontractant de souscrire un contrat de maintenance pour justifier du dépérissement des plantes, alors qu'il lui appartenait d'installer un mur végétal en état de fonctionnement.

Il en résulte que M. [E] a commis une inexécution contractuelle en concevant un mur végétal ne permettant pas la croissance des plantes, qu'il avait choisies et en installant un système d'irrigation sans respecter les règles de l'art.

Les manquements contractuels de M. [E], qui ont fait obstacle à la réalisation du mur végétal que la S.S.P. Méditerranée lui avait confiée, sont suffisamment graves pour justifier la résolution du contrat de fourniture et installation de ce mur végétal.

Le partage de responsabilité entre M. [S] et M. [E] dans la conception du mur végétal à hauteur de 30 % pour le premier et 70 % pour le second n'est pas critiqué et sera retenu.

En conséquence, eu égard à la demande formée par la société S.S.P. Méditerranée, M. [E] sera condamné à restituer la somme de 5'857,32 euros et devra procéder, à ses frais, au démontage du mur et du système d'irrigation, tandis que M. [S] sera condamné, au titre de ses propres manquements contractuels, à verser la somme de 2 510,28 euros et ce avec intérêts au taux légal à compter du 14 juin 2021, date de l'assignation introductive d'instance (en l'absence de mise en demeure de payer antérieure).

2.3. Il est manifeste que la remise en état du mur après le démontage du mur végétal nécessitera des travaux de peinture, pour lesquels la société S.S.P. Méditerranée verse aux débats un devis en date du 28 avril 2021 d'un montant, approprié, de 500 euros, que M. [E] et M. [S] seront condamnés à lui payer dans les mêmes proportions que celles retenues ci-dessus.

2.4. La S.S.P. Méditerranée sollicite la réparation d'un préjudice d'image du fait de la résistance abusive de ses cocontractants, arguant de leur passivité et de «'l'extraordinaire mauvaise foi'» de M. [E], qui a mis « tout en 'uvre pour retarder l'issue de la procédure'» (sic). Toutefois, elle ne verse aux débats aucun élément permettant de caractériser un tel préjudice tandis que l'appréciation inexacte qu'une partie fait de ses droits ne constituant pas, en soi, une faute caractérisant un abus du droit d'agir en justice, ni une quelconque résistance abusive, il convient de rejeter cette demande de dommages-intérêts.

Le jugement déféré sera confirmé, sauf en ce qui concerne le point de départ des intérêts au taux légal et en ce qu'il a rejeté la demande d'indemnisation au titre de la remise en état du mur.

3- sur les autres demandes

Succombant sur son appel, M. [E] sera condamné aux dépens et au vu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, à payer la somme de 2 000 euros, sa demande sur ce fondement étant rejetée.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire,

Confirme le jugement déféré, sauf en ce qu'il a prononcé des condamnations portant intérêts au taux légal à compter du 12 avril 2019 et en ce qu'il a rejeté la demande d'indemnisation au titre de la remise en état du mur,

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Dit que les condamnations de M. [G] [S] et de M. [I] [E] au profit de la SARL S.S.P. Méditerranée portent intérêt au taux légal à compter du 14 juin 2021';

Condamne M. [G] [S] à payer à la SARL S.S.P. Méditerranée la somme de 150 euros au titre de la remise en état du mur';

Condamne M. [I] [E] à payer à la SARL S.S.P. Méditerranée la somme de 350 euros au titre de la remise en état du mur';

Et ajoutant,

Condamne M. [I] [E] à payer à la SARL S.S.P. Méditerranée la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette la demande de M. [I] [E] fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [I] [E] aux dépens d'appel.

le greffier, la présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 22/05171
Date de la décision : 02/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-02;22.05171 ?
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